• il y a 10 mois
"Je veux réengager un dialogue" avec les syndicats et "une certaine stabilité n’est pas inutile", estime Nicole Belloubet, la nouvelle ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, interrogée mardi sur France Inter.

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Transcription
00:00 Elle imaginait il y a quelques années la suppression du ministère de l'éducation nationale.
00:05 Une provocation bien sûr, destinée, écrivait-elle, à susciter la réflexion.
00:10 Et bien la voici depuis la semaine dernière, à la tête de ce ministère.
00:14 Bonjour Nicole Belloubet.
00:15 Bonjour.
00:16 Merci d'accorder à France Inter votre première grande interview en tant que toute nouvelle
00:20 ministre de l'éducation.
00:21 Je ne doute pas que nos auditeurs auront beaucoup de questions à vous poser.
00:25 0145 24 7000 et application de France Inter.
00:30 Alors une phrase est ressortie Nicole Belloubet de tous les articles au moment de votre nomination.
00:36 Extrait justement de cette tribune dont je parlais, que vous avez écrite en 2016, vous
00:40 dénonciez à l'époque les fariboles sur la restauration de l'autorité ou le port
00:45 de la blouse.
00:46 Or, le retour de l'autorité c'est l'axe essentiel de la politique que vous avez accepté
00:50 de porter et vous serez peut-être chargée de généraliser le port de l'uniforme.
00:55 Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez changé d'avis ?
00:58 Non, je n'ai pas changé d'avis.
01:00 J'ai écrit ce mot faribole qui est un joli mot de la langue française d'ailleurs.
01:04 Nom féminin, propos sans valeur, choses vaines et frivoles selon de Larousse.
01:08 J'ai écrit ça parce que l'objet de l'article ne portait pas en réalité sur ces questions
01:12 d'autorité.
01:13 Il portait sur les liens de l'éducation nationale, notamment avec les collectivités
01:17 territoriales.
01:18 C'est un lien qui est important.
01:19 C'est un lien qui est dédié pour une plus grande décentralisation de l'éducation
01:22 nationale.
01:23 Mais cette phrase sur l'autorité, elle est sans ambiguïté.
01:24 Non, mais cette phrase sur l'autorité, elle ne dit pas ce que j'ai vécu comme professeur,
01:31 ce que je vis comme professeur et ce que vivent mes collègues.
01:34 L'autorité, c'est absolument indispensable dans l'école.
01:39 L'école, c'est à la fois le lieu d'apprentissage des savoirs, des matières fondamentales.
01:45 Et pour cela, il faut évidemment que règne une certaine sérénité dans la classe.
01:49 Et l'école, c'est aussi un lieu de socialisation qui ensuite aura des répercussions sur la
01:54 vie dans la collectivité.
01:56 Et là encore, il me semble que si on n'a pas des règles, le respect de ces règles
02:02 et évidemment la protection de ceux qui enfreindraient ces règles et de ceux auxquels s'adresseraient
02:10 ces infractions, tout cela ne peut pas fonctionner.
02:13 Donc, il faut un cadre.
02:14 - Donc quand Gabriel Attal annonce ce week-end des mesures disciplinaires plus précoces,
02:17 sans passer par le conseil de discipline, dès l'école primaire CM1, CM2, vous allez
02:22 le faire ?
02:23 - Il n'a pas parlé de mesures disciplinaires.
02:24 Il dit simplement que quand un enfant commet une infraction, il faut lui répondre.
02:30 Lui répondre immédiatement.
02:31 - Des sanctions plus précoces ?
02:32 - Oui, mais il n'a pas parlé de mesures disciplinaires.
02:34 Donc des sanctions, ça peut être toutes sortes de choses.
02:38 Ça peut être réparer, ça peut être un dialogue avec lui.
02:42 Il y a mille et une manières d'engager ce travail.
02:46 Mais moi, je suis absolument ferme là-dessus.
02:49 On ne peut pas faire de l'école un lieu où le cadre n'est pas respecté.
02:55 - Mais on sent quand même une différence de sensibilité entre le discours qu'a porté
02:58 pendant six mois Gabriel Attal à l'Éducation nationale et vos convictions depuis toujours
03:04 sur ces questions.
03:05 - Non, franchement, je ne suis pas certaine qu'il y ait une différence de sensibilité.
03:09 Je le redis ici, il faut protéger les professeurs pour qu'ils puissent enseigner.
03:13 Et dans ce cadre-là, il faut absolument qu'il y ait des règles claires.
03:17 - L'uniforme, s'il faut le généraliser, vous le ferez ?
03:20 - Écoutez, pour le moment, nous n'en sommes pas là.
03:22 Là encore, la tenue partagée, ça n'est pas nouveau d'abord.
03:26 Moi, je suis élève de l'école publique et il se trouve que dans mon lycée, on portait
03:32 des blouses.
03:33 La semaine A, la blouse bleue, la semaine B…
03:35 - Et ça a apporté quelque chose d'après vous ?
03:37 - Eh bien, ça peut être, et c'est au fond ce qui est recherché, non pas de gommer
03:41 les différences, mais de créer dans l'école un lieu d'égalité et un lieu où finalement,
03:48 on ne s'apprécie pas par les différences que l'on porte.
03:52 Et moi, cette idée que l'école, c'est une forme de lieu d'apaisement et d'égalité,
03:58 c'est ce que nous recherchons.
03:59 On verra ce que donne l'expérimentation dans laquelle vont s'engager une centaine
04:02 d'établissements.
04:03 - Vous ne vous avancez pas pour l'instant.
04:04 Dans la tribune dont nous parlions, vous défendiez aussi avec force une vision de
04:09 l'école que ces détracteurs qualifient de « pédagogiste », c'est-à-dire un
04:13 enseignement moins vertical où on sort du cadre du cours magistral, on laisse plus de
04:17 liberté aux élèves.
04:18 On est loin du retour aux fondamentaux, quand même, prôné par le Premier ministre et
04:21 le Président.
04:22 - Non, pas du tout, pas du tout.
04:23 Je ne comprends pas d'ailleurs le procès qui là me serait fait.
04:25 Je ne comprends pas du tout.
04:27 Lorsque nous disons que pour améliorer les résultats scolaires, et on sait que l'on
04:31 en a besoin, les études PISA qui mesurent les compétences des élèves à 15 ans le
04:35 montrent, puisque les scores montrent que notre école n'est pas efficace.
04:39 Pour améliorer ces résultats, que demandent les professeurs ? Que demandent les professeurs
04:44 ? Et ils ont été consultés, il y en a 230 000, c'est-à-dire un tiers qui ont répondu.
04:48 Ils demandent moins d'hétérogénéité dans les classes.
04:51 Ils demandent des prises en charge particulières pour répondre à des besoins spécifiques.
04:56 C'est ça que nous allons faire.
04:58 C'est ça que je disais, c'est la fin du cours magistral descendant.
05:01 On répond à l'attente des élèves.
05:03 Je suis exactement dans ce qui est ici proposé.
05:07 Plus d'autonomie.
05:08 Plus d'autonomie laissée aux enseignants dans la manière dont ils vont prendre en
05:11 charge les élèves.
05:12 La question c'est aussi de savoir si vous allez avoir une réelle marge de manœuvre
05:15 sur un sujet de l'éducation dont Emmanuel Macron a dit qu'il était aujourd'hui dans
05:19 son domaine réservé et que Gabriel Attal porte lui-même puisqu'il est passé de
05:24 l'éducation nationale à Matignon.
05:26 Mais que croyez-vous ? Ce n'est pas le premier ministre qui est à mon bureau tous les jours.
05:32 Ce n'est pas le président de la République qui est assis à côté de moi tous les jours.
05:35 Nous en parlons.
05:36 Ils ont des convictions parce que l'école c'est évidemment extrêmement important
05:40 pour former l'avenir de la nation.
05:42 Donc vous aurez votre vision à faire valoir.
05:44 Nous discutons.
05:45 Hier soir je travaillais avec le premier ministre.
05:48 Nous dialoguons.
05:49 Nous voyons comment implémenter les idées qu'ils ont portées.
05:51 Mais je partage complètement leur idée qu'il faut absolument améliorer les résultats
05:57 scolaires et aider les enseignants dans ce sens.
06:00 Votre priorité, vous l'avez dit lors de votre passation de pouvoir, c'est la reprise
06:03 du dialogue avec les syndicats.
06:05 D'ailleurs vous les avez vus hier.
06:06 J'en ai vu certains hier.
06:07 Il m'en reste encore beaucoup à voir.
06:09 Vu les quatre dernières semaines désastreuses pour les relations entre votre ministère
06:14 et les syndicats d'enseignants, vous n'avez pas hésité à accepter le poste ?
06:17 Ah non. Enfin, si j'ai hésité, c'est pour d'autres raisons personnelles, mais
06:22 absolument pas en raison des conflits qu'il peut y avoir.
06:27 Moi je pense que les organisations syndicales ont aussi le même objet qui est celui de
06:32 la réussite des élèves.
06:33 Donc après nous pouvons diverger sur les tactiques à mettre en place, nous pouvons
06:38 diverger sur les stratégies.
06:39 Mais moi je suis certaine qu'il faut parler d'abord pour comprendre ce qui est accessible
06:45 sur le terrain, pour comprendre comment dans le collège, le lycée, on peut mettre en
06:49 place ces éléments qui permettront d'améliorer le niveau des élèves.
06:52 Avec les syndicats, vous avez à cœur aussi de crever l'abcès de ces dernières semaines
06:57 avec les déclarations d'Amelia Hood et Castera qui ont suscité beaucoup de colère
07:01 dans les établissements scolaires.
07:04 Vous dites que ces déclarations étaient malheureuses ?
07:06 Non, je ne dis rien du tout aux syndicats.
07:08 Nous repartons sur un travail à conduire en commun.
07:11 Nous repartons sur un dialogue nouveau.
07:12 Je ne m'apesantie pas sur le passé.
07:14 Est-ce que vous comprenez néanmoins qu'après 5 ans de Jean-Michel Blanquer, quand on voit
07:18 qu'en un an et demi, il y a eu 4 ministres aux sensibilités différentes, encore une
07:22 fois, à pas peine, il y a Gabriel Attalame et Oudéa Castera.
07:25 Maintenant vous, vous comprenez que les enseignants soient déboussolés ?
07:27 Je comprends ça évidemment.
07:29 C'est la raison pour laquelle, un, je veux réengager un dialogue avec eux.
07:33 Et puis deux, je pense qu'une certaine stabilité n'est pas inutile.
07:36 Une stabilité qui n'empêche pas les réformes évidemment.
07:39 Mais je pense qu'il faut apaiser et réformer.
07:42 Un mot du privé puisque c'était l'objet de ces polémiques.
07:45 Tous vos prédécesseurs sont passés ou ont inscrit leurs enfants dans les écoles privées
07:49 de l'élite parisienne.
07:50 Vous fustigiez, toujours en 2016 dans cette tribune, ceux qui fuient le service public
07:55 pour rejoindre l'entre-soi des classes homogènes dans l'enseignement privé.
07:59 Vous le rediriez aujourd'hui ?
08:00 Ecoutez, moi je considère que je suis ancien membre du conseil constitutionnel.
08:05 L'enseignement privé fait partie de ce grand principe fondamental des lois de la
08:12 liberté de l'enseignement.
08:13 Et donc évidemment, je tiens cela comme une boussole.
08:17 Quel est votre rapport au privé ? Personnel, vous, vos enfants ?
08:20 Moi je n'en ai pas.
08:21 Vous avez fait toute votre scolarité dans le public, vos enfants aussi ?
08:25 Alors en ce qui me concerne, oui.
08:27 Mes enfants aussi, bien que je n'aime pas répondre aux questions concernant mes enfants.
08:30 C'est une question qui s'est posée pour tous vos prédécesseurs, c'est pour ça
08:32 que je me permets de vous la poser.
08:33 Je réponds, oui.
08:34 Un mot du lycée de l'établissement privé catholique parisien Stanislas, puisqu'encore
08:40 une fois il était au cœur de ces polémiques.
08:42 Il est l'objet d'un rapport officiel qui pointe des dérives, notamment homophobe,
08:47 sexiste.
08:48 Vous l'avez lu ? Vous allez vous en reparler ?
08:49 Je n'ai pas lu encore le rapport évidemment, mais je vais le lire.
08:53 Moi ce que je peux dire ici, c'est que lorsque dans les établissements sous contrat,
08:57 évidemment il faut d'abord respecter les programmes de l'éducation nationale et
09:01 la loi de la République, sans méconnaître le caractère propre de ces établissements.
09:04 S'il y a des déviances, il faut absolument y porter remède.
09:07 C'est ce que relèvent les rapports d'inspection.
09:09 Nous suivrons avec beaucoup d'attention le plan d'action qui est proposé.
09:13 Et s'il faut prendre des mesures, vous les prendrez ?
09:15 Déjà elles sont prises, puisqu'il y a un plan d'action qui a été proposé et
09:19 qui devra être suivi.
09:20 Alors nous parlions de renouer le dialogue avec les syndicats.
09:23 Est-ce que c'est pour les rassurer que lors de votre discours de prise de pouvoir, de
09:27 prise de fonction au ministère de l'éducation, vous n'avez pas évoqué les classes de
09:31 niveau ?
09:32 Parce qu'il n'y a pas de classe de niveau.
09:33 Elle doit rentrer en vigueur en 5e et 6e ? En maths et en français à partir de la
09:38 semaine prochaine ?
09:39 Nous fonctionnons sur des classes hétérogènes.
09:41 C'est-à-dire que dans une classe de 6e, il y a tous les élèves qui y sont inscrits.
09:45 Ensuite, ce sur quoi nous réfléchissons, ce sont des groupes qui puissent répondre
09:51 à des attentes particulières des élèves.
09:55 C'est ça qu'a proposé le Premier ministre.
09:57 Et il me semble que cette réponse n'est pas inintéressante.
10:00 C'est-à-dire qu'on a une classe hétérogène qui fera de l'histoire géo, de l'éducation
10:09 morale et civique, etc.
10:11 Et ensuite, sur les matières fondamentales, parce que c'est là que nous sommes, maths
10:14 et français.
10:15 Quelle différence ça a avec des classes de niveau ? D'ailleurs, Gabriel Attal n'a
10:19 aucun problème à employer ce terme.
10:20 Il le revendique.
10:21 Vous y refusez ?
10:22 Non, ce n'est pas que je m'y refuse.
10:23 Je dis simplement que les classes sont hétérogènes.
10:26 Et ensuite, nous mettons en place des groupes pour prendre en charge les élèves dans les
10:29 matières fondamentales.
10:30 Franck, au standard d'Inter, Nicole Belloubet a une question pour vous, justement, au sujet
10:35 du collège.
10:36 Bonjour Franck.
10:37 Oui, bonjour.
10:38 Vous nous appelez de Lyon ?
10:39 C'est Franck qui a une question pour moi.
10:40 Pardon, je ne sais pas ce que j'ai dit, mais effectivement, bien évidemment, vous
10:44 l'avez compris, c'est Franck qui a une question pour vous.
10:46 Oui, voilà, très bien.
10:47 Écoutez, moi déjà, je prends des quelques secondes qui me sont données pour essayer
10:51 de rétablir une forme de vérité.
10:53 Les enseignants ne veulent pas, M.
10:55 Tréfon, ils n'en veulent pas.
10:56 L'enquête dont vous avez parlé, Mme la ministre, ce n'est pas une enquête sur les groupes
11:00 de nouveau, absolument pas.
11:02 Donc nous n'en voulons pas.
11:03 Les inspecteurs n'en veulent pas, les chefs d'établissement n'en veulent pas, les parents
11:08 n'en veulent pas, quand ils savent ce qu'il y a dans cette loi.
11:11 Voilà, personne n'en veut.
11:13 Et vous y allez coûte que coûte.
11:15 Les deux mois dans les salles des professeurs, en ce moment, c'est démission, burn-out.
11:22 Voilà.
11:23 À cause de vous, à cause de vos mensonges, parce que vous êtes sur un terre, des millions
11:28 de gens vous entendent, vous racontez n'importe quoi.
11:31 Alors, Franck, merci beaucoup.
11:33 On entend votre colère, votre émotion aussi, qui dit sans doute une partie de l'état
11:39 d'esprit du monde enseignant aujourd'hui.
11:41 Nicole Belloubet, cette réforme du collège, vous la ferez coûte que coûte ?
11:46 Moi, je pense, je l'ai dit tout à l'heure, je pense que nous avons un constat qui me
11:51 semble être partagé, y compris par les enseignants, et qui est celui de l'insuffisante efficacité
11:58 de notre système.
11:59 Il me semble qu'on ne peut pas ne pas répondre à ce constat.
12:01 On ne peut pas ne rien faire.
12:03 Et donc, ce que je proposerais, dans des modalités qui ne sont pas définitivement arrêtées,
12:09 parce que je souhaite précisément dialoguer avec les acteurs qui sont sur le terrain,
12:14 ce que nous souhaitons faire, c'est effectivement proposer des modalités pour prendre en charge
12:18 cette hétérogénéité et pour essayer de travailler au mieux.
12:21 On entendait encore une fois l'émotion de Franck à l'instant.
12:24 C'est une réalité aussi que vous entendez ?
12:26 C'est une réalité.
12:27 Hier, j'étais dans un établissement où la colère n'a pas été exprimée de cette
12:32 manière-là, où il y avait des équipes qui travaillaient, me semble-t-il, à des
12:36 réflexions pour améliorer la prise en charge des élèves.
12:39 Mais j'entends la colère et évidemment, j'essaierai d'y être attentive.
12:43 On a énormément d'appels au standard d'Inter ce matin pour vous, Nicole Belloubet.
12:46 On a un témoignage de Marie.
12:48 Bonjour Marie.
12:49 Bonjour Madame.
12:50 Je voulais rebondir justement sur l'appel de Franck à l'instant.
12:54 Alors moi, je suis écoutée très émue aussi d'intervenir parce que je suis une professeure
13:01 passionnée par mon métier.
13:03 J'ai toujours voulu faire ce métier et aujourd'hui, je me pose clairement la question de la reconversion.
13:07 Je suis épuisée, je suis en arrêt depuis début janvier.
13:11 Quand on me parle de retour de l'autorité alors que nous, c'est le pas de vague qui
13:17 règle quand on a des problèmes avec les parents, quand on a des problèmes avec les
13:20 élèves, on se donne, on fait tout.
13:22 On peut avoir des rendez-vous le soir, le week-end, le mercredi avec les parents pour
13:26 essayer de régler les problèmes et notre supérieur, nos supérieurs nous disent pas
13:31 de vague, courbez les chines, soyez gentils, prenez sur vous et nous, on ne peut plus prendre
13:35 sur vous.
13:36 On est épuisée et on est à deux doigts de tous être en burn-out en fait.
13:41 Je vous dis, je suis émue parce que je n'en peux plus alors que j'adore mon métier.
13:46 La réponse de la ministre de l'éducation nationale.
13:49 Merci Marie.
13:50 Madame, je vous comprends.
13:51 C'est-à-dire que je pense que le métier de professeur est un métier extrêmement difficile
13:56 puisqu'à la fois il faut transmettre des savoirs, il faut en même temps gérer des
13:59 élèves et donc répondre à des situations extrêmement diverses.
14:03 D'abord, je ne comprends pas le pas de vague.
14:07 Je comprends que madame l'ait vécu mais je ne comprends pas…
14:12 Cette consigne qui peut être donnée par certains chefs d'établissement ?
14:15 Non, je ne comprends pas ça.
14:16 S'il y a un problème, on en parle et on essaie de le résoudre.
14:19 Alors j'espère pouvoir trouver les moyens de répondre à ces inquiétudes.
14:24 C'est aussi une question de moyens qui fait que beaucoup de professeurs sont épuisés
14:27 aujourd'hui.
14:28 Je crois que vous connaissez ce problème depuis longtemps puisqu'en 2005, si je ne dis pas
14:30 de bêtises, vous étiez rectrice de Toulouse et vous aviez démissionné pour dénoncer
14:35 des suppressions de postes.
14:36 Pas exactement, c'est un peu plus compliqué que ça.
14:39 J'avais démissionné parce qu'on avait mis en place une réforme au lycée qui avait
14:44 créé les travaux personnels encadrés et puis il y avait eu des évolutions avec lesquelles
14:47 je n'étais pas d'accord.
14:48 Mais enfin, peu importe.
14:49 Mais vous avez conscience qu'il manque aujourd'hui des moyens à l'éducation nationale ?
14:52 Bien sûr, il nous manque surtout des personnels.
14:55 C'est-à-dire que les emplois, on peut les avoir mais il manque des personnels parce
14:59 que la fonction d'enseignant n'est plus suffisamment attractive.
15:03 C'est la raison pour laquelle on veut essayer de modifier le recrutement, de modifier le
15:10 salaire en entrée de fonction.
15:12 Ça a été fait par mon prédécesseur.
15:14 Et puis nous voulons également travailler sur la formation continue, essayer de donner
15:17 des atouts aux professeurs pour attirer les gens.
15:20 On va parler des salaires mais sur les moyens, les effectifs, comment vous faites pour mener
15:26 à bien cette réforme avec les classes de niveau ou quelle que soit la manière dont
15:29 on les appelle à partir de la rentrée prochaine ? Avec quels effectifs ? Gabriel Attal dit
15:34 que c'est au moins 2.000, 2.300 postes supplémentaires.
15:37 Vous les trouvez où ?
15:38 Nous avons des redéploiements internes au sein du ministère qui nous permettent de
15:42 trouver ces supports.
15:43 C'est-à-dire ? Ils viendraient d'où ?
15:45 Ils viendraient de la grille d'enseignement, des horaires de sixième et de cinquième
15:51 qui va évoluer avec la mise en place de ces groupes et qui nous permet de récupérer
15:56 un certain nombre d'emplois.
15:57 Mais c'est faisable de trouver, alors qu'il y a une crise des vocations aujourd'hui,
16:01 2.000 enseignants à la rentrée ?
16:02 Il faut distinguer les postes et les personnes qui sont assises sur ces postes.
16:06 Les postes, nous les aurons et les personnes, nous faisons tout pour anticiper les recrutements,
16:11 pour avoir les personnels présents à la rentrée évidemment.
16:14 Et puis, je ne l'ai pas dit, mais nous pouvons également travailler, c'est déjà le cas,
16:17 avec les personnels du premier degré, les professeurs des écoles qui viennent travailler
16:21 en collège et qui nous apportent un concours très sérieux.
16:23 L'une des causes de la crise des vocations et des difficultés de recrutement, justement,
16:29 et on l'a évoqué, c'est la question des salaires.
16:32 Les professeurs français aujourd'hui, même s'ils ont été augmentés en début de carrière,
16:37 restent moins bien payés que la moyenne de leur collègue de l'OCDE.
16:41 Vous comptez agir sur cette question et réduire cet écart ?
16:45 Alors nous avons, comme vous le dites vous-même, il y a un effort très important qui a été
16:49 fait sur les débuts de carrière, qui maintenant nous met au-dessus de la moyenne des pays
16:54 de l'OCDE en début de carrière.
16:55 C'est surtout sur les… et puis il y a eu également un effort sur les fins de carrière,
16:59 c'est surtout les milieux de carrière sur lesquels nous devons travailler pour voir
17:03 comment nous pouvons essayer d'améliorer cette situation.
17:04 Les professeurs peuvent espérer, sous votre mandat à l'éducation nationale, une augmentation
17:11 générale ?
17:12 Nous allons travailler pour voir comment appuyer ces professeurs au niveau salarial.
17:15 C'est-à-dire, ça peut être des primes ?
17:18 Je ne veux pas ici m'engager…
17:19 Un geste sur les salaires ?
17:20 Il y a plusieurs façons de travailler, à la fois par des avancements d'échelon ou
17:26 sur d'autres mécanismes, mais je ne veux pas ici donner de résultats acquis alors
17:32 qu'ils ne le sont pas.
17:33 On parle de création de postes, vous avez annoncé hier lors de votre premier déplacement
17:37 à Reims, 150 postes pour aider à lutter contre le harcèlement scolaire.
17:41 Vous avez choisi de faire votre première sortie sur ce thème.
17:45 Plus d'un élève par classe est victime dites-vous ?
17:48 Statistiquement, plus d'un élève d'à part classe serait victime de harcèlement
17:52 scolaire.
17:53 Ça, on ne peut pas l'accepter bien sûr.
17:55 C'est la raison pour laquelle nous souhaitons vraiment mettre l'accent sur ce phénomène-là.
18:00 C'est un peu la fin du pas de vague dont parlait notre interlocutrice tout à l'heure.
18:06 Il ne faut pas couvrir cela d'un manteau qui nous empêche de voir la réalité.
18:11 Et donc, ces postes viennent en complément.
18:15 J'entendais hier une enseignante à la télévision qui disait "mais ce n'est pas assez, 150
18:19 postes".
18:20 Mais il n'y a pas que 150 postes.
18:21 Ces 150 emplois permettront dans les académies et les départements de coordonner l'ensemble
18:26 des actions conduites.
18:27 Mais dans les établissements, il y a des personnels qui sont formés expressément
18:32 sur cette lutte contre ces repérages et ce traitement du harcèlement.
18:37 C'est un ensemble finalement que nous voulons mettre en place.
18:40 Les mesures déjà annoncées par votre prédécesseur, des cours d'empathie qui sont expérimentés,
18:46 la confiscation des téléphones portables, est-ce que cela peut être suffisant ? Est-ce
18:49 qu'il faut aller plus loin ? Est-ce que vous irez plus loin ?
18:51 Nous allons plus loin d'ores et déjà, puisqu'il y a un plan qui a été déployé.
18:55 Il y a ces moyens supplémentaires qui ont été mis en exergue.
18:59 Un baromètre du harcèlement qui sera désormais chaque année conduit pour mesurer aussi bien
19:05 dans les écoles, les lycées et les collèges, bien entendu, quelle est la hauteur de ce
19:10 harcèlement.
19:11 Donc oui, il y a toute une action de prévention, détection et traitement du dossier.
19:15 On le sait, le harcèlement passe beaucoup par les écrans, par les réseaux sociaux.
19:20 Emmanuel Macron a annoncé sa volonté de réguler l'usage des écrans pour les enfants
19:24 avec des interdictions et des restrictions.
19:27 Est-ce que vous avez un rôle à jouer là-dessus à l'école ?
19:30 Évidemment, il y a un projet de loi qui est d'ailleurs en cours de discussion, qui
19:36 porte sur ces questions-là et qui envisage même une exclusion des réseaux sociaux s'il
19:41 y a des phénomènes de haine en ligne.
19:42 Donc je crois que nous pouvons effectivement essayer de mieux réguler ces sujets-là,
19:47 y compris à l'école où beaucoup d'élèves ont un téléphone portable.
19:50 Sauf que dans le choc des savoirs, il y a aussi l'utilisation des écrans qui est développée
19:55 pour aider les élèves à la maison.
19:59 On ne peut pas couper les élèves du numérique que nous utilisons tous.
20:03 La question est d'avoir un usage raisonné du numérique à l'école et évidemment
20:08 d'en faire mesurer par tous les élèves.
20:10 Ce n'est pas contradictoire ?
20:11 Non, ce n'est pas contradictoire, évidemment.
20:12 Une nouvelle question sur les sujets que nous avons abordés avec vous Nicole Belloubet,
20:16 de la part d'Aurore.
20:17 Bonjour Aurore.
20:18 Oui, bonjour.
20:19 Vous êtes assistante scolaire, c'est ça ?
20:22 Je suis assistante sociale scolaire sur l'académie de Créteil.
20:26 Et nous vous écoutons.
20:27 Donc nous sommes investis pour les élèves, les étudiants et les personnels de l'éducation
20:33 nationale.
20:34 Et nous sommes 3000 sur toute la France en tant qu'assistante sociale pour 12 millions
20:40 d'élèves.
20:41 Nous sommes engagés pour le harcèlement scolaire bien évidemment, mais aussi pour
20:45 le bien-être des élèves et la protection de l'enfance notamment.
20:49 Donc je voulais savoir d'une part si des postes allaient être créés en maths.
20:54 Et d'autre part, nous nous sentons très invisibles dans tous ces débats.
20:59 Nous souhaiterions savoir si nous allons être revalorisés à la hauteur des infirmières
21:05 pour récompenser notre investissement également.
21:07 Merci à vous Aurore.
21:08 Nicole Belloubet.
21:09 Oui, madame, je sais parfaitement le rôle que vous tenez dans notre système, même
21:15 si vous n'êtes effectivement pas assez nombreuse.
21:17 Hier, lorsque j'ai parlé du harcèlement, j'ai annoncé, vous l'avez sans doute
21:21 entendu, un complément indiciaire de 1250 euros qui serait donné aux infirmières
21:27 et aux assistantes sociales qui seraient engagées dans cette lutte contre le harcèlement.
21:31 Donc nous travaillons effectivement sur une prise en compte de vos missions et j'entends
21:40 parfaitement votre demande de revalorisation et je pense que j'aurai prochainement des
21:44 annonces à faire à ce sujet.
21:46 Pour les assistantes sociales scolaires en particulier.
21:48 Voilà.
21:49 Je suis content en tout cas dans tous ces témoignages mais je pense que vous en aviez
21:52 déjà conscience le caractère central, essentiel de cette question des moyens et des salaires.
21:57 Je sors du domaine de l'éducation pour la fin de cette interview.
22:01 Énormément de réactions depuis ce week-end, Nicole Belloubet, après l'annonce de Gérald
22:05 Darmanin de la volonté du gouvernement de supprimer le droit du sol à Mayotte.
22:09 Est-ce que vous êtes à l'aise avec ça ?
22:11 Écoutez, moi ce que je peux dire c'est que lorsque j'étais au Conseil constitutionnel,
22:18 à plusieurs reprises, la question du droit applicable sur le territoire maorais s'est
22:24 posée.
22:25 Il y a toujours eu des traitements différenciés sur ce territoire qui effectivement a un
22:29 statut juridique particulier.
22:31 Donc j'imagine que si le ministre de l'Intérieur a fait cette proposition, c'est qu'il y
22:37 a une singularité, une urgence sur ce territoire.
22:40 Justement, en tant qu'ancienne gardienne de la Constitution, est-ce que vous ne craignez
22:44 pas qu'on franchisse là un pas qui serait dangereux ?
22:47 On voit déjà que la droite et l'extrême droite s'engouffrent dans la brèche et réclament
22:51 la fin du droit du sol pour tout le territoire français.
22:53 Non, ça ce n'est pas acceptable.
22:55 Ce n'est pas acceptable puisque c'est vraiment constitutif de notre identité et de notre
22:59 citoyenneté.
23:00 La question du territoire maorais est vraiment une question particulière et comme je viens
23:04 de vous le dire, ce n'est pas la première fois que des dérogations sont apportées
23:08 aux droits applicables.
23:09 Vous dites "j'imagine que des garde-fous vont être mis en place et que le ministre
23:13 de l'Intérieur le fait en connaissance de cause".
23:15 Je n'ai pas suivi ce dossier précisément au moment où nous parlons, mais je vous
23:18 dis clairement ce que je pense.
23:20 Un, il n'est pas possible de remettre en cause le droit du sol, de mon point de vue,
23:26 sur notre territoire national.
23:27 Deux, le territoire maorais, comme d'autres territoires d'ailleurs, a souvent fait l'objet
23:31 d'exceptions.
23:32 Un mot, Nicole Belloubet, puisque nous parlions du Conseil constitutionnel.
23:35 Robert Badinter s'est éteint vendredi dernier, un hommage lui sera rendu demain.
23:40 Ancien président du Conseil constitutionnel donc, vous avez été ministre de la Justice
23:45 comme lui, professeur de droit comme lui.
23:47 Quelle pensée vous avez pour lui aujourd'hui ?
23:50 Écoutez, j'ai une pensée de grande admiration pour sa ténacité, pour la vision qu'il
23:57 avait de ce qu'était le droit et la justice surtout.
24:00 Et puis, je peux dire que c'était un homme extraordinairement proche de ceux qu'il
24:08 fréquentait.
24:09 C'était pour moi un soutien considérable lorsque j'étais ministre de la Justice.
24:13 Et dans des moments difficiles, il avait une proximité et des mots qui étaient toujours
24:18 justes humainement.
24:19 Il est dans mon panthéon personnel en tout cas.
24:21 Merci Nicole Belloubet, la question de sa panthéonisation se pose déjà bien sûr.
24:27 Nicole Belloubet, merci de nous avoir accordé votre première grande interview de ministre
24:30 de l'Education nationale.

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