Avec Loïc Chetout, ancien coureur cycliste professionnel.
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##JO_REVERS-2024-07-30##
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NewsTranscription
00:00dans les JO, dans tous leurs états avec Joseph Ruiz.
00:03On va parler d'un sujet tabou, Joseph, tabou, parce que ça existe mais on n'aime
00:07pas trop en parler, c'est la
00:08dépression, notamment quand il y a la pression considérable des Jeux,
00:12la dépression chez les athlètes. Et oui, on va en parler avec Loïc Chetout
00:16qui est un ancien
00:17coureur cycliste professionnel. Bonjour Loïc.
00:20Oui, bonjour. Alors, merci beaucoup d'avoir patienté à l'antenne.
00:25On sait que vous avez connu ce haut niveau, vous avez notamment participé
00:30à deux tours d'Espagne en tant que cycliste professionnel.
00:33Alors, dites-nous, est-ce que c'est en train de changer ? Est-ce qu'il y a encore une
00:35omerta
00:36autour des burn-out et notamment qu'a connu par exemple la gymnaste
00:40olympique Simone Biles ?
00:42Écoutez, oui, je pense que ça évolue et ça évolue dans le bon sens.
00:46On voit maintenant depuis quelques années, enfin moi je l'ai vu sur la fin de ma carrière,
00:49j'ai été beaucoup accompagné par
00:52par des préparateurs mentaux.
00:53Et ça évolue, ça évolue petit à petit mais je pense que le chemin
00:57est encore long et il faut que ça rentre dans les mœurs. Il faut qu'on comprenne
01:01enfin aujourd'hui
01:02que le sport c'est pas que le physique, c'est aussi le mental.
01:05Et c'est pas le mental du dur au mal, c'est aussi le mental que tout va bien
01:09dans sa vie, tout va bien à côté
01:11pour pouvoir aller travailler efficacement et faire des
01:15performances,
01:16les plus belles performances possibles.
01:18Autour de vous, quand vous dites en tant qu'ancien sportif professionnel
01:22que vous aussi vous pouvez être finalement un peu fragile,
01:25comment est-ce que c'est reçu ? Est-ce qu'on vous méprise un petit peu ?
01:28Est-ce qu'on en rigole ou est-ce qu'on le comprend ?
01:31Je ne sais pas si on le comprend, on n'en rigole pas forcément mais je pense
01:35qu'on ne le comprend pas forcément non plus.
01:36A mon avis il faut y avoir été confronté.
01:39Alors moi je l'ai eu vécu personnellement sur une fin de carrière
01:42où c'était assez compliqué
01:44et où j'ai été bien accompagné heureusement.
01:47Mais c'est vrai que l'entourage lui ne le voit pas forcément, on se dit
01:51t'es dans le feu des projecteurs, t'as des belles performances, on ne comprend pas
01:54pourquoi ça ne va pas.
01:55Ça ne va pas parce qu'en fait c'est compliqué à gérer toute cette pression.
01:58Et je pense qu'il y a beaucoup beaucoup de choses qui font que la
02:02pression est difficile à gérer
02:03et elle n'est pas forcément comprise par les gens à l'extérieur qui
02:07s'ils n'ont pas vécu les choses ne peuvent pas forcément les comprendre.
02:10Mais Loïc Chétout, quand on voit des noms comme Camille Lacour, un grand
02:14de la natation française
02:16qui reconnaît qu'à un moment donné il a perdu pied
02:19et il l'a raconté, beaucoup d'athlètes encore n'osent pas le dire
02:24c'est si important que ça comme phénomène dans le monde du très haut
02:28niveau sportif ?
02:30Moi je pense que oui, je pense que oui parce que le sport
02:34c'est avant tout être le meilleur et être le meilleur
02:36c'est ne pas avoir de faiblesse.
02:38Et le problème c'est que quand on met le doigt sur ces faiblesses
02:41autour de nous on nous voit beaucoup moins invincibles qu'on ne l'est.
02:45Donc des Camille Lacour qui ont survolé la natation un temps
02:50on le voyait aussi indétrônable, et bien non, il a des failles.
02:55Et le fait de ne pas en parler, c'est ça, ça a été aussi un peu mon éducation
02:59à ne pas montrer ses faiblesses pour justement être le meilleur en permanence
03:02et devoir montrer en permanence qu'on est bon, qu'on est bon et voilà
03:06et qu'il n'y a rien d'autre.
03:07Et aujourd'hui je pense que de parler de ses faiblesses
03:11ça peut entraîner cette perte de confiance de l'entourage
03:16cette perte de confiance des entraîneurs
03:18et c'est pour ça qu'il faut que ce public, entraîneur, le public en général
03:23soit averti sur ces questions-là.
03:24Et d'ailleurs Camille Lacour, on le rappelle, quintuple champion du monde
03:27il avait perdu pied en 2012 au moment où il rate de peu le podium olympique
03:31aux JO de Londres et sa quatrième place avait été un énorme échec.
03:35Il y avait eu un documentaire d'ailleurs sur Prime Vidéo qu'on vous conseille
03:38qui s'appelle « Strong aussi fort que fragile »
03:40et il avait évoqué sa dépression, il en était revenu sur le plateau d'RTL, on l'écoute.
03:44Quand on est en carrière c'est compliqué d'en parler
03:46donc évidemment c'est quelque chose qu'on met de côté.
03:49Je ne suis pas sûr que ce soit quelque chose de tabou
03:52on a utilisé le mot tabou mais en tout cas c'est quelque chose de nouveau qu'on en parle.
03:56Peut-être que le sport commence à être professionnel aussi maintenant
03:59à l'époque il ne l'était pas forcément
04:00donc les retours à la vie normale étaient peut-être moins difficiles.
04:05Là c'est vrai que ça faisait 15 ans que moi je comptais les carreaux
04:09pour parler vulgairement de la natation
04:10mais ma vie était tournée vers la natation
04:13ma philosophie de vie n'était que nager et essayer de performer
04:16et quand on sort de là ou quand on vit un échec c'est très difficile de se relever
04:20donc il faut essayer d'aussi alimenter la personne et pas que le sportif.
04:26Camila Cour, quintuple champion du monde
04:30il y a d'autres sportifs français qui ont été touchés
04:32le surfeur Jérémy Flores, la skieuse Prine Laffont
04:36et le handballeur Valentin Porte.
04:37Loic Chietou, ancien cycliste professionnel
04:40est-ce que vous-même vous y avez déjà été confronté
04:43ou vous avez eu à la Coffee 10, votre équipe
04:46des coéquipiers qui ont été durement touchés
04:50et comment est-ce que vous l'avez géré ?
04:52Des coéquipiers durement touchés ? Non.
04:54Moi je l'ai vécu mais sans jamais trop en parler
04:58parce que forcément encore une fois il ne faut pas montrer ses faiblesses
05:01et on était dans un collectif où justement
05:06le premier cas des faiblesses il saute et il ne va pas aller sur telle course
05:08ou pas aller sur telle course
05:09donc du coup on n'en parle pas
05:11on ne fait que reculer, reculer, reculer
05:13mais c'est reculer pour mieux sauter
05:14donc moi je l'ai vécu en fin de carrière après
05:17où je l'ai frôlé grandement en carrière
05:19et je l'ai vécu un peu en fin de carrière
05:21où on rentre à la maison et on ne redevient plus personne.
05:27Alors d'un côté moi ça m'a arrangé parce que j'aimais beaucoup
05:29ce côté d'anonymat et de ne plus avoir la pression du sport
05:33mais d'un autre ça fait bizarre dans sa vie sociale
05:36parce qu'on est défini par ce code
05:40on est défini en tant que sportif depuis notre plus jeune âge
05:43enfin moi depuis mes 14 ans
05:45donc du jour au lendemain on devient un monsieur tout le monde
05:47alors même si on n'a pas une partenaire comme un monsieur tout le monde
05:50voilà un champion ça n'a pas le droit de craquer
05:52un champion c'est censé être une référence
05:54et c'est censé être un modèle
05:56donc vous le disiez tout à l'heure de Simon Biles
06:01l'Américaine où j'ai regardé son reportage sur Netflix
06:05et c'est vrai qu'elle les définit super bien
06:08où elle était au top, où tout le monde attendait après elle
06:11et le jour où elle a décidé à Tokyo de dire que
06:14ben non j'y arrive pas
06:15on l'a redescendu plus back-terre
06:17et les gens ne comprenaient pas parce que c'était en fait la référence
06:20et voilà la meilleure
06:22donc pourquoi avoir des faiblesses alors qu'on est la meilleure ?
06:25ça arrive à tout le monde.
06:26Il y a Naomi Osaka notamment la tennis woman
06:28qui avait gagné Roland-Garros
06:29qui avait annoncé être en dépression après son titre
06:34et finalement elle avait reçu quand même pas mal de pression sociale
06:38et finalement est-ce que vous n'avez pas l'impression que
06:42la société ne reconnaît pas la souffrance des sportifs
06:45parce qu'on peut dire que certains sportifs aussi
06:48ont finalement la vie rêvée, Loïc Chétout ?
06:52La vie rêvée sur le papier, la vie rêvée à travers les réseaux sociaux
06:56la vie rêvée à travers tout ça
06:58mais ce n'est pas la vraie vie, les réseaux sociaux ce n'est pas la vraie vie
07:01les interviews ce n'est pas...
07:03donc c'est un peu le revers de la médaille
07:06les gens ils n'ont que l'extérieur
07:07alors oui c'est beau, il y a les sponsors, il y a de l'argent
07:10il y a la médiatisation
07:11mais quand on rentre chez soi le soir
07:14on a la vie normale comme tout le monde
07:17on a deux bras, deux jambes comme tout le monde
07:20donc on a aussi le droit d'avoir nos faiblesses
07:22après je pense qu'on met aussi une couverture sur tout ça
07:28en se disant que je n'ai pas le droit d'être mal alors que je suis au top
07:30je suis au top physiquement, je suis au top dans les médias
07:33ma famille est midolâtre, les gens sont midolâtres
07:36je n'ai pas le droit d'être mal alors qu'il y a des gens dans le monde
07:38qui sont vraiment eux dans le mal et qui n'ont pas des vies faciles
07:41mais vous savez les auditeurs, le spectateur
07:46les gens qui viennent vous encourager
07:48en fait les gens le savent, on le sait
07:50et on sait que vous êtes des humains
07:51c'est d'ailleurs pour ça qu'on est très heureux
07:54de pouvoir venir vous supporter les Bleus et tous les athlètes
07:58parce qu'on sait à quel point ça a demandé un effort considérable
08:01et donc on espère que vous allez rester tous au top
08:03on vous remercie Loïc Chétout, ancien coureur cycliste professionnel
08:07d'avoir été là pour nous parler vrai au fond sur ce tabou
08:11qui est la pression avec ses conséquences
08:13la pression psychologique sur les athlètes