DB - 08-01-2024
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00:29 (Bruit de la pluie)
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01:35 -T'as raison d'être ambitieux.
01:38 Tous les bons chauffeurs rêvent de devenir patrons, surtout aujourd'hui.
01:41 C'est le progrès social.
01:44 -Mais tout ce que je te demande, c'est de voir avec moi tous les chiffres.
01:47 -Bien sûr, je te le dirai pour les chiffres.
01:50 Mais les chiffres, on leur fait dire ce qu'on veut aux chiffres.
01:54 Tu sais comme moi qu'il y a la fatalité.
01:57 Et celle-là, pour la chiffrer, la fatalité, c'est un pari.
02:01 Si tu la mets avec toi, t'as gagné.
02:04 Si tu la mets contre toi, t'es perdu.
02:07 -Bon, la fatalité, je la mets avec moi.
02:10 -Bon, ça veut dire...
02:13 Pendant plusieurs années,
02:15 porte-pneus qui éclatent,
02:17 porte-suspension qui casse,
02:20 porte-melon-tromure qui arrive pourrie,
02:22 porte-frais qui disparaît parce que la SNCF baisse ses tarifs.
02:26 Porte-petites vieilles au carrefour
02:28 qu'on évite en amochant son camion.
02:30 Porte le plus petit ennui, quoi.
02:33 Que du beau. Autrement dit, un miracle.
02:36 -Celui qui croit pas au miracle, dans la vie, il vais jette.
02:39 -Toi, c'est pas la peine de te crier casse-couilles.
02:42 Tu l'enfermes qu'à ta tête.
02:44 Alors, autant te pousser à ta roue.
02:48 Viens.
02:49 -T'es un maloche.
02:50 ...
03:13 -C'est un bon hôtel ? -Un grand luxe, c'est pas cher.
03:16 -T'as un mal-effet. -Écoute, Dupuis.
03:19 Tiens un moyen de te dépanner.
03:21 Je vais faire appel à la solidarité.
03:24 -J'y crois pas. -T'as tort.
03:26 Sur la route, ça a toujours été chacun pour soi et les autres.
03:30 Mais les gars n'ont jamais eu une occasion précise de s'entraider.
03:34 Je vais tenter un grand coup sur toi.
03:37 Tu peux pas t'en sortir si t'empruntes avec intérêt la totalité.
03:41 Je vais demander aux copains les plus à l'aise
03:44 de t'avancer pour rien, au moins une partie de la somme.
03:47 -Jésus, tu voudrais que n'importe qui fasse ce que Mathieu n'a pas fait ?
03:51 -Je trouverais des patrons pour en aider un qui démarre.
03:55 Ou alors, qu'il y ait plus d'hommes.
03:57 -T'en trouveras pas un seul. -Si.
03:59 -J'en ai déjà un. -Quoi ?
04:01 -Il mettra à ta disposition 100 000 balles.
04:03 -Qui est-ce ? -Moi.
04:06 ...
04:08 -T'es un chic type, Jésus.
04:10 Mais garde tes 100 000, c'est pas ça qui me dépannera.
04:13 -C'est tout ce que j'ai. C'est pas assez, bien sûr.
04:17 -Ça fait combien ? Et 20, Jésus ?
04:19 -Il y a qu'un Jésus sur la route.
04:21 -C'en est plein, la route de Jésus.
04:23 Ils se croisent, se doublent, se disent bonjour à coups de klaxon et de phare.
04:27 Boivent ensemble dans l'irlai.
04:29 -Si j'avais pas passé la nuit à dépoter avec toi, je croirais que t'es saoul.
04:33 -Oui, je suis saoul. De joie et d'espoir, Dupuy.
04:35 Va dormir tranquille et ne sois plus sceptique. Tu l'auras, ton premier.
04:38 Enferme-toi dans ta chambre, commence tes calculs
04:41 et attends-moi sans bouger. Dans 2 ou 3 jours, je viendrai te trouver
04:45 et j'aurai dans la poche un fric.
04:47 De quoi acheter avec, même la fatalité.
04:50 Grâce à toi, on verra ce qu'on a jamais vu sur la route.
04:54 Des hommes frères.
04:56 -Sacré Jésus, hein ?
04:58 -Donne le résultat.
05:06 -Liste complète des patrons routiers ayant accepté d'aider leurs camarades Dupuy.
05:12 Antoine Lambert, dit Jésus, 100 000 francs.
05:16 Totale des sommes recueillies, 100 000 francs anciens.
05:22 -C'est beau, hein ? La solidarité de la route.
05:25 -Pauvre Jésus.
05:27 -C'est toi qui me plains.
05:29 -Tu ne voudrais pas que je pleure, non ?
05:32 -Il y aurait de quoi. Qu'est-ce que tu vas faire, maintenant ?
05:35 -Ce que j'aurais dû faire tout de suite, au lieu d'attendre de l'aide des autres.
05:38 M'adresser à une maison de crédit.
05:40 -Oui.
05:42 -Je t'ai fait perdre du temps avec ma solidarité.
05:46 -J'ai tout calculé depuis 4 jours, je suis sûr de m'en sortir.
05:49 Tiens, regarde mes chiffres. -Bon.
05:51 Quoi, qu'est-ce que c'est que ça ? -L'imprévu.
05:59 -Tu prévois même l'imprévu.
06:01 Mais tu l'évalues pas cher.
06:04 -Ah, t'as raison.
06:07 Au fond, faut faire confiance à la fatalité.
06:09 Sinon, il n'y a plus qu'à foncer contre le premier platane.
06:12 Il faut que tu réussisses depuis ton temps.
06:15 Il faut que tu réussisses pour montrer à tous ces salauds
06:18 que t'as pas besoin de leur sale fric.
06:21 Moi, je t'aiderai comme un frère.
06:23 Où que tu sois, si t'es en difficulté sur la route,
06:26 appelle-moi, je viendrai.
06:28 Où que je sois, je viendrai.
06:31 -Bon, on n'en est pas là. Tu peux m'indiquer une maison de crédit ?
06:35 -C'est pas ça qui manque.
06:37 C'est tout juste maintenant si on t'arrête pas sur la route
06:40 pour te prêter de l'argent.
06:42 Votre camion est vieux, mais achetez-en un neuf.
06:45 Vous n'avez pas un radis ? Puisez dans notre caisse.
06:49 Votre taco, on vous le reprend au prix du neuf.
06:52 Combien on gagne dans l'opération ?
06:54 Mais rien du tout. On est des bienfaiteurs.
06:57 Combien je connais de pauvres gars qui ont voulu se moderniser
07:00 et ont perdu même leur vieux clou.
07:04 Ils auraient pu rouler encore 10 ans.
07:07 Tout ça parce qu'on n'est pas capables nous-mêmes
07:10 de se tendre la main les uns les autres.
07:12 -Comment ça se passe ? -Quoi ?
07:14 -Quand on emprunte. -C'est pas compliqué.
07:16 Tu demandes du fric, ils font une enquête.
07:19 Et s'il est bon, ils te passent encore le coup.
07:22 -Excusez-moi, mais j'ai pas beaucoup de temps.
07:24 Il faut que je fasse m'asseoir à Marseille et je pars tout seul.
07:27 Alors, qu'est-ce que vous voulez savoir ?
07:29 -Vous avez eu à votre service ces 5 dernières années un chauffeur nommé Dupuis ?
07:33 -Ah oui, un beau petit salaud
07:36 qui s'est fait chasser du jour au lendemain.
07:38 C'est pour ça qu'il y a 800 bandes qui m'attendent tout seul au volant.
07:41 Alors après...
07:42 -Pourrais-je savoir pourquoi vous vous êtes quitté brusquement ?
07:46 -Et moi, je pourrais savoir qui vous êtes
07:48 et pourquoi vous me posez ces questions ?
07:50 -Votre ancien chauffeur a déposé auprès de ma maison
07:52 une demande de prêt pour l'achat d'un camion neuf.
07:54 Je suis chargé de l'enquête à Paris.
07:57 -Ca y est. Il l'a fait, la bêtise.
08:00 -Quelle bêtise ?
08:02 -De s'endetter jusqu'au cou pour qu'on puisse lire son nom sur un camion.
08:05 Un camion, vous le reprendrez dans 6 mois,
08:07 quand il pourra plus payer ses fêtes.
08:10 -Là n'est pas la question.
08:12 Vous vous êtes séparé à la suite d'un accident,
08:14 cet accident en cause de votre séparation, c'est bien de sa faute ?
08:17 -Non.
08:22 -Le bruit a pourtant couru sur la route
08:25 que vous lui avez reproché d'avoir causé inutilement des dégâts à votre poids lourd.
08:28 -Je ne pouvais pas bousiller ce vieil,
08:30 uniquement pour m'éviter les frais.
08:32 -Il a manqué de maîtrise au volant.
08:35 Et vous, avec votre gueule de flic,
08:37 vous en avez de la maîtrise au volant ?
08:39 -Je ne suis pas conducteur de poids lourd.
08:42 -Ca se voit.
08:44 Alors qu'est-ce que vous voulez savoir d'autre ?
08:46 -Vous répondriez-vous sur le plan moral et technique ?
08:50 -Comme de moi-même.
08:52 -Malgré cet accident qui a failli vous coûter un camion, et même la vie.
08:55 -Dites à ceux qui vous envoient
08:57 que Dupuis est le meilleur professionnel
08:59 qu'on puisse trouver aujourd'hui sur la route entre Paris et Marseille.
09:03 C'est moi qui l'ai formé.
09:05 -Je voudrais parler à M. Farbre, s'il vous plaît.
09:08 -Qu'est-ce que vous lui voulez, à M. Farbre ?
09:10 -C'est strictement confidentiel.
09:12 -Je suis sa secrétaire. -Il n'y a pas de secrétaire vitienne.
09:16 Je veux voir le patron. Le patron lui-même, en chair et en os.
09:19 -Qu'est-ce qu'il veut, M. Fadard ?
09:21 -Je ne suis pas Fadard, je suis enquêteur.
09:23 -Un enquêteur de quoi ?
09:25 -Je ne parlerai qu'à M. Farbre.
09:28 -Et c'est moi ?
09:30 -Ah, vous en êtes sûr ? -Oui.
09:32 -Voilà, je vous fais confiance.
09:34 Je viens prendre des renseignements sur un nommé Dupuis.
09:38 -Qu'est-ce qu'il a fait, Dupuis ? -Ca ne vous regarde pas.
09:42 -Ca me regarde plus que vous croyez.
09:44 -Tais-toi, Mireille. Silence aura jamais ce qui veut se giscler.
09:47 Alors, vous accouchez. -Non, mais normalement,
09:49 nous devrions avoir un entretien en tête à tête.
09:52 Mais puisqu'il est impossible de s'isoler ici...
09:56 Bon. Le routier en question, dont je vous ai dit le nom,
09:59 a sollicité un gros prêt d'argent
10:02 de l'importante firme parisienne
10:05 dont je suis le représentant dans tout le midi.
10:07 Et je suis chargé de l'enquête à Marseille
10:11 sur sa moralité, sa compétence professionnelle,
10:14 ses antécédents, ses fréquentations, etc.
10:17 Le solliciteur a jugé bon de se recommander de vous.
10:21 Je suis donc obligé de vous faire subir un petit interrogatoire.
10:26 Soyez franc, sincère, honnête.
10:30 Vous pouvez tout me dire, même la pire des choses.
10:34 -Monsieur, je vous dirai tout sur du puits, même le paroutte.
10:38 -Bon. Est-ce un routier sérieux?
10:41 -Ah, comme un pape. -Bien.
10:44 Est-ce qu'il boit? -De l'eau, beaucoup.
10:48 -Bon. Attention, très important.
10:52 Est-ce qu'il a des histoires de femmes?
10:55 -Non. C'est pas qu'il est plaisant, non. Il ne regarde même pas.
10:59 D'ailleurs, je crois qu'il est marié. -Il me semble aussi.
11:03 -Bon. Je vous avertis.
11:07 Ces traites vont être très lourdes à régler tous les mois.
11:11 Vous ne viendrez pas pleurer dans mon bureau
11:14 en disant que je ne vous avais pas prévenu.
11:18 Généralement, la 1re fois,
11:22 quand je pense que c'est un gars sérieux comme vous,
11:26 j'accorde un petit délai.
11:28 Après, je suis obligé de faire saisir le camion
11:32 et de me rembourser.
11:34 -Oh, c'est la fille!
11:36 -Il est mignon, là! Qu'est-ce qu'on brasse!
11:40 -Regarde, regarde!
11:42 -Eh!
11:43 -Comment tu le trouves, soldat?
11:46 -C'est un bon vélocipède, mais je le trouve un peu sec.
11:51 -Vous voyez, la fille, je le trouve un peu sec.
11:54 Vous allez la loser!
11:56 -Allez! Est-ce que Louis, il est heureux?
11:59 -Oui!
12:00 -Allez, allez!
12:02 ...
12:09 Musique de tension
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