• il y a 8 mois
Ces dernières semaines, plusieurs jeunes ont été victimes d’agressions violentes en France. Les auteurs sont généralement des mineurs. Le pédopsychiatre Christian Flavigny réagit à cette montée de l’ultra violence et estime «il n’y a plus que la parole de l’enfant qui compte» aujourd’hui.

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Transcription
00:00 Bonjour, je voudrais, si vous voulez bien, parce que j'apprécie beaucoup les réflexions,
00:07 les remarques sur les jeunes d'aujourd'hui, mais je voudrais proposer de prendre un peu
00:09 de recul sur ce qui se passe.
00:11 Et vous êtes là pour ça ?
00:12 Oui, cela fait des années que l'on plaide la libération de l'enfant.
00:18 Bon, la libération de l'enfant, c'est très bien parce qu'on voulait se débarrasser
00:23 d'images, vous savez, du passé, où l'enfant n'avait pas la parole, où on ne l'écoutait
00:28 pas, où il y avait même peut-être des pratiques humiliantes à son égard, on voulait se débarrasser
00:33 de cela.
00:34 Et d'une certaine manière, c'était très important.
00:37 Sauf que, comme souvent, on a tendance à passer d'un extrême dans un autre.
00:42 C'est-à-dire que maintenant, il n'y a plus que la parole de l'enfant qui compte,
00:46 les paroles doivent l'écouter, doivent plus ou moins se plier, on les prie d'accompagner.
00:51 C'est-à-dire que d'une certaine verticalité que l'on a voulu dénoncer, entre les générations,
00:57 on est passé à une sorte d'horizontalité des générations.
01:03 C'est-à-dire que l'enfant est comme un petit adulte, finalement, en médiature, on
01:06 le traite comme cela, à la raison de le respecter.
01:09 C'est oublier qu'il est un enfant et qu'il a besoin de repères, il a besoin de protection.
01:16 Et ceci, c'est le rôle des parents que l'on a tendance à disqualifier aujourd'hui,
01:22 c'est-à-dire à craindre comme si l'on craignait qu'ils empêchent l'épanouissement
01:28 de l'enfant du fait de mesures limitatives, du fait qu'ils donneraient à l'enfant
01:34 des limites.
01:35 C'est cela qui est le cœur du sujet, qui entrave l'exercice de l'autorité, c'est-à-dire
01:44 que cette autorité parentale qui est le fondement pour l'enfant, du principe même de l'autorité,
01:51 est actuellement bridée.
01:52 Parce que l'obéissance de l'enfant, comment vient-elle ? Elle vient par le fait que l'enfant
01:57 a confiance dans le fait que si on prend une mesure de limitation de son action pour le
02:05 protéger, il comprend que c'est pour le protéger et que c'est pour son intérêt
02:09 pour l'avenir.
02:10 Donc au fond, quand le maire de Viry-Châtillon, après le terrible drame où Cheb Sédine a
02:16 perdu la vie, tabassé par deux autres jeunes, quand le maire de Viry-Châtillon dit « il
02:21 faut que nous réapprenions la fermeté, il faut que nous réapprenions à punir », au
02:26 fond, vous le rejoignez ? C'est ce qu'il faut faire aujourd'hui ? C'est ce que nous
02:30 avons oublié de faire depuis des années ?
02:31 Il faut comprendre que la sanction, voire la punition, est dans l'intérêt de l'enfant
02:39 dès lors qu'elle est comprise par lui, c'est-à-dire qu'elle est comprise comme légitime.
02:42 Et à ce moment-là, elle est intériorisée par l'enfant comme quelque chose qui le
02:46 protège et qui va lui profiter pour l'avenir.
02:50 C'est cela qui est important.
02:51 L'autorité ne doit pas tomber comme ça d'une façon brutale, c'est ce que l'on
02:55 a voulu empêcher de l'autorité du passé, très bien, mais l'autorité doit être
03:01 comprise par l'enfant comme quelque chose qui va le protéger, qui va lui être utile.
03:06 La condition pour qu'il l'accepte, c'est qu'il accepte qu'on va le limiter dans
03:11 l'immédiat, donc il y aura une satisfaction immédiate qu'il ne pourra pas obtenir,
03:16 mais que c'est dans un intérêt pour l'avenir.
03:18 Or, c'est difficile à comprendre pour l'enfant, parce que la satisfaction immédiate
03:23 pour lui, ça lui parle, tandis que l'avenir, c'est loin.
03:25 Pour cela, il faut qu'il ait confiance dans l'adulte et avant tout dans les parents.
03:32 Ce sont les parents qui peuvent créer cette confiance, parce que les parents portent tout
03:38 l'avenir de l'enfant, et c'est donc leur autorité qui est la légitimité légitime,
03:47 qui est l'autorité légitime en premier.
03:49 Et le problème de notre vie de société, c'est que l'on a tendance à disqualifier
03:55 l'autorité des parents, ceci depuis un certain temps.
03:58 On a tendance, par exemple, je prends un exemple, on a fait une loi à un certain moment, qui
04:03 s'appelle la loi antifaissée.
04:04 Comme si les parents étaient maltraitants, comme si les parents recouraient à la fessée
04:11 humiliante, non, ça c'est quelque chose qui est complètement passé, sauf quelques
04:14 parents maltraitants qui existent peut-être encore et qui d'ailleurs, je dirais, n'attacheront
04:19 aucun intérêt à la loi.
04:21 Par contre, cette loi va, je dirais, empêcher, va embarrasser des parents qui, peut-être,
04:28 à un certain moment, se seront emportés parce qu'ils auront voulu protéger leur
04:31 enfant, ils auront voulu lui faire remarquer qu'il avait traversé la rue sans demander
04:36 l'autorisation, des choses comme cela.
04:38 Peut-être qu'ils vont s'emporter, ils vont savoir aussi le regretter ensuite, ils
04:42 vont savoir parler avec leur enfant.
04:43 Là, il y a une confiance que, d'une certaine manière, la loi vient entraver, vient disqualifier.
04:50 Je pense qu'il faut restaurer une confiance, je dirais, dans l'autorité parentale qui
04:56 est l'autorité légitime avant tout pour l'enfant.
04:58 C'est l'autorité qui fonde l'éducation.
05:00 À partir de là, éventuellement, je dirais, il sera possible, notamment par rapport à
05:05 la justice des mineurs, puisque c'est un sujet dont on parle en ce moment, puisqu'il
05:09 y a une réforme qui est débattue en ce moment.
05:11 Mais la justice des mineurs, je dirais, on voit bien comment on a encore une difficulté
05:18 à envisager que la sanction doit absolument être le premier temps de la reprise éducative
05:25 pour le mineur délinquant, parce que la sanction est une mesure de protection pour lui.
05:30 On craint la sanction parce qu'on pense que, je dirais, qu'on l'a fait pour notre intérêt
05:34 d'adulte.
05:35 Mais non, il faut le faire pour le jeune.
05:37 Pour le jeune, je dirais, pour lui mettre la limite, c'est un message qui lui est adressé.
05:42 [Musique]
05:44 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]

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