• il y a 5 mois
Une épreuve, un accident de parcours ? Comment retrouver des forces ? Reste un ultime abri, un lieu familier et rassurant, un lieu qui nous ressemble et nous raconte : notre logement, notre chez soi. Et si un jour nous en étions privés, qui serions-nous ? En France ils sont toujours plus nombreux : chaque jour, du 1er avril au 31 octobre, près de 60 ménages sont expulsés de leur logement.

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00:00Lui-ci, il a donné un grand coup de pied dans la porte.
00:20Il est venu chez moi, il m'a cassé la porte, il a changé la clé.
00:25Une vie qui tourne au cauchemar, les dettes s'accumulent et Lui-ci de justice est à
00:34leurs portes.
00:35J'ai vu les deux voitures de police, j'ai vu le camion de déménagement, j'ai vu tout
00:41partir.
00:42Ce qui me restait.
00:43Frappé par l'expulsion, de plus en plus de familles se retrouvent à la rue, doublement
00:52victimes de la crise économique et de la spéculation immobilière.
00:56Je me lève le matin, le loyer n'est pas payé, je dois payer ça, je vais faire ça, comment
01:06je vais faire et comment je vais faire.
01:08D'un jour à l'autre, on peut se retrouver à la rue et dormir dehors.
01:12Condamné par la justice, condamné à l'errance, condamné par notre indifférence.
01:18Dix expulsés conjurent la honte avec la seule arme qu'il en reste, le courage de parler.
01:24J'ai écrit toutes les maires de Côte d'Azur, j'ai écrit le maire d'Énis, j'ai écrit
01:29le maire de Cannes, j'ai écrit le sous-préfet de Grasse, j'ai écrit toutes les maires,
01:35il y a sept maires que j'ai écrits, tout le monde s'est trouvé excuse.
01:40Compte tenu à Paris du délai d'attente pour un logement social, dix ans à l'heure
01:45actuelle, je pense que je risque d'être décédé avant d'avoir de nouveau un logement
01:50social.
01:51Ben non, écoutez, désolé, vous faites partie de la liste du nombre de demandeurs, mais
01:57ben voilà, on n'a pas cette capacité-là, débrouillez-vous.
02:00Aujourd'hui en France, plus personne n'est à l'abri d'être un jour expulsé.
02:06C'est là qu'on mesure vraiment que c'est une machine à expulser.
02:13En fait, c'est une machine, je n'aurais même pas su ça abroyer.
02:16On a presque l'impression qu'on a fait un crime.
02:37Bonjour madame, j'ai un acte à vous remettre, je peux vous voir une minute ?
02:43Bonjour madame, je suis maître du ruisseau, c'est moi qui ai sonné, je suis ici, vous
02:46avez quelques minutes à m'accorder ?
02:50Ils sont arrivés, ils étaient une douzaine, voire une quinzaine de personnes, ils ont
02:54sonné à huit heures et demie chez moi.
02:56Les petits étaient prêts à partir à l'école, moi j'étais prête, j'avais mes chaussures,
03:00j'avais plus que mon manteau à mettre.
03:01Et donc j'ai ouvert la porte et là je vois une foule devant ma porte, donc des gros colosses,
03:10bon ben j'ai compris que c'était des déménagères.
03:14Polo et Magali se sont fait expulser de leur logement avec leurs jumeaux Hugo et Carlin,
03:18âgés de 9 ans.
03:19Polo, plombier, et Magali, préparatrice en pharmacie, gagnaient bien leur vie jusqu'à
03:25ce que Polo s'installe à son compte.
03:27Son salaire plonge.
03:28Le couple ne gagne plus assez pour payer le loyer et n'a plus les moyens de déménager.
03:33Je lui ai simplement dit, calmement, très calmement d'ailleurs, j'ai pris énormément
03:41sur moi, s'il vous plaît ne faites pas ça devant les enfants, ne faites pas ça
03:46devant les enfants.
03:47J'ai un petit peu poussé la porte pour que les enfants puissent aller derrière,
03:53dans la salle derrière, et donc il a donné un grand coup de pied dans la porte, ils sont
03:59tous rentrés, ils ont commencé à aller un peu partout dans toutes les pièces, les
04:02cartons, tout, tout, tout, et ils ont fait ça devant les petits, ça les a choqués.
04:07L'appartement, quand je suis passé devant, il n'y avait plus rien, ils avaient déjà
04:09mis une porte anti-infraction.
04:13Ma préoccupation c'était les enfants, qu'est-ce que je vais faire des enfants, parce qu'autant
04:18moi je peux rester dehors, ça ne me dérangerait pas de dormir dans la voiture, je ne pouvais
04:23pas envisager de dormir en dehors avec des enfants dans la voiture.
04:39Je ne voulais pas vraiment en parler à mes copines parce que c'était presque la honte
04:44en fait de dire tiens moi je vais être à la rue, voilà, et que demain je ne sais pas
04:51si je pourrais dormir chez moi ou dehors, et du coup je n'en ai pas vraiment parlé.
04:57Quand elles sont venues s'installer sur la côte d'Azur, Valérie et sa fille Marissane
05:04ne s'imaginaient pas vivre un tel cauchemar pour se loger.
05:07Victime d'une grave chute au travail, Valérie pensait pouvoir surmonter cet accident de
05:12la vie.
05:13Mais la série noire ne fait que commencer.
05:15Valérie, ancienne conseillère en emploi, voit son revenu chuter de 2200 à 800 euros.
05:22Moi, j'ai fait l'objet d'un accident de travail et qui m'a amenée à rentrer en urgence à
05:30la Timone, à Marseille, pour une intervention assez lourde et en l'occurrence, j'ai perdu
05:35mon emploi pendant toute une période de rééducation où j'ai fait l'objet d'un licenciement.
05:40J'ai reçu une assignation, une assignation, un commandement, un premier commandement me
05:47disant que suite au décès de la propriétaire, il y avait le souhait des successeurs de pouvoir
05:57récupérer le logement et me demandant effectivement d'avoir une sortie dans les plus brèves
06:02télés.
06:03On se prend quand même une grande claque, quoi.
06:06Imaginez, demain, on vous dit voilà, on vous sort par la force, on vous sort, vous êtes
06:13jeté à la rue, on vous dit on prend vos affaires et voilà, vous êtes dehors, débrouillez-vous.
06:18Moi, en aucun cas, je pouvais faire supporter ça, ma fille.
06:22En fait, on a l'impression que les gens, ils comprennent pas que d'un jour à l'autre,
06:26on peut se retrouver à la rue et dormir dehors.
06:29Bonjour, madame.
06:30C'est l'étude de maitre parmentier huissier.
06:33C'est un commandement de payer les loyers.
06:35Vous savez, je pense qu'il y a eu des loyers à payer.
06:381895, c'est ça ? Il faut pas laisser les choses traîner.
06:42Vous contactez la responsable du service contentieux.
06:45Ils vont vous expliquer avec l'assistance sociale ce que vous pouvez faire, les solutions
06:49qui existent.
06:50Ce sera fait dans la semaine ? Oui, c'est bon.
06:52On compte sur vous.
06:54Les emmerdes, elles ont commencé quasiment au moment où j'ai décidé de devenir mon
06:58propre patron.
06:59On avait déjà pas mal de personnes, je pense, des crédits de consommation, des petits crédits
07:05par-ci, par-là.
07:06Un crédit auto, je n'avais plus le même salaire.
07:09Donc, les créanciers arrivaient à un moment où je n'arrivais plus à les payer, tout
07:13simplement.
07:14Donc, après, qu'est-ce qu'on fait comme bêtise ? Vous faites des rachats de crédit,
07:20d'autres, vous prenez des réserves pour essayer de combler, payer vos créanciers
07:24qui vous menacent avec des huissiers.
07:26Donc, arrivé à un moment, vous faites des choix, vous payez plus votre loyer.
07:30Donc, vous vous jonglez comme ça.
07:32Et du coup, on ne fait pas attention.
07:34On se dit, ouais, on le paiera plus tard le loyer, mais finalement, c'est un engrenage
07:38sans fin parce que vous n'arrivez pas à vous en sortir.
07:42Moi, la priorité, c'est de nourrir mes enfants, les vêtir.
07:46Donc, quand vous faites tout ça avec le coût de la vie qui a tellement augmenté,
07:49on arrive à des prix, à des sommes qu'il y a 10 ans en arrière, ça nous revenait
07:54quand même deux fois moins cher.
07:56Donc oui, tout a augmenté sauf les salaires.
08:00Donc oui, ça devient difficile de payer un loyer.
08:17Pendant des années, on peut payer, on peut faire partie de la société,
08:21être dans la société.
08:23Et puis, du jour au lendemain, que ce soit pour une perte d'emploi, une maladie,
08:29on peut se retrouver à la rue.
08:33Et sans rien, quoi.
08:35Sans rien.
08:36Sans s'en rendre compte.
08:39Après avoir travaillé plus de 10 ans comme électricien,
08:42Frédéric crée son entreprise près de Béthune.
08:45Ses clients ont des difficultés à payer, son activité baisse,
08:48et Frédéric est obligé de déposer le bilan.
08:51Quand les taux se resserrent et que les huissiers frappent à sa porte,
08:54sa compagne ne supporte plus la menace qui plane sur eux en permanence.
09:00Elle est partie du jour au lendemain quand les difficultés sont arrivées.
09:04Donc ça, ça a été un choc supplémentaire qui a fait que j'ai décidé
09:10un choc supplémentaire qui est intervenu, et voilà.
09:14Le fait de se retrouver tout seul, plus de boulot,
09:19les huissiers qui frappent à la porte.
09:22Donc les recommander au fur et à mesure.
09:28On se dit mince, comment on peut faire pour s'en sortir, quoi.
09:31Fallait que je fasse inversement,
09:34donc on s'avait arrangé sur une somme de 2000 euros.
09:39Comme je n'avais plus aucune rentrée d'argent, je ne pouvais pas.
09:44Donc même 50 euros, je ne pouvais pas.
09:48Je n'avais plus de gazole, je ne pouvais même plus mettre de l'essence dans ma voiture.
09:54Je n'avais plus rien, plus rien, plus rien.
09:56Je suis passé au tribunal d'instance de Béthune pour expliquer ma situation.
10:04Et là, le juge m'a dit, monsieur Barré, il va falloir partir.
10:08Il va falloir partir parce que vous ne pouvez pas rester dans le logement.
10:13Mais comme je n'avais pas d'autre moyen de me loger, je suis resté dans la maison.
10:23Et une fois je suis rentré au soir, les huissiers étaient venus,
10:27parce que je n'avais pas ouvert mon courrier.
10:29Donc ils sont venus, ils ont pris ce qui est resté dans la maison.
10:34Je n'avais plus grand-chose.
10:35Qu'est-ce qu'ils vous ont laissé ?
10:37Le lit. Le lit, une petite table et puis une chaise. Voilà.
11:00Vous vous rendez compte ? Un an et demi, ça fait beaucoup que je lutte.
11:04J'ouvre une nuit, je me lève le matin. Le loyer n'est pas payé.
11:08Je dois payer ça. Je vais faire ça. Comment je vais faire ? Et comment je vais faire ?
11:17Un petit 3 pièces dans un immeuble résidentiel sur les collines de Nice.
11:21C'est là qu'Adèle vit depuis 20 ans avec son mari, Artisan Boucher.
11:26Ils allaient y finir leur vieux jour.
11:28Mais quand arrive l'horizon de la retraite, son mari meurt brutalement.
11:33Pour Adèle, c'est la spirale infernelle de l'expulsion qui s'enclenche.
11:38Sa retraite ne lui suffit plus pour payer le loyer.
11:44Quand mon mari est décédé, je ne vais pas m'en sortir toute seule.
11:47Parce que je me suis dit, je vais être dans le pétrin.
11:49Mais par contre, j'ai dit, il faut que je continue à travailler
11:52si l'hôpital me permet de continuer à travailler, prolonger ma retraite.
11:57Du coup, ils ont accepté. J'ai travaillé jusqu'à 67 ans.
12:01Je faisais le matin, je faisais le soir, je faisais des heures supplémentaires.
12:06Bien sûr, je faisais des nuits, pas tout le temps.
12:10Mais je travaillais, je gagnais bien ma vie.
12:12Je n'ai jamais pensé que je vais arriver dans ce genre de problème.
12:17Mes ressources sont à 540 euros.
12:21Je viens juste de recevoir la notification de la pension de la réversion de retraite.
12:27300 euros.
12:29Ce qui fait, ça va me faire dans les 800 euros, à peu près.
12:34Mon loyer est à 771 euros.
12:37Charge comprise.
12:41Adèle lance des appels au secours auprès des organismes d'aide publique.
12:49À peine un an après avoir pris sa retraite d'aide soignante,
12:52elle reçoit son premier avis d'expulsion.
12:55Ils m'ont envoyé le lucier.
12:58Ils m'ont envoyé le lucier, mais je n'étais pas à la maison.
13:00Ils m'ont laissé un avis de passage.
13:02Je suis allée chercher le courrier,
13:05mais c'est marqué commandement de payer à telle date.
13:08Si vous ne payez pas cette date-là, il y aura l'expulsion,
13:11il y aura une saisie des meubles, des comptes bancaires et tout ça.
13:17Ça m'a beaucoup perturbée, cette histoire.
13:21C'est l'humiliation pour moi.
13:24Pourquoi on m'envoie le lucier ?
13:26Peut-être qu'ils sont dans leur droit parce que le loyer est impayé,
13:30mais moi, comment je fais ?
13:32Même les bijoux de ma mère qui m'a donnés, je les ai vendus.
13:35Je n'ai pas envie que tout le monde voit que je suis expulsée.
13:39Et puis j'ai dit, ce logement-là, ça fait 20 ans que je suis dedans,
13:43je n'ai pas envie de sortir, de quitter ce logement,
13:45et j'ai peur de l'expulsion.
13:47Vu mon âge, je me trouve dehors.
13:51J'en ai vu, moi, les gens qui sont dehors, leurs affaires dehors.
13:54J'en ai vu plein.
14:00Bonjour madame, je suis ici.
14:02Je viens vous voir pour votre dossier de loyer.
14:04Vous avez du retard de loyer.
14:06Oui, j'ai payé le loyer.
14:08Vous avez payé ?
14:09Pas tout.
14:11Pas tout.
14:12La procédure, elle est avancée.
14:14Là, madame, il faut vraiment faire quelque chose,
14:16parce que votre bail, il est résilié.
14:18C'est important ce que je vous dis.
14:20Résilié, ça veut dire, c'est fini ici.
14:22Sauf si vous faites quelque chose
14:24et que le bailleur vous accorde un échéancier.
14:26Mais sinon, il va falloir sortir de là.
14:28Vous allez perdre votre maison.
14:30On ne va pas en arriver là, quand même.
14:32Non.
14:44J'étais plutôt replié sur moi-même.
14:46Je restais énormément chez moi.
14:48Normalement, chez moi, je ne pouvais plus sortir.
14:50J'évitais les contacts avec les autres,
14:52parce que je ne pouvais plus voir personne.
14:54Ça me faisait peur.
14:56La société me faisait peur.
14:58Les gens me faisaient peur.
15:00Moi, je me faisais peur.
15:02Je me faisais peur.
15:04Je me faisais peur.
15:06Je me faisais peur.
15:08Je me faisais peur.
15:10Je me faisais peur.
15:12Je me faisais peur.
15:14Les gens me faisaient peur.
15:16Je me suis retrouvé tout seul,
15:18sans que je puisse réagir, en fait.
15:20Même ma famille,
15:22qui, eux, voulaient m'aider,
15:24je ne voulais plus de leur aide.
15:26Je ne voulais plus de leur aide.
15:28Je me suis refermé la porte
15:30et il n'y avait plus possibilité
15:32d'avoir contact avec moi.
15:34Ce n'était pas possible.
15:36Ce n'était plus possible.
15:38Pas honte.
15:42On a presque l'impression
15:44qu'on a fait un crime.
15:46On a fait un crime.
15:48On se dit, mince,
15:50qu'est-ce que j'ai fait pour en arriver là ?
15:52On se sent criminel.
15:54Juste parce qu'on n'arrive pas
15:56à payer son logement ?
15:58C'est la honte.
16:00C'est l'angoisse.
16:02C'est la peur.
16:04Ça laisse des conséquences sociales,
16:06parce qu'il y a une désertification
16:08de votre réseau social,
16:10de vos amis qui disent
16:12qu'ils comprennent,
16:14mais qui, au final,
16:16se font progressivement
16:18dissents.
16:22Vous vivez un grand moment
16:24de solitude.
16:28On perd les amis,
16:30on perd la famille.
16:32Au fur et à mesure,
16:34on se rend compte
16:36qu'on est tout seul.
16:40Mon fils, il en a marre
16:42de m'écouter.
16:44Après, j'ai ma sœur.
16:46De temps en temps, je lui raconte tout.
16:48Elle a ses problèmes, elle aussi.
16:50Et les amis, non.
16:52Les amis, quelques-uns,
16:54je ne parle pas du tout.
16:56Ça ne sert à rien.
17:00Le jour où nous est arrivé ça,
17:02il n'y avait plus personne.
17:04La famille, il n'y a plus de famille.
17:06Là, les vrais amis,
17:08je les remercie.
17:14Avec ma mère, j'en parlais pas souvent.
17:16Ça me tracassait,
17:18mais je gardais pour moi.
17:20J'en parlais pas.
17:38L'expulsion, c'est l'explosion totale
17:40du noyau familial.
17:42Ça n'existe plus, la famille.
17:44Je ne suis plus une maman
17:46qui prépare le dîner pour les enfants.
17:48Il n'y a plus le à-table.
17:50Il n'y a plus ça.
17:52Il y a des choses...
17:54Bonsoir, les enfants.
17:56Comment avez-vous passé la journée ?
17:58Ou arrêtez de parler
18:00parce que je suis fatiguée.
18:02Ça n'existe plus.
18:04Alors qu'elle habite
18:06avec ses deux enfants,
18:08Pénélope, 14 ans,
18:10et Mathias, 18 ans,
18:12dans un petit appartement à Paris,
18:14Anna est expulsée une première fois
18:16suite à la perte de son emploi.
18:18Anna se reloge par elle-même
18:20chez une marchande de sommeil
18:22sans avoir signé de bail.
18:24C'est à ce moment-là qu'elle apprend
18:26qu'elle est atteinte d'un cancer.
18:28Au bout de quelques mois,
18:30l'impensable, la marchande de sommeil,
18:32a décidé de me jeter à la rue.
18:34On se dit à tout moment
18:36que la marchande de sommeil
18:38peut décider de me jeter à la rue.
18:40Tous les 2-3 mois,
18:42elle disait qu'il fallait que je parte
18:44le mois suivant ou dans 2-3 mois.
18:46Le voisin du 3e
18:48est parti un matin au travail.
18:50Moi, je partais en chimiothérapie,
18:52en traitement,
18:54et je vois les techniciens
18:56fixer les portes blindées.
18:58Il y avait des portes blindées
19:00dans la rue,
19:02et puis fixer les portes blindées
19:04aux portes.
19:06Je sursautais à chaque fois.
19:08C'est dans la sécurité la plus totale.
19:10C'est un bruit.
19:12On se dit ce qui va m'arriver
19:14sur le point de la figure.
19:18C'était à quelques jours
19:20de ma mastectomie.
19:22On m'a enlevé le sein droit.
19:243 jours après la mastectomie,
19:26j'étais en train de faire les cartons.
19:30Je me suis dit que je ne me remettrais pas.
19:32Une première expulsion,
19:34un cancer
19:36avec des métastases,
19:38je ne vais pas m'en relever.
19:40Où vais-je trouver la force de faire des cartons ?
19:42Où vais-je trouver
19:44la ressource physique et morale,
19:46et puis la ressource
19:48des amis, de l'entourage ?
19:50Sans l'entourage, je n'aurais jamais pu.
19:52Je n'aurais jamais pu faire les cartons
19:54de 20 ans.
19:56C'est les cartons de 20 ans d'une vie.
20:00L'expulsion,
20:02c'est une condamnation à mort.
20:04C'est un meurtre organisé.
20:06C'est un assassinat.
20:08C'est...
20:10On ne se relève pas.
20:12J'en étais à vouloir.
20:14Sérieusement,
20:16j'avais envie d'aller me pendre
20:18avec mon commandement payé autour du cou
20:20devant le tribunal de grande instance
20:22de Marseille.
20:24Il n'y a pas d'armes.
20:26Devant le tribunal d'instance,
20:28il y a des jolies armes.
20:30Il y a une quincaillerie pas loin
20:32où je pouvais acheter une échelle.
20:34Je n'arrivais pas à penser des trucs pareils.
20:36Je n'avais jamais pensé à des choses comme ça.
20:38Des envies de suicide.
20:40Oui, des envies de suicide.
20:42Sylviane
20:44et son fils Yann, de 15 ans,
20:46ont vécu les 2 années de procédure
20:48seules, agrippées l'un à l'autre.
20:50Quand le père de Yann
20:52quitte le domicile familial,
20:54Sylviane reste dans l'appartement
20:56avec son fils.
20:58Elle perd ses derniers petits boulots
21:00et n'a plus les moyens de chercher à se loger ailleurs.
21:06J'ai vécu 9 ans là-bas quand même.
21:087 ans avec le père de mon fils.
21:10Et quand il est parti
21:12en fin 2011, je suis restée toute seule.
21:14Et
21:16à peine 2 mois
21:18après que le père de mon fils soit parti,
21:20j'ai commencé à avoir des problèmes avec la propriétaire.
21:22L'année 2012 n'a pas été terrible.
21:24L'année 2013 a été très difficile.
21:26Et en fait, j'ai perdu mes emplois.
21:28Après, j'ai coulé.
21:30Toute l'année de 2014.
21:32Après, oui, j'avais plus le moyen de payer du tout.
21:34Et là, le problème,
21:36c'est que la procédure, pendant ce temps-là,
21:38il y a eu 5 reports.
21:40La première audience était prévue
21:42le 7 février.
21:44Ça a été repoussé en avril.
21:46Puis ensuite en juin.
21:48Puis ensuite en septembre.
21:50Et je passais des jours à pleurer.
21:52Et puis à attendre.
21:54J'attendais chaque fois la procédure.
21:56Ça va enfin s'arrêter.
21:58Victime de cette descente aux enfers,
22:00Yann ne va plus du tout à l'école
22:02et reste enfermé chez lui toute la journée.
22:04L'ado, placé dans un foyer,
22:06voit sa mère tous les week-ends.
22:08Il parlait plus aux gens
22:10dans les yeux.
22:12Il détournait.
22:14Il me tenait comme ça.
22:16Ça me faisait mal aussi, ça, de le voir comme ça.
22:18Comme la procédure continuait
22:20et que mon état ne s'améliorait pas
22:22et que Yann
22:24ne s'améliorait pas trop non plus,
22:26il a été décidé
22:30l'intervention du juge des enfants
22:32et une enquête sociale plus approfondie.
22:34Yann est parti à l'escale.
22:36C'est un endroit
22:38pour les enfants angoissés
22:40ou différents problèmes psychologiques
22:42plus ou moins.
22:44Il avait des activités.
22:46Il voyait d'autres personnes.
22:48J'étais tout le temps à la maison.
22:50Il y a eu ce suivi-là, mais c'était un suivi psychologique.
22:52C'est vrai qu'à ce moment-là,
22:54je ne cherchais même plus à me loger.
22:56Je ne cherchais plus rien.
22:58J'attendais la fin de cette procédure.
23:02C'est vrai que l'expulsion,
23:04je n'imaginais pas.
23:06J'imaginais pas, non.
23:14On m'a dit qu'il y avait 9 policiers
23:16toujours dans l'expulsion.
23:189 policiers.
23:20Et quand j'ai voulu rentrer,
23:22j'ai trouvé Portoclose.
23:26Je n'avais plus rien.
23:28Je n'avais pas de brosse à dents.
23:30En plus, j'avais perdu un verre de contact.
23:32Je n'avais plus qu'un verre de contact.
23:34Aucune affaire de toilette.
23:36Aucun change. Rien.
23:46Qu'est-ce que je deviens ?
23:48Qu'est-ce que je deviens ?
23:50J'ai été assistante de direction.
23:52Je me suis occupé d'une galerie d'artisans d'art
23:54pendant deux saisons
23:56dans un endroit très touristique
23:58où il y avait beaucoup de travail,
24:00où on m'a laissé des tas de responsabilités.
24:02J'étais quelqu'un qui était habitué à me débrouiller.
24:04Je suis décrédibilisé du point de vue de ma famille,
24:06du point de vue de l'administration,
24:08du point de vue de toutes les personnes
24:10que je connais.
24:12Comme si j'avais tout perdu.
24:14J'ai tout perdu.
24:16À part mon fils, heureusement.
24:20Qui...
24:22Il continue
24:24à me soutenir quand même.
24:28Et ça nous a rapprochés.
24:32On a besoin l'un de l'autre.
24:34Et ça...
24:38On se le dit tous les jours, en fait.
24:40Oui.
24:42Et c'est vrai, parce que...
24:44L'un sans l'autre, franchement...
24:48On essaie de se motiver l'un à l'autre
24:50pour faire des démarches.
24:52Chacun de son côté
24:54essaie de faire des...
24:56Des papiers.
24:58Appeler les services sociaux.
25:00Appeler...
25:02Appeler qui on peut
25:04pour essayer de tirer des signes d'alerte.
25:06Des appels d'urgence, quoi.
25:08Aider nous, quoi.
25:10A sortir de cette galère.
25:12On ne demande qu'à retrouver une vie normale.
25:14Payer des impôts et...
25:16Un loyer.
25:18Pour ça, on a besoin qu'on nous fasse confiance.
25:20Et qu'on leur donne une deuxième chance.
25:22Tout simplement.
25:28Sans logement,
25:30on n'est plus rien.
25:32Parce que pour tout, pour les papiers,
25:34pour vouloir trouver du travail,
25:36vous n'avez plus d'adresse.
25:38Vous n'existez plus.
25:44C'est le socle, c'est le fondement.
25:46On a besoin d'avoir un toit.
25:48Un toit, c'est sa dignité aussi.
25:52Quelqu'un qui n'a pas de toit,
25:54il est dans la rue, il perd sa dignité.
26:00On ne se rend pas compte la chance qu'on a
26:02quand on est dans sa maison.
26:04On a besoin d'une douche quand on peut
26:06se laver, dormir dans un lit,
26:08bien au chaud.
26:16A priori, au 25 septembre,
26:18on avait une dette de 1235,67 euros.
26:24Et ça fait combien de temps que vous n'avez pas payé ?
26:26Que vous avez loupé l'échéance ?
26:28Ça fait que deux mois.
26:30Alors, je vous explique comment ça se passe.
26:34Il faut payer tous les mois.
26:40Le juge avait été clair en octobre 2014.
26:42Il vous a dit, voilà, j'arrête toute la procédure
26:44d'expulsion si vous payez votre loyer
26:46et vous payez 50 euros par mois.
26:48Par contre, au moindre impayé, là, le fils est en droit
26:50de reprendre la procédure d'expulsion.
26:52Donc, il ne faut surtout pas
26:54laisser les choses traîner.
26:58C'est ensemble que Valérie et sa fille Marysanne
27:00se sont battues pour retrouver un toit.
27:02Le juge avait accordé un an et demi de délai
27:04pendant lequel Valérie frappa
27:06toutes les portes pour obtenir un HLM.
27:10Moi, j'ai épuisé
27:12tout ce qui était de l'ordre des solutions.
27:16Voilà, on rentre dans un processus administratif,
27:18on vous demande d'instruire des dossiers,
27:20de rédiger, d'argumenter.
27:22Donc, c'est une justification.
27:24Mais au-delà de ça, vous vous devez aussi
27:26d'interpeller
27:28vos interlocuteurs, vos élus locaux,
27:30le maire de votre commune,
27:32l'élu,
27:34conseillère municipale
27:36ou adjointe au logement.
27:38Il y a des inquiétudes qui commencent à se poser
27:40sur un devenir.
27:42Sur un devenir.
27:44Qu'est-ce qu'on va devenir ?
27:46Je lui ai dit qu'il ne faut pas perdre espoir
27:48et qu'on va trouver.
27:50On ne va pas être à la rue.
27:52On ne va pas dormir dehors.
27:54On va s'en sortir.
27:56On est dans l'espérance.
27:58On croit en ses interlocuteurs locaux.
28:02Mais à un moment donné,
28:04on se rend compte que
28:06ça devient gênant.
28:08On entend,
28:10mais on ne veut pas s'embarrasser.
28:12C'est une réalité,
28:14mais on n'a pas de solution.
28:16Donc, si ça ne vous convient pas, allez ailleurs.
28:18Moi, j'ai eu l'impression qu'on nous prenait
28:20pour des idiotes parce que
28:22c'est de dire
28:24qu'on va essayer de nous aider.
28:26Et en fait,
28:28à la fin, on dit
28:30qu'on n'a pas pu traiter
28:32notre dossier.
28:34Il y a un sentiment d'injustice,
28:36d'incompréhension.
28:38D'incompréhension.
28:40Pourquoi nous ?
28:42Pourquoi on nous fait croire
28:44à des promesses
28:46et en fait, non ?
28:48On ne veut pas de cas sociaux.
28:50C'est ce qu'on m'a dit un jour.
28:52On m'a dit
28:54voilà, mais nous, on ne veut pas
28:56de cas sociaux.
29:00Mais vous dites
29:02mais je ne suis pas un cas social.
29:08Même en ayant déposé
29:10une demande de logement social il y a 6 ans
29:12à la mort de son mari,
29:14Adèle n'a pas eu plus de chance.
29:18Je n'ai jamais eu de réponse
29:20de la demande de logement.
29:22Je n'ai jamais eu de réponse.
29:24Jamais.
29:26J'ai fait voir des élus
29:28du maire et j'ai vu
29:30rien. Aucune réponse.
29:32Donc du coup,
29:34je commençais à couvrir à gauche et à droite
29:36les assistantes sociales,
29:38l'association pour les personnes
29:40en difficulté.
29:42Mais ça n'a rien donné.
29:44L'assistante sociale a fait tout ce qu'elle a pu, la pauvre.
29:46Elle m'a dit, je ne peux rien faire pour vous
29:48que d'attendre
29:50d'être vraiment en état
29:52d'expulsion. Vraiment.
29:54Je lui ai dit, donc vous ne pouvez rien faire.
29:56Elle m'a dit, la seule chose
29:58que vous... J'ai dit, je vais être bientôt expulsée.
30:00Elle m'a dit, oui, je comprends bien.
30:02Elle m'a dit la seule chose
30:04si vous voyez quelqu'un
30:06de votre famille ou des gens, des amis
30:08pour vous aider à payer votre dette.
30:12Le logement social
30:14devrait être la solution pour tous.
30:16Mais le manque de HLM
30:18engorge toutes les procédures
30:20et les expulsés se fracassent
30:22contre un système à bout de souffle.
30:24Un dispositif
30:26totalement saturé.
30:28On a essayé de se rapprocher
30:30des assistantes sociales
30:32qui n'ont aucune solution
30:34à nous proposer.
30:38Les services sociaux n'avaient pas d'hébergement
30:40d'urgence disponible.
30:42Donc c'était impossible
30:44de me reloger.
30:49J'ai reçu une offre
30:51de relogement
30:53à 600 euros de loyer.
30:55Donc à ce moment-là, je n'avais plus du tout les moyens
30:57de... J'ai dit, je ne peux pas accepter.
30:59Je ne vais pas pouvoir payer.
31:03Il n'y en a toujours pas de proposition
31:05de l'office HLM,
31:07de bailleurs sociaux
31:09malgré les relances
31:11quasiment toutes les semaines.
31:13Vous n'avez droit à rien.
31:15Vous n'êtes pas prioritaire sur quoi que ce soit.
31:18Démarrez-vous.
31:19Non, écoutez, désolé.
31:21Vous faites partie de la liste
31:23du nombre de demandeurs.
31:25Mais on n'a pas cette capacité-là.
31:27Débrouillez-vous.
31:42Quand on n'a pas de domicile fixe,
31:44non seulement on a
31:46le linge,
31:48les produits de toilette, brosse à dents.
31:50Je me suis baladée comme ça pendant deux ans.
31:52Un an et demi,
31:54comme ça, avec mon petit sac,
31:56une petite serviette,
31:58une petite brosse à dents,
32:00un change, un pull chaud
32:02et puis des papiers.
32:04Un sac de papiers.
32:06De justificatif,
32:08de quittance de loyer,
32:10de toute la procédure.
32:12Alors c'est un petit escargot
32:15Au fur et à mesure
32:17de l'avancement,
32:19de l'avancée de la procédure
32:21et des rencontres et des rendez-vous,
32:23en fait, dans nos enfances,
32:25petit à petit, la tête sous l'eau,
32:27on essaie de respirer et puis un petit coup,
32:29un petit rendez-vous, pof !
32:31Trois ans de... Mais non, c'est votre faute.
32:33Mais non, vous auriez dû faire ça avant.
32:35Ah mais non !
32:37Mais c'est ça que vous auriez dû faire.
32:39Mais bon, si on n'a pas l'information,
32:41comment on peut savoir ce qu'il faut faire ?
32:43Je ressentis, c'était une très très forte culpabilité,
32:45une pression énorme.
32:47Déjà de remettre en doute ce que je disais,
32:49mon histoire.
32:51Alors raconter ça pendant trois ans,
32:53c'est épuisant, épuisant.
32:55Je pleurais, j'en sortais en pleurs.
32:57Et de remettre...
32:59La personne qui ne m'a jamais vue
33:01remettait à chaque fois
33:03en cause,
33:05mais non, c'est pas possible.
33:07En principe, c'est comme ça,
33:09mais c'est pas possible qu'il vous arrive ça.
33:11Mais non, mais pourquoi vous ne l'aviez pas fait avant ?
33:13Je ne l'ai pas fait avant
33:15parce que je n'étais pas informée.
33:17Aussi simple que ça.
33:19Mais c'est maintenant que vous le faites.
33:21Ah mais vous savez, on aurait pu faire quelque chose
33:23si vous l'aviez fait il y a six mois.
33:25Mais bon, maintenant, comme vous le faites, c'est trop tard.
33:27Voilà, c'était comme ça pendant trois ans.
33:29C'est là qu'on mesure vraiment
33:31que c'est une machine à expulser.
33:33En fait, c'est une machine
33:35déjà même pas expulsée, abroyée.
33:37C'est là qu'on voit que c'est de l'administration.
33:39La machine qui se met en rouleau compresseur.
33:41Et puis, c'est tout.
33:43L'humain n'existe plus.
33:45Il n'existe plus.
33:47Et c'est là où on se dit que,
33:49oui, on entend parler du gouvernement,
33:51d'avoir des chevaux de bataille,
33:53le logement,
33:55le droit, la dignité,
33:57l'égalité, la fraternité.
33:59Est-ce que c'est bien encore
34:01de réalité tout ça ?
34:09C'est là qu'on se dit que
34:11c'est la machine à expulser.
34:13C'est là qu'on se dit que
34:15c'est la machine à expulser.
34:17C'est là qu'on se dit que
34:19c'est la machine à expulser.
34:21C'est là qu'on se dit que
34:23c'est la machine à expulser.
34:25C'est là qu'on se dit que
34:27c'est la machine à expulser.
34:29C'est là qu'on se dit que
34:31c'est la machine à expulser.
34:33C'est là qu'on se dit que
34:35c'est la machine à expulser.
34:37La loi a condamné au gouvernement
34:39de me donner l'appartement.
34:41Ils sont incapables de me donner l'appartement.
34:43J'ai 52 ans, je n'ai jamais demandé
34:45quelque chose au gouvernement.
34:47J'ai toujours travaillé, j'ai payé l'impôt,
34:49j'ai payé tout complet.
34:51Menacé d'expulsion,
34:53Zakaria a été reconnu prioritaire d'Allo il y a 3 ans.
34:55Sa demande est urgente.
34:57Zakaria élève
34:59ses 4 jeunes enfants, âgés de 3 à 7 ans,
35:01dans un petit deux-pièces,
35:03insalubre.
35:05Le propriétaire n'a jamais voulu faire les travaux
35:07nécessaires et lui envoie régulièrement
35:09les huissiers pour le mettre dehors.
35:11Alors Zakaria se tourne
35:13vers l'Etat. Pas d'expulsion
35:15sans relogement, c'est ce que prévoit la loi.
35:19Je suis resté
35:21sans de l'eau chaude pendant 8 mois
35:23avec mes enfants.
35:25Je chauffais de l'eau pour me laver,
35:27pour laver mes enfants,
35:29pour les amener à l'école. Il n'y a pas d'eau du tout.
35:31Les humains étaient des petits bébés,
35:33ils étaient 3 mois, 4 mois.
35:35Je chauffais de l'eau,
35:37je chauffais de l'eau avec les gaz,
35:39je les lavais.
35:41L'état de l'appartement se dégrade.
35:43Il y a de l'eau qui coule,
35:45et l'appartement il est humide.
35:47Quand tu as des enfants,
35:49l'hiver comme ça, tu ne peux pas dormir.
35:51Les enfants sont froids.
35:57Zakaria alerte son propriétaire
35:59et lui demande de faire des travaux.
36:03Ils sont ramenés,
36:05quelqu'un pour regarder les plomberies.
36:07La personne a fait le débit,
36:09il est parti, il n'est plus revenu.
36:11Il y a au moins 6 personnes qui sont venues faire le débit.
36:13Elles ne sont pas venues.
36:15Pendant ce temps, vous payez le loyer ?
36:17Pendant ce temps, je paye le loyer.
36:19Combien ?
36:21750 de loyer.
36:23C'est 30 mètres carrés, ce n'est pas grand.
36:25Au bout d'un moment, je dis j'en ai marre,
36:27je ne paye pas l'appartement.
36:29Si le propriétaire ne réalise pas,
36:31il va porter plainte.
36:33Moi aussi, je suis allé porter plainte.
36:37Zakaria commence alors des démarches
36:39pour faire appliquer la loi d'Allot
36:41et être relogé.
36:43On n'a jamais proposé de logement social.
36:45J'ai écrit à toutes les maires
36:47de Côte d'Azur.
36:49J'ai écrit au maire de Nice,
36:51j'ai écrit au maire de Cannes,
36:53j'ai écrit au sous-préfet
36:55de Grasse,
36:57j'ai écrit au maire de Théoul,
36:59j'ai écrit au maire de Mandelieu,
37:01j'ai écrit à tous les maires d'Antibes.
37:03J'ai écrit à toutes les maires.
37:05Il y a sept maires que j'ai écrits.
37:07Tout le monde s'est trouvé excusé.
37:13Moi, je suis protégé par Allot.
37:15Pourquoi créer une loi
37:17si vous ne soutenez pas cette loi-là ?
37:29Ils ont construit des asylums
37:31deux pas de chez moi.
37:33Et puis, ils me disent
37:35qu'ils ne sont pas là pour me donner l'asylum.
37:37Il y a cinq étages, ils ont construit
37:39la rue de Cannes.
37:41Cette rue s'appelle la rue de Cannes.
37:43Les deux étages,
37:45il n'y a pas d'appartement pour moi.
37:47Je passe là-bas tous les matins
37:49pour aller dans mon boulot.
37:51J'écoule les larmes, je pleure.
37:53Je dis, eh bon Dieu, il faut qu'il pense à moi.
37:55Tu deviens fou, là.
37:57J'ai le logement, j'ai le moyen pour payer
37:59et je travaille.
38:01Vous voyez ça ? C'est ça, le problème.
38:03Peut-être que je ne suis pas un être humain.
38:05Je ne sais pas.
38:07Je suis un pauvre type.
38:09Peut-être que c'est pour ça qu'il ne veut pas de moi.
38:11Je ne vole pas.
38:13Je n'esclare pas les gens.
38:15Je travaille pour faire vivre ma famille.
38:19Je ne fais pas quelque chose de mal.
38:21Quand un pauvre type a un appartement,
38:23il est heureux.
38:27...
38:53Comme Zakaria,
38:55Adèle, Anna,
38:57Valérie et les autres,
38:59tous sont reconnus prioritaires d'Allô.
39:03Aucun n'a été relogé.
39:05Je me suis dit,
39:07il faut que je m'en ressaisisse.
39:09On ne peut pas rester comme ça.
39:11Pour moi, je me suis dit,
39:13on ne sera pas à la rue.
39:15On n'a pas à dormir dehors.
39:17Du coup,
39:19j'ai décidé d'en parler
39:21à mes amis.
39:23Elle en a parlé à des amis.
39:25Des amis qui en ont parlé
39:27à leurs parents.
39:29De fil en aiguille,
39:31on a eu une opportunité.
39:33C'est une maman
39:35qui m'a contactée.
39:37Elle m'a dit,
39:39elle a parlé à mon fils.
39:41Ma soeur est propriétaire.
39:43Elle a un studio de 24 m2
39:45qui se libère au pied levé.
39:47Je n'ai pas choisi.
39:49J'ai pris.
39:51On a pu déménager
39:53rapidement.
39:55On a pu se reloger.
39:57On s'est dépossédés
39:59de nos biens.
40:01Parce que
40:03passer de
40:0565 m2
40:07à 24 m2
40:09pour un studio
40:11meublé,
40:13vous dites
40:15que vous faites le deuil de vos affaires.
40:17Vous donnez et vous ne vous retournez pas.
40:19Mais vous dites,
40:21on reconstruira.
40:25Le jour de l'expulsion,
40:27je ne savais pas où aller.
40:29Il y avait ça aussi.
40:31Il s'est trouvé que c'est un ami.
40:33Je peux maintenant dire
40:35que c'est un ami.
40:37Je ne pouvais pas le dire.
40:39J'ai eu la chance d'avoir
40:41quelqu'un qui m'a proposé
40:43de m'héberger à Marseille.
40:49Le fait d'être hébergé
40:51reste quand même
40:53un peu précaire.
40:55Pour l'instant,
40:57je n'arrive pas à me poser
40:59dans l'avenir,
41:01à faire des projections dans le futur.
41:03Je suis toujours au jour le jour.
41:05Je me considère comme étant
41:07une SDF de luxe.
41:09C'est tout ce que je fais pour l'instant.
41:11Et ça ne me plaît pas trop.
41:15Les solidarités familiales
41:17ou privées sont rarement définitives.
41:19Pendant six mois,
41:21Polo, Magali et leurs jumeaux
41:23ont été ballotés
41:25chez les parents de l'un ou l'autre
41:27avant que la situation ne devienne intenable.
41:29Dernier point de chute,
41:31le centre d'hébergement social.
41:33Ça a été des va-et-vientre
41:35chez ses parents,
41:37chez ma mère,
41:39pendant quelques mois
41:41avant qu'on retrouve
41:43un centre d'hébergement,
41:45avec des chambres
41:47où on y est encore.
41:49Mais 26 m2 pour 4,
41:51c'est peu, sachant que les cuisines
41:53sont collectives.
41:55Certaines chambres n'ont pas de douche,
41:57des sanitaires, donc c'est du collectif aussi.
41:59Les WC, pareil.
42:01Après, il y a des moments difficiles
42:03parce qu'on peut retrouver
42:05des personnes qui sont
42:07addictes à l'alcool.
42:09Du coup, elles sont bruyantes,
42:11elles cherchent un peu
42:13la bagarre avec d'autres personnes
42:15parce qu'elles ont l'alcool mauvais.
42:17Mais sinon, ouais, c'est...
42:19On a 24 m2 pour 4,
42:21on est vite oppressés.
42:25Quand la famille ou les amis
42:27ne répondent pas présent,
42:29quand les hébergements sociaux sont saturés,
42:31apparaît le spectre tant redouté
42:33de la rue.
42:35La seule solution, c'était la voiture.
42:39Dormir dans sa voiture,
42:41c'est très dur.
42:43Très dur.
42:45La première nuit, ça va encore,
42:47mais la deuxième, elle est dure.
42:49La première nuit, j'ai passé...
42:51Pratiquement,
42:53j'ai dormi,
42:55mais je me suis pas rendu compte
42:57que j'étais à la rue.
42:59C'était fini, j'allais plus rentrer chez moi.
43:01J'allais plus pouvoir
43:03ouvrir la porte.
43:05La deuxième nuit, ça travaille.
43:07Et on se dit, mince,
43:09je vais faire quoi ?
43:11Je vais aller où ?
43:17Et l'expulsion,
43:19de jeter sur le trottoir des villes
43:21une armée d'invisibles.
43:37Bloqués dans des parcours d'errance,
43:39les 100 logements fixes
43:41finissent un jour ou l'autre
43:43par vraiment dormir dans la rue.
43:49Comme Armel et Yves,
43:51deux naufragés du logement
43:53qui, le soir venu, partent à la recherche
43:55d'un coin où dormir.
43:59Ils se sont rencontrés après leur expulsion.
44:01Ils ne sont pas en couple,
44:03mais partagent une solidarité de survie.
44:07Nous nous sommes rencontrés
44:09tout à fait par hasard
44:11lors d'une visite
44:13chez le garde-meubles,
44:15là où ont été transférés
44:17tous nos biens
44:19à la suite de l'expulsion.
44:21C'est un grand hangar
44:23qui contient au total
44:25environ 800 grosses caisses en bois
44:27qu'ils appellent des
44:29composants de bois.
44:31C'est un hangar
44:33qui contient
44:35des grosses caisses en bois
44:37qu'ils appellent des containers.
44:39Et parmi ces 800 containers,
44:41500 appartiennent
44:43aux gens qui ont été expulsés
44:45par ce pailleur social.
44:47C'est assez impressionnant.
44:53Devant ces containers
44:55où sont stockés les reliques
44:57de leur vie passée,
44:59Armel et Yves découvrent
45:01qu'ils ont le même itinéraire maudit.
45:03En 2006, ils ont été expulsés
45:05de leur HLM à Paris
45:07alors qu'ils y habitaient
45:09depuis plus de 40 ans.
45:15Armel travaille en CDI
45:17dans une grande entreprise.
45:19Expulsée pour une dette
45:21de 3000 euros,
45:23elle alterne l'hôtel et la rue
45:25car son salaire ne lui permet pas plus.
45:27Pour l'instant, j'ai pas de logement
45:29parce qu'il y a trop de demandes.
45:31Quand vous avez un salaire,
45:33il faut vous débrouiller.
45:35Il faut trouver une chambre d'hôtel
45:37sinon il faut appeler le 115.
45:39Voilà.
45:41Vous avez appelé le 115 ?
45:43Oui, mais il faut patienter
45:45les heures.
45:47Après, on vous a dit d'appeler
45:49à telle heure.
45:51Quand vous appelez,
45:53il n'y a plus de place.
45:55Il faut rappeler à telle heure
45:57et il n'y a plus de place.
45:59Il faut rappeler encore
46:01le lendemain.
46:03C'est sans arrêt comme ça.
46:05Ça devient insupportable.
46:07Il faut vous débrouiller seul.
46:09Moi, je suis obligée
46:11d'aller à l'hôtel.
46:13Il n'y a pas le choix.
46:15Je paye 15 jours.
46:17Il y a d'autres choses
46:19à payer.
46:21Il faut payer les impôts derrière,
46:23les choses en cours,
46:25ma dette aussi.
46:27Vous avez remboursé votre dette ?
46:29Oui, j'ai remboursé la dette.
46:31Yves est retraité
46:33après avoir travaillé toute sa vie
46:35comme électronicien.
46:37Sa retraite ne lui permet pas
46:39de chercher un logement dans le privé.
46:43Aujourd'hui,
46:45il n'a nulle part où aller.
46:49Je me retrouve à la rue.
46:51J'ai un âge maintenant
46:53qui est important.
46:55Je me retrouve sans rien.
46:57Les services sociaux
46:59que j'ai sollicités
47:01m'ont dit qu'ils occupaient
47:03en priorité des femmes seules
47:05avec enfants et des sans-papiers.
47:07Vous avez une retraite,
47:09débrouillez-vous.
47:11Vous dormez où ?
47:13La plupart du temps dans ma voiture
47:15qui est stationnée
47:17dans la rue.
47:19Ou alors dans la rue
47:21quand il fait très beau.
47:23Et puis quelquefois dans une gare,
47:25dans un aéroport.
47:27De temps à autre,
47:29j'ai pu être hébergé
47:31par de la famille
47:33ou assumer
47:35quelques nuits d'hôtel.
47:37Mais ma retraite n'est pas suffisante
47:39pour aller à l'hôtel tous les jours.
47:41Il faut de temps en temps
47:43soigner son aspect,
47:45prendre une douche, etc.
47:47C'est obligatoire.
47:49Tous les jours,
47:51il faut dormir.
47:53Si vous n'avez pas d'argent,
47:55vous ne pouvez pas payer l'hôtel.
47:57Vous dormez dehors.
47:59On est obligé de se poser
48:01tous les jours la question
48:03où on va dormir,
48:05qu'est-ce qu'il faut qu'on fasse.
48:07Psychologiquement,
48:09on est quand même traumatisé
48:11de se retrouver à la rue
48:13comme ça.
48:15On n'a pas ses affaires.
48:17On est complètement perdu,
48:19c'est un traumatisme.
48:21Dans mon cas,
48:23vu mon âge maintenant,
48:25c'est une sorte de double peine.
48:27Je me retrouve à la rue
48:29en ayant déposé une demande
48:31en mairie, c'est sûr.
48:33Mais compte tenu à Paris
48:35du délai d'attente
48:37pour un logement social,
48:3910 ans à l'heure actuelle,
48:41je pense que je risque
48:43d'être décédé avant d'avoir
48:45de nouveau un logement social.
48:47C'est une sorte de mise à mort
48:49administrative de la personne.
48:51Vous n'existez plus,
48:53ce numéro-là, terminé,
48:55on l'a jeté.
48:57C'est ce qui s'est passé pour moi.
48:59C'est la porte et la rue. Terminé.
49:17Mes amis, au secours !
49:19Une femme vient de mourir gelée
49:21cette nuit à 3 heures
49:23sur le trottoir
49:25du boulevard Sébastopol,
49:27serrant sur elle
49:29le papier par lequel
49:31avant-hier,
49:33il y a eu la mort
49:35d'une jeune femme
49:37qui a été tuée
49:39par un homme
49:41qui a été tuée
49:43par un homme
49:45et par lequel, avant-hier,
49:47on l'avait expulsée.
49:49Chaque nuit,
49:51ils sont plus de 2000
49:53recroquevillés
49:55sous le gel.
49:57Sans toit, sans pain,
49:59plus d'un presque nu.
50:01Devant tant d'horreurs,
50:03les sites d'urgence,
50:05ce n'est même plus assez urgent.
50:07La météo annonce
50:09un mois de gelée terrible.
50:11Tant que dure l'hiver,
50:13une seule opinion doit exister entre hommes.
50:15La volonté
50:17de rendre impossible
50:19que cela dure.
50:21Grâce à vous,
50:23aucun homme, aucun gosse
50:25ne couchera ce soir
50:27sur l'Alface ou les quais de Paris.
50:29Merci.
50:43Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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