• il y a 7 mois

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Amusant
Transcription
00:00 Bonjour Nora Hamzaoui.
00:01 Bonjour.
00:02 Vous êtes actuellement sur scène avec votre nouveau spectacle, donc jusqu'au 8 juin prochain
00:06 au Théâtre de l'Atelier, puis après en tournée dans toute la France.
00:08 Vous démarrez ce spectacle en assumant de l'avoir construit sur un thème qui s'appelle
00:11 "Vous".
00:12 Vous dites "Adorer parler de vous".
00:14 Ça tombe bien, le monde des Lodi est avant tout un portrait justement.
00:18 Vous êtes humoriste, comédienne, chroniqueuse.
00:20 C'est votre participation au festival "Juste pour rire" de Nantes qui vous a révélé
00:23 au public.
00:24 Au même moment, vous étiez auteur pour la série "Scène de ménage" sur MCI.
00:27 En suivant l'émission "On ne demande qu'à en rire" sur France 2.
00:31 Dans le spectacle, vous dites "C'est confortable de parler de soi" parce que ça permet de
00:36 maîtriser le sujet, à contrario de l'actualité.
00:38 Est-ce que c'est si confortable finalement Nora ? Très sérieusement.
00:41 C'est confortable quand on a un double et une scène et qu'on maîtrise les choses
00:46 et qu'on peut rentrer, sortir.
00:50 Je trouve que dans l'intimité, ça permet de sortir de l'actualité, de la théorie,
00:56 de la société pour se ramener à soi et aux autres, un rapport plus intime.
01:02 Vous dites d'ailleurs, vous assumez, vous dites "moi, a priori, je ne suis pas assez
01:06 virulente, je n'ai pas assez d'avis".
01:09 Est-ce que ce sont deux raisons pour lesquelles vous n'abordez pas l'actualité ?
01:14 Non.
01:15 En fait, le truc, c'est que j'ai le sentiment de l'aborder un peu l'actualité, mais pas
01:18 de manière, en effet, de pas de manière frontale.
01:21 Et ce qui m'intéressait, c'est sûr que ce que je dis quand je dis "je ne suis pas assez
01:25 virulente, je n'ai pas de personnalité", c'est que je m'aperçois que, à mon avis,
01:30 ce que je dis dans le spectacle change selon la personne à qui je m'adresse et que globalement,
01:34 ça peut être l'esprit de contradiction, mais que globalement, quand je suis face à
01:38 quelqu'un qui affirme quelque chose, moi, j'affirme assez peu, je crois.
01:41 Et puis, ce qui m'intéressait et ce qui me semblait drôle, je me disais "comment on
01:44 peut rire encore, en gros, ou comment on peut trouver un ressort comique dans tout ça ?" C'est
01:49 de me dire comment l'actualité vient toucher notre quotidien et notre intime et notre libido
01:55 et notre façon d'être, parce qu'en fait, au-delà de parler de l'actualité ou de la
01:58 décrypter, ça vient forcément jouer sur nos comportements.
02:03 Au départ, vous étiez tournée vers le droit, bon, ça a duré trois semaines.
02:06 Ensuite, vous avez décidé de faire un IUT Infocom.
02:10 Et puis, les cours Florents sont arrivés.
02:12 Est-ce que ça a été une évidence pour vous, Nora ? Il y a eu cette meilleure amie aussi,
02:16 qui croyait plus en vous que vous-même au moment où vous travaillez au Galerie Lafayette.
02:20 Les cours de théâtre, ça n'a pas été une évidence parce qu'en fait, j'y suis
02:22 arrivée, je me suis amusée, mais une fois de plus, je pense que j'étais à un âge
02:25 où je me comparais beaucoup à la norme et cet espèce de truc de vouloir bouffer théâtre,
02:28 rêver théâtre, je ne sais pas quoi.
02:30 Moi, je me disais "ouais, j'aimais jouer, j'aimais m'amuser, mais je n'étais pas sûre
02:35 de vouloir être dans un métier de dépendance, en fait, d'être dépendant du regard des
02:40 autres, du désir des autres, quelque chose que je trouvais très, en tout cas à l'époque,
02:43 je trouvais très infantilisant et compliqué, donc ce n'était pas complètement mon endroit.
02:46 Et c'est vrai que ma bien-ramie, quand elle me dit "au lieu d'attendre et de courir
02:50 des castings, écris et fais ton propre truc", là, j'y vois une zone de liberté et un
02:55 truc où je vais dépendre de personne et où c'est moi qui décide.
02:57 Et là, ça commence à être joyeux, mais fragile aussi, parce que je suis obsédée
03:05 à l'idée de ce qui est normal, de pouvoir quitter, j'allais dire le nid familial,
03:12 mais juste la famille et de pouvoir avoir un loyer et d'avoir les moyens de le payer.
03:16 Et donc, du coup, il faut bosser.
03:17 Et voilà, moi, ma mère m'avait dit très jeune "si tu as envie d'être comédienne,
03:21 tu seras comédienne, mais moi, je ne peux pas t'aider.
03:24 Donc, tant que tu ne seras pas indépendante, tu vivras à la maison".
03:27 Finalement, vous avez cette force, Nora Hamzaoui, de transformer du négatif en positif.
03:32 C'est exactement ce qui va se passer avec Jean-Benigny quand il y a effectivement ce
03:34 passage dans l'émission où il va vous dire, où il va dire clairement "elle ne sait
03:38 pas jouer, elle ne sait même pas porter une robe".
03:40 J'avais un peu à cette époque-là une espèce de volonté molle, de pensée magique.
03:43 J'espérais encore être repérée par quelqu'un.
03:45 J'étais un peu fascinée par cette idée de Pygmalion, de je ne sais pas quoi.
03:48 Donc, tout à coup, Jean-Benigny m'a dit en gros que j'étais une merde, parce que
03:53 c'est un peu ça.
03:54 Par ailleurs, il s'est excusé.
03:56 On s'est croisé dans une gare des années après.
03:57 Mais je pense qu'en fait, je me suis effondrée.
04:01 J'ai beaucoup pleuré.
04:02 J'ai beaucoup pleuré chez moi.
04:05 D'ailleurs, c'est marrant.
04:06 Le truc qui m'a le plus, je pense, consolé à l'époque, c'est que ça amusait mes amis.
04:09 Enfin, c'est-à-dire qu'il me consolait, mais il me disait "mais c'est délirant,
04:11 tu ne peux pas pleurer pour ce type qui vient de t'insulter à télé.
04:16 C'est tellement grotesque, tu ne peux pas te remettre en question pour ça".
04:18 Mais je pense que ce qui m'a fait pleurer, c'est de me dire, c'est pas d'avoir été
04:23 insultée, c'est d'avoir essayé de leur plaire et de me faire insulter.
04:25 Quand le film de Jacques Doyon devait sortir, vous aviez quand même l'un des rôles principaux
04:30 à l'intérieur.
04:31 Vous vous êtes opposée aussi à la sortie du film en disant que c'était finalement
04:34 un mépris, du mépris qui était envoyé face à la parole des femmes.
04:40 C'est important pour vous d'être là, à cet endroit-là, Nora, de dire les choses
04:45 par rapport au combat ?
04:46 - Oui, c'est hyper important et c'est hyper important de l'être quand on a la chance
04:54 et l'opportunité de pouvoir l'exprimer.
04:56 C'est-à-dire que de toute façon, je pense qu'à un moment, si je ne m'étais pas exprimée
04:59 sur ce sujet-là, je me serais sentie mal une fois de plus parce qu'il faut dire les
05:04 choses telles qu'on les ressent.
05:06 Et que mon sentiment, c'est aussi que la parole des femmes a tout le temps tendance
05:13 à être minimisée ou expliquée.
05:17 Il y a toujours un mais.
05:20 J'avais le sentiment que si moi, je ne me servais que de ma propre expérience sur le
05:24 film de Jacques Doyon en disant "Ah bon, mais moi, tout s'est bien passé, donc hop,
05:31 je me cache, tout va bien, ça ne me regarde pas".
05:35 C'est hyper lâche.

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