• il y a 6 mois
Après le premier meeting du Nouveau Front Populaire Montreuil, en Seine-Saint-Denis, la députée européenne LFI et co-présidente du groupe de la Gauche au Parlement européen, Manon Aubry, souhaite défendre le programme de l'alliance des gauches.

Retrouvez les entretiens de 7h50 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50

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Transcription
00:00Et 7h48, Sonia De Villers, votre invitée ce matin est Eurodéputée La France Insoumise.
00:06Bonjour Manon Aubry.
00:07Bonjour.
00:08Hier soir, premier grand meeting à Montreuil, du Nouveau Front Populaire, sur scène sur
00:17la photo finale, deux figures historiques des Insoumis, Raquel Garido et Alexis Gorbière,
00:22députés sortants qui n'ont pas été réinvestis par votre parti.
00:26Certains dénoncent une purge, suite à leur désaccord avec Jean-Luc Mélenchon.
00:30Est-ce que vous êtes à l'aise avec cette mise à l'écart ?
00:33Écoutez, moi j'ai dit mes réserves en interne, mais ce qui m'intéresse pour être honnête
00:39c'est pas nécessairement ces 4-5 circonscriptions qui vont rester à gauche, c'est les 200-300-400
00:45circonscriptions.
00:46On aura sûrement des duels entre le Nouveau Front Populaire et le Rassemblement National.
00:50On aura deux visions du monde, du pays, qui s'affrontent d'un côté, une vision raciste,
00:56sexiste, climato-sceptique, et de l'autre, un programme de progrès, de transformation
01:01sociale et écologique.
01:02Donc terminez, c'est-à-dire tous les papiers de la presse ce matin, qui disent à quel
01:04point ces divisions ont parasité ce premier grand meeting.
01:07Vous vous bâlez-vous à cela ?
01:08Honnêtement, là je pense à des millions de gens qui sont en train de se réveiller
01:11ce matin, et qui comme moi depuis une semaine, on a l'impression que cette semaine, honnêtement
01:16c'est une semaine mais le ressenti c'est trois ans, et qui ont une immense boule au
01:22ventre.
01:23Qui ont l'estomac noué depuis une semaine.
01:25Samedi dernier, à la grande manifestation, je compte pas le nombre de personnes qui sont
01:30venues me voir en pleurant.
01:31En pleurant et en me disant « qu'est-ce que vous allez faire pour nous sauver ? ».
01:35Qui ont pleuré parce que ce sont des gens racisés, qui seront les premiers touchés
01:40par les politiques du Rassemblement National.
01:42Parce que les droits des femmes seront attaqués, ils s'attaqueront dès le premier jour au
01:46planning familial, en supprimant les moyens.
01:48Parce qu'ils s'attaqueront aux droits sociaux, parce qu'ils feront le tri des malades à
01:53l'hôpital.
01:54On vous entend parfaitement.
01:55Moi c'est sur ça que j'ai envie de faire campagne.
01:56Je comprends très bien, il n'empêche que vous proposez une alternance, vous proposez
02:00une contre-offensive, vous proposez un contre-pouvoir politique, on a envie de savoir à qui on
02:04s'adresse.
02:05Le journal Le Monde s'est tout de même procuré la charte que la France Insoumise a fait signer
02:09aux candidats pour les législatives, les engageants, je cite « à respecter la discipline
02:14de vote du parti, à défendre le projet et la stratégie définie par l'EFI, et surtout
02:17à soutenir coûte que coûte le candidat de l'EFI lors de la présidentielle de 2027 ».
02:21Est-ce que c'est une remise au pas ? Est-ce qu'on est libre de critiquer ? Est-ce qu'on
02:26est libre de parler ? Est-ce qu'on est libre de penser différemment au sein de la France Insoumise ?
02:30Bien sûr qu'on est libre.
02:31Vous savez, ce qu'on va défendre en commun c'est ça, puisqu'on est en radio, c'est
02:34le programme du Nouveau Front Populaire.
02:35Vous l'avez à la main.
02:36C'est ça qu'on va défendre.
02:37Et dans ce programme, il y a la brogation de la réforme des retraites, il y a le blocage
02:41des prix des produits de première nécessité, il y a la hausse du point d'indice de 10%
02:46pour les fonctionnaires qui ont été maltraités depuis des années, le réinvestissement de
02:51l'hôpital public, dans l'école publique.
02:53Honnêtement, moi c'est pour ça que je fais campagne et c'est pour ça qu'on va aller se battre.
02:57Parlons-en de ce nouveau programme du Nouveau Front Populaire, parlons du volet économique
03:02parce qu'il a directement trait avec l'Europe et je rappelle que vous êtes eurodéputée.
03:05Parmi les mesures, beaucoup de nouvelles dépenses, hausse des retraites, hausse du
03:09revenu des fonctionnaires.
03:10Nouvelle recette aussi.
03:11Oui, on va parler des dépenses d'abord, du minimum vieillesse, gratuité totale de l'école,
03:15le SMIC à 1600 euros, etc.
03:17La majorité présidentielle a chiffré l'ensemble du programme à 287 milliards d'euros.
03:22Est-ce que vous reprenez ce chiffre à votre compte ?
03:24D'abord, la majorité présidentielle, c'est Bruno Le Maire qui a chiffré avec sans doute
03:29les moyens de l'État, les moyens de son ministère, ce qui pose une question d'un
03:32point de vue démocratique et légal.
03:34Et puis, quand on regarde d'un peu plus près, c'est complètement farfelu parce qu'il
03:38surestime de 20 fois le coût de la réforme des retraites.
03:41Il prévoit que notre réforme de la CSG en la rendant progressive va coûter 39 milliards
03:46d'euros.
03:47Alors, combien coûte votre programme ?
03:48Alors, là, en l'occurrence, la CSG progressive, ça coûte 0 euro.
03:52Puisqu'on la rend plus progressive, certains coûteront plus cher et d'autres coûteront
03:56moins cher.
03:57Nous sommes en train de le chiffrer, vous l'aurez dans les prochaines heures.
04:00Nous avons largement de quoi le financer.
04:03En rétablissant l'impôt de solidarité sur la fortune, vous récupérez 10 milliards
04:06d'euros.
04:07Avec une taxation sur les super-profits, vous récupérez 15 milliards d'euros.
04:10Je peux vous faire la liste, elle est longue et elle va être technique pour un matin quand
04:14les gens se réveillent.
04:15Mais je veux dire, c'est une question de cap.
04:17On a un gouvernement qui a fait 50 milliards d'euros de cadeaux fiscaux aux entreprises
04:23multinationales et aux plus riches ces dernières années.
04:2650 milliards d'euros de cadeaux fiscaux, quand nous, nous prévoyons des recettes pour
04:30investir dans du commun, dans nos services publics pour redistribuer les richesses.
04:34A partir de quel revenu les Français vont payer plus ? Pardon de vous poser une question
04:39aussi simple, mais c'est la question que se posent les Français.
04:42Aucun problème à y répondre.
04:43Parce qu'on leur parle de multinationales et de taxes sur les super-profits, les gens
04:47voient leur feuille d'impôt.
04:48D'abord, puisque j'ai Dominique Seux en face de moi qui est un grand expert en matière
04:51économique, on a le premier impôt en France qui est payé, ce n'est pas l'impôt sur
04:56le revenu, c'est la TVA qui est un impôt injuste et qu'on prévoit de revoir.
04:59Sur l'impôt sur le revenu, parce que j'imagine que c'est votre question, nous prévoyons
05:02que tous ceux qui gagnent moins de 4 000 euros par mois, c'est-à-dire 92% des Français
05:09payent moins d'impôts.
05:10On veut rendre l'impôt sur le revenu davantage progressif.
05:13Donc ça veut dire que ceux qui gagnent plus de 4 000 euros par mois sont considérés
05:17comme riches, c'est ce que François Hollande avait dit pendant sa campagne.
05:20Oui, ils paieront légèrement plus et ensuite ce sera progressif.
05:21Vous voyez l'histoire...
05:22Donc quand je gagne plus de 4 000 euros par mois, mes impôts vont augmenter ?
05:26Légèrement si c'est à 4 000 euros et beaucoup plus si vous êtes Bernard Arnault, c'est
05:30une évidence.
05:31Entre 4 000 euros par mois et Bernard Arnault, il y a beaucoup, beaucoup de Français maintenant
05:35au prix.
05:36C'est pour ça que je fais la différence.
05:39Mais vous voyez, on peut avoir un débat super technique sur le barème des impôts.
05:44Vous voyez, je le connais le barème des impôts.
05:45Ce n'est pas technique, c'est très concret.
05:46Je vous le donne.
05:47Est-ce que c'est un choc fiscal pour les Français ?
05:50C'est pour ça que j'insiste, c'est un choc de redistribution des richesses.
05:53Dans notre pays, on a les 500 plus grandes familles qui possèdent 45% des richesses.
05:57Et on a de l'autre côté 10 millions de pauvres.
06:00On a l'hôpital public qui suffoque.
06:02On a l'école publique qui suffoque.
06:04Je pense aux millions de fonctionnaires dans notre pays qui font vivre avec beaucoup de
06:08fierté, mais souvent sans moyens, notre école et notre hôpital.
06:12Enfin, on réinvestira.
06:13Vous avez parlé de l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune.
06:15Vous dites que vous en attendez 10 milliards, c'est ça ? C'est le chiffre que vous venez
06:19de prononcer.
06:21A l'époque où il existait, c'était 3 milliards d'euros en recettes.
06:24Alors comment on passe de 3 milliards à 10 milliards ?
06:26En le rendant plus progressif et en le renforçant.
06:29Donc ça veut dire qu'il va y avoir beaucoup plus de gens considérés comme fortunés
06:32en France ?
06:33Non, on ne change pas nécessairement le seuil, mais on change le barème.
06:35De nouveau, en l'occurrence, avant d'être élue au Parlement européen, je travaillais
06:38à Oxfam sur les questions de lutte contre l'évasion fiscalité.
06:41On peut avoir un débat très technique sur les impôts, donc je vous réponds.
06:44Mais de nouveau, ce que je vous dis, c'est une histoire de cap politique.
06:48Cette élection et cette campagne un peu éclaires, on doit avoir un affrontement de projet contre
06:54projet, cap contre cap.
06:56Vous avez d'un côté un gouvernement qui a définancé les retraites, l'école, qui
07:03a baissé les prélèvements obligatoires pour les entreprises, de l'autre, nous nous
07:06suspendrons les politiques antisociales.
07:09Et oui, nous l'assumons, c'est une question de vision politique.
07:11Et j'ai envie de dire, ça n'a pas véritablement changé du projet de la gauche, je termine
07:14juste là-dessus.
07:15Et je suis ravie qu'on parle enfin du sérieux de notre programme, c'est la démonstration
07:19qu'on est au seuil de l'accession au pouvoir et qu'on peut gagner cette fois-ci.
07:23Et je veux le dire au milieu de gens qui sont désespérés par ce qu'il se passe dans
07:28notre pays.
07:29Depuis une semaine, on peut gagner.
07:30Si on ajoute Manon Aubry à la réforme, à la révision de l'impôt sur le revenu, à
07:33la révision de l'ISF, si on ajoute l'instauration d'un héritage maximum, est-ce qu'on peut
07:37craindre une forme de fuite des capitaux ? Est-ce qu'on peut craindre que les gens les
07:41plus riches en France organisent le départ de leur argent ?
07:43Quand il y avait un ISF, est-ce que vous savez la part des Français qui fuyaient l'ISF
07:47français ?
07:48Dites-nous.
07:49C'est 0,2% des contributeurs de l'ISF.
07:51C'est peanuts.
07:52Et en plus de cela, nous prendrons des mesures de lutte contre l'évasion fiscale.
07:56Je vous l'ai dit, c'était mon métier avant.
07:58En considérant le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Irlande comme des paradis fiscaux, la moitié
08:04des sommes qui sont évadées de France, elles sont vers nos voisins européens.
08:08On prendra enfin un bras-le-corps cette question et on a autour de nous des économistes qui
08:12sont extrêmement compétents sur le sujet.
08:14Je pense à Gabriel Zucman ou à Thomas Piketty qui sont des experts.
08:17Sur l'Europe, c'est très important parce que beaucoup d'observateurs craignent une
08:20aggravation du déficit français avec un tel programme.
08:23La Commission européenne doit lancer une procédure de déficit excessif contre la
08:26France demain, le 19 juin, c'est deux mois, ça arrive après la dégradation de la note
08:31sur la dette française.
08:32Vous en tenez compte de cette procédure ? Vous en tenez compte des règles européennes ?
08:36Écoutez, c'est le résultat de la politique menée par le gouvernement depuis sept ans.
08:40Donc c'est à eux qu'il faut poser des questions et rendre des comptes.
08:43Notre budget sera à l'équilibre à l'horizon de la fin du mandat.
08:46Mais je le redis, oui, nous nous assumons.
08:48Budget à l'équilibre ? D'ici la fin du mandat ?
08:51D'ici la fin du mandat.
08:52Mais nous assumons.
08:53Vous constaterez que beaucoup, beaucoup, beaucoup d'observateurs en doutent.
08:56Non, mais pardon, mais en fait, moi j'en ai marre qu'on prenne quelques économistes
09:00libéraux et on dit que c'est pas crédible.
09:02Je vous l'ai dit, on a plein d'économistes qui nous soutiennent et qui soutiennent la
09:05crédibilité mais surtout qui soutiennent l'horizon politique.
09:08Et puisque c'est la fin de l'interview, je voudrais terminer là-dessus.
09:10Aux gens qui désespèrent, engagez-vous, venez nous aider, c'est possible de gagner.
09:15En termes d'horizon politique, je sais que vous n'allez pas aimer la question mais
09:18elle va se poser dans quelques jours en France.
09:20Si au second tour, un électeur de la France Insoumise, quelqu'un qui vous soutient,
09:24se retrouve obligé de trancher entre un candidat Renaissance et un candidat RN, que doit-il faire ?
09:28Écoutez, on verra pour donner des consignes de vote.
09:32Il est clair que pour nous, jamais, jamais, jamais, aucune voix ne doit aller au Rassemblement
09:36National.
09:37C'est l'héritier des nazis.
09:39Ils ont été créés par des Waffen-SS, on est le 18 juin aujourd'hui, il est 81 ans,
09:44de l'appel du Général de Gaulle, je pense qu'il doit se retourner dans sa tombe en
09:47voyant l'état de notre pays aujourd'hui.
09:49Mais ce dont je suis sûre aussi, c'est que dans beaucoup, beaucoup de cas, le nouveau
09:52Front Populaire peut gagner.
09:53Donc, oh les cœurs, les gens, les amis, on peut y aller, on peut transformer notre pays
09:58et on peut, à la fin, rallumer tous les soleils, comme le disait le grand Jean Jaurès.
10:02Merci Manon.
10:03Merci à vous.
10:04Et merci Sonia De Villers.

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