• il y a 11 mois
François Ruffin, député LFI de la Somme, était l’invité de “Julie jusqu’à minuit” pour évoquer la poursuite de la mobilisation des agriculteurs, après la réception de la FNSEA, premier syndicat agricole français, et des "Jeunes agriculteurs" à Matignon

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Transcription
00:00 Est-ce que vous saluez le dialogue ce soir ?
00:03 On peut saluer le dialogue autant qu'on veut.
00:04 Maintenant, moi, ça fait plus de 5 ans que je suis sur la question des prix agricoles,
00:09 parce que la clé, c'est le prix.
00:10 Au fond, il faut voir qu'il y a une injonction de la part du gouvernement
00:14 pour le monde agricole qui est schizophrénique.
00:16 De leur côté, on leur dit de monter en gamme,
00:19 on leur dit qu'il faut le bien-être animal,
00:21 on leur dit qu'il faut éliminer les phytos,
00:22 et de leur côté, on leur dit qu'il faut la compétition internationale
00:26 avec les fermes-usines au Brésil,
00:28 et éventuellement maintenant avec les fermes-usines en Ukraine.
00:31 Et donc, il y a une injonction qui est complètement contradictoire.
00:33 Vous ne pouvez pas à la fois vous bagarrer pour monter en gamme sur les produits,
00:38 et en même temps dire que vous devez vous adapter au dumping à l'international.
00:42 Donc, ce qu'il faut maintenant, il nous faut une exception agriculturelle.
00:46 Vous savez, moi, ça fait deux décennies qu'on le dit.
00:50 Ça consiste en quoi, cette exception agriculturelle ?
00:53 C'est-à-dire que de la même manière qu'on a fait sortir la culture des traités internationaux,
00:57 et c'est ça qui nous permet aujourd'hui d'avoir encore...
00:58 - C'est ce que vient de dire le Rassemblement national.
00:59 - Exactement.
01:00 - C'est exactement ce que vient de dire aujourd'hui la même...
01:01 - Mais écoutez, s'ils veulent imiter le discours et improviser un discours
01:05 que moi je tiens maintenant depuis deux décennies,
01:07 c'est leur problème, c'est pas le mien.
01:09 - Ils le tiennent depuis un certain temps.
01:10 - Moi, je viens de dire quelque chose avec Constance,
01:11 j'ai même écrit un bouquin sur ces questions-là, d'accord ?
01:14 Donc, je dis, il nous faut une exception agriculturelle.
01:16 Ça veut dire quoi ? Ce qu'on a fait sur la culture,
01:18 qui nous permet d'avoir un modèle français, avec du cinéma français,
01:22 il n'y aurait plus un film français si on avait jeté ça entre les mains de l'OMC.
01:27 Eh ben, il faut faire la même chose pour l'agriculture.
01:30 Il faut se demander si en fond,
01:32 et c'est pour ça que moi je suis intervenu sur les questions agricoles.
01:34 - Mais concrètement, ça veut dire quoi ?
01:35 - Ça veut dire qu'on sort l'agriculture des traités internationaux
01:39 et on n'a pas pour objectif d'avoir les prix, les prix, les prix, les prix,
01:42 les plus bas possibles.
01:43 Si on veut rémunérer nos agriculteurs correctement,
01:46 il faut des instruments de régulation.
01:48 Qu'est-ce que c'est ces instruments de régulation ?
01:49 Je vais les citer, puisque là, en revanche,
01:51 notre interlocuteur avant était bien incapable de les citer.
01:55 Ce sont des prix planchers, oui, un.
01:57 C'est, deux, des quotas d'import-action,
02:00 ce sont des quotas de production,
02:01 et c'est le coefficient multiplicateur,
02:03 qui fait qu'entre le moment où vous achetez au producteur
02:06 et le moment où c'est vendu en supermarché,
02:08 il y a un multiple qui ne peut pas être dépassé.
02:10 Ce que je vous raconte là, ce n'est pas l'Union soviétique,
02:13 ce n'est pas la Corée du Nord.
02:14 Qu'est-ce que c'est ?
02:15 C'est la politique agricole commune,
02:17 qui a été celle dans les années 80-90,
02:19 avant que l'Europe ne décide de s'auto-détruire,
02:23 de s'auto-déréguler.
02:25 Et qui fait que ça a eu quoi comme conséquence ?
02:27 On l'a vu d'abord sur le lait,
02:29 on a supprimé les quotas de production sur le lait,
02:31 crise de surproduction,
02:32 qui a fait plonger les prix et qui a éliminé les produits.
02:34 Je voulais dire, il n'y a plus d'importation,
02:37 c'est plus d'échange en fait, c'est autosuffisant.
02:39 Attendez, je ne vous dis pas que c'est l'autarcie,
02:42 ne confondez pas l'autarcie et la régulation des échanges.
02:46 On a eu une régulation des échanges pendant des décennies
02:49 qui n'a pas posé de problème.
02:50 Donc il ne s'agit pas d'être dans l'autarcie,
02:51 il s'agit d'être dans une régulation des échanges.
02:54 Et ça, c'est tout à fait faisable.
02:55 Certains disent que ce serait suicidaire économiquement,
02:57 et il y a d'autres personnes qui ont travaillé sur le sujet
02:59 qui disent que ça frapperait de plein foie
03:03 les productions haut de gamme comme le vin et le fromage,
03:05 par exemple, je redonnais cet exemple,
03:08 et que ça entraînerait de graves conséquences économiques.
03:10 D'accord, maintenant, vous savez, au fond, la question,
03:13 je vais vous parler des prix, vous reparlez des prix,
03:15 mais la question fondamentale, et j'entendais,
03:18 comme vous le disiez tout à l'heure,
03:19 on a des politiques qui sont en zigzag,
03:20 on ne sait plus ce que veulent les politiques.
03:22 L'interlocuteur le plus pertinent que j'ai entendu,
03:24 c'est le patron de la Fédération Nationale Bovine,
03:27 donc la FNSEA sur les bœufs et les vaches,
03:31 qui disait quoi ?
03:32 Qui disait, il faut qu'on nous donne un cap.
03:34 Dites-nous ce que vous voulez qu'on fasse.
03:37 Si vous voulez qu'on fasse une agriculture familiale,
03:39 on le fera.
03:39 Si vous voulez qu'on concurrence la Nouvelle-Zélande,
03:41 on le fera.
03:42 Mais dites-nous ce que vous voulez qu'on fasse.
03:44 Et il faut qu'on dise aux paysans ce qu'on veut qu'ils fassent.
03:47 Pendant l'après-guerre,
03:49 ça a été très clair ce qui a été demandé aux paysans.
03:51 C'était quoi ?
03:52 C'était retrouver la souveraineté alimentaire.
03:54 Et en une génération, en 1972,
03:57 on retrouve notre souveraineté alimentaire.
03:58 Pourquoi ?
03:59 Parce que l'État a appuyé la mécanique,
04:01 il a appuyé la chimie,
04:02 il a appuyé le démembrement
04:03 et on a obtenu le retour à la souveraineté alimentaire.
04:07 Mais depuis 1972, ça fait un demi-siècle maintenant,
04:09 il n'y a plus de cap,
04:10 il n'y a plus de but qui est donné.
04:11 Alors est-ce que c'est la mission exportatrice
04:13 de l'agriculture française ?
04:14 Ou est-ce que c'est, et je vous dis,
04:16 moi le cap que je porte,
04:17 le cap c'est les agriculteurs français,
04:20 ils doivent d'abord aider,
04:22 permettre que les Françaises,
04:24 les Français de notre pays se nourrissent
04:26 et se nourrissent bien.
04:27 Et s'il y a des surplus,
04:29 ben ça va pour l'international.

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