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00:00 Nous voici à Bambilor. C'est juste là, entre Dakar et Thies au Sénégal.
00:07 Ces petites maisons que vous voyez, ils en sortent de terre de plus en plus depuis 2020.
00:11 Bambilor, dans le département de Rufisque.
00:14 450 villes, 2000 unités de logements, voire 10 000 hommes.
00:17 Un cadre calme doté de commodités.
00:20 Bambilor, c'est une des communes qui devait bénéficier en priorité d'un programme de l'État pour construire des logements sociaux.
00:27 Construction de 100 000 logements.
00:29 Un programme lancé en 2019 par Macky Sall, le président du pays.
00:35 Il s'agit d'une initiative ambitieuse d'offrir un logement à des coûts compris entre 10 et 12 millions de francs.
00:44 Ok, donc des villas à bas coût devaient être construites, et tout ça en 5 ans.
00:49 Mais voilà, que les images de Bambilor ne trompent pas.
00:52 Le bilan, au bout de 5 ans, est loin d'être atteint.
00:56 Moins de 2000 logements construits et souvent plus chers que ce qui était promis.
01:01 Alors pourquoi le Sénégal n'arrive-t-il pas à produire de logements sociaux ?
01:07 Bon, pour comprendre, on vous emmène à la cité du Lac Rose, à Bambilor.
01:15 Dans ce lotissement, les 150 premiers logements sociaux ont été construits.
01:20 Une partie destinée à la vente.
01:22 Mais vous allez voir, ces logements ne sont clairement pas adaptés.
01:26 Premièrement, parce qu'ils sont trop petits.
01:29 Ces maisons sont composées de deux chambres uniquement.
01:32 Or, une famille sénégalaise compte en moyenne 4 enfants.
01:36 Il faudra donc engager des frais d'agrandissement.
01:40 Et deuxièmement, parce qu'elles sont trop chères.
01:44 Un F3 de ce type est vendu 14 millions de francs CFA.
01:48 Avec une chambre en plus, c'est même 15 millions de francs CFA.
01:53 Selon une étude, pour acquérir ce type de maison,
01:56 une famille doit avoir un revenu mensuel minimal de 270 000 francs CFA.
02:02 Avec des mensualités de 90 000 francs CFA pendant 15 ans.
02:07 Or, voilà la répartition des revenus des ménages au Sénégal.
02:12 Seules les catégories les plus aisées peuvent s'offrir ce type de logement.
02:18 On est donc loin de la cible d'un logement social.
02:21 Alors, il existe bien un deuxième dispositif
02:26 pour les ménages qui n'ont pas la possibilité d'acheter
02:29 et notamment ceux qui travaillent dans l'informel,
02:31 soit 97% de la population active sénégalaise.
02:35 Ce dispositif, c'est la location-vente.
02:38 Les ménages à revenus faibles ou irréguliers
02:41 pourront ainsi acquérir une villa ou un appartement
02:44 en s'acquittant d'un loyer compris entre 60 000 et 100 000 francs par mois.
02:49 Un loyer de 100 000 francs CFA.
02:52 Sauf qu'au Sénégal, le salaire mensuel moyen est de 90 000 francs CFA.
02:58 Les logements qui sont effectivement mis sur le marché dans le cadre de ces programmes,
03:01 ils sont réellement abordables pour les 2, 3 grands maximums
03:05 premiers déciles de la population.
03:07 Donc ce qui laisse de côté à minima 2 bons tiers de la population, si ce n'est plus.
03:13 Bon, trop petit et pas abordable.
03:16 Alors pourquoi les promoteurs ne parviennent-ils pas à proposer des logements moins chers ?
03:21 La première raison, vous vous en doutez, c'est bien sûr le foncier.
03:26 Au Sénégal, le foncier disponible pour construire est rare,
03:30 car 95% des terrains appartiennent à ce qu'on appelle le domaine national.
03:35 Ce domaine national, c'est une spécificité juridique sénégalaise de 1964.
03:42 Ce sont des terres non immatriculées, c'est-à-dire sur lesquelles personne n'a de titre de propriété.
03:49 Certains y vivent, les cultivent, ou même parfois revenduent de l'espace.
03:55 Et l'ambition de l'État, c'est de reprendre une partie de ces terrains
04:01 et les donner gratuitement aux promoteurs.
04:03 On ne vient plus arracher la terre des gens, on préfère négocier.
04:07 Les communautés sur place, s'il y en a, sont indemnisées.
04:11 Mais voilà, le problème, c'est que ces déplacements de population ne se passent pas toujours bien.
04:15 Mes grands-parents sont nés ici, et un étranger veut venir prendre nos terres.
04:19 Depuis nos ancêtres jusqu'à présent, nous habitons ces terres-là.
04:23 Du jour au lendemain, ils se sont levés pour s'accaparer de notre jeune.
04:27 Et c'est ce qui s'est passé ici, pour ces maisons qu'on montrait en début de vidéo.
04:31 Elles n'ont pas pu être livrées.
04:33 Un conflit foncier empêchait jusqu'à récemment la construction d'une route menant au lotissement.
04:40 Un litige de ce type, ça peut durer de nombreuses années.
04:44 Alors en attendant, les promoteurs privés doivent construire sur les terrains qu'ils ont achetés.
04:50 Et pour faire des bénéfices, ils vendent les maisons plus chères.
04:54 Deuxième problème, celui du coût de construction.
04:59 Au lancement du programme, l'État a fixé le prix à la vente d'une villa composée de deux chambres et d'un salon.
05:06 12 millions de francs CFA.
05:09 Pour aider les promoteurs à diminuer leurs coûts, il accorde des avantages fiscaux sur les matériaux.
05:15 Mais c'est très loin de suffire.
05:17 La plupart des matériaux utilisés sur les chantiers sont importés, soumis à des ruptures régulières.
05:23 Et leur prix ne cesse de grimper.
05:26 Comment aujourd'hui on peut penser construire une maison, même en F2, à 12 millions, ça c'est quasiment impossible.
05:36 Malgré les exonérations et la TVA sur les matériaux de construction,
05:40 pour avoir un logement décent dans la périphérie de Dakar, il faudrait un minimum de 20 à 25 millions.
05:45 L'État accuse lui les promoteurs de ne pas respecter leurs engagements à construire des logements sociaux
05:52 et de privilégier la construction de logements haut de gamme, plus rémunérateurs.
05:57 On voit que les promoteurs s'en mettent plein la poche avec leurs marges.
06:01 Souvent ils ne respectent pas leurs engagements de départ.
06:03 Après quelques années et les prix flambent, il y a une forte inflation.
06:06 Troisièmement, les retards sont aussi liés à des lenteurs dans la construction.
06:12 Au Sénégal, environ 80% du parc urbain de logement est produit en autoconstruction,
06:19 c'est-à-dire par les habitants eux-mêmes, parfois organisés en coopérative.
06:23 L'État a donc prévu de s'appuyer aussi sur ces coopératives pour la construction des logements sociaux.
06:30 Or celles-ci progressent très lentement.
06:32 C'est du maison par maison, brique par brique.
06:35 Et ça, à l'échelle de 100 000 logements, on sera encore là dans 30 ans.
06:40 30 ans. Les Sénégalais ne pourront pas attendre.
06:44 A l'ouverture de la plateforme des 100 000 logements, plus de 210 000 demandes ont été enregistrées.
06:50 Un chiffre qui crie à lui seul l'urgence pour le pays.
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06:59 [Silence]
07:04 [SILENCE]

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