• il y a 9 mois
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Transcription
00:00 *musique*
00:24 *musique*
00:30 "Tu te rappelles les grandes grandes vacances?"
00:31 "Grandes deux fois?"
00:32 "Oui, c'est des grandes vacances qui ont été particulièrement grandes pour les héros vu qu'ils ont été coincés en Normandie plusieurs années sans pouvoir rentrer à Paris.
00:38 C'est comme le vieux parc, vieux parc d'attractions abandonnés."
00:40 "Vieux parc deux fois?"
00:41 "Oui."
00:42 "T'en conclus que tu te rappelles pas?"
00:43 "Bien sûr que si, je me rappelle.
00:45 C'est la série vedette du studio Les Armateurs à qui on doit déjà belle fégore.
00:49 C'est une série d'animation toute mignonne à destination des jeunes enfants sortie en 2015
00:54 pour raconter l'occupation pendant la seconde guerre mondiale par le biais d'un regard d'enfant.
00:58 C'est d'ailleurs sa tagline, la seconde guerre mondiale vécue par les enfants.
01:01 Indépendamment du sujet et de l'ambition, c'est une série qui marque.
01:04 Les efforts qui ont été investis dedans se voient au premier coup d'oeil.
01:07 La musique, le dessin, l'écriture sont dans le haut du panier de ce qu'on fait en termes de série animée française
01:11 et on sait dès qu'on regarde qu'on est devant quelque chose que les créateurs ont pris au sérieux.
01:14 Il y a toutes les raisons de s'en rappeler.
01:15 Pour se débarrasser d'abord de la question qui fâche,
01:18 cette série n'assume pas complètement la dureté de son sujet.
01:22 Les oeuvres destinées à raconter la seconde guerre mondiale aux enfants ne manquent pas.
01:25 En ayant lu pas mal quand j'étais enfant, il m'est facile de comparer les grandes grandes vacances à ce qui s'est fait d'autres dans le genre.
01:30 Et force m'est de constater que les autres créations que je connais sont souvent moins pudiques sur la violence des événements dépeints.
01:36 La série ne cherche pas à censurer les aspects meurtriers de la guerre ou l'oppression subie par le pays occupé
01:41 mais lorsqu'elle aborde ces questions, elle le fait avec prudence et douceur.
01:44 Peut-être trop.
01:44 En dépit des affrontements racontés, il y a très peu de mort d'humains au cours du récit.
01:48 3-4 seulement parmi les personnages importants dont 2 parmi les gentils,
01:51 le tout mis en scène de manière aussi peu graphique que possible.
01:54 D'ailleurs, les événements les plus terribles sont racontés sous forme d'ellipses ou hors caméra.
01:57 Et quand un fait historique réputé pour avoir été particulièrement meurtrier survient dans l'intrigue,
02:01 le hasard fait que le village des héros est exceptionnellement bien épargné par les massacres.
02:05 Déjà oui, il y a ça mais c'est pas tout.
02:07 Je propose de se débarrasser une bonne fois pour toutes de l'éléphant dans la pièce avant de décrire la série plus en détail.
02:13 La question du massacre des juifs n'est abordée que dans un seul épisode en tout pour tout sur les disques contre la série.
02:19 Aujourd'hui quand on parle de la seconde guerre mondiale, la question de la Shoah est totalement centrale
02:23 et l'évocation des nazis est indissociable de celle des juifs qu'ils ont persécuté.
02:26 Mais elle ne l'était pas nécessairement pour les gens à l'époque qui vivaient l'occupation comme quelque chose ayant un impact plus global et plus pratique sur leur vie de tous les jours
02:32 et dont la série essaye de retranscrire le point de vue de manière aussi réaliste que possible.
02:36 Donc le sujet de la solution finale n'est pas du tout proéminent dans la série.
02:39 Même.
02:40 Sans aller jusqu'à dire que l'horreur de la situation est atténuée, aucun pâteau se n'est fait sur ce cas là de scandaleux et d'inacceptables.
02:47 D'ailleurs le nazisme lui-même n'est incarné que par un personnage de collabo un peu trop superficiel et caricatural pour être réellement effrayant.
02:54 Les allemands qu'on rencontre sont soit des figurants,
02:57 soit des ordures qui abusent de leur position de conquérant pour brimer les habitants du pays occupé et s'enrichir en faisant du marché noir
03:03 mais n'évoquent absolument jamais les rafles et la persécution des juifs,
03:07 soit des gentils qui ont le malheur d'être engagés dans le mauvais camp mais se retourneront contre lui à la fin.
03:11 La série n'a juste pas pu incarner le personnage du nazi.
03:15 Il y a un personnage de colonel de l'armée allemande qui dirige les forces occupantes dans le village des héros.
03:19 On lui donne suffisamment de temps d'écran pour le rendre vivant
03:21 mais c'est assez dur de déterminer ce qu'on est censé en penser.
03:24 Il n'est pas homme à arrêter les civils sur le moindre soupçon et il apprécie les fleurs
03:27 mais il n'hésite pas une seconde à ordonner qu'on fusille des otages par représailles contre les actions de la résistance
03:32 et sauf s'il y a des propos qui m'ont échappé parmi les nombreuses phrases en allemand non sous-titré qui sont prononcées dans cette série,
03:37 lui non plus ne donnera jamais son point de vue sur l'extermination des juifs.
03:39 En même temps, je peux comprendre la difficulté d'écrire une fiction sur ce sujet là.
03:44 Il faut reconnaître qu'en tant qu'élément scénaristique, le nazisme n'a que l'excuse d'être réel.
03:49 Avant les années 40, un auteur aurait essayé de vendre une histoire de dictateur
03:52 qui met en place un système de massacre industrialisé de toute une population,
03:56 son éditeur lui aurait répondu qu'un tel degré d'inhumanité, ce n'est pas crédible
04:01 et que personne ne peut être aussi caricaturalement méchant.
04:04 Du coup même aujourd'hui, on a beau savoir que ces événements sont réellement arrivés,
04:09 parvenir à concevoir comment ils ont pu arriver et ce qui se passait dans la tête des responsables n'est pas un exercice si facile que ça.
04:15 Si j'avais à faire une série sur des enfants survivant dans un goulag par exemple
04:19 qui est la situation à laquelle on aime bien comparer aujourd'hui,
04:22 je pourrais faire l'expérience de pensée nécessaire pour camper les officiers russes qui maltraitent les héros.
04:28 On pourrait disons les représenter comme étant davantage intéressés par le rendement et la productivité des prisonniers
04:34 et indifférents à leur souffrance et à leur survie.
04:36 Ca ferait des scènes violentes et dures mais ne nécessitant aucune suspension d'incrédulité.
04:41 Par contre, se mettre à la place d'un officier nazi qui met des cristaux dans la chambre à gaz
04:46 puis rentre chez lui caresser son chat et embrasser ses enfants,
04:49 se prend en photo avec les prisonniers et voit sincèrement ça comme une distraction, ça dépasse l'imagination.
04:56 Je ne peux pas blâmer à un auteur de ne pas arriver à camper ce type de personnage d'une manière qui lui paraisse réaliste.
05:01 Le résultat, c'est que cette série a peu de méchants et que les dits méchants sont très évanescents.
05:05 Ceux qui sont développés donc sont soit plus vénal que nazi,
05:08 soit purement collabos mais sans que son excessive motivation pour servir les allemands
05:11 qu'ils prennent assez peu au sérieux vu qu'il les choue tout le temps, ne soit vraiment expliqué.
05:14 C'est bien ce que je dis, les auteurs n'ont vraiment pas réussi à se mettre dans la tête d'un nazi pour expliquer sa conduite.
05:20 Et j'avoue, je sais pas si à leur place, j'aurais réussi.
05:22 Pour rendre un personnage vivant dans son récit, la méthode standard est de se demander comment je réagirais moi dans cette situation là.
05:29 Il faut quand même un mental et une force morale à toute épreuve pour réfléchir très sérieusement à la question
05:35 qu'est ce qui pourrait m'amener moi à remplir la chambre à gaz tous les jours
05:39 et à être complètement indifférent à l'aspect monstrueux de cette action.
05:43 Personne n'a envie de connaître la réponse à cette question.
05:46 Personne n'a envie de se la poser.
05:48 C'est bien pour ça que pour ce genre d'histoire,
05:50 je pense qu'il vaut mieux se baser sur des témoignages réels plutôt que d'improviser une fiction montée de toutes pièces.
05:55 Quand le réel dépasse l'entendement, la fiction ne fera jamais aussi bien que la réalité.
05:59 Inséré des témoignages, la série a tenté de le faire.
06:02 Chaque épisode se termine par un petit court métrage animé dans un autre style que la série principale
06:06 qui illustre le récit de quelqu'un qui était enfant durant la seconde guerre mondiale et rapporte une anecdote.
06:10 Là encore, la seconde guerre mondiale vécue par les enfants.
06:12 Mais ces courts métrages ne sont pas forcément plus durs que la série, en particulier sur la question du nazisme.
06:17 Par contre, ils sont originaux.
06:18 Je t'avais dit que je lisais beaucoup d'oeuvres qui expliquent la seconde guerre mondiale aux enfants quand j'étais petite
06:23 et ces oeuvres ont pas mal d'éléments récurrents.
06:25 Les anecdotes racontées à la fin des épisodes des grandes grandes vacances sont très atypiques par rapport à ce qu'on trouve dans ces oeuvres.
06:30 Déjà, la plupart des livres que j'ai lu se focalise sur les situations d'inconfort provoquées par la guerre.
06:36 Le couvre-feu, les écoliers juifs obligés de porter une étoile jaune, le rationnement...
06:40 Les anecdotes de fin d'épisode des grandes grandes vacances,
06:43 elles peuvent aller de la description d'un exceptionnel coup de chance dont la valeur ne se mesure que si on est déjà au courant du contexte de la guerre
06:50 à une série d'informations décousues pour retranscrire l'ambiance d'un événement.
06:54 Tous ces récits sont vraiment très sobres pour ce qui est de décrire les horreurs de la guerre.
06:59 Il n'y en a qu'un qui parle de bombardement et de mort.
07:01 Si je n'avais pas eu une grand mère particulièrement traumatisée qui m'a décrit cette période avec force détail,
07:07 j'en aurais conclu que ça ne devait pas être si terrible que ça pour le tout venant en vrai la guerre.
07:12 Mais c'est pas la seule chose qui me fait dire que ces épilogues aux épisodes des grandes grandes vacances sont atypiques.
07:18 Je crois surtout que ce qui me déstabilise, c'est que rien n'est fait pour qu'on sache ce qu'on est censé conclure de ces récits.
07:24 On nous décrit le quotidien d'une époque sans clé de lecture, sans contexte
07:28 et on nous laisse comme ça libre de décider tout seul quelle impression doit en être retirée.
07:33 Après moultes leçons d'histoire sur les horreurs de la guerre et le devoir de mémoire, cette liberté est presque effrayante.
07:40 L'animation de ces courts métrages varie selon l'épisode. C'est clairement plus des exercices de style que des vrais récits.
07:45 Revenons à la série principale.
07:47 La bibliographique est signée Émile Bravo, connu entre autre chose pour être l'auteur de la série de BD des épatantes aventures de Jules.
07:54 Si je tiens à le souligner, c'est parce que cette BD a en commun avec les grandes grandes vacances de raconter de manière très mignonne et légère des péripéties pourtant assez graves.
08:02 Pour donner un exemple, dans le premier tome, le héros Jules est sélectionné pour faire partie d'une expédition dans l'espace à destination d'Alpha Ducentor.
08:10 Personne ne précise ni à lui ni à sa famille que si pour lui, la mission durera 15 jours, les lois de la relativité vont faire que pendant ce temps, il s'écoulera 8 ans pour sa famille.
08:19 Alpha Ducentor, il vit des aventures rigolotes avec des extra-terrestres et des triangles amoureux
08:24 et puis à la fin de l'album, il rentre et retrouve ses parents devenus vieux et riches parce qu'ils ont fait un procès à l'organisation qui a envoyé Jules dans l'espace.
08:32 Le décalage entre la gravité de ce qui arrive au héros et la légèreté avec laquelle tout ça nous est raconté devrait être choquant
08:38 mais entre le style graphique et le mode de narration, tout ça passe comme une lettre à la poste
08:43 et c'est au final une très bonne BD.
08:45 Je ne sais pas si Emile Bravo a participé à l'écriture de la série mais je n'aurai pas trop de mal à y croire.
08:51 On a dans Les grandes grandes vacances le même projet surprenamment réussi de rendre mignonne et touchante une histoire dont le fond est assez sombre.
08:59 Tu viens de dire qu'une partie de ce qui faisait que ça marche dans la BD, c'est le style graphique.
09:02 Donc même si Emile Bravo n'a pas participé à l'écriture, le choisir pour les dessins était ce qu'il fallait faire.
09:07 Quoi qu'il en soit, le parti pris de faire une série légère sur la seconde guerre mondiale est réfléchi et assumé.
09:13 Ca se voit au générique.
09:14 Il consiste uniquement à montrer la bande des enfants principaux courant dans la campagne pour aller jouer ensemble dans leur repère sous l'oeil à tenderie des adultes.
09:21 Le seul indice du véritable sujet de la série est à la fin
09:25 quand on réalise que le jeu en question consiste à brandir clandestinement un drapeau français.
09:29 On approuve ce choix ou on ne l'approuve pas mais une fois celui-ci admis, on ne peut pas nier que la série est une réussite
09:34 mais peut-être serait-il temps de la raconter pour de bon.
09:36 Un matin de septembre 1939, Ernest et Colette, deux enfants parisiens,
09:40 partent en Normandie pour un dernier bref séjour chez leurs grands-parents maternels avant la rentrée des classes.
09:44 Malgré leur joie de repartir à la campagne une dernière fois avant l'automne, l'ambiance est un peu triste.
09:48 Leur mère étant malade, il est prévu qu'elle parte prochainement se faire soigner dans un sanatorium en Suisse
09:52 et qu'il reste seul avec leur père jusqu'à ce qu'elle soit guérie.
09:55 Oui parce que l'empêcher d'aller se faire soigner pour rester ensemble serait tout sauf mignon, n'est-ce pas, le vent se lève?
10:01 C'est probablement pour lui permettre de dire au revoir à ses parents, qu'elle ne reverra pas avant un moment,
10:05 que ce séjour de dernière minute a été décidé juste avant la rentrée en dépit du fait que les enfants sont déjà venus en Normandie une première fois au début de l'été.
10:11 Alors que la famille profite ensemble des derniers moments de chaleur et de vacances, la nouvelle tombe.
10:15 La guerre est déclarée.
10:16 Il est probable que le père d'Ernest et Colette, Robert, reçoivent prochainement un ordre de mobilisation
10:20 et que plus personne ne soit présent à Paris pour s'occuper des enfants.
10:23 Il n'y a donc pas d'autre solution que de laisser Ernest et Colette en Normandie jusqu'à ce que le père ou la mère soit à nouveau disponible.
10:28 Les enfants font donc leur rentrée des classes dans la petite école de campagne du village
10:32 où ils retrouvent les enfants de la ferme voisine avec qui ils ne se sont jamais entendus et se font de nouveaux copains.
10:37 Durant les premiers épisodes, malgré le contexte, ils vivent des aventures d'enfants et jouent à des jeux d'enfants
10:43 relativement indifférent à ce qui est en train de se produire dans le monde des adultes.
10:47 Puis arrive l'exode et l'occupation qui les oblige bien à vivre les réalités de la guerre malgré leur jeune âge.
10:52 D'une résilience à toute épreuve et loin de se laisser abattre par l'angoisse, ils vont commencer à se rebeller contre cette situation.
10:59 D'abord de manière assez potache comme les enfants savent le faire,
11:02 puis les résistants adultes réalisant qu'ils sont compétents et que tous les bras sont bons à prendre en temps de guerre, de plus en plus sérieusement.
11:09 Cette progression qui s'étale sur les 5 ans séparant l'entrée en guerre de la France contre l'Allemagne nazie et le débarquement de Normandie
11:15 se fait principalement par Ellipse mais est gérée de manière crédible tant sur le fond, les personnages deviennent de plus en plus matures, que sur la forme.
11:23 Visuellement, la croissance des enfants est convaincante comme dans Les malheurs de Sophie.
11:26 Une narration est assurée par la voix adulte de Colette qui présente les événements décrits dans la série comme ses souvenirs.
11:31 "Avec le premier hiver de l'occupation, nous avons vraiment commencé à sentir les effets du rationnement et de la pénurie."
11:38 Mais la série présente forcément plus d'événements qu'il y en a dans son récit puisqu'on assiste à des scènes auxquelles Colette ne participe pas
11:44 "Bon je me souviens pas de cette partie parce que je n'étais pas là mais apparemment l'histoire commence à ces moments là."
11:50 et des conversations d'adultes auxquelles il est sûr qu'elle n'entend goût.
11:52 Non parce que Colette est une de ces petites filles de fiction connectée à la vérité profonde de l'univers.
11:58 Elle a l'air insouciante et y réfléchie mais elle sait d'emblée qui est méchant, qui est gentil et à qui il faut faire confiance.
12:04 Par contre son omniscience lui permet pas de dire à son camarade de classe qu'aller jouer à la plage qui a été minée, c'est pas une bonne idée.
12:10 Colette est une petite fille joyeuse, très joyeuse en toutes circonstances.
12:13 Elle pleure quand les adultes ont besoin qu'elle pleure pour se sentir autorisé à pleurer eux-mêmes.
12:17 Comme le scénario est de son côté, toutes les occasions qu'elle a de choisir entre les pulsions de son coeur et le bien commun lui passent à côté
12:24 donc elle n'aura jamais à perdre son insouciance.
12:26 Tu penses à l'histoire du cochon?
12:27 Oui, je sais pas ce qu'il y a entre moi, la fiction, les petites filles, les cochons
12:31 mais pour une raison obscure, les histoires impliquant des petites filles et leurs cochons de compagnie me satisfont rarement.
12:38 Dans le premier épisode donc, Colette se prend d'affection pour un bébé cochon de la ferme voisine.
12:42 Ses grands-parents lui expliquent que ce cochon est élevé pour être mangé qui va constituer une source de revenu très importante pour la famille de la fermière
12:50 mais devant l'insistance de l'enfant, le grand-père se résout à acheter le cochon pour en faire un animal de compagnie
12:56 en temps de guerre alors qu'il roule pas sur l'or et qu'il peine déjà à nourrir sa famille.
13:00 Emmener l'animal de compagnie en question pendant l'exode va être source d'ennui.
13:04 Le grand-père manquera même de se faire tuer pour sauver le cochon en question.
13:08 Oui parce que ce serait assez idiot qu'il meure réellement à la place de l'animal, n'est-ce pas Man of Steel?
13:13 Connaissant l'histoire de la seconde guerre mondiale et d'étiquettes de rationnement, je me doutais que ce cochon allait avoir une fin tragique.
13:19 En fait, il était évident qu'au bout d'un moment, la petite fille allait bien être obligée de se résoudre à laisser tuer son cochon pour que sa famille puisse manger.
13:27 Les allemands la sauvent de ce choix cornelien en volant le cochon eux-mêmes.
13:31 C'est beaucoup moins glauque que ce à quoi je m'attendais et quelque part j'en suis soulagée
13:35 mais en attendant, j'ai un peu de mal à accepter de voir la grand-mère s'affamer pour que ses petits enfants et leur cochon de compagnie mangent à leur faim
13:42 sachant que le cochon pourrait constituer une source de nourriture suffisante pour sauver tout le monde.
13:46 Ce qui est étrange, c'est que cette série n'est pas spécialement pro-vegan.
13:49 Les anecdotes de fin d'épisode racontent à deux reprises la satisfaction d'une famille d'avoir des animaux qui se mangent comme animal de compagnie pour pouvoir faire un bon repas malgré la guerre.
13:56 L'une de ces deux anecdotes conclut l'épisode même où a été raconté la mort du cochon.
14:00 C'est vraiment très bizarre.
14:01 On aurait voulu mener cette histoire vers la chute à laquelle tu t'attendais pour rétro-pédaler à la dernière minute en se disant que vraiment c'est beaucoup trop glauque pour être mis, on s'y serait pas pris autrement.
14:08 L'alternative serait d'imaginer que la série s'est montrée malicieusement cynique volontairement et ce n'est malgré tout pas trop son style.
14:14 Sans être pro-vegan, cette série a quand même conscience quelque part qu'en temps de guerre, il n'est pas de bon goût d'avoir des animaux de compagnie
14:21 car on aura tant ou tard plus la possibilité de garantir leur survie.
14:25 Le grand-père d'Ernest et Colette adore les pigeons. Il a un pigeonnier dans son jardin.
14:29 Au moment de l'exode, comme il sait que plus personne ne sera là pour nourrir les pigeons,
14:33 il ouvre toutes les portes du pigeonnier et essaye de pousser les pigeons à s'envoler pour pouvoir leur permettre de survivre d'eux-mêmes dans la nature.
14:40 Ca lui brise le coeur mais il le fait quand même.
14:43 Il procède d'ailleurs de la même manière avec les lapins qui les lèvent pour les manger, eux.
14:47 Il veut leur laisser une chance de survivre dans la nature également.
14:51 A noter que ni les lapins ni les pigeons ne doivent trop s'éloigner du lieu de leur captivité
14:54 car quand la famille revient, n'ayant pas pu quitter la région au moment de l'exode, elle n'a pas de peine à les récupérer.
14:58 C'est indispensable, les animaux vont jouer un rôle essentiel dans la mise en scène.
15:03 Comme la série est assez frileuse pour mettre en scène des morts d'humains
15:07 mais qu'il faut quand même montrer la violence de la guerre,
15:09 ceux qui vont mourir pour permettre cette démonstration, ce sont les animaux.
15:13 Le cochon est tué par les allemands pour montrer la conduite abusive de l'occupant
15:17 et pas mal d'animaux à qui on a donné un nom ou au moins un rôle affectif meurent au champ d'honneur.
15:22 Pendant l'exode, la famille échappe de justesse à un obus qui tombe sur le pont qu'elle s'apprêtait à traverser
15:27 mais le cheval qui tirait leur charrette n'a pas cette chance.
15:30 Les pigeons du grand père finissent massacrés par les allemands car ils permettent à la résistance d'échanger des messages.
15:36 Le chien des voisins qu'on croyait être plus un gag récurrent qu'autre chose vu qu'il sert surtout à aboyer sur tout ce qui bouge
15:42 se fait tuer dans l'un des derniers épisodes.
15:44 Cette série est l'inverse exact des malheurs de Sophie.
15:47 On y censure la mort des humains mais pas celle des animaux.
15:50 Dire que la mort des humains est censurée est quand même une exagération
15:53 mais on y reviendra, là ce serait quand même bien de continuer à les présenter les humains en question.
15:56 On a parlé que de Colette pour l'instant. Ton histoire de cochon nous a emmené vraiment trop loin.
16:00 Oui oui pardon.
16:02 On va principalement parler des enfants.
16:04 Pas qu'il y ait rien à dire sur les adultes mais les enfants sont réellement centraux
16:08 et on rend davantage hommage au projet de la série, la seconde guerre mondiale vécue par les enfants, en se focalisant sur eux.
16:14 Si Colette est la narratrice, c'est son grand frère, Ernest qui est le véritable personnage principal.
16:20 La série est structurée autour de son évolution.
16:22 Lorsqu'il commence la série, il a la personnalité qu'on peut attendre d'un enfant de son âge.
16:26 Il aime les livres et les jeux, il manifeste son mécontentement d'être laissé à la compagne par ses parents sans trop se préoccuper des soucis des adultes
16:33 et il est un peu trop timoré pour tenir tête aux deux gamins de la ferme voisine qu'il brime.
16:38 La frustration grandissante dans laquelle la guerre va l'obliger à vivre va être le tremplin pour lui apprendre à se défendre contre ceux qu'il maltraite.
16:45 Ses premiers actes de rébellion seront des rébellions d'enfants et ne seront pas forcément dirigées contre les adultes les plus mal intentionnés
16:52 mais elles constitueront le premier pas qui le fait entrer dans la résistance et se soucier de la guerre et de l'invasion des allemands.
16:58 Malgré cela, il reste un véritable enfant jusqu'au bout.
17:01 Bien que ses parents lui aient demandé de veiller sur sa petite sœur, il restera négligent avec elle,
17:05 envisageant plusieurs fois de l'abandonner pour aller mener sa rébellion tout seul de son côté avec sa bande de copains.
17:11 La bande de copains en question qui se baptise bande des Robinson en référence à Robinson Crusoé
17:15 deviendra dans les derniers épisodes une branche essentielle du réseau de résistance locale
17:18 mais elle commence par être une simple bande de gamins qui se retrouve pour jouer ensemble et construire des cabanes dans la forêt.
17:22 Il y a d'abord Jean, le fils du maire.
17:24 Il est le premier à accepter de parler à Ernest lorsque celui-ci est ostracisé à l'école communale parce qu'il est parisien.
17:29 Autant dire qu'on s'attend à ce que la série présente Jean sous un jour plutôt positif.
17:32 Sauf qu'au final, dans tous les autres épisodes, il jouera le rôle du trouillard un peu bêta
17:35 qui se laisse entraîner dans l'aventure par ses copains contre son gré alors qu'il voudrait rester en sécurité auprès de ses parents.
17:40 Je crois que l'idée était d'en faire le gosse de riche pour il gâter qui accepte quand même de résister avec ses potes
17:44 mais comme son potentiel comique a davantage intéressé les auteurs que son potentiel touchant,
17:48 il est beaucoup moins intéressant que ne peut l'être par exemple Eric dans Le sourire du dragon qui a le même rôle.
17:52 Ensuite il y a Muguet, dite la vrec parce qu'elle gagne sa vie en ramassant du varec sur la plage.
17:57 Enfant déscolarisé qui vit seul avec son père qu'on ne rencontre jamais, absolument jamais.
18:02 Je le soupçonne fortement d'avoir disparu depuis un moment
18:05 et Muguet de faire tout ce qu'elle peut pour donner l'illusion qu'il vit encore avec elle pour ne pas être emmené par les services sociaux.
18:10 Mais rien ne vient confirmer ou infirmer cette théorie.
18:13 Elle est rejetée par les autres enfants du village qui ont peur d'elle et pensent que c'est une sorcière.
18:17 Ernest est le premier à accepter de lui adresser la parole.
18:20 On s'attend à ce qu'elle soit sa love interest
18:22 mais non, elle finit par sortir avec Jean que la série ridiculise à chaque occasion.
18:27 C'est un peu frustrant.
18:28 A part ça, Muguet ayant dû s'élever un peu comme ça toute seule et trouver très tôt des moyens de survivre malgré la pauvreté de son foyer,
18:33 elle est la plus débrouillarde et la plus mature de la bande.
18:35 Si c'est Ernest qui fait les projets, prend les initiatives et tranche les choix à faire pour son groupe,
18:40 c'est Muguet avec son sens pratique et sa connaissance encyclopédique de la nature et de la survie qui rend les projets d'Ernest réalisables.
18:45 C'est elle avant toute chose qui permet au Robinson de devenir une branche efficace de la résistance
18:49 et qui rend crédible le fait que ses enfants ne se soient pas fait tuer dès les premières blagues potache qu'il faut aux allemands.
18:53 Ca et l'indulgence excessive qu'a cette série pour les humains dont on a déjà parlé.
18:57 Ensuite il y a Fernand qui, comme Ernest et Colette, a dû trouver refuge dans ce village de Normandie à cause de la guerre
19:03 sauf que lui, c'est d'Alsace qu'il vient.
19:05 Son fort accent très ressemblant à l'accent allemand le fait ostraciser à l'école.
19:09 C'est un thème récurrent dans cette série de se faire ostraciser à l'école
19:13 mais il a du caractère, il ne se laisse pas démonter pour autant.
19:16 A part ça, c'est un peu le Jack William Dalton.
19:18 C'est également celui qui est le plus en danger parmi les enfants principaux car il est juif.
19:23 Compte tenu des scrupules de cette série à faire mourir les humains, en particulier ceux qui sont proches des personnages principaux,
19:30 on caresse l'espoir de le voir échapper au funeste sort des juifs pendant la seconde guerre mondiale.
19:35 Mais non, il finit emporté par les allemands dans une scène sobre mais aussi tragique que possible et ne reviendra pas.
19:41 L'épilogue en précise la raison.
19:43 La série ne comptait quand même pas se censurer à ce point.
19:46 Si tu dis qu'on censure la mort des humains, c'est parce qu'il y a beaucoup moins de morts humains qu'on pourrait s'y attendre s'agissant d'une série sur la seconde guerre mondiale
19:52 mais ça aurait été vraiment peu crédible qu'il n'y en ait aucun donc la série en met tout de même.
19:56 Déjà nos héros passent devant des cadavres durant l'exode.
19:58 Ils sont obligés de prétendre à Colette que le soldat qu'il trouve allongé dans un verger est en train de dormir pour ne pas l'effrayer.
20:03 Ils doivent également recueillir un bébé dont la mère a pris une balle perdue et n'a eu que le temps d'aller mettre son enfant à l'abri loin de la route avant de rendre l'âme.
20:09 Le bébé est récupéré par sa famille hors cadre entre la fin de l'épisode suivant et le début de celui d'après.
20:13 Son introduction dans l'histoire ne sert vraiment qu'à mettre l'histoire tragique de sa mère.
20:16 A chaque fois, c'est mis en scène de manière prudente en faisant en sorte de ne pas choquer mais en rendant tout de même assez clair ce qu'on voit à l'écran.
20:21 Au fur et à mesure que la série avance, on va assister à des morts plus brutales.
20:25 Avant la scène phare où Fernand est emmené par les allemands, un des camarades de classe d'Ernest et Colette meurt en sautant sur une mine alors qu'il allait à la plage.
20:31 On l'a brièvement évoqué plus tôt.
20:32 Comme pour le chien des voisins, sa mort est rendue marquante par le fait que ce personnage, avant d'être utilisé pour mourir, était surtout un gag.
20:38 C'était le camarade un peu bête dont tout le monde se moquait.
20:40 L'effet choquant de sa disparition est amplifié par cette dernière scène précédant le drame où il propose à Colette de l'accompagner à la plage ce qu'elle refuse parce qu'elle a autre chose à faire.
20:47 Ca permet sans faire mourir un des personnages principaux d'attirer l'attention sur le fait qu'ils auraient pu être sur cette plage et mourir.
20:53 Cette mort là est remarquable parce que c'est une mort dont la série aurait pu faire l'économie.
20:58 Il fallait impérativement mettre en scène la déportation d'un camarade de classe juif et la fusillade d'un adulte résistant.
21:04 Par contre, montrer des enfants victimes de ce genre de dommages collatéraux, ce n'était pas nécessaire et la série l'a tout de même fait.
21:11 Donc en dépit de sa volonté d'adoucir son propos en faisant mourir moins d'humains qu'on s'y attendrait et en choisissant un titre qui donne une impression de légèreté,
21:19 elle prend quand même au sérieux son travail de retranscription d'une époque.
21:22 Cette ambivalence de la série sur la question de la violence n'est pas sans effet sur l'expérience de visionnage.
21:27 Nous avons vu la série deux fois, une première fois en 2015 lors de sa sortie et une deuxième fois en 2023 pour cette vidéo en l'ayant oublié entre temps.
21:33 La première fois, nous avons été surpris et peut-être même légèrement déçu de la légèreté de la série compte tenu de son sujet.
21:38 Nous avons donc retenu que relativement peu de personnages mouraient et que ça ne nous paraissait pas toujours bien justifié.
21:43 Du coup en la revoyant, on a été surpris dans le sens inverse car on s'est rendu compte qu'au final, si, il y avait quand même un certain nombre de morts.
21:51 Juste pas forcément autant qu'on pourrait le croire ou le craindre
21:54 et pas d'une manière qui nous paraisse totalement raccord avec l'idée qu'on se fait aujourd'hui de la brutalité de cette période.
22:00 C'est peut-être parce qu'elle essaye de mettre en scène ces événements comme si s'agissait d'anecdotes de vie quotidienne après lesquelles on passe à autre chose
22:06 plutôt que de drames exceptionnels qui nous marquent toute notre vie.
22:10 C'est de cette manière à vrai dire que sont tournées les anecdotes vécues qui concluent les épisodes.
22:14 En tout cas, la série met en scène cette mort aléatoire de l'enfant sur la mine parce que ça fait partie des choses qui constituent le quotidien des enfants de l'époque.
22:22 En revanche, elle reste très prudente dans la façon de le présenter.
22:24 La mort de l'enfant qui saute sur la mine n'apparaît bien sûr pas dans le cadre.
22:27 On montre les héros en train de vaquer à leurs occupations et sursauter soudain avec un bruit d'explosion
22:31 puis on coupe sur un discours de l'instituteur en train de rappeler qu'il ne faut pas aller à la plage parce que c'est dangereux.
22:35 La fusillade de l'adulte résistant qu'on évoquait tout à l'heure a été mise en scène un peu de la même façon.
22:39 On n'assiste pas à sa mort, on ne filme que le visage des héros qui entendent les bruits de fusil et comprennent ce qui se passe.
22:43 L'arrestation de Fernand est sans doute ce qui est mis en scène de manière la moins pudique.
22:47 Comme j'ai dit, c'est vraiment une scène dont on ne pouvait pas faire l'économie.
22:50 Dans tous les cas, ces événements seront mis en scène avec prudence et pudeur certes mais avec toute la gravité nécessaire.
22:56 On n'assistera pas plus qu'il ne le faudra sur le côté cynisme de la chose,
22:59 on essaiera de le présenter avec autant de douceur que possible
23:02 mais on ne cherchera pas à prétendre que c'était dimanche ce jour là que les immeubles étaient vides,
23:06 qu'on a vu leurs parachutes et qu'ils vont bien ou quoi que ce soit d'autre.
23:08 Non, à la place, on utilise la beauté de l'image et la poésie de la mise en scène pour faire passer la pilule.
23:13 En effet, la série n'hésite pas à être poétique pour rendre son sujet plus facile à appréhender.
23:17 Elle ne rechigne pas à utiliser des images symboliques très classiques pour véhiculer l'impression qu'on est censé retirer de telle ou telle scène.
23:22 Je reprocherais peut-être à la présentation poétique des événements qu'elle rend certains drames
23:25 comme notamment la mort de l'enfant sur la mine plus abstrait et lointain qu'il ne devrait l'être.
23:29 Bon, faut dire en même temps que ce n'était pas un personnage pour lequel on avait un attachement particulier.
23:33 Comme tu l'as dit, avant ça, c'était surtout un gag derrière plan.
23:35 Revenons à Fernand.
23:36 Le fait d'en avoir fait le Jack William Dalton de la bande est rétrospectivement un choix très efficace.
23:42 Le fait que ce soit lui qui soit enlevé par les allemands prouve que ce sort pouvait tomber sur n'importe qui
23:47 et permet de réaliser avec douceur toute l'horreur de la déportation.
23:50 Colette, Ernest, Jean, Muguet et Fernand sont l'équipe de départ.
23:53 Ils sont en rivalité avec les enfants de la ferme voisine de la maison des grands-parents, Marcelin et Gaston Morteau.
23:57 Les Morteau ont pour rôle de montrer le rejet des enfants parisiens par les locaux dans les villages de province où ils trouvaient refuge pendant la guerre.
24:03 C'est donc eux qui scandent le célèbre slogan "Parisien tête de chien, Parigo tête de veau"
24:07 et qui soupçonnent Fernand d'être un espion allemand à cause de son accent.
24:10 Mais une fois ce rôle joué, la série préfère utiliser ses personnages autrement.
24:13 Et d'abord Gaston puis Marcelin deviennent amis avec les héros et rejoignent leur bande.
24:16 Je sais pas si c'est parce qu'ils avaient fini de jouer leur rôle de connard.
24:19 La série met en scène un personnage de collabo durant qui du premier épisode au dernier épisode manifeste une profonde admiration pour Pétain puis pour les allemands
24:27 et une grande satisfaction de voir son pays occupé.
24:30 C'est un personnage un peu étrange.
24:32 Son pouvoir de nuisance est présenté comme réel mais il est principalement tourné à la comédie.
24:37 Comme tout le monde au village connait son allégeance sans la partager
24:40 et que ses tentatives de découvrir des actes de résistance pour les dénoncer aux allemands échouent 99% du temps,
24:46 la mise en scène le présente plus comme un gros coup que les héros prendront plaisir à ridiculiser que comme la menace lancinante qui incite chacun à se méfier de tout le monde.
24:53 Durand ne joue vraiment que le rôle de montrer qu'il y avait des collabos
24:57 et la série ne s'enlase jamais jamais jamais car il restera dans ce seul et unique rôle jusqu'au bout.
25:03 C'est un peu bizarre d'ailleurs.
25:04 Non seulement on s'étonne que ce soit le seul et unique collabo dans un village avec quelques opportunistes mais surtout beaucoup de résistants
25:10 mais on s'attarde jamais sur les raisons pour lesquelles ce collabo est à ce point surnaturellement motivé à collaborer et à trouver des crimes à dénoncer à l'occupant.
25:16 Il correspond au cliché du bon à rien qui passe son temps à picoler, qui n'a rien de mieux à faire que de fouiner et dénoncer les autres
25:21 et qui se tourne vers l'extrême droite parce qu'il pense que ça va lui donner un statut
25:23 mais d'une part c'est surprenant de la part d'une série qui n'a pas voulu mettre en scène de vrai nazi et de présenter ce genre de caricature
25:29 renforcé par le fait que Durand est encore une fois le seul et unique collabo de la série
25:32 et d'autre part, sa persévérance paraît peu crédible compte tenu de son inefficacité.
25:36 Franchement même les allemands ne l'aiment pas et ils le trouvent trop collant.
25:38 En outre, dans la vraie vie, un mec comme ça qui clame aussi haut et fort son allégeance à l'occupant dans un village principalement peuplé de résistants,
25:45 il aurait dû se faire assassiner dès les premiers mois de l'occupation.
25:47 En tout cas, ça n'a pas dérangé la série de laisser un personnage jouer un rôle uniquement fonctionnel jusqu'à la fin.
25:53 Les mortaux ne sont pas que des personnages fonctionnels.
25:56 Déjà, leur motivation pour être si hostile envers les parisiens est un peu expliquée.
25:59 Leur mère étant amie avec les grands-parents des héros,
26:02 elle oblige ses enfants à servir les parisiens quand ils passent à la ferme pour demander du lait et des œufs
26:07 ce qui leur procure un sentiment d'humiliation qui font payer à Ernest et Colette.
26:11 En même temps, c'est quoi cette idée de demander au tout petit d'aller chercher l'énorme bidon de lait
26:14 tandis que le rôle du grand costaud est juste de conduire le parisien au poulailler?
26:17 On serait vénère à moins.
26:18 Bref, Gaston et Marcelin n'étant pas juste des éléments scénaristiques mais de vrais personnages,
26:23 on ne pouvait pas tenir sur la longueur en les rendant unilatéralement cons et méchants.
26:27 Donc ils s'adoucissent.
26:28 D'abord, Gaston s'attache à Colette pour qui il a de la compassion et lui vient en aide.
26:32 Ensuite, Marcelin se lie d'amitié avec Ernest parce que...
26:36 on ne sait pas trop.
26:37 On n'avait pas le budget pour montrer. Ça se passe hors cadre.
26:39 Dommage, ça m'aurait intéressé de voir.
26:41 C'est une amitié de rivaux de shonen.
26:43 Ils se sont bastonnés et après, ils sont devenus amis parce qu'ils se sont bastonnés.
26:45 Rien de mystérieux dans une logique de dessin animé.
26:47 C'est pas le seul truc a priori important qui se passe hors cadre.
26:50 Le fait que l'instituteur avoue à ses élèves qu'il est dans la résistance se passe hors cadre aussi.
26:54 Pourtant les élèves ont passé l'épisode à se méfier de lui.
26:56 Cette série a une façon étrange de choisir ce qui se passe dans le cadre
26:58 et ce qui sera seulement résumé en narration par Colette au début et à la fin des épisodes.
27:02 Là encore, la logique semble être de se focaliser sur des événements pouvant passer pour des anecdotes de vie quotidienne plutôt que sur de grands coups de théâtre exceptionnels.
27:08 Quoi qu'il en soit, la morale de cette histoire, c'est que Gaston est le plus mature des deux jeunes frères mortaux malgré le fait d'être le benjamin
27:13 et cette tendance se poursuit même après que les mortaux soient devenus gentils et aient rejoint la bande.
27:17 Nous parlons beaucoup de choix de mise en scène étranges et apparemment incohérents de la série donc on pourrait croire que nous la trouvons mal écrite.
27:23 Au contraire, l'écriture de cette série est suffisamment maîtrisée pour que nous cherchions à comprendre l'intérêt de ses choix plutôt que de les mettre sur le compte de la maladresse
27:31 et que nous partions du principe qu'il y a un intérêt même quand nous ne sommes pas complètement sûr duquel.
27:36 Les dialogues et la narration par exemple sont très bien rédigés.
27:40 Les personnages parlent l'argot de l'époque mais un argot compréhensible par un petit spectateur du 21ème siècle.
27:46 "Est-ce que tu crois que les anglais vont venir chercher leur pilote? En tout cas, faut pas que les boches l'attrapent."
27:49 "C'est sûr qu'avec ces gibbons en vrac, ils peuvent pas partir tout seul mais comment on peut prévenir les anglais?"
27:53 "On va pas prendre le téléphone et faire 'Allô Laraf, on a votre pilote, allô'."
27:57 Quand on s'apprête à regarder une série sur la vie des enfants pendant la seconde guerre mondiale,
28:01 on ne peut pas s'empêcher d'avoir des attentes très précises.
28:03 C'est pour ça que les choix qui s'éloignent de ces attentes ont tendance à plus déstabiliser que dans n'importe quelle autre série.
28:08 Mais la cohérence de ces choix, la cohérence de l'esthétique globale et l'efficacité de la mise en scène pour véhiculer l'émotion rend évident que tous ces choix sont délibérés.
28:15 Et quand on prend du recul, qu'on regarde la série dans son ensemble et l'effet qu'elle fait à ses spectateurs,
28:19 il n'y a finalement pas de raison de remettre ces choix en question.
28:21 C'est une série douce et mignonne qui aborde avec prudence un sujet dur
28:24 et permet de parler d'une époque devant rester dans les mémoires à une génération qui ne l'a pas connue.
28:28 Indépendamment de son rôle éducatif, elle raconte une histoire plaisante mettant en scène des personnages sympathiques dans une ambiance agréable et constitue une bonne expérience de visionnage.
28:36 Pour sa qualité d'écriture et de mise en scène, sa sincérité et sa vocation documentaire,
28:41 Les Grandes Grandes Vacances mérite qu'on s'en souvienne.
28:43 [Musique]

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