Le proviseur du lycée Maurice Ravel, à Paris, qui était menacé de mort, a pris la décision de quitter ses fonctions. Il était accusé de racisme et d'islamophobie après avoir demandé à une élève de retirer son voile.
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00:00 La politique. Mathieu Croissando, on en parlait tout à l'heure dans la première édition, le proviseur du lycée Maurice Ravel à Paris,
00:07 qui avait été menacé de mort pour avoir demandé à une jeune fille de retirer son voile, a décidé de quitter ses fonctions.
00:14 Alors, sous quelle forme, vous allez me dire ?
00:16 - Alors, oui. Je vais vous dire d'abord, c'est un échec, c'est une défaite terrible. Pas la sienne, bien sûr.
00:21 Personne n'est en droit de juger ce chef d'établissement pour avoir préféré jeter l'éponge.
00:26 Il l'a expliqué dans un message à ses collègues, révélé par nos confrères de l'Humanité.
00:30 « J'ai finalement pris la décision, écrit-il, de quitter mes fonctions de proviseur, par sécurité, pour moi et pour l'établissement. »
00:37 Alors, je le disais, c'est sa liberté. Évidemment, qui peut dire comment il aurait réagi en pareille situation ?
00:41 Je rappelle très brièvement les faits. Une altercation avec une jeune fille voilée à laquelle il avait demandé de retirer son voile dans la cour de l'établissement,
00:49 qui lui a valu des accusations de racisme, d'islamophobie et des menaces de mort sur les réseaux sociaux.
00:55 On a retrouvé d'ailleurs les auteurs de ces menaces.
00:57 Oui, deux interpellations, une en Normandie où l'auteur présumé a été finalement relaxé, et puis l'un d'eux en région parisienne qui sera jugé à Paris le 21 avril.
01:05 Mais vous dites « ce n'est pas sa défaite », mais c'est la défaite de qui ? Vous voulez dire qu'on l'a poussée à partir ?
01:13 Non, je veux dire que c'est la défaite de tout le monde. Et je vais commencer par les grands mots. C'est une défaite de la République tout entière.
01:18 On vient de fêter, il y a 15 jours seulement, les 20 ans de la loi de 2004 sur l'interdiction des signes religieux à l'école.
01:24 On est dans un pays où le corps enseignant a payé un très lourd tribut à la haine islamiste avec les tragédies, évidemment, de Samuel Paty et de Dominique Bernard.
01:32 Un rapport sénatorial, c'était il y a 15 jours encore, a mis en lumière les intimidations, les menaces dont étaient victimes les enseignants.
01:38 Et on ne s'émeut pas de voir un proviseur qui n'a fait que son boulot, rappeler les fondements de la loi de 2004 à une élève, jeter l'éponge.
01:46 On ne s'émeut pas de ce « départ anticipé à quelques mois de la retraite pour convenance personnelle », comme on dit dans l'éducation nationale,
01:53 où on est incapable de prononcer le mot de « démission », comme au bon vieux temps du pas de vague.
01:57 Donc ça c'est de l'habillage ?
01:59 Oui, parce que le proviseur avait bénéficié d'une mesure policière, de protection.
02:04 Il avait bénéficié aussi, il faut le dire, du soutien de la ministre de l'Éducation nationale.
02:08 Ils avaient fait le job, mais les autres, tous les autres.
02:10 Vous vous souvenez d'avoir entendu le président de la République s'émouvoir de cette nouvelle atteinte insupportable à la laïcité,
02:15 qui est pourtant un des fondements du pacte républicain ?
02:17 Vous vous souvenez d'avoir vu le Premier ministre, Gabriel Attal, pourtant le Spiti González du déplacement ?
02:22 Vous l'avez vu se rendre au lycée à Ravel ? Non.
02:25 Aujourd'hui, tout le monde pleure des larmes de crocodile.
02:27 À droite, par exemple, comme Valérie Pécresse, la présidente de région, qui soutient évidemment le proviseur.
02:33 À l'extrême droite aussi, comme Gilbert Collard, qui s'émeut de cette lâcheté selon lui.
02:38 À gauche, avec le Premier adjoint à la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire, ou encore le député Jérôme Guedj, qui parle de « défaite collective ».
02:46 Et là, il a raison, parce que dans un pays qui est pront à organiser des marches, des manifestations, personne ne s'est mobilisé.
02:51 À part les enseignants et les proviseurs, surtout.
02:54 La laïcité, c'est un combat de tous les jours, qui nous concerne tous, qui nécessite fermeté, vigilance.
02:59 C'est simple, c'est un contrat de société, la laïcité.
03:02 Ceux qui y respectent, c'est juste ceux qui croient et ceux qui ne croient pas.
03:04 C'est notre capacité à vivre ensemble qui est en jeu.
03:06 Et ça, ce sont des petites défaites qui sapent tous les fondements de ce vivre ensemble.