• il y a 9 mois
"Ça n'est pas le patient tout seul qui peut décider de mettre fin à sa vie", affirme Catherine Vautrin, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités. Elle détaille le projet de loi pour une "aide à mourir" annoncé dimanche par le chef de l’État, dans un entretien accordé à La Croix et à Libération. Il sera présenté en avril en Conseil des ministres, en vue d'une première lecture en mai à l'Assemblée nationale.

Le ministre conteste l'emploi des termes "euthanasie" et "suicide assisté" par ses opposants. "Avec ce texte, on regarde la mort en face", a déclaré le chef de l’Etat. "On a aujourd’hui dans notre pays des situations dans lesquelles des citoyens connaissent le côté incurable de leur maladie et surtout sont dans une situation de souffrance", explique Catherine Vautrin. "Il y a un moment où le patient a besoin de se dire que ses jours sont comptés, et ils ont besoin d’avoir une possibilité de se dire qu’il y a quelque chose qui peut répondre à cette situation dramatique."

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Transcription
00:00 Et avec Léa Salamé, nous recevons ce matin dans le Grand Entretien, la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités.
00:07 Vos questions au 01 45 24 7000 et sur l'application de France Inter.
00:13 Catherine Vautrin, bonjour.
00:15 Bonjour Nicolas Demorand, bonjour Léa Salamé.
00:17 Et bienvenue à ce micro.
00:18 Votre parole est très attendue ce matin parce que vous êtes la ministre qui va porter le projet de loi sur la fin de vie
00:25 dont Emmanuel Macron a exposé les grandes lignes dans un entretien donné à la Croix et Libération.
00:31 Il a annoncé la possibilité de demander une aide à mourir sous certaines conditions strictes.
00:38 Et nous avons donc beaucoup de questions à vous poser sur ce que le président de la République appelle le modèle français de la fin de vie.
00:46 Mais pouvez-vous en quelques mots, pour commencer, nous dire quelle est la philosophie générale de ce texte ?
00:53 Oui, bien sûr. Vous venez de le dire, ce modèle français de l'aide à mourir,
00:58 c'est un modèle d'abord qui s'adresse quand on parle de malades en fin de vie à des gens qui sont malades.
01:04 On parle donc d'une pathologie et non pas d'un âge.
01:07 Et je crois que c'est important que chacun comprenne bien que quand on évoque ce type de situation,
01:12 c'est parce qu'on est gravement malade, frappé d'une maladie grave et incurable.
01:16 Ce modèle, il repose sur un développement des soins palliatifs avec une stratégie de soins palliatifs
01:24 et dans un complètement repensé qui d'ailleurs vont même s'appeler des soins d'accompagnement
01:29 avec l'organisation d'une filière autour des soins palliatifs pouvant aller à terme jusqu'à effectivement
01:35 une demande qui serait faite par le patient dans des conditions strictes sur lesquelles j'imagine que nous allons revenir
01:41 et qui pourrait aller jusque l'aide à mourir.
01:43 Je voudrais tout de suite dire que la façon dont ce texte a été construit est très importante.
01:49 Parce que c'était effectivement un engagement de campagne d'Emmanuel Macron en 2022.
01:53 Il y a eu une évaluation de la loi Claes-Leonetti dont on a beaucoup parlé,
01:56 qui est le dernier texte en vigueur sur le sujet dans notre pays qui date de 2016.
02:01 Il y a ensuite eu un avis du Conseil Consultatif National d'Ethique et surtout une convention citoyenne.
02:08 Cette convention citoyenne, c'est inédit, c'est la première fois que ça a eu lieu en France.
02:12 Des Françaises et des Français tirés au sort.
02:14 185 au départ, 184 à l'arrivée.
02:18 La seule personne qui a arrêté a déménagé.
02:20 Et des gens qui se sont engagés bénévolement pendant 4 mois.
02:23 C'est très important parce que ça montre le travail qui a été porté.
02:27 Et puis un plan évidemment de soins d'accompagnement autour du professeur Chauvin.
02:31 Cette convention citoyenne, ce n'était pas la première puisqu'il y avait la convention citoyenne sur l'écologie.
02:35 Mais sur un sujet aussi lourd que celui-là.
02:38 Oui, lourd que celui-là. Puisqu'on en est dans les principes et la philosophie générale,
02:43 que signifie l'expression, Madame la Ministre, avec ce texte "On regarde la mort en face"
02:47 employé hier dans son interview par le Président de la République ?
02:50 Ça veut dire que jusque-là, on ne la regardait pas en face, la mort ?
02:53 Je crois que ce que le Président de la République a voulu dire, c'est qu'on a aujourd'hui dans notre pays
02:59 des situations dans lesquelles un certain nombre de nos concitoyens connaissent le côté incurable de leur maladie.
03:08 Et surtout, sont dans une situation de souffrance, qui est une souffrance réfractaire.
03:14 Cette souffrance, elle est psychologique, elle peut être physique.
03:18 Et donc, il y a un moment où le patient a besoin de se dire que potentiellement,
03:24 il sait que ces jours sont malheureusement comptés, son pronostic vital est engagé.
03:28 Et ils ont besoin d'avoir une possibilité de se dire qu'il peut y avoir quelque chose
03:33 qui réponde à cette situation dramatique.
03:34 Catherine Votrain et Emmanuel Macron ont également déclaré "cette loi, nous l'avons pensée comme une loi de fraternité".
03:41 L'emploi du mot "fraternité", vous le savez, a suscité une avalanche de réactions, certaines indignées.
03:48 Marie de Haenzel, psychologue clinicienne, déclarait hier sur France Info
03:52 "il y a quelque chose de pernicieux dans le fait de dire que c'est un texte fraternel".
03:57 Et quant au Président de la Conférence des évêques de France, Éric de Moulin-Beaufort,
04:02 il estime qu'appeler "loi de fraternité", je le cite, un texte qui ouvre à la fois le suicide assisté
04:08 et l'euthanasie est une tromperie. Que leur répondez-vous ?
04:12 J'ai beaucoup de respect pour l'un comme pour l'autre, et je connais le sens des mots
04:17 et je sais combien Monseigneur de Moulin-Beaufort est précis.
04:20 Pour autant, quand on parle d'euthanasie, on parle de donner la mort avec ou sans consentement.
04:25 Ça n'est pas du tout le sujet ici.
04:28 Quand on parle de suicide assisté, c'est donner à quelqu'un la possibilité de déterminer la fin de sa vie.
04:35 Ça n'est pas le cas ici.
04:36 Puisque quand on regarde très précisément le texte, l'idée c'est qu'un patient,
04:42 dont dans des conditions strictes, on l'a déjà dit, vous savez qu'il y a plusieurs conditions,
04:46 et notamment cette notion de maladie grave incurable, cette notion de souffrance réfractaire,
04:52 cette notion d'être en capacité de donner son consentement,
04:56 quand vous dites tout ça, à ce moment-là, vous pouvez potentiellement demander à bénéficier d'une aide à mourir.
05:03 Dès lors que vous le demandez, vous avez un collège de médecins,
05:06 avec du personnel paramédical, des infirmiers, qui acceptent ou refusent.
05:11 En d'autres termes, ça n'est pas le patient tout seul qui peut décider de mettre fin à sa vie.
05:16 Et c'est ça la différence par rapport aux deux termes que vous venez d'évoquer.
05:20 Mais c'est vrai qu'on a du mal, pardon, on essaye ce matin vraiment d'aller dans le fond des choses,
05:25 parce que le sujet est trop délicat et trop sensible pour en faire un objet polémique.
05:31 Mais vous dites, et vous répétez Emmanuel Macron, et vous ce matin répète,
05:34 ce n'est ni l'euthanasie ni le suicide assisté.
05:39 Emmanuel Macron a lu une phrase qui figurera dans le projet de loi,
05:42 "l'administration de la substance létale est effectuée par la personne elle-même,
05:45 ou lorsque celle-ci n'est pas en mesure d'y procéder physiquement à sa demande,
05:49 soit par une personne volontaire qu'elle désigne, lorsqu'aucune contrainte d'ordre technique n'y fait obstacle,
05:55 soit par le médecin ou l'infirmier qui l'accompagne."
05:58 En clair, les patients qui veulent cette aide à mourir pourront soit s'administrer le produit létal eux-mêmes,
06:04 soit être aidés pour le faire par une tierce personne, un médecin ou une personne proche.
06:09 Pardon, mais ça c'est précisément l'euthanasie et le suicide assisté.
06:13 Pardonnez-moi, je pense que, et vous avez raison de vouloir faire du fond,
06:18 il faut que nous repartions dans le procédé, parce que tout est dans l'organisation du procédé.
06:25 Le texte tel qu'il est écrit aujourd'hui, parce que nous savons que là le texte partira,
06:29 il va faire aujourd'hui l'objet d'une réunion interministérielle, ensuite il partira au Conseil d'Etat,
06:35 ensuite il partira en discussion devant l'Assemblée.
06:38 Tel qu'il est écrit aujourd'hui, il précise bien quelles sont les conditions
06:44 avec lesquelles une personne peut demander l'aide à mourir.
06:47 On se les redit rapidement parce que c'est vraiment le point de départ.
06:52 Vous avez raison, il y a des conditions strictes qui entourent les choses.
06:54 Mais à la fin, quand on rentre dans ces conditions strictes...
06:57 Excusez-moi, si vous voulez bien qu'on aille au bout, parce que je crois que c'est important que chacun comprenne.
07:01 Donc les conditions, on les connaît, je passe sur la partie administrative de la majorité,
07:05 et d'être français ou de résider en France.
07:06 Après, on a le consentement, c'est-à-dire la capacité du patient,
07:11 quelque part, d'être encore en capacité de discernement, c'est lui et lui seul qui peut demander l'aide à mourir.
07:17 Donc personne de sa famille, c'est le malade qui demande à bénéficier de l'aide à mourir.
07:22 Quand il demande ça, il y a à ce moment-là, on laisse passer déjà deux jours pour attendre qu'il réitère éventuellement sa demande.
07:32 S'il réitère sa demande, il y a à ce moment-là une réunion d'une équipe médicale.
07:38 Cette équipe médicale, c'est le médecin traitant qui le suit, un médecin de la spécialité et un paramédical, probablement un infirmier.
07:47 Ensuite, cette équipe peut intéresser d'autres personnes qui sont autour du patient.
07:52 Cette équipe a deux semaines, quinze jours, pour donner un avis.
07:56 L'avis, c'est le patient est éligible à l'aide à mourir ou ne l'est pas.
08:00 S'il n'est pas éligible, il peut y avoir potentiellement un recours.
08:03 J'ose dire que ce n'est pas la question.
08:05 Il est éligible.
08:06 S'il est éligible, il est informé de son éligibilité.
08:09 Là, il a de nouveau un temps pour dire s'il veut l'aide à mourir.
08:14 Ce temps, c'est un minimum de deux jours et après, ça peut être le temps qu'il veut.
08:18 S'il a demandé cette aide à mourir, à ce moment-là, il y a une prescription, et c'est seulement à ce moment-là,
08:25 une prescription du produit létal.
08:27 Le produit létal est remis, arrive, et à ce moment-là, soit le patient...
08:32 - Il va l'acheter en pharmacie ou pas ? Parce que là aussi, les modèles sont différents.
08:35 À l'Oregon, aux Etats-Unis, on va à la pharmacie acheter le produit létal.
08:38 - Non, on ne va pas l'acheter.
08:40 Ça vient par la pharmacie des hôpitaux.
08:42 Après, si la personne n'est pas dans une ville où il y a un hôpital, ça peut être apporté à la pharmacie pour lui donner,
08:50 mais on ne va pas l'acheter.
08:51 Il vient spécifiquement, et il y a même dans le texte de loi, à la fin du texte de loi,
08:55 tout un procédé écrit sur ce que l'on fait du produit, si tout n'a pas été utilisé, mais je pense que...
09:00 Là, je reste dans le procédé.
09:02 Donc, la personne, effectivement, soit est en capacité de s'administrer le produit, elle se l'administre.
09:08 Elle peut être en présence de paramédicaux, de proches.
09:11 C'est la personne qui, après qu'elle ait dit, une fois encore, qu'elle voulait l'aide à mourir,
09:17 il y a un temps d'accompagnement avec l'ensemble des équipes pour déterminer les conditions.
09:22 Et la personne, soit s'administre le produit, soit c'est un paramédical qui le fait,
09:26 soit en l'état du texte, je dis bien en l'état du texte, ça peut effectivement être un proche déterminé par le patient.
09:33 - Mais donc ?
09:34 - Vous dites en l'état du texte, ça veut dire quoi ?
09:35 Ça veut dire que peut-être ça peut changer au Parlement, sa disposition ?
09:38 - Oui, vous savez, je pense que c'est important de se dire que ce texte va faire l'objet, évidemment, d'échanges au Parlement.
09:46 Et vous avez vu, c'est un texte sur lequel, d'ailleurs, le Président l'a dit dans son interview.
09:50 C'est un texte qui ne fera évidemment pas l'objet de l'urgence.
09:54 On a besoin de temps. On voit bien ce matin le temps dont on a besoin.
09:58 C'est un sujet de fond qui mérite du temps. Il est ouvert pour deux semaines à l'Assemblée.
10:03 Donc, évidemment, il y aura des échanges avec les parlementaires.
10:05 - Et pas de procédure accélérée, évidemment, sur un tel texte.
10:08 Et donc, la voie française, est-ce qu'on peut le formuler comme ça ?
10:13 C'est ouvrir sous conditions strictes.
10:16 Et je vous repose la question que vous posez, Léa Salamé.
10:20 D'une certaine manière, le droit à l'euthanasie si on ne peut pas faire le geste soi-même,
10:28 et au suicide si on peut le faire soi-même ?
10:32 - Ça n'est ni le droit à l'euthanasie, ni le droit au suicide pour les raisons que je viens d'expliquer.
10:37 Puisque la grande différence avec ces deux notions que vous mettez en avant,
10:41 c'est que systématiquement, c'est une demande du patient.
10:45 Et il y a plusieurs conditions indissociables.
10:49 La première, c'est l'état de santé, l'incurabilité, la gravité, les souffrances réfractaires.
10:54 Et parallèlement à ça, c'est l'accord de l'équipe médicale.
10:57 - Alors si l'accord médical refuse ?
10:59 Si l'équipe médicale refuse ?
11:01 Parce qu'à l'origine, vous avez hésité entre une décision du médecin traitant seul,
11:08 qui dit "si je dis moi je veux mourir, c'est lui qui donne l'autorisation ou pas".
11:13 Là, vous l'avez étendue à un corps médical, pour que ce soit une décision collective.
11:17 Si jamais, imaginons un cas où le corps médical dit "non".
11:21 Qu'est-ce qui se passe ?
11:21 - Alors d'abord, je n'ai personnellement pas hésité.
11:24 C'est l'occasion pour moi de rendre hommage à Agnès Firmin-Lebaudot, ma prédécesseure,
11:28 qui a beaucoup travaillé sur ce texte.
11:30 Et quand je suis arrivée, nous étions déjà sur la notion d'équipe médicale.
11:34 S'il y a désaccord de l'équipe médicale, l'aide à mourir n'est pas possible.
11:38 Et donc, le processus s'arrête.
11:40 Et à ce moment-là, si le patient veut évidemment recommencer, redemander un autre avis, etc.
11:47 Mais en tout cas, la procédure telle qu'elle avait démarrée, s'arrête.
11:52 Et ça, c'est vraiment un point important.
11:54 De la même manière, j'entendais hier sur une antenne,
11:57 un patient qui était un patient, l'exemple qu'on prend souvent d'ailleurs,
12:01 qui était un patient charcot, qui disait "moi en ce moment,
12:04 je profite encore de ce dont je peux profiter, et je n'ai pas envie de mourir en ce moment".
12:09 Mais l'idée de me dire que potentiellement, si la souffrance est plus importante,
12:14 si j'ai des douleurs plus importantes,
12:17 de me dire que je peux avoir le choix, est quelque chose d'important.
12:20 Et je crois qu'il faut aussi que nous entendions ces femmes et ces hommes
12:26 qui expliquent la situation qui est la leur.
12:29 Moi, je suis très consciente de la difficulté.
12:31 C'est un texte extrêmement lourd, extrêmement important,
12:35 mais il faut que nous entendions tout le monde.
12:37 Et vous avez entendu les oppositions depuis hier, notamment de l'Église, de la droite ?
12:42 Oui, mais pas tellement celles et ceux qui attendent depuis longtemps.
12:45 Si j'ai entendu quelques-uns qui nous disent "mais c'est très long",
12:48 et je leur dis "je comprends, mais...
12:50 et entendez qu'il faut du temps pour un texte aussi important".
12:53 Catherine Vautrin et Emmanuel Macron ont précisé, on l'a dit,
12:56 que cet accompagnement sera réservé aux personnes majeures.
13:00 Ils ont également indiqué que les personnes devront être capables
13:04 d'un discernement plein et entier, ce qui exclut de fait
13:08 les malades d'Alzheimer ou les malades atteints de pathologies neurodégénératives,
13:14 ou psychiatriques, ce que déplore l'Association pour le droit à mourir dans la dignité.
13:21 Pourquoi avoir fait ce choix ?
13:23 Tout simplement parce que le pivot du texte, c'est le consentement du patient.
13:28 Que du patient, rien que du patient.
13:30 Si le patient n'est plus en capacité de montrer son discernement,
13:35 de demander et de juger, ça n'est pas possible.
13:38 Mais pourrait-on envisager que la rédaction de directives anticipées
13:42 puisse permettre de résoudre cette question du discernement plein et entier ?
13:46 Si on a Alzheimer.
13:47 On peut dire qu'un malade diagnostiqué Alzheimer écrit dans ses directives anticipées
13:53 qu'il veut une aide à mourir à tel moment ?
13:57 À ce stade, ça n'est pas possible.
13:58 Et ça n'est pas possible parce que, d'ailleurs, ce texte a trois titres.
14:02 Le premier titre, il y a cinq articles qui sont des articles
14:05 qui concernent la stratégie de soins palliatifs,
14:07 deux articles sur le droit des patients,
14:09 et huit articles sur l'aide à mourir avec toute la description.
14:13 Sur le droit des patients, c'est extrêmement important de dire
14:16 qu'au jour d'aujourd'hui, c'est la capacité du discernement
14:20 et ce ne sont pas les directives anticipées qui suffisent.
14:22 Donc, pas d'Alzheimer, c'est exclu.
14:24 Vous parliez de Charcot, parce qu'évidemment...
14:26 Ou de cancer incurable.
14:27 Ou de cancer incurable.
14:28 Parce qu'il faut rappeler qu'aujourd'hui, la loi Claes-Leonetti,
14:30 elle permet ce droit à mourir pour les malades condamnés à court terme.
14:36 Toute la question, et là aussi, c'est une énorme question
14:39 que vous devrez débattre à l'Assemblée nationale,
14:42 c'est la question du temps.
14:43 Emmanuel Macron a précisé qu'il faut avoir une maladie incurable
14:46 et un pronostic vital engagé, attention, à court et moyen terme.
14:50 Jean-Léonetti lui répond, qu'est-ce que ça veut dire moyen terme ?
14:54 Court terme, on arrive à voir, c'est quelques jours,
14:56 je suis condamné dans quelques jours, quelques semaines,
14:59 mais moyen terme, c'est quoi ?
15:00 C'est un an ? C'est deux ans ? C'est six mois ? C'est douze mois ?
15:04 Qu'est-ce que...
15:05 Ça, c'est Jonathan Denis de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité
15:08 qui vous demande qu'est-ce qu'il faut répondre aux personnes
15:11 qui auraient un pronostic vital engagé à 14 mois ?
15:13 Qu'il faut souffrir encore un peu avant de pouvoir accéder à une aide à mourir ?
15:17 C'est quoi moyen terme ?
15:18 J'ai effectivement échangé avec Jonathan Denis.
15:21 La grande difficulté, c'est que la mort n'est pas quelque chose qu'on programme
15:26 et personne ne sait le moment où la mort va arriver.
15:30 La Haute Autorité de Santé, au moment où nous nous parlons,
15:33 vous venez de très bien le dire,
15:35 dit que le court terme, c'est quelques jours, quelques semaines,
15:37 et aujourd'hui, la notion de moyen terme, c'est six à douze mois.
15:40 Après, seule l'équipe médicale, en l'état de la science,
15:45 est en capacité d'avoir une approche.
15:47 On passe au Standard Inter où nous attend Nathalie.
15:50 Bonjour, bienvenue.
15:51 Bonjour Monsieur, bonjour Mesdames.
15:54 Je vous appelle ce matin parce que mon père est décédé le 16 mars dernier dans un EHPAD.
16:00 Alors il s'agit maintenant de regarder la mort en face.
16:04 Papa avait rédigé ses directives anticipées à l'entrée de l'EHPAD.
16:08 Il les a renouvelées au mois de novembre avec son médecin prétendant
16:12 qu'il voulait partir et qu'il voulait mourir.
16:15 Le 4 mars, donc il y a un petit peu plus d'un an,
16:18 on nous a appelé pour dire que papa allait bénéficier d'une sédation profonde et continue.
16:23 Et ça n'a pas du tout été le cas.
16:25 Il a énormément souffert.
16:27 J'ai passé ces 15 derniers jours en sa compagnie,
16:29 en passant quelques nuits et toutes mes journées.
16:33 Il était à 2 grammes de midazolam et trois jours avant de mourir,
16:37 constatant les souffrances extrêmes qu'il subissait,
16:42 le médecin a accepté de passer à 20 grammes.
16:46 Je trouve tout à fait déplorable de ne pas pouvoir mourir dignement.
16:51 Alors certes il avait Alzheimer,
16:53 mais il avait rempli ses directives anticipées en arrivant à l'EHPAD.
16:57 Et au mois de novembre, donc quatre mois avant de décéder,
17:00 il en avait aussi parlé à son médecin.
17:03 Pourquoi n'accompagne-t-on pas dignement toutes les personnes,
17:09 et aussi les personnes en EHPAD ?
17:12 Papa n'a pas mérité de mourir dans des souffrances telles,
17:18 et je ne le souhaite absolument à personne.
17:21 Merci Nathalie pour ce témoignage.
17:25 Catherine Vautrin vous répond.
17:26 Oui, bonjour madame.
17:27 D'abord je vous présente évidemment mes condoléances.
17:30 Je comprends la difficulté que vous mettez en avant.
17:32 Le sujet, vous le comprenez bien,
17:34 c'est effectivement dans le texte tel qu'il est écrit aujourd'hui,
17:38 et c'est vraiment une des conditions majeures,
17:40 c'est la capacité de discernement et la demande faite par la personne.
17:46 Et aujourd'hui, les conditions qui sont mises dans ce texte
17:52 restent extrêmement fermes sur le sujet.
17:54 Nous avons besoin d'avoir la certitude
17:57 de la volonté exprimée et réitérée de la personne.
18:02 Donc après tout le sujet, c'est celui, dans le cadre de votre père,
18:05 de l'accompagnement des soins palliatifs,
18:08 de la capacité que l'on peut avoir à essayer de l'accompagner
18:12 dans les conditions que j'oserais qualifier de moins mauvaises possibles.
18:15 Emmanuel Macron a précisé qu'aucun lieu ne serait exclu pour cette aide à mourir.
18:20 Domicile, EPAD dont nous parlait Nathalie à l'instant,
18:25 ou établissement de soins.
18:27 L'évêque de Nanterre, Mathieu Rouget, réagissait sur ce point à notre micro hier.
18:31 Qu'est-ce que ça veut dire qu'on va ouvrir massivement la possibilité
18:36 des gestes laiteaux dans les EPAD ?
18:38 Et il ajoutait, le scandale des EPAD d'il y a quelques mois
18:41 serait peu de choses à côté de cette ouverture.
18:44 Qu'est-ce que vous lui répondez sur ce point très sensible ?
18:47 Vous voyez que je viens de répondre à cette fille
18:50 qui vient de nous parler de la mort de son père en disant très concrètement
18:54 qu'on peut avoir dans un EPAD quelqu'un qui est malade,
18:59 d'une maladie grave, incurable, avec des souffrances réfractaires,
19:03 qui est quelqu'un qui a encore son consentement
19:05 et qui donc, quelque part, répond aux différentes conditions qui sont menées.
19:09 Et à ce titre-là, dans l'EPAD comme dans un autre endroit,
19:13 il pourra bénéficier de l'accompagnement et de l'aide à mourir.
19:17 Pour autant, il est hors de question, et c'est extrêmement clair,
19:21 que le texte s'applique à des personnes en EPAD.
19:24 Et c'est pour ça, je l'ai dit au début de notre échange, je le redis,
19:28 c'est une pathologie, ça n'est pas un âge.
19:30 Ce que l'on regarde, c'est la pathologie du patient
19:33 s'il répond à des conditions très strictes.
19:35 Mais on peut renverser et on peut se dire
19:38 pourquoi est-ce que quelqu'un qui répond à toutes les conditions,
19:41 parce qu'il n'est pas chez lui, parce qu'il n'est pas dans un service hospitalier,
19:44 ne pourrait pas avoir accès ?
19:46 On comprend bien, mais pour que ce soit clair, pour répondre à Mathieu Rouget,
19:49 à l'évêque qui était à votre place hier,
19:52 si on est dans un EPAD et qu'on répond à ces conditions-là,
19:55 c'est-à-dire charcot ou un cancer incurable,
19:58 ou certains Parkinson, et qu'on est dans ce terme de moyen terme,
20:03 c'est-à-dire le pronostic vital est engagé de 6 à 12 mois,
20:09 et qu'on est dans un EPAD, on pourra avoir accès à cette aide à mourir.
20:12 Dès lors que l'on répond aux 5 conditions,
20:15 c'est-à-dire dans un EPAD on a forcément plus de 18 ans,
20:18 on réside en France puisque l'EPAD est en France,
20:20 qu'on a son consentement, son discernement,
20:23 c'est très important qu'on ait son discernement.
20:26 On a ensuite une maladie grave et incurable,
20:28 et enfin on a des souffrances réfractaires.
20:30 À partir de là, on peut demander,
20:32 l'équipe médicale dans l'EPAD comme ailleurs donnera son avis,
20:36 et à ce moment-là le processus peut être enclenché.
20:38 Mais vraiment, c'est la pathologie, en aucun cas l'État civil.
20:42 - Christine, au Standard Inter, bonjour et bienvenue.
20:46 - Bonjour, bonjour madame la ministre, merci de prendre mon appel.
20:49 Je vais peut-être vous paraître hors sujet,
20:51 mais moi ce matin je voudrais vous parler du droit de continuer à vivre dans la dignité.
20:56 Mon mari est atteint de la maladie de Charcot,
20:57 il est trachéotomisé depuis 15 ans maintenant.
21:00 Donc je traduis, il est sous ventilation invasive.
21:04 On a fait des malades de Charcot depuis plusieurs mois,
21:06 un emblème de la bataille pour le droit de mourir dans la dignité.
21:11 Ce qu'il faut savoir c'est qu'il y a beaucoup de malades qui se battent
21:14 pour continuer à vivre, et dont beaucoup choisissent la trachéotomie,
21:17 c'est-à-dire cette ventilation invasive.
21:19 Or aujourd'hui, on leur refuse la plupart du temps ce droit
21:22 dans des centres dits référents ECLA,
21:25 sous prétexte qu'ils seront un poids pour les proches aidants.
21:28 Alors ma première question,
21:30 qu'est-ce que vous allez faire pour que ces personnes très dépendantes
21:33 puissent vivre dignement, pour qu'on ne leur refuse pas leur choix de vie,
21:37 sous prétexte que notre pays ne s'est pas accompagné de la grande dépendance
21:40 autrement qu'en faisant reposer le poids sur les proches ?
21:44 Deuxième question, qu'est-ce que vous allez faire pour éviter les dérives
21:48 à des malades ECLA qui craignent, et ils sont très nombreux à le craindre,
21:52 d'être poussés vers la sortie, en lieu et place d'une trachéotomie ?
21:57 Merci.
21:57 Merci beaucoup Christine pour cette intervention de questions.
22:01 Donc, qu'allez-vous faire pour aider à vivre ?
22:05 Et c'est la question de la dépendance.
22:07 Pour commencer, Catherine Votrain vous répond.
22:09 Merci madame pour votre témoignage, et vous avez raison.
22:12 Par définition, le ministre de la Santé est aussi là avant tout pour dire
22:16 que la médecine française a pour objectif d'aider les gens à vivre.
22:21 La médecine française est là pour apporter des traitements,
22:25 elle est aussi là pour apporter des soins.
22:26 Et vous me permettez, par votre question, de parler de tout le sujet
22:31 qui est celui de l'accompagnement des patients,
22:33 et je pense notamment à l'accompagnement des soins palliatifs,
22:36 avec tout le travail qui est mené autour de Franck Chauvin,
22:39 pour investir sur le sujet, doubler les budgets et apporter des réponses.
22:43 Parce que, et nombreux sont les patients que j'ai rencontrés,
22:47 qui effectivement souhaitent vivre, leur vie a changé,
22:50 ce n'est pas pour ça qu'elle ne vaut pas la peine d'être vécue,
22:52 et qu'ils ont effectivement besoin d'être accompagnés.
22:55 Et merci de votre témoignage, vous avez raison,
22:58 on doit faire plus à la fois sur cette notion de trachéotomie,
23:01 mais également sur l'accompagnement,
23:04 et ça c'est tout le sens du plan que je sortirai d'ici la fin du mois de mars.
23:07 Sur les soins palliatifs, vous avez entendu la critique de Claire Fourcade hier,
23:11 présidente de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs,
23:14 qui se dit consternée par les annonces du président de la République.
23:17 Je la cite "Nous ne pouvons qu'être consternés par le manque d'ambition
23:20 et d'affichiance qui concernent les soins palliatifs.
23:22 L'ambitieuse stratégie décennale, parce que ce sera sur 10 ans,
23:26 est expédiée en quelques mots bienveillants.
23:28 Le président de la République annonce un milliard d'euros supplémentaires
23:30 investis sur 10 ans pour les soins palliatifs,
23:32 à mettre en regard du 1,6 milliard d'euros déjà consacré actuellement.
23:36 L'ambition présidentielle pour les soins palliatifs se résume donc
23:39 à une hausse de 6% de leur budget annuel, soit 1,50 euros de plus par français et par an.
23:46 Face au vieillissement de la population, face à l'état de nos soins palliatifs aujourd'hui,
23:51 dont on sait qu'en France, on est très en retard par rapport à nos voisins,
23:55 est-ce qu'il ne faut pas mettre plus d'argent sur les soins palliatifs ?
23:58 Plusieurs points. D'abord, ce n'est pas un sujet de vieillissement,
24:01 puisque quand on parle du texte dont nous parlons ce matin,
24:05 ce n'est pas le vieillissement, c'est une maladie.
24:07 Pardonnez-moi, mais je reviens toujours sur ce sujet parce qu'il est important.
24:10 Maintenant, je suis allée à Poitiers, dans le service de Laurent Montaz,
24:14 qui est un des membres de la Société française de soins palliatifs.
24:18 Et j'ai beaucoup échangé avec les équipes.
24:21 Le sujet, et Claire Fourcade le sait très bien, c'est de mettre en place une filière.
24:25 Et ça, c'est ce à quoi je m'engage.
24:26 En d'autres termes, former des chefs de clinique, des assistants chefs de clinique,
24:31 des professeurs d'université.
24:32 Au moment où nous nous parlons, vous n'avez pas un PU-PH en charge.
24:37 Qu'est-il ?
24:38 Un professeur d'université, praticien hospitalier.
24:40 Vous avez raison.
24:41 Et donc, nous n'en avons pas un.
24:42 Donc, tout le sujet, j'ai travaillé là-dessus avec Sylvie Retailleau.
24:45 L'objectif, c'est de créer une filière.
24:47 Et ensuite, effectivement, on va aller plus loin.
24:49 On a 144 services aujourd'hui et 420 unités de soins palliatifs.
24:53 Oui, il faut continuer et on va accélérer dès 2024 et 2025.
24:55 Une dernière question sur vous, Catherine Votrain.
24:58 Vous allez porter, défendre, incarner ce texte sur la fin de vie,
25:01 alors qu'en 2004, quand vous étiez secrétaire d'État aux personnes âgées dans le gouvernement Raffarin,
25:06 vous aviez jugé inacceptable les démarches d'euthanasie active dans le cadre des débats de la loi Léonetti.
25:14 Vous mettiez en garde alors contre la boîte de Pandore des tentations eugénistes dans les situations de fin de vie.
25:21 Aujourd'hui, êtes-vous pleinement, totalement alignée sur la philosophie d'Emmanuel Macron ?
25:27 Deux réponses, Nicolas Delnoron.
25:28 La première, c'est que j'ai plusieurs fois dit qu'on ne parlait pas d'euthanasie dans ce texte.
25:33 Deuxième question, est-ce que vous, en 20 ans, vous n'avez pas évolué ?
25:36 Vous avez évolué donc.
25:39 Qui n'évolue pas dans sa vie ? Heureusement qu'en 20 ans, on bouge.
25:42 Ben oui.
25:44 C'est mieux de le dire, c'est tout à fait.
25:47 Merci beaucoup Catherine Votrain d'avoir été à notre micro.

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