• l’année dernière
Transcription
00:00 - C'est vous qui êtes parti ou vos amis dehors ?
00:01 - Non, c'est moi qui ai parti.
00:02 - C'est joli. C'est beau.
00:08 Jeune maman de 23 ans, Shaila tente de se libérer d'un compagnon violent.
00:14 En la suivant sur quatre années, le film retrace sa lutte juridique
00:18 et son combat intime pour vivre enfin libre et en sécurité.
00:22 - Tous les copains que j'ai eus, ils buvaient tous.
00:25 Ils m'ont tous frappé.
00:29 Ils me trompaient à tir d'arrigo et je ne disais strictement rien.
00:32 Ils partaient avec leurs copains et moi, je ne pouvais pas voir mes copines.
00:34 Donc moi, un mec qui est normal, on va dire, je ne sais pas c'est quoi.
00:40 - Elle a accepté très vite la présence de la caméra.
00:44 On a fait un premier entretien face caméra où elle nous a livré un discours.
00:50 Elle était dans la rage, la révolte, le sentiment d'injustice par rapport
00:54 au fait qu'elle, elle se retrouvait à vivre dans un foyer avec son fils,
00:58 alors que son ex compagnon était tranquillement dans leur ancien appartement.
01:02 Mais elle disait à cette époque qu'elle ne s'en remettrait jamais avec lui,
01:05 que son choix a été fait.
01:08 Quelque part, elle tenait le bon discours.
01:09 Finalement, elle s'est remise avec lui quelques mois plus tard en quittant le foyer
01:13 et que c'est là que notre travail s'est joué et qu'il y a eu une véritable
01:17 relation qui s'est nouée avec elle et un engagement pour le film.
01:21 C'est que finalement, tout ce discours s'est effondré
01:24 puisqu'elle se remettait avec son ex compagnon.
01:27 Nous, il a fallu qu'on lui fasse comprendre que ce n'était pas pour ça
01:29 qu'on ne s'intéressait plus à elle ou à son histoire
01:30 et que justement, on n'était pas dans le jugement
01:32 et que ça nous intéressait de continuer à la filmer et à l'accompagner.
01:36 -Oui, on y gère quelques questions.
01:38 -Magnifique, il se réveille pas la nuit,
01:40 il donne un biberon le soir quand il rentre du travail.
01:43 Et je lui ai appelé, j'ai vu que c'était 23h.
01:45 Je sais pas, tu manques de dormir 2-3 heures en haut, toute seule.
01:49 Ils m'ont aussi pété un plomb.
01:50 -Ah, j'en ai marre, je suis fascinée.
01:56 -Il fait rien du tout.
01:57 -Arrête de rigoler, il faut m'apprendre.
02:02 -C'était pas le sujet violences conjugales qui nous intéressait,
02:06 ni même l'emprise.
02:08 En fait, ça s'est vraiment révélé à nous au fur et à mesure du tournage.
02:11 Nous, on imaginait une émancipation plus linéaire
02:14 qui irait vers l'autonomie financière, vers tout ça.
02:16 Et de voir qu'elle y retournait,
02:20 que ça nous a permis de nous rendre compte de la complexité de l'emprise.
02:24 Après, oui, on a senti la portée collective et universelle de son histoire,
02:29 mais c'est vrai qu'on n'a jamais voulu en faire l'incarnation
02:31 d'une femme victime de violence.
02:33 Après, on avait conscience qu'elle était aussi le produit d'un milieu,
02:40 d'une histoire où la femme était assignée à un certain rôle.
02:43 Et on voit bien comment, elle, justement,
02:46 il y a plein d'injonctions sociales qui pèsent,
02:48 et notamment l'idée qu'en tant que femme,
02:50 elle est là pour gérer sa famille, répondre aux attentes de son mari.
02:53 - Est-ce que vous voulez réellement un retour ou pas ?
02:55 - J'aimerais pas. - Vous êtes sûre ?
02:56 Pourquoi ?
02:58 - Je me dis oui, mais moi, je me fais un...
03:01 Pour moi, en fait, la vie de famille,
03:03 j'ai eu lui avec mes enfants, il faut que je reste comme ça avec lui.
03:07 S'il m'avait du mal, il faut quand même qu'il revienne, en fait.
03:09 - Pourquoi ?
03:10 - Moi, comme j'ai vu mes parents,
03:13 qui ont eu des enfants, qui ont été séparés,
03:15 ils ont refait des enfants en cours,
03:16 moi, je veux pas faire pareil avec mes enfants, en fait.
03:18 - Donc, c'est-à-dire que si vous restez avec,
03:20 vous êtes capable d'accepter l'inacceptable.
03:22 - Oui.
03:23 - Ouais ?
03:24 Donc, en gros, vous allez montrer à vos enfants ce que c'est l'amour.
03:28 - Non, c'est pas comme ça, je vais pas montrer.
03:30 En gros, c'est quand je suis avec lui, il faut tout être beau, tout rose.
03:34 Et après, il faut qu'ils soient pas là quand il se passe des choses.
03:37 - D'accord.
03:38 Et vous allez jouer une pièce de théâtre toute votre vie.
03:40 - Quand on raconte comme ça, le film, les gens se disent
03:48 "Ah, ça doit être hyper dur et hyper violent."
03:50 Et en fait, oui, ça l'est.
03:52 Mais Shaila, en fait, dans sa vie de tous les jours,
03:54 elle a aussi plein de moments de joie, plein de moments de bonheur.
03:56 Et c'est aussi pour ça que...
03:57 Et puis en plus, elle, c'est une personne plutôt...
04:00 Enfin, qui fait beaucoup d'humour, qui est drôle, qui est pleine de vie.
04:05 Et c'est aussi pour ça qu'on a eu envie de la filmer, elle.
04:07 C'était très important pour nous de montrer tous ces moments de joie,
04:11 de fête, de rire avec ses amis, qu'elle vit aussi,
04:14 et qui sont aussi pour elle un renouveau.
04:18 Parce que nous, quand on l'a rencontrée,
04:20 elle nous racontait qu'avant le passage au centre d'hébergement,
04:23 elle était enfermée chez elle, qu'elle voyait plus personne.
04:25 Ses déplacements étaient soumis
04:27 aux choix et au bon vouloir de son ex-compagnon.
04:30 Quand elle sort du foyer,
04:31 en fait, elle redécouvre aussi l'amitié, la sororité,
04:36 même si elle ne l'explicite pas comme ça.
04:38 Mais toutes ces relations et la possibilité d'être heureuse
04:43 dans des relations d'amitié et d'amour.
04:46 - De toute façon, on n'a eu que des mauvais moments.
04:49 - On arrive au foyer. - Ouais.
04:51 - T'as récupéré ton fils. - Six mois après.
04:54 - Six mois après, t'as réussi à ne plus rien, le petit Méo.
04:57 T'as eu ta maison, j'ai eu ma maison.
04:59 On est retombés encore sur des cons.
05:00 Moi, j'ai gardé tout le temps le même con.
05:01 - C'est quand même bien sensé, là, le puits.
05:09 - Ouais.
05:10 On va s'en sortir. - On va s'en sortir, les défauts.
05:13 - On est des guerriers. - C'est vrai.
05:14 - On est des warriors. - Des winners.
05:16 - Des winners.
05:18 - On est des winners. - Des winners.
05:20 (rires)
05:22 Voilà.
05:23 [Bruit de la voiture]

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