• il y a 7 mois
C'est un grand magistrat qui prend la parole pour alerter l'opinion et l'état sur la menace du narcotrafic, sur son extrême violence aussi. L'attaque du fourgon dans l'Eure mardi 14 mars en est malheureusement l'illustration. Écoutez l'interview de Marc Cimamonti, Procureur général de Versailles.
Regardez L'invité de RTL Soir avec Julien Sellier du 15 mai 2024

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00:00 RTL bonsoir, Isabelle Choquet et Cyprien Signe.
00:04 Allez RTL bonsoir, nous accueillons maintenant notre invité face à l'événement, c'est un grand magistrat qui prend la parole pour
00:11 alerter l'opinion, l'état sur la menace du narcotrafic, sur son extrême violence aussi, l'attaque du fourgon dans l'heure, hier on est malheureusement à l'illustration.
00:19 Bonsoir Maxime Amonti. Bonsoir. Vous êtes procureur général à Versailles.
00:23 On sent dans le débat public une forme de sidération 24 heures après ce drame, cette attaque sanglante en plein jour, ces tirs à bout portant quasiment.
00:33 Vous cette violence, est-ce qu'elle vous a surpris hier ?
00:37 Elle m'a surpris dans son degré d'intensité qui atteint une extrémité véritablement sans précédent.
00:44 Parce que j'ai pas de souvenir moi d'une attaque d'un fourgon pénitentiaire.
00:48 Mais elle m'a pas surpris si vous voulez dans la dimension d'extrémité de violence qui est la tendance effectivement, qui est une des tendances du narcotrafic.
00:56 Parce que la réalité c'est celle d'homicide, lié au narcotrafic que connaissent certains lieux, Marseille, Nîmes, Perpignan, le Cazéchent de manière non inconnue.
01:06 Mais c'est aussi une violence beaucoup plus basse, quotidienne, en tout cas régulière, qui est faite de jambisations, c'est-à-dire de tirs dans les jambes,
01:14 qui est faite d'enlèvements séquestrations, qui est faite de menaces à l'égard de tenants du trafic, de leur famille.
01:22 Et ça c'est une réalité dans les quatre départements par exemple qui relève de mon autorité.
01:26 On a le sentiment aujourd'hui que le narcotrafic est vraiment ultra organisé avec des effectifs, de l'import-export, des centrales d'achat, du marketing.
01:33 On a affaire à des multinationales du crime ?
01:36 Je sais pas si on peut parler de multinationales du crime. Moi je préférerais si vous voulez l'expression d'un phénomène criminel de société.
01:42 On a des dimensions si vous voulez, qui est celle qu'on a vu hier avec la violence extrême contre le pouvoir, contre le fourgon pénitentiaire,
01:50 qu'on a aussi à travers des phénomènes de corruption, qui sont des phénomènes qui se banalisent aujourd'hui,
01:56 qui n'ont pas une ampleur considérable mais qui se multiplient.
02:00 Et on a une mutation du trafic dans le sens où on a de multiples produits qui sont de plus en plus concentrés.
02:09 On a une mutation des modes d'importation, trafic maritime, trafic aérien avec les mules de Guyane par exemple, mais toujours trafic routier.
02:16 Et on a une mutation aussi dans les modes de distribution, puisque par exemple au-delà des points de deal,
02:20 on a aujourd'hui de plus en plus des modes de distribution par des centrales d'achat qui utilisent des messageries comme Snapchat
02:28 et qui font du marketing attractif, à travers des packagings attractifs, qui recrutent des livreurs,
02:34 qui sont parfois des personnes totalement insérées qui veulent arrondir leur fond de mois.
02:39 Donc on a un phénomène, si vous voulez, de société multidimensionnelle.
02:45 Vous parlez de phénomène de société. Est-ce que le gouvernement aujourd'hui a pris la mesure de ce phénomène et de ses dangers ?
02:51 Le rapport de la commission d'enquête du Sénat hier évoquait un plan stup indigent et familique, pas la hauteur en tout cas.
02:58 En tout cas, si vous voulez, je pense qu'il y a une prise de conscience.
03:01 Et de ce point de vue-là, le rapport de cette commission sénatoriale est tout à fait important.
03:06 Je pense qu'il y a une prise de conscience parce que j'ai entendu par exemple le ministre de l'Intérieur intervenir devant cette commission
03:13 et dire que c'était le danger numéro un.
03:16 Après, il y a un consensus, me semble-t-il, désormais sur le constat du phénomène criminel de société.
03:23 Maintenant, il faut passer à un autre stade qui est le stade de la réaction et qui jusqu'à présent, si vous voulez,
03:29 n'est pas à la mesure de la mutation de ce phénomène criminel de société.
03:34 Vous vous dites qu'il faut faire comme en Italie où il y a un parquet antimafia, il faut en quelque sorte une super structure judiciaire spécialisée, c'est ça ?
03:41 Oui, je pense que si vous voulez, il faut au-delà sans doute d'une juridiction nationale spécialisée,
03:46 il faut en tout état de cause un procureur général national.
03:50 Les modèles qui sont ceux, par exemple, le garde des Sceaux a posé à juste titre la question en ces termes de mutation de l'organisation judiciaire.
03:58 Mais il faut bien voir que nous sommes sur un phénomène qui va au-delà même du terrorisme,
04:04 qui va au-delà même de la matière financière qui a donné lieu à la constitution d'un parquet national.
04:10 Il faut mettre en place une coordination judiciaire des différents niveaux judiciaires depuis le tribunal, par exemple, du Havre,
04:21 sur le port du Havre, dont on sait qu'il y a des trafics par container avec de la corruption, le cas échéant de Dockers.
04:27 Il faut articuler ce niveau du Havre avec le niveau de la juridiction spécialisée de Lille ou de la Junalco
04:33 pour traiter ce phénomène criminel, ces phénomènes criminels de manière spécifique.
04:38 Et ça, il n'y a qu'une structure nationale dédiée, un ministère public, un procureur général qui peut piloter cette coordination
04:46 qui est aussi nécessairement une coordination de la police judiciaire et des services enquêteurs.
04:52 Les sénateurs, dans leurs rapports, ils pointent aussi une corruption grandissante liée au narcotrafic
04:57 et notamment dans la justice, parfois dans la police.
05:00 Est-ce que, à Versailles, vous avez été confronté à de telles affaires ? Est-ce que c'est une réalité aujourd'hui ?
05:04 Oui, c'est aujourd'hui une réalité. Je ne vais pas vous dire que ça concerne des centaines de procédures.
05:10 Mais moi, dans les deux dernières années, j'ai vu des affaires de corruption,
05:15 ou en tout cas de communication d'informations confidentielles d'agents de greffe vers des personnes qui sont inscrites dans le trafic de stupéfiants.
05:25 Je vois, parce que les services de police de Mont-Rossor m'en ont saisi,
05:29 des affaires qui mettent en cause des fonctionnaires de police de manière ponctuelle, des communications d'informations,
05:35 voire de manière très systématique, où on peut avoir même des fonctionnaires de police qui, le cas échéant, proposent des services sur l'arc web.
05:43 Il y a un véritable sujet, il y a une corruption qui se banalise,
05:48 et qui ne concerne pas seulement des dockers, comme je l'ai cité tout à l'heure du port du Havre,
05:53 mais qui concerne ceux qui sont directement proches du traitement des procédures.
05:59 Et ça concerne aussi, le cas échéant éventuellement, des agents de greffe pénitentiaire, par exemple.
06:05 Mais ça arrive souvent, des affaires comme ça ?
06:07 Ça arrive, si vous voulez. Moi, j'ai trois affaires en cours qui mettent en cause des agents de greffe, à ma connaissance, dans Mont-Rossor.
06:15 Il y a plusieurs affaires de la même façon qui concernent des fonctionnaires de police.
06:18 Surtout, de mon point de vue, c'est une nouveauté.
06:21 Parce que ça, c'est quelque chose, si vous voulez, qui n'existait pas, et qui désormais affleure à la vie judiciaire.
06:28 Maxime Amonti, on a aussi été marqué ce matin par les propos du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin. C'était sur RTL, écoutez-le.
06:35 On ne peut pas à la fois pleurer les veuves et les orphelins sur le péage de leurs, et continuer à fumer son joint.
06:41 Ce n'est pas possible. Ça s'appelle la schizophrénie, et chacun est responsable.
06:45 Il a raison de pointer les consommateurs comme ça ?
06:47 Ou alors, avec 5 millions de fumeurs de cannabis estimés dans notre pays, c'est déjà peine perdue, en fait.
06:51 Et si vous voulez, si on a un phénomène criminel de société, on a une offre.
06:58 Des agents économiques illicites, que sont les tenants du trafic de stupéfiants.
07:01 Mais on a aussi la demande. Et il y a effectivement une demande.
07:06 Et on ne peut pas, aujourd'hui, traiter le trafic de stupéfiants sans se préoccuper de l'usage.
07:12 Je pense qu'il y a effectivement la nécessité d'une réflexion, qui est à plusieurs niveaux.
07:17 Je pense qu'il faut, par exemple, systématiser le paiement immédiat d'amende par les gens qui commettent des délits d'usage de stupéfiants.
07:27 Il faut aussi bien voir que lutter contre le trafic de stupéfiants,
07:31 et c'est pour ça que la notion de plan Marshall qui a pu être évoquée devant la Commission est importante,
07:36 ça ne concerne pas que les services régaliens.
07:38 Ça doit concerner aussi les autres secteurs de la société.
07:42 Et de ce point de vue-là, il y a sans doute, c'est d'ailleurs pointé par le rapport de la Commission du Sénat,
07:46 la nécessité, si vous voulez, d'une prévention beaucoup plus active sur les dangers de l'usage des stupéfiants,
07:53 tant du point de vue de la santé physique que de la santé psychique.
07:56 Et les opérations PlaceNet qui ont été lancées ces dernières semaines pour harceler les points de deal, la grosse renfort de police, ça sert à quelque chose ?
08:03 Écoutez, je ne vais pas vous dire qu'elles ne servent à rien.
08:05 Mais ceci dit, ce n'est qu'une partie du sujet et elles ne sont pas la réponse à tout.
08:11 Il faut bien voir qu'il y a de telles sommes en jeu sur ces points de deal que très vite,
08:16 dès que l'opération a été réalisée, les réseaux se restructurent pour que, évidemment, la vente continue.
08:23 Et vous avez par exemple des messageries qui sont utilisées, des centrales d'achat, pour dire le trafic continue.
08:30 Donc si vous voulez, si on veut attaquer le phénomène dans toutes ses dimensions,
08:35 vous ne pouvez pas seulement vous attaquer aux points de deal,
08:37 puisque aujourd'hui, une des formes de distribution, c'est aussi des centrales d'achat par messagerie.
08:42 Merci beaucoup, Maxime Amonti, procureur général à Versailles.
08:46 Merci d'avoir été ce soir dans ce contexte si particulier, notre invité, face à l'événement dans RTL. Bonsoir.
08:52 Merci beaucoup.
08:53 Et la suite, là dans l'immédiat de l'émission, c'est votre RTL Inside.
09:02 RTL avec les troupes de l'OTAN en exercice à la frontière russe.
09:05 Et puis plus léger la visioconférence arrive le programme Alex.
09:08 Alex, Alex ?
09:11 Ah ben on va parler de Taylor Swift. Vous connaissez ?
09:14 Ah oui, un petit peu.
09:15 J'ai entendu parler, oui.
09:17 A tout de suite.
09:18 RTL

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