Pierre-François Veil, fils de Simone Veil et président de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, est l'invité du Live BFM ce samedi.
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00:00Pierre-François Veil, bonjour, merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation, vous êtes évidemment, on vous connaît, le fils de Simone Veil, vous êtes avocat,
00:07vous êtes le président de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, c'est la première fois que vous parlez dans ce contexte extrêmement instable,
00:14extrêmement clivant de ces élections législatives anticipées, on va parler de ces élections, on va parler de cet antisémitisme qui s'est invité au cœur de cette élection.
00:24Je voudrais avant de vous entendre sur tous ces points, vous soumettre deux faits d'actualité. D'abord, on a appris que deux personnes, deux jeunes, un de 19 ans hier avait été arrêté,
00:34mis en examen, il projetait un attentat avant les Jeux olympiques en ciblant très clairement des juifs. Un attentat qui cible directement des juifs.
00:44Est-ce que les juifs sont devenus aujourd'hui dans notre pays une cible maximale ?
00:52Écoutez, vous me l'apprenez, ça ne fait évidemment que rajouter une pierre de plus à ce mur d'inquiétude qui saisit actuellement les Français juifs dans notre pays.
01:12Il y a tous les jours maintenant des événements dramatiques, alors je ne sais pas, encore une fois, je n'ai pas le détail de ce que vous venez de m'annoncer.
01:22Le crime épouvantable auquel nous avons tous été confrontés la semaine dernière de cette petite fille, de cet enfant de 12 ans, par d'autres enfants,
01:36commis vraiment par des criminels tellement jeunes, sur une victime tellement jeune, dans une école, enfin voilà, c'est une situation absolument dramatique.
01:50Il faut faire baisser le niveau de violence dans notre pays.
01:55Puisque vous évoquez le drame de Courbevoie, comment comprenez-vous que des enfants si jeunes, vous le rappeliez, 13 ans et 12 ans pour l'un,
02:03puissent être imprégnés d'antisémitisme, puissent violer une jeune fille, la menacer de la brûler, en évoquant sa religion ?
02:14Écoutez, il y a un degré de violence verbale qui progresse dans notre pays depuis des années, qui depuis le 7 octobre a été conscientieusement
02:34entretenue par des forces politiques pour monter les Français les uns contre les autres, pour dresser des oppositions systématiques entre les Français,
02:46agiter les drapeaux communautaires des Français les uns contre les autres, il ne faut pas s'en étonner.
02:58Vous êtes choqué qu'au premier meeting du nouveau Front populaire à Montreuil, il y a quelques jours, il n'y ait effectivement pas de drapeau français, mais des drapeaux de la Palestine ?
03:07Je suis d'abord triste qu'il n'y ait pas de drapeau français, parce que c'est un débat français que celui de nos élections, c'est l'avenir de notre pays,
03:19c'est l'avenir de notre démocratie, c'est l'avenir de notre République, de nos valeurs, et je suis extrêmement inquiet effectivement qu'il n'y ait pas de drapeau français
03:29et qu'on ne s'investisse plus dans notre pays, je trouve ça de très très mauvais augure, et je trouve que d'instrumentaliser comme cela est fait,
03:42ce qu'on veut définir comme des communautés qui vivraient, comme l'avait dit un ancien ministre de l'Intérieur, vaguement côte à côte, mais en définitive surtout face à face,
03:56me paraît extraordinairement dangereux pour notre pays, mais il ne faut pas s'en étonner, ce sont des extrêmes qui vivent, qui entretiennent cette violence,
04:08et qui en vivent et qui espèrent prospérer sur cette violence.
04:11On arrive là au cœur du sujet et on va évidemment vous interroger avec Laurent sur ces questions-là, ces élections législatives, le thème de l'antisémitisme est devenu prégnant.
04:20Serge Klarsfeld figure évidemment s'est exprimé ces derniers jours et quand on lui a demandé s'il avait à choisir entre un vote RN et un vote La France Insoumise,
04:32Serge Klarsfeld répond très clairement, je choisirais le vote du Rassemblement National.
04:39Arnaud Klarsfeld, son fils, a d'ailleurs été dans le même sens sur le plateau de BFM TV, on va l'écouter.
04:45On est face à un parti qui est un parti que je considère comme un antisémite, et un parti qui était d'extrême droite et qui est devenu un parti de droite populiste et populaire,
04:56et entre les deux, je choisis Marine Le Pen.
05:00Pierre-François Veil, faites-vous le même choix que Serge et Arnaud Klarsfeld ?
05:06Je connais Serge Klarsfeld depuis 45 ans.
05:12Je l'aime énormément et tous mes combats l'ont accompagné.
05:16Il se trouve que j'étais à ses côtés il y a déjà 45 ans quand il luttait aux côtés de Robert Badinter contre Faurisson et contre le négationnisme.
05:28Nous avons fait ensemble ce procès.
05:31Les extrêmes sont les extrêmes.
05:38Je veux retenir de la réponse qui a été faite par Serge Klarsfeld que pour ce qui le concerne, lui, il voterait au centre.
05:47Il voterait pour des partis républicains et qu'il ne s'égarerait pas vers les extrêmes.
05:51Alors je sais, il y a eu ensuite cette formule qu'il a retenue parce qu'on l'a mis, ou on a voulu le mettre devant ce dilemme insupportable qui est
06:05« mais quels extrêmes choisiriez-vous ? ».
06:07Mais nous ne choisirons aucun extrême et nous ne sommes pas dans cette situation.
06:12Nous sommes non pas à la veille du deuxième tour, d'un éventuel, d'un hypothétique deuxième tour dans lequel seraient confrontés deux extrêmes,
06:22mais nous sommes pour l'instant dix jours avant un premier tour dans lequel il y a des forces républicaines qui se battent contre des forces qui sont moins républicaines.
06:30Cela veut dire que vous ne voulez pas répondre à cette question parce que vous ne voulez pas vous projeter dans le scénario aujourd'hui où vous nous dites ce matin « moi je voterai blanc ».
06:39Mais ce serait une étrange défaite que de répondre aujourd'hui en considérant que d'ores et déjà les partis républicains ont perdu.
06:51Je ne l'accepte pas.
06:53Je ne l'accepte pas.
06:55Et je trouve que c'est une forme de défaitisme républicain que de considérer que nous serons confrontés à ce dilemme mortifère.
07:04Je ne veux pas l'accepter.
07:06Mais tous les chiffres aujourd'hui nous amènent à penser qu'on saura dans ce choix-là.
07:12Aujourd'hui on est à 34-35% pour le Rassemblement National, 29% pour le Nouveau Front Populaire, le Bloc Central est à 22%.
07:21Alors je vais vous le dire autrement.
07:23En ce qui me concerne, je ne voterai jamais pour un parti extrême.
07:28Jamais.
07:30Sans me dire encore ce matin que vous voterez blanc.
07:33Dans cette hypothèse.
07:36Je vais vous faire la même réponse que Serge Tartefel.
07:38Je ne serai pas confronté à cette situation.
07:40Parce qu'à titre personnel, dans ma circonscription, ça ne peut pas se produire.
07:46Mais je ne veux pas considérer cette hypothèse.
07:48Je ne veux pas considérer que la France, encore une fois, n'a plus le choix que d'être entre les mains de LFI ou entre les mains du Rassemblement National.
08:01C'est pour moi inacceptable.
08:04Oui, deux choses.
08:06D'abord, Pierre-François Veil l'a dit, Serge Tartefel a commencé par dire qu'il voterait au centre.
08:11Et évidemment, il a été obligé de répondre à une question à laquelle Pierre-François Veil vraisemblablement répond différemment.
08:18Mais c'est vrai que c'est une question qui ne se posera qu'entre les deux tours.
08:23Et encore, elle ne se posera que dans quelques circonscriptions.
08:26Et pour ce que j'en sais, pas dans celle de Serge Tartefel.
08:29Donc il n'aura pas, au final, à choisir.
08:33Moi, ce qui m'a frappé, c'est qu'après les propos de Serge Tartefel, évidemment, tout le monde a été étonné.
08:39Quand on connaît le parcours, les combats auxquels vous avez participé, les combats de Serge Tartefel, on est étonné qu'il fasse cette réponse-là.
08:47Jean-Luc Mélenchon a été étonné, lui aussi.
08:50Et il a été très loin, il a parlé, à propos de Serge Tartefel, de naufrage moral.
08:56Mais à aucun moment, Jean-Luc Mélenchon ne s'est interrogé pour savoir comment on en est arrivé là.
09:04Comment l'antisémitisme, qui était une étiquette collée au Front national naguère,
09:10et dont Marine Le Pen avait du mal à se décoller depuis qu'elle a transformé son parti en Rassemblement national,
09:16et même depuis qu'elle a fait sécession avec son père,
09:20comment cette étiquette-là est arrivée à un parti qui fait partie de la gauche ?
09:25Normalement, quand on accole une étiquette aussi infamante à une formation politique ou à des responsables politiques,
09:31ceux-là, avant de critiquer ceux qui collent l'étiquette, devraient s'interroger sur le point de savoir comment on en est arrivé là.
09:39Or, je n'entends aucune autocritique.
09:41À aucun moment, les responsables politiques qui sont concernés,
09:44et je fais clairement la différence entre quelques-uns et tous ceux qui appartiennent à ce Front populaire.
09:51C'est injuste de mettre tous ceux qui sont dans ce Front populaire dans le camp des extrêmes.
09:56Mais à aucun moment, ceux qui se retrouvent avec cette étiquette infamante
09:59ne s'interrogent sur le point de savoir comment on a pu en arriver là.
10:04– Si vous me permettez d'intervenir.
10:09Vous avez parlé de l'intervention de Jean-Luc Mélenchon,
10:12qualifiant les propos de Serge Klarsfeld.
10:15Je trouve ça inadmissible.
10:17Je trouve ça inadmissible parce que,
10:20depuis une quinzaine d'années ou une vingtaine d'années,
10:23on parle, à la suite de Jérôme Fourquet, des territoires perdus de la République.
10:28Moi, à titre personnel, je considère que Jean-Luc Mélenchon est un homme politique perdu de la République.
10:34Et depuis longtemps.
10:36Et qu'il entraîne notre pays vers des abîmes extraordinairement dangereux.
10:41Pour autant, et comme vous l'avez dit,
10:44je ne crois pas du tout que toutes les forces qui sont réunies
10:49dans le nouveau Front populaire soient fascistes et antisémites.
10:56De la même façon que je ne fais pas le procès à tous nos concitoyens
11:02qui peuvent voter pour le Rassemblement national d'être antisémites.
11:07Je crois simplement que chacune de ces deux forces politiques
11:12porte en elle-même, pour des raisons différentes et dans des circonstances différentes,
11:17dans leur cœur, des valeurs qui sont contraires à nos valeurs républicaines.
11:21L'une comme l'autre.
11:24Je ne suis pas là pour les mesurer, je n'ai pas un décimètre pour les mesurer.
11:30Mais je sais que l'une comme l'autre porte des valeurs qui sont extraordinairement dangereuses pour notre République.
11:36Qui opposent nos concitoyens.
11:38Qui les mettent en situation de conflit.
11:40Qui dénoncent.
11:41Qui sans arrêt incriminent tel ou tel par la couleur de sa peau, par ses choix de vie,
11:48par ses choix politiques, par ses positions.
11:50C'est intolérable.
11:51Et c'est de cela dont nous devons sortir pour faire gagner notre République,
11:55pour faire gagner nos valeurs républicaines.
11:57Pierre-François Veil, je voudrais vous soumettre une image, une archive qui date du 8 juin 1979.
12:03Vous la connaissez évidemment, c'est votre mère Simone Veil qui est en campagne pour les européennes.
12:08Elle tient une réunion publique et vont surgir dans la salle un commando du Front National à l'époque
12:15qui va venir perturber cette réunion.
12:17Voilà la réponse de Simone Veil.
12:20Je vais vous dire encore quelque chose.
12:23Vous ne me faites pas peur.
12:24Pas peur du tout.
12:26J'ai survécu à pire que vous, vous n'êtes que des SS aux petits pieds.
12:42Vous ne me faites pas peur, vous êtes des SS aux petits pieds.
12:45Ce combat contre l'extrême droite reste le vôtre aujourd'hui.
12:50Je pense que ce n'est pas...
12:52Bien sûr, je suis très ému quand j'entends les propos de maman.
12:55Mais je pense que ce n'est pas cela qu'il faut regarder.
12:59Ce qu'il faut regarder, c'est la violence qu'il y a dans la salle.
13:02C'est la violence de ces groupes politiques qui viennent perturber une réunion politique
13:12et afficher clairement des positions d'extrême droite insupportables.
13:20C'est à ça qu'il faut penser.
13:21C'est à cela que nous sommes confrontés aujourd'hui, quels que soient les extrêmes.
13:27Nous ne pouvons pas faire confiance à des groupes extrémistes,
13:31à des partis extrémistes, quelle que soit leur importance pour diriger notre pays.
13:36J'appelle à un sursaut républicain.
13:38Votre message est très clair ce matin.
13:39Merci beaucoup Pierre-François Veil d'être venu sur le plateau du Live BFM ce matin.
13:43Je vous remercie.
13:43Merci à vous.