"L’île au trésor", c’est le dernier livre de Marc Pautrel. Cette île, la maison que ses parents ont fait construire pour vivre leur retraite.
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00:00 L'île au trésor, c'est le dernier livre de Marc Potrel.
00:04 C'est-il la maison que ses parents ont fait construire pour vivre leur retraite.
00:09 Il écrit "Être chez soi, c'est pouvoir être seul dans une pièce fermée à clé.
00:15 Le principe est celui de la prison inversée.
00:18 Tous ceux qui ne sont pas dans la pièce sont emprisonnés et moi je suis en liberté."
00:24 Il raconte les visites à ses parents.
00:27 "Je sens la fébrilité et la joie enfantine que mon père et ma mère ont de me voir
00:33 et qu'ils ne parviennent pas à cacher.
00:35 C'est comme si j'étais leur plus beau cadeau.
00:38 Je suis revenu. Je suis là.
00:41 Ils font mine de rien. Ils font des gestes habituels.
00:46 Ma mère me demande si j'ai fait bon voyage, si j'ai mangé suffisamment, si j'ai faim.
00:52 Je suis leur père plaisante mais je sens qu'ils sont métamorphosés, qu'ils sont comme à la fête.
00:58 Ils découvrent encore que je suis leur fils et donc, pour eux, que je suis un miracle,
01:04 alors que pour moi, je ne suis que moi."
01:07 Marc Potrel écrit un livre par an.
01:10 Ce sont des livres courts.
01:12 Quand on en lit un, en général, on se met à les lire tous, les uns après les autres,
01:16 au rythme de leur parution.
01:18 La colère n'y apparaît jamais, ou de façon latente, contrôlée par la phrase,
01:23 tenue par la grammaire, le rythme.
01:26 Quand on lui parle au téléphone, on est surpris qu'il puisse avoir l'air inquiet ou contrarié.
01:32 Il parle travail, édition.
01:35 Un livre par an, pour un éditeur, c'est trop.
01:37 Il préfère tous les deux ou trois ans.
01:41 Quand ça se bouscule, Marc Potrel s'auto-édite
01:44 et envoie le livre à une centaine de personnes pour les fêtes de fin d'année.
01:48 Il a vu que Georges Perec faisait ça.
01:51 Il l'a fait pour l'île au trésor.
01:54 Dans une interview à Libération, il y a quelques années,
01:57 il parlait de son système d'écriture.
01:59 "C'est un système complètement improductif et pas économiquement viable,
02:04 comme une usine qui produirait plein de pièces
02:07 et qui se rendrait compte que seules quelques-unes sont en bon état."
02:10 Peut-être.
02:12 N'empêche que, quand on lit le livre, quel qu'il soit,
02:15 on a la certitude d'être dans la littérature
02:18 pendant les deux ou trois heures que dure la lecture.
02:21 Celui qui a eu le plus de lecteurs, La vie princière,
02:25 c'était le déroulé d'un amour,
02:27 de la rencontre à la compréhension qui sera impossible de le vivre
02:31 parce que la jeune femme a un compagnon.
02:34 Ce sont toujours des sujets comme ça, extrêmement simples et connus de tous.
02:38 Les situations sont si précisément décrites qu'on en pleure.
02:43 Dans l'interview à Libération, il disait
02:46 "J'ai à la fois la liberté d'écrire autant que je veux
02:49 et la nécessité de trouver des financements."
02:52 Il n'en trouve pas toujours, mais il en trouve.
02:55 Le nombre de livres publiés en sont la preuve multiple.
02:58 L'œuvre est là, sur mon étagère.
03:00 Les coûts de la littérature sont sans commune mesure avec ceux du cinéma.
03:04 L'argent n'a pas d'incidence sur le nombre de personnages dans un roman.
03:07 Juste sur la possibilité pour l'auteur de vivre ou pas de son écriture.
03:13 Justine Trier, recevant la Palme d'Or, a dû penser que c'était le moment
03:17 de rappeler la nécessité des financements publics
03:20 et ses inquiétudes sur la question.
03:22 L'administration n'a pas apprécié qu'elle se mêle de politique
03:25 devant les caméras du monde entier.
03:28 Macron a préféré parler de la fierté de la France au sujet de Depardieu
03:32 que du film de Trier.
03:34 Et la France, plutôt qu'être représentée aux Oscars par un film sur les hommes,
03:39 les femmes, la vie sexuelle, les accusés, les plaignants, la salle d'audience,
03:44 la justice, a préféré l'être par un film sur la cuisine française,
03:48 les produits du terroir, avec des plans de grands acteurs
03:53 qui se lèchent les doigts.