• l’année dernière
Transcription
00:00 Donc voilà, comme je vous disais tout à l'heure, pour Tristram, ça fait un petit peu
00:04 loin Paris pour juste venir présenter un texte, donc ils ont eu la gentillesse de
00:07 nous enregistrer une vidéo.
00:11 La meilleure chose qui puisse arriver à des éditeurs, c'est de découvrir
00:20 parmi la masse innombrable des manuscrits qui arrivent chaque jour, un
00:25 roman extraordinaire signé par un auteur inconnu. Et bien c'est exactement ce qui
00:30 s'est produit lorsqu'on a reçu il y a quelques temps aux éditions Tristram,
00:34 lorsqu'il est littéralement tombé sur notre bureau, ce manuscrit de Denis Infante
00:40 intitulé "Rousse ou les beaux habitants de l'univers" et dont je peux d'ailleurs
00:44 tout de suite montrer la couverture. Comme on le fait avec chaque manuscrit, avec
00:50 chaque texte reçu, on a évidemment immédiatement commencé à le lire,
00:55 les premières pages, et la vérité est qu'après avoir lu simplement quelques pages,
00:59 on savait déjà intimement que c'est un texte qu'on publierait. Je vais
01:06 tenter en quelques minutes d'expliquer comment un tel miracle est possible, de
01:12 prendre une décision si rapide sur la fois de quelques pages d'un texte dont on
01:19 vient de prendre connaissance, de manière tout à fait partielle, et dont on ne
01:23 connaît absolument rien de l'auteur. La première raison évidemment c'est le
01:29 sujet du livre lui-même, je le décris en quelques mots, c'est à
01:35 vrai dire la scène inaugurale du roman. On se trouve sur une terre, dans un
01:41 monde duquel apparemment les êtres humains semblent avoir totalement
01:46 disparu. Il y a une sécheresse absolument terrible qui est en train de sévir,
01:51 tous les vivants, aussi bien mobiles qu'immobiles, sont littéralement
01:56 assoiffés, les végétaux dépérissent, les animaux aquatiques sont pris au piège
02:01 de l'évaporation de leur demeure, tous les animaux sont en très grande
02:06 difficulté, et à vrai dire les oiseaux migrateurs au retour de leur long
02:11 périple lointain apportent eux-mêmes de très mauvaises nouvelles, la désolation, la
02:18 sécheresse, le manque d'eau, le manque de nourriture,
02:22 toute cette désolation fait des ravages absolument sur toute la surface de la
02:28 terre. Parmi ces animaux qui sont qui sont
02:32 acculés dans cette situation terrible se trouve une très jeune renarde qui
02:37 s'appelle Rousse, qui donne son nom au roman, une jeune
02:42 renarde très intrépide, très courageuse, très astucieuse, qui est peut-être trop
02:48 jeune et trop innocente pour se désespérer totalement et qui donc prend
02:53 la décision, faute de toute façon d'une autre solution, poussée par la
02:57 nécessité de partir à l'aventure dans l'espoir de trouver quand même peut-être
03:03 de l'eau quelque part et des conditions d'existence plus favorables.
03:08 Le livre raconte son aventure qui l'amènera à découvrir des contrées
03:15 des régions pour elle absolument stupéfiantes, qui l'amènera également à
03:19 rencontrer tout un tas d'animaux de toute espèce dont certaines lui étaient
03:24 totalement inconnues. Et le roman, qui est un roman très bref, très
03:29 resserré, d'à peine 150 pages, raconte donc cette histoire dont
03:35 on devrait dire, l'histoire qui est constituée, c'est le sentiment qu'on a à
03:40 lecture, on a l'impression d'aller de morceau de bravoure en morceau de
03:43 bravoure. L'un des plus stupéfiants pour moi par exemple a été le moment où
03:47 Rousse découvre pour la première fois une trace de l'existence passée des
03:53 êtres humains sous la forme totalement incompréhensible pour elle de la
03:56 carlingue d'un avion de ligne qui était échoué au sol. Autre très grand moment
04:01 du roman, les moments où Rousse chemine avec Noirciel, qui est un corbeau très
04:08 vieux, très sage et qui lui apportera un très très grand nombre de choses
04:14 très très utiles pour la suite de son périple. Voilà, ça c'est
04:19 l'histoire que racontent Rousse ou les Beaux-Habitants de l'univers. S'il n'y
04:22 avait que ça, on serait déjà en présence d'un livre absolument
04:26 magnifique, mais il y a plus, beaucoup plus, c'est le style, c'est l'écriture.
04:30 Puisque c'est un livre sans aucun personnage humain, uniquement des animaux
04:35 et pas uniquement Rousse, puisqu'il y a toute une cohorte, toute une troupe d'animaux
04:41 très très divers qui traversent cette aventure,
04:44 Denis Infante a mis au point un langage qui n'est pas tout à fait le langage que
04:51 nous utilisons nous pour penser et communiquer. C'est une langue française
04:55 qui est un peu plus simple que la normale, qui produit des effets beaucoup plus
05:02 immédiats et surtout beaucoup plus concrets, c'est à dire qu'on n'est pas du
05:05 tout dans la langue habituelle des humains, c'est à dire qui surplombe
05:10 l'ensemble du monde et de la réalité avec sa morale, son savoir, sa science, sa
05:15 métaphysique. Là on est dans une langue qui par sa très grande simplicité mais
05:21 aussi sa très grande richesse, son côté très concret et très immédiat en
05:26 quelque sorte avance à la fois au ras du réel, au ras de la conscience de
05:34 Rousse, notre personnage et d'ailleurs des autres animaux, au ras de leur
05:39 perception, de leurs sensations, de leurs instants.
05:43 Évidemment on ne sait pas ce qui se passe dans la tête des animaux mais avec
05:46 cette langue que leur donne Denis Infante on a l'impression ou tout au
05:50 moins l'illusion d'être très proche de quelque chose de plus rudimentaire, de
05:55 plus rapide, de plus instinctif, de plus violent et de plus brutal aussi dans ce
06:00 périmètre qui est celui du savoir instantané des animaux et qui se
06:04 déplacent à mesure de leur propre déplacement. C'est vraiment un très très
06:09 grand tour de force d'écriture, c'est d'une très très grande beauté de langue
06:15 et indépendamment de la force de l'histoire cette langue tout à fait
06:20 remarquable, très inventive et d'une originalité absolue contribue à porter
06:25 le récit pendant ses 150 pages. Je ne vais pas vous lire un extrait du
06:32 roman mais vous lire une phrase de Jean Gionnot que Denis Infante a eu la bonne
06:37 idée de placer en exergue de son roman et qui éclaire d'ailleurs le titre et le
06:42 sous-titre et qui je crois en dit très long sur l'ambition
06:48 poétique mais peut-être politique aussi du roman qu'il a écrit. Dans tous les
06:55 livres actuels on donne à mon avis une trop grande place aux êtres mesquins et
07:01 l'on néglige de nous faire percevoir le allaitement des beaux habitants de
07:05 l'univers. Les beaux habitants de l'univers étant le sous-titre de
07:09 Rousse. Il y aurait évidemment beaucoup plus de choses à dire de ce roman. Au
07:14 moment où je vous parle une vingtaine de lectrices ou de lecteurs ont lu le
07:18 manuscrit entre les mains en avant-première et je dois dire que pour
07:21 l'instant tous ces lecteurs ont été tout aussi saisis et subjugués que
07:28 Cilly Martigny et moi même l'avons été chez Tristram. Donc inutile de vous
07:32 dire que nous vous engageons dès que vous recevrez les épreuves à lire ce
07:38 roman très étonnant, très frappant et duquel je crois selon la formule
07:44 consacrée nous pouvons attendre beaucoup. Il sera sur vos tables le 4 janvier
07:48 prochain. Merci à bientôt
07:52 [Musique]
07:55 Merci à tous !
07:57 Merci à tous !

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