• il y a 6 mois
Fasciné depuis l’enfance par les lynx, le pisteur naturaliste Neil Villard entreprend de suivre leurs traces du Jura suisse au massif de la Chartreuse. Au milieu d’une nature immaculée, un périple aux images de toute beauté.

Une empreinte de patte laissée dans la neige, un poil accroché au rocher d’une corniche… : un lynx est passé par là. Pisteur naturaliste, Neil Villard n’aime rien tant qu’arpenter les grands espaces du Jura suisse dont il est natif. Fasciné depuis l’enfance par le lynx boréal, auquel il a consacré un album de photographies, il sillonne vallées et cimes afin de l’observer dans son espace naturel. Exterminé en Europe occidentale au siècle dernier, le félin y a été réintroduit dans les années 1970. Depuis, l’espèce peine encore à se développer. Si aujourd’hui, des individus adultes occupent les principales forêts jurassiennes, les jeunes, une fois sevrés, partent en quête de nouveaux territoires et de futures partenaires – ce que les scientifiques appellent la "dispersion". Leur quête d’un nouvel espace vital les mène plus au sud, jusqu’au massif de la Chartreuse, porte d’entrée des Alpes françaises, via le Doubs, le Haut-Jura et le Bugey.

Lancé sur les traces de ces félins solitaires extrêmement difficiles à observer, Neil Villard emprunte les couloirs forestiers, tout à sa quête d’observation. Au milieu d’une nature immaculée, son périple à l’affût est ponctué de rencontres avec des personnes passionnées comme lui par l’animal, qui permettent de mieux comprendre les besoins d’un prédateur sauvage méconnu et les enjeux de sa coexistence avec l’homme.

Category

Personnes
Transcription
00:00 [Générique]
00:29 Le lynx, chez nous, on l'appelle le fantôme de la forêt
00:32 parce qu'il est très discret et pratiquement indétectable quand il ne bouge pas.
00:36 C'est un peu comme une apparition.
00:42 Ça arrive souvent de le voir et le temps d'un instant, une distraction,
00:47 un coup d'œil sur la droite et hop, il a disparu, il s'est fondu dans le décor.
00:56 Ça fait un peu plus de dix ans que je me suis mis sur sa piste
00:59 et c'est devenu une quête de tous les jours, une quête interminable.
01:03 Peu importe où je vais, je cherche sa présence, je cherche sa trace.
01:09 Il a été réintroduit dans le Jura il y a environ 50 ans,
01:14 après avoir complètement disparu de nos forêts.
01:16 La population de lynx, maintenant, elle grandit
01:20 et bien sûr, il n'y a pas la place pour tous.
01:22 Donc les jeunes lynx sont forcés d'aller chercher d'autres territoires plus loin.
01:26 Ce phénomène, c'est la dispersion.
01:28 Et ce voyage les amène beaucoup plus au sud, jusqu'au massif de la Chartreuse.
01:32 Aujourd'hui, j'ai décidé de moi aussi me lancer dans ce voyage
01:37 et par mes yeux, à travers mon regard à moi, d'essayer de comprendre,
01:41 d'essayer de vivre ce que ressentent ces jeunes lynx
01:43 qui découvrent de nouveaux espaces
01:45 et peut-être même aller à leur rencontre dans ces nouveaux territoires.
01:49 Le Jura
01:51 Pour rejoindre la Chartreuse, le meilleur itinéraire qui s'offre à moi,
02:04 c'est de faire comme le lynx, c'est de suivre les couloirs forestiers.
02:08 Et depuis le Jura suisse, c'est rejoindre le Doubs, le Haut-Jura,
02:12 le Buget et puis la Chartreuse pour finir mon périple.
02:15 Le Jura
02:17 Je m'apprête à passer la limite de la ville où j'ai grandi.
02:44 Presque la limite du territoire dans lequel j'évolue
02:47 depuis toutes ces années où je piste le lynx.
02:49 Je vais devoir me mettre dans la tête de l'animal
02:53 pour essayer de deviner quelle voie emprunter,
02:58 quelle crête parcourir, quelle combe traverser.
03:02 La forêt, c'est vraiment le milieu dans lequel je me sens le plus à l'aise.
03:10 Et c'est aussi ce qui me lie énormément au lynx.
03:13 C'est vraiment un animal qui est exclusivement forestier.
03:16 Et c'est ça qui fait qu'on est un peu frères de forêt ensemble.
03:21 Si on me dit de citer un animal qui représente la forêt,
03:28 c'est le lynx, par excellence.
03:31 J'ai fait un apprentissage de forestier bûcheron
03:38 pour justement être le plus possible dehors, le plus possible dans la nature.
03:43 J'ai toujours été très lié à la forêt,
03:45 toujours attiré par les arbres,
03:49 comme chez les hommes.
03:51 Fus d'en haut, ils se ressemblent tous,
03:53 mais dès qu'on regarde d'un peu plus près,
03:56 chacun d'entre eux est unique.
03:59 C'est une odeur vraiment caractéristique du Jura.
04:09 Pour moi, ça contribue énormément aux sentiments que j'ai quand je suis dans ces forêts.
04:13 L'odeur de l'épicère, c'est aussi un excellent moyen pour disparaître,
04:26 pour se fondre encore plus dans la forêt.
04:28 Pour pouvoir mettre une autre odeur,
04:32 pour devenir un petit peu plus forêt.
04:37 C'est des petites aides dans la nature
04:40 qui peuvent contribuer à la réussite d'une rencontre.
04:43 Quand on prend le terme "la dispersion",
05:10 c'est un terme pour décrire le comportement d'un jeune
05:13 qui part à la recherche d'un territoire.
05:15 Si on veut prendre ça d'une manière plus poétique,
05:18 c'est vraiment le voyage pour la vie,
05:20 pour devenir un représentant de son espèce.
05:23 Là, je quitte les forêts qui me sont familières,
05:29 les forêts des plateaux jurassiens.
05:31 Et pour moi, c'est là que commence l'enjeu de ce périple,
05:35 quitter Mazoun,
05:37 pour arriver dans des forêts, des massifs qui me sont inconnus.
05:40 Et le lynx, c'est un peu la même chose.
05:42 Je ne sais pas comment il perçoit ce changement de paysage.
05:46 Ça va être un travail sur les cartes,
05:49 un travail de lecture du paysage,
05:51 de voir la forêt la plus propice,
05:53 où les passages dangereux, les passages compliqués
05:55 sont les plus faciles.
05:57 Et ensuite, peu importe quel massif où il y a de la forêt,
05:59 il peut y avoir du lynx.
06:05 C'est une vieille borne
06:07 qui marque la frontière entre la Suisse et la France.
06:10 Là, sous la mousse, on distingue encore la fleur de lys du côté français.
06:15 Quand on traverse une frontière, ça fait toujours quelque chose de dire que
06:18 là, c'est la France, juste là, c'est la Suisse.
06:21 Alors que pour les animaux, c'est totalement insignifiant.
06:24 Il n'y a pas ces notions-là,
06:26 mais ils ont aussi leur notion de territoire.
06:29 Ils vont utiliser des rochers ou des tigres,
06:32 ils vont utiliser des rochers ou des troncs
06:35 qui sortent de l'ordinaire, qui visuellement se démarquent des autres
06:38 pour marquer ces bornes à leur façon,
06:42 en y déposant leur odeur, par le biais d'urines,
06:46 ou en se frottant dessus, en laissant bien des odeurs distinctes entre les individus,
06:50 en délimitant leurs propres frontières,
06:52 pour savoir qui a quel droit sur quel endroit,
06:56 sur le droit de nourriture, sur le droit de cachette, d'abri,
06:59 entre mâles, femelles,
07:02 et sûrement énormément d'autres choses qui nous échappent.
07:06 [Musique]
07:32 Le lynx, c'est un animal qui se déplace énormément,
07:35 qui occupe de très grands territoires.
07:38 Ça arrive des fois de parcourir 25, 30, 35 kilomètres quotidiens sur la piste,
07:46 dans des conditions pas forcément faciles, dans la neige, dans des endroits escarpés.
07:51 Toute la beauté du pistage, c'est ce côté un peu hypnotique.
07:55 On avance au rythme de son souffle.
07:58 [Musique]
08:01 On a vraiment un beau rocher qui est entre le vide et la paroi.
08:19 Il n'y a aucun moyen de passer à gauche.
08:22 Le seul passage, c'est ce petit portail, ici.
08:27 [Musique]
08:30 La pierre est très rugueuse, il y a plein d'aspérités.
08:33 Les animaux sont obligés de frotter les flancs,
08:36 de venir frotter le cou comme ça, ou une partie de l'épaule,
08:42 pour laisser une odeur.
08:46 Là, ici, il y en a un beau.
08:54 Il est long, légèrement orangé.
08:58 C'est très certainement un poêle de lynx.
09:02 C'est magnifique de voir cette pierre froide, recelée autant de signes de vie.
09:16 Il y a de la mousse, on y voit les traces des animaux,
09:19 on y voit plein de secrets que les êtres vivants ont laissés.
09:23 C'est un peu comme un carnet de visite dans des cabanes forestières,
09:26 où on laisse une petite trace de son passage,
09:29 on laisse un petit mot pour les autres.
09:31 Et c'est là toute la force du pistage, c'est de réussir à trouver des indices de présence,
09:36 des indices de passage, de celui qu'on cherche.
09:40 [Musique]
10:05 Là, c'est vraiment excellent.
10:08 On a une trace assez fraîche de lynx.
10:12 En tout cas, ça y ressemble beaucoup.
10:14 La trace, elle se dessine ici.
10:17 Les quatre coussinets, deux, trois, quatre.
10:21 Elle est relativement fraîche.
10:23 Elle n'a pas plus de 48 heures, 72 heures.
10:26 C'est grâce à la pluie, j'arrive à dater un peu cette trace.
10:31 S'il n'y avait plus dessus, on n'arriverait sûrement plus à la discerner.
10:34 Elle serait complètement effacée, à mon avis, même avec un tout petit peu de pluie.
10:37 C'est vraiment excellent.
10:39 Ça confirme la voie que j'ai choisie.
10:43 Donc là, je vais continuer.
10:45 C'est vraiment courageux.
10:47 [Musique]
11:16 [Bruits de pas]
11:31 - Bonjour. - Bonjour.
11:35 Il y a quelque chose d'intéressant sur le piège ?
11:37 Je viens d'arriver, là. Je n'ai pas encore regardé.
11:39 OK. Du coup, là, tu travailles pour ?
11:41 L'Office National des Forêts.
11:43 J'ai une spécialisation sur le lynx et j'ai un certain nombre de pièges photo installés sur mon secteur
11:47 que je relève de temps en temps pour voir s'il y a du passage.
11:49 Moi, je suis aussi là pour ça.
11:51 Du coup, je peux regarder avec toi ?
11:53 [Bruits de pas]
11:58 Il y a pas mal de sangliers qui passent par là.
12:01 - C'est quoi, ça ? - Un chat sauvage.
12:03 Il est passé trop près du piège. Il est un peu surexposé.
12:06 Il a dû se prendre un bon flash dans les yeux.
12:10 - Beau chat sauvage. - Ah ouais, excellent.
12:12 - Encore ? - Le même deux jours.
12:14 Il passe dans l'autre sens.
12:15 Il y a que du petit chat, il n'y a pas le gros.
12:17 Pas de lynx, ce coup-ci. Il était passé le mois dernier.
12:19 OK, ouais. Bon, il y a du passage, par contre.
12:21 Oui, oui. J'ai d'autres pièges à relever, si ça te dit.
12:24 - Avec plaisir, ouais. - Ça marche.
12:26 - Je te laisse passer devant ? - Ouais.
12:28 [Musique]
12:54 On va voir si on a un peu plus de succès sur ce site-là.
12:56 [Bruit de pas]
13:02 - Il y a pas mal de sangliers. - Il est beau, celui-là.
13:06 Le biéreau.
13:08 Encore le même. Ah, Babel a le combat tout !
13:11 Il est beau, celui-là.
13:14 Il est bien costaud.
13:16 Il n'est pas séquent, celui-là. Le 9. Il y a une semaine.
13:22 Rabelotte, le même, un jour avant.
13:26 Ouais, la même position quasiment, c'est fou.
13:28 Et toi, t'en fais quoi de tes photos, du coup ?
13:31 Pas l'objectif, c'est de les identifier, savoir lequel passe par là,
13:36 si c'est un mâle, une femelle.
13:38 Donc j'utilise un logiciel d'identification à partir de la taille et de la disposition des tâches sur le pelage.
13:45 Donc je peux savoir si c'est un individu que j'ai déjà photographié chez moi ou pas.
13:49 Donc on lance l'analyse pour comparer avec toutes les autres photos qui ont déjà été intégrées à la base de données.
13:57 Il a retrouvé. Et quand on compare à l'œil nu, on voit bien que c'est le même.
14:03 Donc voilà, ça nous permet vraiment de savoir quel individu est présent.
14:07 On peut le retrouver quelques années plus tard dans un autre endroit.
14:11 Il y a des individus qui restent pendant pas mal d'années et d'autres qui sont vraiment que de passage.
14:15 Après, c'est normal, le lynx est territorial et il ne va pas accepter qu'un autre individu traîne sur son territoire.
14:22 Donc automatiquement, il faut qu'il aille ailleurs chercher un territoire qui lui est propre.
14:26 Par exemple, un jeune lynx qui avait été identifié sur le département du Doubs
14:30 et qu'on a retrouvé un an plus tard dans le massif de la Chartreuse.
14:33 Donc voilà, c'est vraiment un moyen idéal pour suivre les individus
14:39 et essayer de prouver ces passages d'individus d'un massif à l'autre.
14:44 - Le but, tu l'as déjà vu en vrai ?
14:46 - Celui-là, non. Il y en a très peu.
14:51 Donc c'est vrai que la probabilité de le croiser, elle est minime.
14:54 Je pense qu'il ne m'a plus souvent vu que moi, je ne l'ai vu en forêt.
14:58 Mais voilà, ça reste quelque chose qui me passionne et qui me motive
15:04 de continuer à passer des heures à le suivre dans la neige,
15:08 à installer des pièges photos, à faire des relèves de pièges,
15:11 à faire tourner le logiciel pour savoir quel lynx.
15:15 C'est vrai que c'est un animal, une fois que tu as croisé son gars,
15:19 une fois, tu n'attends qu'une chose, c'est de pouvoir le recroiser.
15:23 ♪ Piano ♪
15:33 ♪ Piano ♪
15:43 ♪ Piano ♪
15:53 ♪ Piano ♪
16:03 ♪ Piano ♪
16:25 Ces moments magiques du crépuscule, je ne pourrai jamais m'en lasser,
16:28 c'est impossible.
16:31 Et de tous les instants que je passe dans la nature,
16:34 c'est sans aucun doute le moment le plus fort et celui qui gère le plus d'émotion en moi.
16:41 Maintenant, en plus, je sais que les animaux qui vivent la journée
16:44 sont en train de se reposer,
16:47 et les animaux nocturnes sont en train de sortir de leur gîte,
16:52 et tout ce monde, en fait, est en train de s'inverser.
16:56 Et pendant un petit laps de temps, on a vraiment ce monde de la nuit
17:00 qui rencontre le monde du jour.
17:03 Là, il y a juste le vent, les cimes, le ciel qui s'assombrit,
17:11 les rochers qui disparaissent.
17:15 C'est des plaisirs extrêmement simples,
17:18 mais qui font clairement partie des plus beaux moments de ma vie.
17:23 [Bruit de feuilles de feuilles de feuilles]
17:32 L'alynx, c'est un animal qui est avant tout solitaire.
17:36 Il dort seul, il marche seul, il chasse seul, il affronte les éléments seul.
17:44 C'est ça qui est intense en imaginant la vie d'un alynx,
17:46 c'est que tout ce qu'il fait, il le doit à lui-même.
17:50 Et quand tout d'un coup, il va trouver son semblable,
17:53 quand il va aller à la rencontre d'un autre individu,
17:56 je pense que l'émotion, l'intensité du moment pour l'alynx doit être très très forte.
18:00 [Bruit de feuilles de feuilles de feuilles]
18:13 Tout commence là, quand il s'appelle Rook, qui déchire la nuit comme ça,
18:19 qui semble très fort parce que justement il n'y a plus un bruit,
18:22 il n'y a plus que ses appels aigus, culturaux,
18:27 on appelle ça le feulement, ses appels d'amour.
18:33 Et c'est vraiment cette période particulière qui est le Root,
18:37 où il va se signaler avant tout aux femelles qui cherchent
18:43 et aussi aux autres mâles qui pourraient être là.
18:48 Ses cris solitaires pendant plusieurs nuits.
18:54 Et tout d'un coup, il va recevoir les appels de la femelle qui est arrivée.
18:59 Et là, je n'ose même pas imaginer la puissance viscérale qui doit l'envahir,
19:04 se dire qu'il va retrouver un congénère et pendant plusieurs nuits,
19:10 ils vont s'unir, ils vont rester ensemble et ils vont donner la vie.
19:14 C'est fantastique.
19:18 [Musique]
19:23 [Musique]
19:27 [Musique]
19:30 [Musique]
19:39 [Musique]
19:52 [Musique]
19:57 [Musique]
20:05 [Musique]
20:12 [Musique]
20:21 [Musique]
20:24 [Bruit de la mer]
20:33 [Bruit de la mer]
20:36 [Bruit de la mer]
20:44 [Bruit de la mer]
20:51 Les grands corbeaux, c'est les sentinelles absolues des crées duraciennes.
20:57 Ils connaissent leur territoire sur le bout des plumes.
21:02 [Bruit de la mer]
21:05 Il est inspirant, il est intelligent.
21:09 Et lui, quand on le voit s'amuser dans le vent, dans la tempête,
21:14 on a l'impression qu'il n'y a rien qui peut l'atteindre.
21:17 Il est au-dessus de tout.
21:20 [Musique]
21:23 Ils sont au courant de tout ce qui se passe.
21:28 Ça vaut vraiment la peine de les écouter.
21:30 Parce qu'à qui sait entendre et un petit peu interpréter leur dialecte,
21:36 ça peut nous apprendre beaucoup de choses.
21:39 [Bruit de la mer]
21:42 Ils signalent tout. Ils signalent le passage du renard, du lynx.
21:56 Et ils sont toujours en train d'être à l'affût de moindre chose qui sort de l'ordinaire.
22:02 Ça m'est arrivé plusieurs fois de pouvoir localiser aux jumelles des animaux
22:07 en écoutant et en interprétant correctement le cri d'alarme des corbeaux.
22:14 Un de mes rêves, ça aurait été d'avoir un corbeau pour être mes yeux dans le ciel
22:20 et trouver ce que je cherche.
22:24 Parce que lui, il sait toujours où est le lynx.
22:26 En tout cas, quand il passe, à lui, il ne lui échappe pas.
22:30 [Bruit de la mer]
22:38 [Bruit de la mer]
23:06 Je me souviens vraiment de pouvoir, avec les traces, avec ce qui a été écrit dans la neige,
23:12 de pouvoir retranscrire, de pouvoir comprendre le récit de ce qui s'est passé.
23:19 C'est plus une partition, en fait.
23:22 On se met sur la piste et on commence à comprendre de plus en plus.
23:26 C'est peut-être la plus vieille façon d'écrire une histoire sur quelque chose.
23:31 Le plus vieux support de récits qui existe.
23:34 [Musique]
23:37 Il vient de passer juste là.
23:59 [Bruit de pas]
24:02 [Bruit de pas]
24:06 [Bruit de pas]
24:33 [Soupir]
24:36 Les traces m'ont amené ici, dans cette zone tranquille, dans les rochers.
25:00 On a vraiment une belle couche où le lynx s'est couché, il n'y a pas très longtemps.
25:05 Son pelage est resté contre la neige, ça a fait fondre la neige.
25:10 Et quand il s'est relevé pour partir, comme il fait bien froid là,
25:13 ça a gelé et ça a fait une légère croûte de glace sur la mousse.
25:17 Ces endroits, c'est vraiment des endroits qui doivent être tranquilles.
25:21 Ce que le lynx aime dans un endroit comme celui-là, c'est qu'il domine, il voit bien ce qui se passe.
25:27 Il est complètement maître de son environnement, maître de ses mouvements.
25:31 Et ça, le lynx, pour lui, c'est très important.
25:33 Il déteste se sentir entravé, se sentir enclavé dans quelque chose.
25:37 Plus je piste le lynx, plus je me rends compte qu'il a besoin de cette liberté de mouvement,
25:42 de ne jamais être acculé.
25:44 Et ce côté solitaire qui renforce tout ça, pour moi, le lynx, c'est la liberté à l'état pur.
25:50 Et ça, c'est trop beau.
25:52 [Musique]
26:11 Plus je vais dans la nature, plus je me laisse parler de cette liberté.
26:14 Et plus, quand je rentre dans le monde normal, j'ai de la peine à être contraint.
26:21 Quand je vois le lynx, quand je vois les animaux sauvages, pas que le lynx, n'importe lesquels,
26:25 il y a un sentiment de liberté.
26:28 Et je pense que c'est le plus fabuleux dans la faune sauvage, dans la vie sauvage,
26:33 c'est de les voir évoluer comme ça.
26:35 [Musique]
27:04 [Bruit de pas]
27:13 Le pouvoir du désir de vivre est tel qu'on surmonte des épreuves énormes.
27:18 [Bruit de pas]
27:25 Donc cette dispersion, c'est une épreuve qui est effroyable.
27:29 [Bruit de pas]
27:57 Ces abris sont tellement importants quand on transite comme ça dans les forêts.
28:01 Ils sont là pour les gens qui sont perdus ou qui marchent longtemps.
28:06 Ce sentiment de sécurité, à l'abri vraiment des intempéries, à l'abri du vent,
28:11 à l'abri de la pluie, de la neige.
28:13 [Bruit de pas]
28:21 Et j'aime m'imaginer que pendant que je vais dormir, d'un coup,
28:24 il y aura peut-être un lynx qui passera peut-être pas loin,
28:28 qui va sentir l'odeur de mon feu.
28:30 Il ne sera pas perturbé parce qu'il sait que de toute façon la nuit le dissimule,
28:34 elle le fait disparaître.
28:36 [Bruit de pas]
29:02 [Bruit de pas]
29:14 [Bruit de pas]
29:26 [Bruit de pas]
29:49 [Bruit de pas]
29:56 Quand on arrive dans le budget, on se rend quand même compte
29:59 qu'il y a beaucoup de petites zones agricoles,
30:01 que le paysage est quand même bien morcelé d'habitations,
30:04 de petits villages, de petits hameaux.
30:06 Quand on arrive ici, on se rend compte qu'il y aura forcément des enjeux
30:11 au niveau de la cohabitation entre les prédateurs et les gens,
30:14 et que le lynx ici aura quand même plus de peine à trouver des endroits calmes
30:18 pour chasser sans interférer avec le monde des hommes.
30:21 [Musique]
30:34 [Bruit de pas]
30:53 - Bonjour ! - Salut !
30:55 - Bonjour ! - Comment ça va ?
30:57 - Ça m'appelle Laïka, elle est sympa. - Laïka ? Salut Laïka !
31:00 Ouais, tu es belle !
31:02 - Vous faites quoi en fait là du coup ? - On est en train de poser des filets de protection
31:06 pour qu'ils puissent sortir après ces brebis,
31:10 de manière qu'elles soient protégées pendant la nuit avec les filets et le chien.
31:14 Parce qu'ici, on est vraiment sur le territoire du lynx.
31:16 On a des lynx qui arrivent du Doubs, du Jura, qui passent par chez nous,
31:21 et qui est la porte de la dispersion, direction la Chartreuse,
31:25 et donc nos éleveurs vivent en plein milieu de ces territoires.
31:29 - Toi le lynx, tu l'as déjà vu en fait ? - Moi je l'ai déjà vu, ouais.
31:32 Quand il y a eu la première attaque, c'est vrai que le lynx, on avait clairement envie de le voir disparaître.
31:36 Et puis le lendemain, quand je suis repassé, je l'ai trouvé sur la carcasse.
31:40 Là je l'ai pris en photo. Enfin là j'ai trouvé que c'était quand même quelque chose de magnifique.
31:44 Après maintenant, grâce aux chiens, grâce aux filets, on arrive à trouver un certain équilibre.
31:50 C'est comme si on avait fait un pacte.
31:53 Tu ne viens pas manger mes animaux, et moi je te laisse vivre de l'autre côté.
32:00 Et cet équilibre, ce pacte, il est important que tout le monde le respecte.
32:04 Pour que l'éleveur puisse continuer à travailler, mais que le lynx puisse continuer à vivre en toute tranquillité.
32:10 [Musique]
32:28 [Léonard crie]
32:53 Quand on s'est installés, on a eu l'impression que c'était chez nous.
32:58 Et qu'en gros, il n'y avait de la place que pour nous.
33:02 Nous on devait élever des brebis, et que derrière, la moindre prédation, elle était insupportable.
33:08 Parce que c'est notre territoire et c'est chez nous.
33:11 En 2016, on a eu des attaques, et du coup derrière, on a tout changé.
33:17 Et en changeant nos méthodes, on a changé de regard derrière.
33:20 Parce que d'un coup, on s'est rendu compte que la nature n'était pas là juste pour nous embêter.
33:26 Le lynx, je ne le considère plus comme une menace.
33:29 Ça nous a fait peur, très peur.
33:31 Mais du moment où on apprend à connaître avec qui on vit, du coup la cohabitation est un peu plus simple.
33:39 Donc du coup, c'est une relation qui va être sereine.
33:43 On sait que ça va bien se passer.
33:46 Je ne sais pas pourquoi, je le ressens, je le sens.
33:48 Ça va bien se passer, en fait.
33:50 Léa et Raphaël sont arrivés là-bas, ils ont perdu des bêtes.
34:00 Ça les a profondément mis en colère.
34:03 Ils ont eu de la haine, ils ont eu des ressentiments sur le lynx, sur la nature qui les environnait.
34:07 Ils ont réussi à changer cette façon de penser, et aller de l'avant.
34:11 A transformer cette haine en chance de pouvoir cohabiter avec l'environnement qui est autour de leur ferme.
34:17 C'est beaucoup plus facile d'éliminer quelque chose qui nous gêne, que de prendre du temps pour apprendre à cohabiter avec.
34:23 De la lisière de la forêt, jusqu'au mur intérieur de la bergerie,
34:31 des chiens qui dorment avec les brebis,
34:33 le bruit, les discours, l'interaction d'un couple qui est très lié.
34:37 Je trouve tout extrêmement touchant, extrêmement beau, en harmonie avec ce que j'ai envie de croire.
34:42 [Musique]
34:46 [Musique]
34:50 [Musique]
34:54 [Musique]
34:57 [Musique]
35:03 [Musique]
35:09 [Musique]
35:15 [Musique]
35:22 [Musique]
35:25 [Musique]
35:31 [Musique]
35:37 Là, ce matin, je peux enfin contempler le paysage de la Chartreuse.
35:46 Avec toutes ces montagnes, toutes ces versants assez abrupts qui se dressent autour de moi.
35:53 Et j'imagine le lynx un peu partout.
35:56 C'est assez difficile de planifier les recherches, car je connais assez mal ce genre de terrain.
36:12 Je ne me rends pas compte si sur les plateaux, sur le haut de ces crêtes,
36:17 si c'est des endroits qui sont riche en gibier, s'il y a des abris,
36:22 à quel point c'est fréquenté par les hommes,
36:25 est-ce qu'il y a des accès faciles, des accès qui sont trop difficiles pour le lynx.
36:29 Je vais essayer de me rendre à l'extrémité maintenant de ce massif,
36:35 et voir là où se trouve le bout du monde, le bout du monde pour le lynx.
36:40 Là, ça c'est intéressant ici.
36:43 C'est pas très haut en plus.
36:47 Du coup, si c'est ici, si c'est pas très haut,
36:53 il y a aussi du gibier qui va être là forcément.
36:56 Là, il y a vraiment une très très longue barre rocheuse.
37:00 Un lieu très escarpé, très long.
37:02 S'il y a du lynx dans le coin là, c'est quasiment fait pour le lynx.
37:07 S'il y a du lynx dans le coin là, c'est quasiment forcé que je trouve,
37:11 peut-être pas des traces mais au moins un indice de présence.
37:15 Ouais, je vais faire ça.
37:18 Allez, c'est parti.
37:30 [Musique]
37:34 [Musique]
37:37 [Musique]
37:40 [Musique]
37:44 [Musique]
37:48 [Musique]
37:52 [Musique]
37:56 [Musique]
38:00 [Musique]
38:05 [Musique]
38:08 [Musique]
38:12 [Musique]
38:16 [Musique]
38:20 [Musique]
38:24 [Musique]
38:28 [Musique]
38:33 [Musique]
38:36 [Musique]
38:40 [Musique]
38:44 [Musique]
38:48 [Musique]
38:52 [Musique]
38:56 [Musique]
39:01 [Musique]
39:04 [Musique]
39:08 [Musique]
39:12 [Musique]
39:16 [Musique]
39:20 [Musique]
39:24 [Musique]
39:29 [Musique]
39:32 [Musique]
39:36 [Musique]
39:40 [Musique]
39:44 [Musique]
39:48 [Musique]
39:52 [Musique]
39:57 [Musique]
40:00 [Musique]
40:04 [Musique]
40:08 [Musique]
40:12 [Musique]
40:16 [Musique]
40:20 [Musique]
40:25 [Musique]
40:28 [Musique]
40:32 [Musique]
40:36 [Musique]
40:40 [Musique]
40:44 [Musique]
40:48 [Musique]
40:53 [Musique]
40:56 [Musique]
41:00 [Musique]
41:04 [Musique]
41:08 [Musique]
41:12 [Musique]
41:16 [Musique]
41:21 [Musique]
41:24 [Musique]
41:28 [Musique]
41:32 [Musique]
41:36 [Musique]
41:40 [Musique]
41:44 [Musique]
41:49 [Musique]
41:52 [Musique]
41:56 [Musique]
42:00 [Musique]
42:04 [Musique]
42:08 [Musique]
42:12 [Musique]
42:17 [Musique]
42:20 [Musique]
42:24 [Musique]
42:28 [Musique]
42:32 [Musique]
42:36 [Musique]
42:40 [Musique]
42:45 [Musique]
42:48 [Musique]
42:52 [Musique]
42:56 [Musique]
43:00 [Musique]
43:04 [Musique]
43:08 [Musique]
43:13 [Musique]
43:16 [Musique]
43:20 [Musique]
43:24 [Musique]
43:28 [Musique]
43:32 [Musique]
43:36 [Musique]
43:41 [Musique]
43:44 [Musique]
43:48 [Musique]
43:52 [Musique]
43:56 [Musique]
44:00 [Musique]
44:04 [Musique]
44:09 [Musique]
44:12 [Musique]
44:16 [Musique]
44:20 [Musique]
44:24 [Musique]
44:28 [Musique]
44:32 [Musique]
44:37 [Musique]
44:40 [Musique]
44:44 [Musique]
44:48 [Musique]
44:52 [Musique]
44:56 [Musique]
45:00 [Musique]
45:05 [Musique]
45:08 [Musique]
45:12 [Musique]
45:16 [Musique]
45:20 [Musique]
45:24 [Musique]
45:28 [Musique]
45:33 [Musique]
45:36 [Musique]
45:40 [Musique]
45:44 [Musique]
45:48 [Musique]
45:52 [Musique]
45:56 [Musique]
46:01 [Musique]
46:04 [Musique]
46:08 [Musique]
46:12 [Musique]
46:16 [Musique]
46:20 [Musique]
46:24 [Musique]
46:29 [Musique]
46:32 [Musique]
46:36 [Musique]
46:40 [Musique]
46:44 [Musique]
46:48 [Musique]
46:52 [Musique]
46:57 [Musique]
47:00 [Musique]
47:04 [Musique]
47:08 [Musique]
47:12 [Musique]
47:16 [Musique]
47:20 [Musique]
47:25 [Musique]
47:28 [Musique]
47:32 [Musique]
47:36 [Musique]
47:40 [Musique]
47:44 [Musique]
47:48 [Musique]
47:53 [Musique]
47:56 [Musique]
48:00 [Musique]
48:04 [Musique]
48:08 [Musique]
48:12 [Musique]
48:16 [Musique]
48:21 [Musique]
48:24 [Musique]
48:28 [Musique]
48:32 [Musique]
48:36 [Musique]
48:40 [Musique]
48:44 [Musique]
48:49 [Musique]
48:52 [Musique]
48:56 [Musique]
49:00 [Musique]
49:04 [Musique]
49:08 [Musique]
49:12 [Musique]
49:17 [Musique]
49:20 [Musique]
49:24 [Musique]
49:28 [Musique]
49:32 [Musique]
49:36 [Musique]
49:40 [Musique]
49:45 [Musique]
49:48 [Musique]
49:52 [Musique]
49:56 [Musique]
50:00 [Musique]
50:04 [Musique]
50:08 [Musique]
50:13 [Musique]
50:16 [Musique]
50:20 [Musique]
50:24 [Musique]
50:28 [Musique]
50:32 [Musique]
50:36 [Musique]
50:41 [Musique]
50:44 [Musique]
50:48 [Musique]
50:52 [Musique]
50:56 [Musique]
51:00 [Musique]
51:04 [Musique]
51:09 [Musique]
51:12 [Musique]
51:16 [Musique]
51:20 [Musique]
51:24 [Musique]
51:28 [Musique]
51:32 [Musique]
51:37 [Musique]
51:40 [Musique]
51:44 [Musique]
51:48 [Musique]
51:52 [Musique]
51:56 [Musique]
52:00 [Musique]
52:05 [Musique]
52:08 [Musique]
52:11 [Musique]
52:14 [Musique]
52:18 [Musique]
52:22 [Musique]
52:26 [Musique]

Recommandations