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00:00 Après les agriculteurs, c'est au tour des artisans d'alerter sur leurs conditions de travail, sur leur rémunération et sur le trop-plein d'administratifs.
00:07 On en parle ce matin avec le président de la CAPEP d'Ordogne, la Confédération de l'Artisanat, qui répond à vos questions. Louis de Bergevin.
00:13 Bonjour Frédéric Liogier.
00:15 Bonjour.
00:15 Vous avez vu les agriculteurs manifester la semaine dernière, vous n'avez pas eu envie d'aller manifester avec eux ?
00:20 Alors aujourd'hui on est plus dans la négociation.
00:22 Donc je vous le dis, on n'est pas prêts à descendre dans la rue.
00:26 On est plutôt sur des échanges avec les différents cabinets ministériels pour essayer d'avancer un petit peu sur le sujet.
00:32 Parce qu'il y a une colère en ce moment et des difficultés chez les artisans ?
00:36 Une colère, un ras-le-bol, on baisse les bras, ça devient très compliqué.
00:41 Tant au niveau technique, administratif, juridique, complexité réglementaire, on est des artisans du bâtiment.
00:49 Les agriculteurs disaient qu'il y avait trop de normes, c'est la même chose pour les artisans ?
00:52 C'est exactement la même chose.
00:53 On complexifie les choses, je ne comprends pas l'utilité, on rajoute ces contraintes.
00:59 Et moi je pense qu'il faut vraiment arrêter de faire fonctionner ce système au-delà même du bâtiment.
01:04 Parce que ce n'est pas le nôtre.
01:06 Notre travail ce n'est pas de faire de l'administratif pour de l'administratif.
01:09 Ça s'empire ?
01:10 Ça s'empire de plus en plus, j'en veux pour preuve, on ne verra pas dans les détails parce qu'on n'aura pas le temps,
01:15 c'est sur ma prime rénov', où les règles du jeu changent à partir du 1er janvier.
01:19 Et pour preuve, on nous laisse un délai jusqu'au 1er juillet parce que même ceux qui l'ont mis en place ont du mal à nous l'expliquer.
01:24 Donc vous voyez bien qu'il y a un problème.
01:26 C'est-à-dire qu'il y a des moments où l'artisan ne sait pas comment faire et il n'a pas de réponse, même en appelant les bonnes personnes ?
01:34 Exactement, c'est exactement ça.
01:35 On a fait une réunion il y a une dizaine de jours, 150 entreprises que nous avons réunies avec les acteurs locaux, on n'a pas toutes les réponses.
01:43 Vous avez mené justement une enquête auprès de vos adhérents, c'est quoi le sentiment qui en ressort ?
01:49 Je dirais que sur une dizaine de questions, il y en a deux que j'aimerais mettre en exergue.
01:52 La première, c'est le carnet de commandes qui a tendance à s'aménuiser, puisqu'on est à peu près entre 2 et 5 mois d'avance, ce qui n'est pas beaucoup.
02:00 La deuxième chose, c'est la trésorerie. La trésorerie, elle n'est pas bonne.
02:03 Aujourd'hui, on a perdu entre 20 et 30% de trésorerie.
02:07 7h47 sur France Bleu Périgord et France 3.
02:10 Notre invité ce matin, c'est Frédéric Liogier, président de l'ACAPEB, la Confédération de l'Artisanat.
02:14 Il répond à vos questions, Louis de Bargevin.
02:16 C'est quoi les raisons principales, notamment de cette baisse de trésorerie, de cette diminution du carnet de commandes ? C'est l'inflation ?
02:21 Je vous rappellerai qu'on a eu quand même une hausse du coût des matériaux.
02:24 On ne se faisait pas des illusions. On savait très bien que ça n'allait pas redescendre.
02:28 Mais en fait, ce n'est pas du tout redescendu et ça a impacté effectivement nos trésoreries.
02:32 Aujourd'hui, c'est compliqué.
02:33 Et ce qui nous fait très, très peur, c'est que quand on regarde le nombre d'entreprises qui s'arrêtent pour différentes raisons,
02:38 vous avez hélas des dépôts de bilan qui ne passent même plus par la case du redressement.
02:43 Donc voyez bien qu'il y a une certaine forme de ras-le-bol, on baisse les bras.
02:46 Mais des gens aussi qui font valoir leur droit à la retraite, voire beaucoup plus grave,
02:49 des gens entre 30 et 50 ans qui arrêtent, qui sortent du circuit du bâtiment.
02:54 Et ça, c'est pas entendable.
02:56 Vous disiez 2 à 5 mois de commandes, c'est pas beaucoup ?
02:58 2 à 5 mois d'avance de commandes, c'est pas beaucoup ?
03:01 Non, parce que généralement, on l'a toujours entendu, on tournait avec une petite année à peu près.
03:05 Ça permettait de se projeter, ça permettait de bien faire tourner les équipes.
03:09 Aujourd'hui, c'est plus le cas.
03:10 Donc, on ne parle plus d'embauche, bien entendu.
03:12 On va essayer de parler de conserver nos salariés.
03:15 L'inflation commence à diminuer.
03:17 Est-ce qu'on se dit que le coût dur est passé, que les commandes vont revenir ?
03:20 Je ne sais pas.
03:21 Mais ce que je constate, c'est qu'en tout cas, les frais de fonctionnement, eux, ils ne diminuent pas.
03:25 Tout ce qui gravite autour de notre travail, que ce soit le coût des matériaux, comme je le disais,
03:29 mais que ce soit le carburant, et tout ce dont nous avons besoin pour faire fonctionner nos entreprises,
03:33 jusqu'à preuve du contraire, pour l'instant, les prix sont bien stables et ils ont bien monté.
03:37 Les marges aussi diminuent, on imagine ?
03:39 Les marges diminuent.
03:40 On essaye quand même de les maintenir, parce que, ben voilà, on travaille avec nos adhérents,
03:44 notamment sur la gestion, mais à un moment donné, il va y avoir le retour de bâton.
03:48 Vous disiez que vous étiez en train de négocier, en ce moment, qu'est-ce que vous demandez ?
03:52 Si j'osais, je vous dirais qu'on nous fout de la paix !
03:56 Non, qu'est-ce qu'on demande, tout simplement, c'est de nous laisser travailler,
03:59 d'arrêter de nous rajouter ces contraintes.
04:01 Moi, ce que je voudrais faire passer comme message, c'est que si l'État,
04:04 aujourd'hui, se coupe du bâtiment de proximité,
04:08 je parle bien des entreprises, qui est un véritable lien du tissu social de notre département,
04:13 de nos territoires, on court vraiment à la catastrophe.
04:16 Donc, laissez-nous travailler, on paiera nos charges, on paiera notre TVA,
04:19 on fera fonctionner le système, mais arrêtez, mais arrêtez de nous rajouter des contraintes.
04:24 Certains disent que les normes permettent d'éviter, les dérives permettent d'éviter,
04:29 qu'il y ait des problèmes de sécurité aussi, c'est important qu'il y en ait quand même ?
04:33 Alors, aussi bizarre que ça paraisse, plus on augmente ces normes,
04:37 plus on voit arriver des dérives avec des groupes beaucoup plus importants.
04:39 Moi, je vous parle de l'artisanat de proximité,
04:42 je vous parle des entreprises que vous côtoyez tous les jours,
04:44 je vous parle pas de gros groupes.
04:46 Et c'est ça qui est assez paradoxal, c'est plus on rajoute des normes,
04:49 plus on a des gens qui s'engouffrent dans ce système.
04:51 - C'est possible de voir les artisans manifester ?
04:54 - C'est peut-être possible, en tout cas, aujourd'hui, on essaie de les tenir,
04:57 si je peux me permettre cette expression,
04:59 leur dire qu'on travaille en amont, on travaille au niveau national,
05:03 mais je vous le dis très honnêtement, à un moment donné, on les tiendra plus.
05:05 Et là, on pourra plus rien faire.
05:07 - Merci beaucoup Frédéric Lhuillier, président de la CAPEB Andordone,
05:11 la Confédération de l'Artisanat.