• il y a 9 mois

Tous les samedis et dimanches à 18h17, Pierre de Vilno reçoit un invité au cœur de l'actualité politique pour un moment d'échange franc sur les dossiers brûlants du moment. Ce soir David Amiel, vice-président de Renaissance, député de Paris.
Retrouvez "Les invités d'Europe Soir week-end" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-invite-europe1-week-end

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00:00 - 18h15 sur Europe 1, l'interview politique et notre invité ce soir est vice-président de Renaissance et député de Paris.
00:08 Bonsoir David Amiel. - Bonsoir.
00:10 - Ce n'est pas la première fois que vous vous intéressez aux grandes fortunes.
00:13 Déjà en octobre 2022, vous présentiez un rapport sur les super profits avec un certain Manuel Bompard.
00:21 Et là, alors je vous donne l'occasion de vous expliquer, on va rentrer dans un entretien un peu technique,
00:26 mais en même temps j'aimerais bien savoir ce qu'il se passe.
00:29 Vous auriez lancé l'idée d'un impôt minimal européen sur les grandes fortunes.
00:33 Alors pourquoi et pour quoi faire ?
00:35 - Vous avez raison, il faut d'abord partir du contexte.
00:37 La transition énergétique qui est devant nous, qui est indispensable à la fois pour tenir nos objectifs climatiques
00:42 et pour assurer notre souveraineté, va requérir des investissements publics absolument considérables.
00:47 C'est probablement le plus grand défi économique et financier depuis 1945.
00:51 - Quelques exemples d'investissement ?
00:52 - Investir dans la production d'énergie, investir pour aider les ménages à rénover les logements,
00:56 investir pour avoir des voitures électriques accessibles et ainsi de suite,
01:00 et donc sortir aussi de nos dépendances au pétrole, au gaz russe et moyen-oriental,
01:04 aux technologies américaines ou chinoises.
01:06 Aucun État européen n'aura les épaules assez solides pour les mener seuls.
01:10 On va devoir agir ensemble à la fois pour investir, pour accompagner les classes moyennes
01:14 et pour dégager de nouvelles ressources en faisant effectivement contribuer
01:18 ceux qui ont le plus gagné à la mondialisation en ne respectant pas toujours les mêmes règles du jeu.
01:24 - Ah, donc vous visez d'abord les fautifs d'une certaine manière
01:27 qui auraient contourné des règles ?
01:29 - Je pense d'abord aux importations.
01:33 On a des importations de biens de pays qui ne respectent pas les mêmes exigences environnementales.
01:38 On a eu dans les dernières années, par exemple venant de Chine,
01:40 où on produit à partir d'un charbon qui émet des gaz à effet de serre en quantité absolument astronomique.
01:46 On a mis en place ces dernières années une taxe carbone aux frontières européennes.
01:50 C'est une grande victoire du président de la République et de Bruno Le Maire.
01:53 Il va falloir que dans les années qui viennent, on continue à en augmenter la puissance.
01:57 On a des multinationales qui avaient recours à des dispositifs divers d'optimisation fiscale
02:02 pour aller se localiser par exemple dans des pays où l'impôt sur les sociétés était très bas.
02:07 Là aussi, c'est une grande victoire française.
02:09 On a obtenu un impôt minimum sur les sociétés qui commence à y mettre bon ordre
02:13 et qui rapportera dans les caisses de l'État français environ 1 milliard d'euros par an.
02:18 - C'est-à-dire que dans les pays où il n'y avait pas d'IS,
02:20 du coup, vous en avez instauré un par défaut d'une certaine manière ?
02:23 - On a instauré la capacité à prélever un impôt sur les sociétés supplémentaires
02:26 quand effectivement des entreprises paiement ailleurs.
02:29 - Quand ça concerne un acteur français qui est installé dans une entreprise européenne ?
02:33 - C'est la même logique que je crois qu'il faut pouvoir poursuivre en matière de grandes fortunes,
02:37 c'est-à-dire des personnes physiques, des milliardaires, des multimilliardaires
02:40 qui aussi, comme ces entreprises multinationales,
02:43 peuvent avoir recours à différents moyens techniques pour réduire leur taux d'imposition.
02:47 Il nous faut travailler avec nos partenaires européens
02:49 à un impôt minimum européen sur les grandes fortunes
02:52 qui permet de s'assurer, au fond, que chacun prend sa juste part.
02:55 - Jusqu'à votre dernière phrase, je vous suivais mais...
02:58 avant votre dernière...
02:59 Cette dernière phrase, elle est totalement antinomique avec ce que pense le Président de la République
03:03 qui encourage justement les grandes fortunes,
03:06 qui est très proche de certains grands patrons du CAC 40,
03:10 on le sait d'une certaine manière,
03:12 qui fait le sommet Choose France à Versailles
03:15 en invitant les plus grands investisseurs du monde entier pour justement choisir la France.
03:19 L'impôt, pardonnez-moi, mais c'est un réflexe de gauche,
03:24 c'est un réflexe...
03:26 Le Président de la République a montré ces dernières années qu'il était plutôt un libéral
03:30 plutôt que quelqu'un qui va refaire...
03:32 Et d'ailleurs, Bruno Le Maire a toujours dit
03:35 "On n'augmentera pas, en tout cas en ce qui concerne la sphère française,
03:38 on n'augmentera pas les impôts."
03:39 Alors pourquoi tout d'un coup on reparle d'impôts ?
03:41 - Parce que votre dernière phrase est peut-être la plus importante.
03:43 Dans ce que vous avez dit, effectivement,
03:45 augmenter massivement les impôts à l'échelle nationale, ça ne sert à rien.
03:48 C'est finir par être les dindons de la farce dans la mondialisation actuelle
03:51 parce que les entreprises et les particuliers iront produire des richesses ailleurs,
03:55 vous ne réglerez donc ni la question de la justice sociale,
03:58 ni la question de l'activité économique,
04:00 et au fond, vous vous tirez une balle dans le pied.
04:01 C'est pour ça que la ligne du Président de la République,
04:03 ça a toujours été d'encourager la production, l'investissement en France,
04:06 et on a obtenu des résultats inédits en la matière,
04:09 et d'agir en matière de régulation de la mondialisation au niveau européen.
04:13 Et là, ce qui est très important,
04:14 c'est que pendant des années, la France a poussé dans cette direction.
04:17 Mais la France trouvait porte-close.
04:19 Depuis qu'on a Emmanuel Macron, on a obtenu sa victoire.
04:21 Taxe carbone aux frontières, on en parlait depuis des années,
04:23 on l'a eu. Impôts minimums sur les sociétés, on l'a eu.
04:26 - Mais là, on est sur des structures. - Super profit !
04:28 Vous en parliez.
04:29 Super profit dans le domaine de l'énergie, par exemple,
04:32 on se rappelle de tout le débat qu'il y avait eu en 2022.
04:34 On a obtenu une contribution exceptionnelle sur les super profits au niveau européen.
04:39 Ah non, ce n'était pas à la marge, ça représentait des milliards et des milliards d'euros.
04:42 Mais ce qui était très important, c'était de le faire avec les autres pays européens
04:45 pour ne pas, évidemment, désavantager notre pays.
04:47 Je comprends les entreprises, je comprends...
04:51 Mais quand on dit "grande fortune européenne", ce sont des individus,
04:55 ce sont des familles, ce sont des gens qu'on voit dans les classements
05:00 de différents magazines qu'on ne va pas citer ici.
05:04 Comment est-ce que vous allez faire le casting de ces personnes que vous allez taxer ?
05:10 C'est-à-dire que ça va être un seuil,
05:11 ou est-ce que ça va être une façon d'utiliser l'optimisation fiscale ?
05:16 Comment est-ce que vous allez cibler les gens ?
05:18 Jusqu'à présent, il y a deux façons de voir.
05:21 Soit on se dit, il y a des gens, par exemple,
05:24 comme Bernard Arnault qui est l'homme le plus riche du monde,
05:26 mais il vous dira "LVMH est une entreprise qui emploie 160 000 personnes, il me semble,
05:32 qui crée de l'emploi en France,
05:34 qui, quand la cathédrale brûle, envoie de l'argent tout de suite, sans se poser de questions.
05:39 Comment est-ce qu'on peut mettre le jou sur ces personnes qui font fonctionner les pays,
05:43 d'une certaine manière, en créant de l'emploi, en disant
05:45 "Tiens, puisque vous gagnez beaucoup d'argent, vous allez payer encore plus."
05:50 Il ne s'agit évidemment pas de stigmatiser telle ou telle,
05:52 et particulièrement pas des entrepreneurs qui ont réussi et qui font, effectivement,
05:55 vous l'avez dit, rayonner notre pays et qui créent beaucoup d'emplois.
05:58 Il s'agit simplement de s'assurer qu'on a des règles
06:01 qui font que les personnes les plus riches dans nos pays européens payent leur juste part.
06:06 On a aujourd'hui des mécanismes qui sont accessibles aux plus grandes fortunes,
06:09 qui ne sont pas accessibles aux classes moyennes,
06:11 qui permettent de réduire votre imposition.
06:14 Il y a plusieurs schémas techniques pour pouvoir travailler dessus.
06:17 - Ce sont des optimisations fiscales au sens propre que vous visez,
06:22 c'est-à-dire des manip' pour contourner tel ou tel système.
06:28 Est-ce que ce sont des individus, encore une fois,
06:30 et je vous ai posé la question tout à l'heure,
06:32 des fraudeurs, comme on avait eu aussi des fraudeurs
06:35 qui fuyaient le fisc français et qui cachaient leur argent à l'étranger,
06:41 et d'ailleurs, ça a fonctionné puisque beaucoup sont revenus en France, sont régularisés.
06:45 Encore une fois, le modus opérant dit,
06:49 comment est-ce que vous allez faire pour trouver ces gens-là ?
06:52 - C'est exactement ce que vous disiez, c'est-à-dire de pouvoir lutter
06:54 contre des mécaniques d'optimisation fiscale.
06:57 On sait que, par exemple, en ayant recours à certaines holdings,
07:00 on peut réduire artificiellement en Europe.
07:02 Aux Etats-Unis, c'est différent, ils ont des règles qui précisément l'empêchent.
07:05 Mais en Europe, ils permettent de réduire son taux d'imposition.
07:07 Il y a des travaux qui sont menés par l'économiste Gabriel Zuckman
07:10 à l'école d'économie de Paris, ça a d'ailleurs été présenté au G20.
07:13 Bruno Le Maire a souligné que la France était engagée
07:16 pour faire progresser ce dossier au niveau international et au niveau européen.
07:20 Je pense qu'on va dans la bonne direction.
07:21 À nouveau, on a lutté contre l'optimisation fiscale au niveau des entreprises.
07:25 Il faut pouvoir le faire pour les plus grandes fortunes.
07:27 Au niveau des individus, Gabriel Zuckman estime que
07:30 cette taxation minimale des super-riches,
07:33 selon ses calculs, pourrait rapporter 250 milliards de dollars.
07:37 Il y a plusieurs hypothèses sur la table.
07:39 Ce qui compte et ce qui est prioritaire, c'est qu'on puisse avoir les mêmes règles.
07:42 Parce qu'à nouveau, ce dont on a besoin en la matière,
07:44 c'est que la France applique les mêmes dispositifs que dans les autres pays.
07:48 C'est le début d'un travail, d'une offensive.
07:50 On est allé très vite sur l'impôt minimum sur les sociétés.
07:53 Vu les urgences de l'époque, en matière de transition écologique,
07:56 en matière des investissements qu'on va devoir conduire aussi
07:59 pour la défense, pour l'autonomie stratégique,
08:01 on va pouvoir mobiliser nos partenaires.
08:03 Est-ce que ce dossier-là de l'impôt européen est, j'allais dire,
08:07 un des chapitres importants de la course de renaissance aux Européennes
08:11 et donc qui est menée par Valérie Ayé ?
08:13 Ce qui sera central dans la course pour les Européennes de renaissance,
08:17 c'est de dire que de manière générale,
08:19 c'est au niveau européen qu'on a besoin d'avancer sur ces grands enjeux.
08:22 Maintenant, aujourd'hui, je m'adresse à vous
08:24 parce que je suis rapporteur spécial du budget écologie à l'Assemblée nationale.
08:27 Et au-delà de l'exemple que l'on aborde aujourd'hui,
08:30 une chose est certaine, on a besoin d'Europe
08:32 pour affronter ce défi de la transition écologique.
08:34 On n'y arrivera pas tout seul.
08:36 Les sommes en jeu sont trop importantes.
08:38 Il va falloir modifier les règles de la mondialisation,
08:40 notamment pour éviter cette concurrence déloyale
08:43 venant de pays produisant dans des conditions environnementales
08:48 beaucoup plus dégradées.
08:49 Il y a ces questions fiscales à pouvoir régler.
08:51 Il y a des investissements à pouvoir mener en commun.
08:53 C'est véritablement d'une grande ambition européenne
08:55 en matière de transition énergétique dont on aura besoin.
08:58 Et pourtant, c'est un scrutin que habituellement les Français boudent.
09:02 Comment est-ce que vous allez leur expliquer pendant ces quelques mois ?
09:05 Parce que Valérie Ayé arrive malheureusement
09:07 après beaucoup d'autres personnes qui sont déjà en place
09:10 pour leur dire que ce scrutin est important et donc il faut voter.
09:15 Ce scrutin est plus qu'important.
09:16 Ce n'est pas un scrutin des Européennes comme les autres.
09:19 C'est une année où les défis qui se posent à l'Europe
09:22 sont véritablement existentiels.
09:24 On n'avait pas dans les derniers scrutins
09:26 une guerre qui faisait rage sur le continent européen.
09:28 On l'a aujourd'hui en Ukraine.
09:29 On n'avait pas les dernières années
09:31 une montée à ce point aiguë des rivalités économiques
09:35 entre l'Amérique et la Chine
09:36 avec un risque pour l'Europe d'être déclassée,
09:38 d'être broyée entre ces deux géants.
09:41 Et donc je crois que c'est ça qui fait la particularité de ce scrutin.
09:43 Et je crois d'ailleurs que beaucoup de Français l'ont bien compris.
09:45 Qu'est-ce que vous dites à ceux qui vous disent
09:48 "de toute façon c'est plié, le RN est devant
09:51 et donc c'est eux qui vont gagner".
09:52 Vous savez, il y a toujours à ce moment-là de l'année
09:55 des prophètes de tel ou tel résultat.
09:58 Je crois que la campagne commence maintenant.
10:00 Et qu'on a plusieurs semaines, plusieurs mois
10:02 pour montrer une à une l'ensemble des contradictions du RN.
10:05 C'est quand même un parti qui change tout le temps des vies
10:07 et dont la seule cohérence est un acharnement systématique
10:11 à trahir au fond les intérêts fondamentaux du pays.
10:14 Pourquoi se trahir ?
10:15 Ils trahissent nos intérêts en matière de sécurité
10:17 quand ils se font, et je cite le rapport parlementaire
10:19 qui avait été produit sur la question,
10:21 la courroie de transmission du Kremlin.
10:23 Ils trahissent nos intérêts fondamentaux en matière économique.
10:25 Vous parlez des financements russes du parti ?
10:28 Je parle de la proximité idéologique
10:30 entre le RN et la ligne de Moscou.
10:33 Je pense évidemment à la question agricole.
10:36 On a un RN qui prétend à Paris défendre les agriculteurs
10:39 et qui à Bruxelles ne vote pas le budget de la PAC.
10:42 On a un RN qui prétend défendre l'agriculture,
10:45 la puissance économique française
10:47 et qui nous propose de sortir des traités commerciaux
10:50 qui font qu'on exporte dans le monde entier
10:52 et que notre pays est une grande puissance agricole.
10:54 C'est ça que nous allons démontrer dans les semaines qui viennent.
10:56 Ils ne votent la PAC, mais il y a certains agriculteurs
10:58 qui pensent que la PAC ce n'est pas bien.
11:00 Non, les agriculteurs veulent réformer
11:02 tel ou tel aspect de la PAC.
11:04 Mais je crois que tous nos agriculteurs savent très bien
11:06 que la politique agricole commune est absolument indispensable
11:08 à nos pays, c'est un grand acquis des années 60.
11:11 Ils estiment qu'il faut, j'allais dire,
11:13 c'est la réformer, c'est un doux euphémisme.
11:15 Il faut renverser la table et il faut tourner ta plate.
11:18 Mais ce que propose le RN, ce n'est pas de la réformer,
11:20 c'est d'en sortir.
11:21 Parce que quand le RN fait l'éloge du Brexit,
11:23 on a vu ce qui est arrivé à une agriculture anglaise
11:26 qui ne bénéficiait plus de la politique agricole commune.
11:29 Elle est rentrée dans une crise extrêmement profonde.
11:31 C'est ça le projet du RN
11:33 et c'est effectivement très différent d'une autre.
11:35 Nous proposons un projet de réforme, ils proposent un projet de sortie.
11:37 Merci beaucoup David Damiel d'avoir été l'invité d'Europe 1 ce soir.

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