• il y a 5 mois
Mira, créatrice de contenus sur internet, a été victime de cyberharcèlement. Elle nous raconte comment cette vague de haine a impacté sa vie.
Transcription
00:00Et ça a été assez dur parce que j'étais juste un objet, un corps féminin qu'il faut fantasmer,
00:06dont il faut parler dans les commentaires.
00:08Bonjour, je m'appelle Mira, je suis professeure de piano et créatrice de contenu sur les réseaux
00:12et aujourd'hui je viens de vous parler de mon cyberharcèlement.
00:15J'ai commencé à faire des vidéos sur internet parce que je me sentais seule en tant qu'étudiante au Beaux-Arts
00:20et donc j'ai décidé de partager mon art en faisant des lives où je jouais de la musique
00:24pour que les personnes qui m'écoutent puissent s'endormir.
00:27Donc ça a commencé à fédérer une communauté, mais je ne m'imaginais pas du tout que ça allait prendre cette ampleur-là.
00:31Dès mes premiers lives, j'ai commencé à avoir quelques petites remarques
00:35et après ça a commencé à apparaître aussi sur les vidéos que je commençais à partager.
00:39Donc beaucoup de commentaires sexisme qui commentaient mon corps, qui commentaient mon apparence.
00:44Beaucoup de messages de comparaison, de menaces de viol aussi, de menaces de mort j'en ai reçu.
00:50Il y avait des attaques beaucoup plus psychologiques, c'est-à-dire que quand on les lit,
00:54et qu'on ne connaît pas le contexte, on peut se dire « bon bah c'est rien »,
00:56mais finalement c'est une violence encore plus forte que celle qui est de juste critiquer en disant
01:00« sale pute » ou « ton corps est moche » ou je ne sais quoi.
01:03C'est des choses qui sont tellement précises et tellement insidieuses comme ça
01:07que je ne pourrais pas les inventer tellement ça fait mal au bon point.
01:10Au début, j'ai fait cette erreur-là de répondre aux commentaires.
01:13Je me suis dit que ça allait m'amuser et qu'un petit commentaire comme ça méchant, je peux répondre.
01:17Mais au bout de 10, 15, 20, 30, des centaines et des milliers de messages,
01:21ça commence vraiment à nous toucher.
01:23Et ça a été assez dur parce que je commençais à leur donner une classe plus grande que les messages positifs.
01:29Et c'est assez connu, quand on reçoit un message négatif et qu'on en a 100 des positifs,
01:33on retient que le négatif là-dessus.
01:35Et donc j'ai commencé à retenir que les négatifs, mais je n'en avais pas qu'un.
01:38Je n'en avais plusieurs, plusieurs, plusieurs.
01:40Notification, notification.
01:41Donc on coupe les notifications, on essaye de reprendre du recul par rapport à ça.
01:44Mais non, ça a réussi à me toucher et je pense que toute femme qui se lance sur les réseaux
01:49se prend une vague comme ça à un moment et doit essayer de passer par-dessus.
01:53Et donc ça a été très, très dur pour moi parce que je me suis sentie comme un objet vraiment réduit à mon corps,
02:00mais même pas à mon corps en tant que moyen d'expression pour partager mon amour pour la peinture,
02:04pour le piano, pour la musique, pour l'art.
02:06J'étais juste un objet, un corps féminin qu'il faut fantasmer, dont il faut parler dans les commentaires.
02:12Alors ça a commencé à aller au-delà parce que quand on commence à avoir une présence sur Internet,
02:17il y en a aussi qui arrivent dans la rue, dans notre quotidien, quand on est au supermarché.
02:22Donc au tout départ, c'est génial puisqu'on rencontre nos abonnés dans la vraie vie et c'est toujours des super bons moments.
02:27Et petit à petit, il y a aussi cette chose où j'ai commencé à ressentir de la paranoïa.
02:31J'étais dans le métro et il y avait une personne qui me regardait bizarrement.
02:34Je me disais, mais non, mais tu n'es personne.
02:36Juste, il te regarde parce que tu as les cheveux roux ou quelque chose comme ça,
02:38mais je ne pense pas qu'il ait capté que tu es sur les réseaux ou quoi que ce soit.
02:41Donc je mets la chose de côté et là, il sort du métro avant moi, donc à l'arrêt juste avant.
02:46Donc tout va bien, je me dis, tu n'es pas parano, il ne se passe rien, tout va bien.
02:49Donc là, je sors, arrêt suivant, ça va être l'endroit où je vais aller vers mon appartement.
02:54Et là, au moment où je sors, je marche dans la rue et je le vois qui pop-up de la rue d'en face, le même mec.
03:00Je me dis, ce n'est pas possible, c'est la même personne.
03:02Il y a vraiment quelque chose qui va mal, surtout qu'il est sorti à l'autre arrêt,
03:04donc il a dû courir pour arriver au prochain arrêt.
03:07Donc je continue, je marche et j'évite finalement mon appartement
03:10et je vais un peu me perdre dans des magasins comme ça.
03:13La personne, elle ne va pas savoir où est-ce que j'habite.
03:15J'ai passé ma fin de journée et avant de dormir, j'ai pris mon téléphone
03:19et je suis tombée sur un mail où il était expliqué toute l'après-midi
03:22comment cette personne m'avait suivie en me disant,
03:24bonjour, c'était génial, exactement le même tote bag Festival d'Avignon que tu avais,
03:28tu avais le même bracelet, c'est superbe.
03:30J'ai passé un très bon moment en ta compagnie et c'était si glauque.
03:34Et là, je ne me suis vraiment plus du tout sentie en sécurité.
03:36Je n'ai pas reporté ça à la police, j'ai juste un mail, j'ai juste une histoire.
03:41Là, je ne sais plus à quoi il ressemble.
03:43Il avait une quarantaine d'années.
03:45La police, malheureusement, elle ne va pas faire grand-chose envers juste un mail envoyé.
03:49Donc là, je continue mon activité sur les réseaux sociaux
03:51parce que j'ai décidé de prendre du recul et d'essayer de mieux gérer
03:56comment je reçois ce type de commentaires.
03:58Je sais que ce n'est pas du tout normalement la chose à faire.
04:01Normalement, ça devrait être réglé et c'est les personnes qui font les violences
04:04qui doivent être punies ou jugées.
04:06Mais j'ai décidé de prendre du recul, de faire beaucoup de travail sur moi-même.
04:09Donc, ça passe par la conscience en soi,
04:12et qu'aucune autre personne avec un autre commentaire
04:14peut venir ébranler ce dont je suis persuadée d'être.
04:17Et puis ensuite, prendre du recul et se dire
04:19les haters, ils rentrent chez eux et ils vont prendre peut-être 30, 45 minutes.
04:23J'ai déjà vu des pavés qu'on m'envoyait.
04:25On m'envoyait des pavés gigantesques de je ne sais pas combien d'heures
04:27il faut mettre pour écrire ça, mais c'était immense.
04:29Et moi, qu'est-ce que j'ai fait ?
04:30J'ai vu le message bloqué, supprimé.
04:33Donc en cinq secondes, il n'y a plus rien.
04:35Et c'est une bonne manière finalement de se défendre et de se dire
04:38ce n'est pas moi la victime, c'est eux.
04:40Ils ont une vie extrêmement triste pour pouvoir écrire ça.
04:42Je ne sais pas ce qu'il se passe, mais ça ne va pas être simple.
04:44Donc là-dessus, j'essaye plutôt de faire tout
04:46pour ne pas lui donner du grain à moudre
04:48et de prendre du recul comme ça.
04:50Si jamais vous êtes dans ce cas et que vous recevez
04:52des messages de violence, de cyberharcèlement,
04:54il y a des choses qui peuvent être mises en place.
04:56Donc déjà, par rapport au mindset, c'est important de faire un travail sur soi.
04:59Il y a aussi, de votre côté, vous pouvez utiliser le 3018.
05:02C'est déjà une application.
05:04Vous pouvez envoyer toutes les preuves des violences que vous recevez
05:07et ensuite, ils peuvent par exemple supprimer
05:09si vous avez des photos d'une unité ou quoi que ce soit
05:11qui vous dérangent sur Internet.
05:12Eux, ils peuvent envoyer votre dossier et demander au site
05:14de les faire supprimer.
05:16Je les avais déjà eus aussi au téléphone
05:18et ils sont aussi très compétents.
05:20Juste pour vous écouter, ça fait vraiment du bien
05:22et ils m'ont vraiment rassurée là-dessus.
05:24Plusieurs fois au téléphone et sur l'application aussi.
05:26Donc le 3018, ils sont vraiment là pour ça.
05:28Utilisez-le.

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