Chef du service des urgences de l'hôpital du Mans. Le service est saturé à cause notamment de l'afflux de patients qui ne peuvent être pris en charge par l'hôpital psychiatrique d'Allonnes
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00:00 C'est le 6/9, France Pleumelle.
00:03 8h moins le quart, c'est donc l'heure d'accueillir l'invité du 6/9 avec un constat.
00:07 Yann Asténette, les urgences sont sur le point de craquer.
00:09 Oui, celle de l'hôpital du Mans, débordée par le nombre de patients,
00:12 et notamment ceux que ne peut pas prendre en charge l'hôpital psychiatrique d'Allens.
00:17 Bonjour Docteur Lionel Ismad.
00:19 Vous êtes le chef des urgences de l'hôpital du Mans, mais aussi du Bayol.
00:24 La situation est si grave que ça ?
00:27 Oui, c'est une situation qui évolue depuis plusieurs mois maintenant.
00:31 Ça joute en ce moment à la difficulté que connaissent tous les services d'urgence
00:36 de saturation et d'afflux de patients.
00:38 Une problématique d'engorgement du service par des patients qui doivent être hospitalisés
00:43 dans des lits de psychiatrie et qui, faute de lit, restent là pendant plusieurs jours,
00:48 plusieurs semaines parfois, en attente de leur transfert.
00:51 Concrètement, comment ça se passe là, avec cet afflux de patients,
00:55 notamment de l'hôpital psychiatrique ?
00:57 Comment fonctionne le service en ce moment ?
00:59 Nous sommes en plein hiver, là aussi il y a forcément peut-être un peu plus d'activité.
01:04 C'est un service qui, architecturellement, déjà est un petit peu juste.
01:07 C'est un service qui avait été fait pour 40 000 passages par an.
01:10 On en fait quasiment 70 000, donc déjà on est un peu à l'étroit dans nos locaux.
01:14 Et ça joute là en ce moment, tous les jours, une vingtaine de patients
01:17 qui sont là dans un profil d'hospitalisation,
01:21 qui restent sur des brancards, sur des chaises,
01:23 et qui attendent de partir, de pouvoir être hospitalisés.
01:26 Et donc ça engorge physiquement le service.
01:28 Quand on met 20 brancards de plus dans un service dans lequel on est à l'étroit,
01:32 c'est un problème déjà.
01:34 Et ensuite, c'est une occupation de tant de personnel, médical et infirmier,
01:39 qui, pendant qu'ils font ces missions-là, n'assurent pas les missions pour lesquelles ils sont là normalement,
01:45 c'est-à-dire accueillir et prendre en charge des patients qui ont besoin de soins urgents.
01:49 - Ça peut être un peu provocateur, mais est-ce que vous parlez d'un service dégradé, là,
01:53 pour tous les patients de l'hôpital du Mans, de ceux qui viennent aux urgences ?
01:57 - En tout cas, si on pense à une prise en charge optimale et idéale de ce qu'on voudrait faire,
02:02 c'est sûr qu'on n'y est pas.
02:04 Quand avec le même nombre de personnel, encore une fois, on n'est pas...
02:08 On pourrait être mieux, il nous manque un tiers des médecins qu'on devrait avoir,
02:12 donc il n'y a déjà pas tous les postes qui sont pourvus tous les jours.
02:15 On ne donne pas les soins qu'on voudrait donner aux patients, notamment à cause de ça.
02:20 Ça vient encore impacter la situation.
02:22 - Le personnel, il est à bout ?
02:24 - Le personnel a besoin de perspectives.
02:27 C'est des gens des équipes des urgences.
02:31 C'est pas pour ça qu'ils viennent le matin.
02:33 Ils viennent pour s'occuper des patients, pour prendre en charge les patients qui viennent à nous.
02:39 On n'est pas ni qualifiés ni compétents pour faire de l'hospitalisation de psychiatrie,
02:43 on arrive... on perd de sens.
02:45 Il y a des gens qui sont là et qui se retrouvent à faire des missions pour lesquelles ils ne sont pas qualifiés,
02:49 qui voient des patients qui restent là avec des soins qui ne sont pas des bons soins,
02:54 qui ne sont pas ceux pour qui on les a...
02:56 - Qui ne relèvent pas en tout cas des services des urgences directement.
03:01 Ça veut dire que certains personnels quittent les urgences ?
03:05 - Oui, régulièrement.
03:06 Alors ce serait un peu facile de mettre tout sur le dos de la psychiatrie,
03:09 mais régulièrement, oui.
03:10 Et je pense que ça s'ajoute aujourd'hui, c'est une charge qui vient s'ajouter,
03:13 une pénibilité qui vient s'ajouter.
03:15 - Il est 7h48, notre invité ce matin, le Dr Lionel Ismad,
03:18 chef du service des urgences du centre hospitalier du Mans et du pôle santé Loire-du-Baillol.
03:21 - Alors Dr Ismad, quelle est la solution ?
03:23 Parce que ce n'est pas de gaieté de cœur, évidemment, que l'hôpital psychiatrique d'Allonne ferme des lits.
03:29 Vous avez eu ce chiffre, 29 psychiatres seulement, alors qu'il y a 70 postes disponibles.
03:34 Quelle est la solution pour éviter justement cet afflux de patients de l'hôpital psychiatrique vers les urgences ?
03:39 - Ça serait prétentieux de ma part de vous livrer aujourd'hui la solution,
03:42 et puis de tout le temps que si je connaissais la solution, peut-être qu'on n'en serait pas dans ces situations.
03:46 - Alors est-ce qu'il y en a une ?
03:47 - En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'aujourd'hui, il y a un cadre à la fois réglementaire,
03:51 et puis il y a des missions, il y a des moyens qui sont alloués pour des missions.
03:54 La mission du service des urgences, je vous l'ai dit plusieurs fois,
03:57 c'est accueillir, prendre en charge tous ces patients-là qui ont des pathologies aigües.
04:00 Il y a eu des difficultés sur le département, vous le savez, des services d'urgence qui ont fermé,
04:05 et pour autant, on continue d'assumer cette mission-là pour tous les SART.
04:09 Aujourd'hui, l'établissement qui a la mission d'hospitaliser les patients
04:13 qui ont besoin d'une prise en charge psychiatrique, c'est le PSM de la SART.
04:17 - Oui, mais s'il n'y a pas assez de personnel ?
04:19 - Il manque aussi un tiers des effectifs, il manque la moitié des urgentistes en SART,
04:22 et pour autant, on assume la mission, donc charge à cet établissement-là de tout innover,
04:25 de trouver des façons de pouvoir assumer sa mission avec moins de personnel.
04:29 C'est ce qu'on a fait nous sur les urgences quand tout a fermé autour.
04:32 - Est-ce que vous concertez notamment l'ARS, l'Agence Régionale de Santé ?
04:36 Est-ce qu'il n'y a pas des possibilités de report de ces patients vers d'autres hôpitaux,
04:41 établissements extérieurs au département ?
04:43 Ça s'est fait pendant le Covid, ça s'est fait aussi lors des plans blancs ?
04:47 - C'est déjà le cas aujourd'hui, quotidiennement, y compris le week-end,
04:49 il y a quelque chose qui s'appelle une cellule régionale de relancement,
04:53 c'est-à-dire qu'il y a une centralisation de tous les lits disponibles en psychiatrie sur la région,
04:57 et que les patients, mais pas que les SART, c'est pas possible pour les Mayennais,
05:00 qui ont besoin de lits en psychiatrie, quand il y a une place à Nantes, quand il y a une place à Angers,
05:04 ils sont transférés, avec le raccord, parce que malgré tout on parle de patients.
05:08 - Et ça sature là aussi ?
05:10 - Ça sature là aussi, il y a eu récemment la défermeture de lits dans le Manéloir,
05:14 au niveau de Cholet, donc ça se reporte aussi sur Angers.
05:17 Là non plus, la crise n'est pas que sartoise, elle est nationale.
05:22 - Crise illustrée par cette grève des personnels des urgences,
05:27 100% du service fermé le 29 février, vous recommencez ça le 7 mars ?
05:32 - Oui, une nouvelle mobilisation prévue jeudi,
05:35 il y aura une réunion, une mobilisation Place de la République à partir de 14h30,
05:40 à laquelle participeront les personnels des urgences,
05:42 mais aussi les personnels du centre-santé du Mans.
05:45 - Et les sartois, vous espérez justement ?
05:47 - Oui, on appelle aussi les usagers, parce qu'aujourd'hui la psychiatrie,
05:50 c'est quelque chose qui touche toutes les familles, donc on appelle aussi les usagers.