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Sur les 10 films qui ont réalisés le plus de recettes aux Etats Unis en 2023, il y a 8 franchises autrement dit : huit films qui mettent en avant un personnage ou univers déjà connu. Pourquoi un tel succès des franchises au cinéma ?

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00:00 9h, 11h.
00:02 Eurotun Culture Média.
00:04 Avec Thomas Hill et Thomas, c'est l'heure de la question Média du Jour.
00:06 Fast, Furious 10, Scream 6, Avatar 2, Les Gardiens de la Galaxie 3.
00:12 Sur les 10 films qui ont réalisé le plus de recettes aux Etats-Unis en 2023,
00:16 il y a 8 franchises, autrement dit 8 films, qui mettent en avant un personnage ou un univers déjà connu.
00:22 Alors pourquoi un tel succès des franchises au cinéma ?
00:25 On va se poser la question ce matin avec Frédéric Mauget.
00:28 Bonjour, vous êtes directeur général de Paramount France,
00:31 qui a développé de nombreuses franchises, Sonic, Transformers, les Schtroumpfs,
00:35 Missions Impossible, ou Pas de Patrouille en ce moment à l'affiche.
00:39 Et puis Julien Jourdan est avec nous également. Bonjour.
00:41 Bonjour Thomas.
00:42 Vous êtes professeur associé à HEC Paris, ancien directeur financier chez Warner.
00:46 Alors quand j'étais petit, il y avait James Bond.
00:49 Et puis au milieu des années 90, il y a eu la série des Missions Impossibles qui a commencé à démarrer.
00:54 Mais à part ça, on retrouvait assez rarement les mêmes héros d'un film à l'autre.
00:58 Depuis quand est-ce qu'il y a ce phénomène de franchise, Julien Jourdan ?
01:02 C'est un phénomène qui remonte à assez longtemps, à la fin des années 70.
01:06 Le premier blockbuster, ce sont les Dents de la mer en 75.
01:09 Le premier Star Wars, c'est en 77.
01:11 Puis il y en a un deuxième en 80, puis un troisième en 83, je crois.
01:15 Mais ça restait très coiffé.
01:17 Oui, on a le retour vers le futur, Indiana Jones.
01:20 Et ça décolle vraiment dans les années 2000, avec la franchise Harry Potter chez Warner notamment.
01:24 Et puis surtout avec l'achat par Disney de Marvel en 2009 et de Star Wars en 2012.
01:29 Et là, ça devient le modèle dominant d'Hollywood.
01:32 Et aujourd'hui, on n'a quasiment plus que ça.
01:34 Et à quoi c'est lié ça ? Comment est-ce qu'on peut l'expliquer ?
01:37 Alors, c'est dû à un phénomène assez particulier.
01:42 C'est cette industrie qui repose sur une grande incertitude.
01:46 C'est-à-dire que quand on fait un film, ça coûte très, très cher.
01:48 Frédéric le sait très, très bien, un blockbuster, ça coûte des dizaines, voire des centaines de millions de dollars.
01:54 Oui, ça peut être 200 millions de dollars.
01:56 Mission impossible, le dernier, c'est 300 millions de dollars.
01:59 Donc c'est assez difficile d'imaginer ce que ça représente.
02:01 C'est le coût d'un Boeing 777, qui va voler pendant 30 ans.
02:05 Donc on prend énormément de risques.
02:07 Et ça, c'est uniquement le coût de production.
02:09 Après, il faut le distribuer.
02:11 Ça, ça coûte encore beaucoup d'argent.
02:12 Et le jour où le film sort en salle, on n'a aucune assurance que le public va venir.
02:16 On a la boule au ventre.
02:18 Et il faut arriver à réduire cette incertitude, à réduire ce que j'appelle la terreur du box-office.
02:22 Et la franchise, c'est un moyen de faire ça.
02:23 Donc c'est moins de risque pour Paramount, par exemple, Frédéric Moget, de faire appel à des héros récurrents comme ça ?
02:28 Alors c'est moins de risque, évidemment.
02:30 Ça permet de démarrer avec ce qu'on appelle la pré-notoriété.
02:34 Donc il y a déjà une notoriété pour le spectateur.
02:37 Mais il y a toujours du risque.
02:39 Et il y a toujours des échecs, quand même ?
02:40 Il y a toujours des échecs, après.
02:42 Dans une franchise, je pense que si on regarde le côté créatif, c'est pas seulement qu'il y a du risque.
02:47 Ça veut dire qu'on a des personnages que les gens ont envie de revoir.
02:51 Et qu'on a une histoire qu'on peut continuer à développer.
02:53 C'est-à-dire qu'on est dans de la créativité et dans comment est-ce qu'on continue à parler de quelque chose que les gens ont montré qu'ils aimaient.
03:01 Les plateformes ont peut-être eu une influence aussi là-dessus.
03:04 Elles ont dû changer la donne dans le sens où elles ont pour pousser les gens à faire l'effort à aller au cinéma.
03:10 Peut-être qu'il faut dépenser encore plus dans les films de cinéma.
03:14 Je dirais que c'est surtout une dépense de temps.
03:16 Pour aller au cinéma, ça coûte de l'argent.
03:18 Effectivement, il y a un ticket à payer.
03:19 Il faut peut-être payer la BBC-terre si on est une famille.
03:21 Mais surtout, il faut passer du temps.
03:23 Il faut passer une soirée entière.
03:24 Et un Français va, je crois, deux fois au cinéma par an en moyenne.
03:27 Donc c'est vraiment une décision qui est assez rave.
03:29 Et on a la possibilité de regarder tout ce qu'on veut.
03:33 Beaucoup de choses, en tout cas, sur Netflix et sur d'autres plateformes.
03:35 Donc il y a cette concurrence pour le temps qui est très forte.
03:40 Et qui fait qu'aujourd'hui, pour déplacer un spectateur, le faire venir en salle, il faut vraiment une promesse très forte.
03:44 Et alors il y a un exemple qu'on va prendre de franchise, un phénomène auquel vous n'avez pas pu échapper,
03:49 surtout si vous avez des enfants, c'est celui de pas de patrouille.
03:52 On en parle dans un instant avec des chiffres étonnants.
03:54 Vous allez voir.
03:55 Culture Média sur Europe avec la suite de la question Média du jour.
03:58 Comment expliquer le succès des franchises au cinéma ?
04:01 On en parle avec vos invités.
04:03 Thomas Hill, vous recevez Frédéric Mauger, directeur général de Paramount France.
04:06 Et Julien Jourdan, professeur associé à HEC à Paris.
04:09 Et alors il y a un exemple, il y a une franchise qui écrase tout en ce moment au box office.
04:15 C'est la pas de patrouille.
04:16 Une franchise qui pèse 12 milliards de recettes à titre de comparaison.
04:21 Écoutez ça, Julien Pichenay.
04:23 C'est plus que tous les films de la carrière de Steven Spielberg réunis.
04:26 La pas de patrouille.
04:27 Frédéric Mauger, c'est produit dans votre groupe à la Paramount.
04:31 Des dessins animés, il en existe des centaines.
04:34 Pourquoi est-ce que celui-là, il a pu générer cette franchise et ce business ?
04:38 C'est toujours un peu magique.
04:40 Comme on l'évoquait, on ne sait jamais.
04:42 Ce qu'on sait, c'est qu'en tout cas, on parlait tout à l'heure de la sortie cinéma.
04:45 C'est vrai que c'est quelque chose qui n'arrive pas tous les jours.
04:49 Mais c'est quelque chose qui est très valorisé par les familles.
04:52 La possibilité de sortir de chez soi, de ne pas être sur le canapé et d'aller ensemble faire quelque chose.
04:58 C'est quelque chose qui est très fort, qui parfois reste des souvenirs importants pour les enfants.
05:03 Ce qu'on a vu sur la pas de patrouille, c'est qu'il y a quelque chose d'universel.
05:06 Contrairement à beaucoup de franchises, enfants qui sont souvent soit garçons, soit filles.
05:13 Là, on est vraiment dans du 50/50.
05:15 Les filles et les garçons aiment autant.
05:17 Vous avez créé un personnage de fille.
05:19 Il n'était pas forcément prévu au début.
05:21 C'est pas nous directement, mais le créateur.
05:24 C'est un personnage de Stella qui est de plus en plus important et qui d'ailleurs est au centre du nouveau film.
05:29 Ce qu'on voit aussi, c'est qu'on parlait de la longévité.
05:33 Souvent, on commence à regarder la pas de patrouille quand on est un jeune enfant.
05:37 Mais on est surpris par l'âge jusqu'auquel les enfants regardent.
05:42 Ce qu'on a vu aujourd'hui, c'est le phénomène grand frère, grande soeur.
05:45 C'est-à-dire, on va emmener ton petit frère ou ta petite soeur voir le film.
05:48 Tu veux rester à la maison ? "Ah non, je vais quand même venir."
05:51 "Fais genre, ça m'intéresse pas."
05:53 Et comme c'est des vrais films de cinéma, les parents passent aussi un très bon moment.
05:58 Il y a ce bouche-à-oreille aussi avec les parents.
06:00 Ce qui est fou, c'est que le deuxième volet marche encore mieux que le premier.
06:03 C'est fréquent pour les franchises, Julien Jourdan ?
06:05 Il n'y a pas vraiment de règle.
06:07 Si vous prenez Harry Potter, le premier a fait mieux que le deuxième, qui a fait mieux que le troisième.
06:10 Mais le meilleur film en termes de recette de la série, c'est le dernier.
06:13 Il n'y a vraiment pas de règle.
06:15 Mais en fait, ce n'est pas vraiment ce qui compte.
06:17 Pour le producteur, la comparaison, c'est entre faire une franchise, une suite de franchises, ou faire un film nouveau.
06:23 Et là, il n'y a pas photo.
06:24 Quand on voit le succès des franchises, ça explique pourquoi on a autant de franchises aujourd'hui dans le marché.
06:29 Et puis surtout, l'intérêt pour les producteurs, c'est qu'au-delà du succès en salles, une franchise, c'est une marque.
06:34 Donc ça permet de développer une multitude d'objets dérivés que vous allez pouvoir commercialiser.
06:39 J'ai regardé dans un catalogue de Noël, il y a une trentaine de jouets estampillés du logo de la Pâte Patrouille.
06:45 Et c'est sans parler des vêtements, des assiettes ou des couches.
06:49 Pas de Patrouille, ça existe aussi.
06:51 En fait, le film, ça devient une vitrine presque de votre business, Frédéric Mogelle.
06:56 Alors, est-ce que c'est une vitrine ?
06:57 Ça fait partie d'un écosystème global.
06:59 C'est-à-dire que quand on regarde la réalité de ce qui se passe, tout fonctionne l'un pour l'autre.
07:05 C'est-à-dire que l'univers qui existe avec les produits dérivés est aussi favorable au succès du film.
07:13 C'est aussi ce qui permet de faire des films de la qualité de ceux de Pâte Patrouille,
07:17 qui sont des budgets importants pour des films d'animation.
07:20 Et donc, la capacité à ce que le spectateur et le consommateur aient cette relation avec la Pâte Patrouille,
07:28 dans plusieurs endroits, ça permet qu'il y ait toujours cette envie.
07:33 Et après, ce qu'on voit, c'est vrai, et ce n'est pas vrai que pour les franchises,
07:37 c'est qu'aujourd'hui, l'événement que crée une sortie cinéma reste quelque chose de spécial.
07:42 Qu'on n'a pas réussi à répliquer avec des sorties plateforme, par exemple.
07:47 Alors justement, si on se place du côté du public, maintenant, Julien Jourdan,
07:50 qu'est-ce qui explique que ça plaise autant toutes ces franchises ?
07:53 Est-ce qu'il y a un côté rassurant ? On sait qu'on va en avoir pour notre argent, c'est ça ?
07:57 Oui, c'est un peu comme une maison familière dans laquelle on revient.
08:00 On sait qu'on va y retrouver des personnages, on va y retrouver un univers.
08:04 Et donc, quand on doit faire un choix entre une dizaine de films qui sont à l'affiche,
08:09 en tout cas qui sortent sur une semaine donnée, on va plutôt aller vers ce type de produit-là.
08:15 Parce qu'on est sûr de faire mouche.
08:18 On a des enfants, mais on est sûr que quand on va aller voir "La Patte Patrouille",
08:20 ils vont sortir avec un grand sourire. Et ça, ça n'a pas de prix.
08:23 Mais avec toutes ces franchises, est-ce qu'il n'y a pas un moment, un risque de lassitude,
08:26 quand même, au bout d'un moment ? Peut-être que cette logique des franchises,
08:29 elle durera qu'un temps ? C'est peut-être juste une parenthèse dans l'histoire du cinéma.
08:34 Oui, on dit ça depuis à peu près 20 ans.
08:36 Mais depuis 20 ans, le succès des franchises ne se dément pas.
08:41 Moi, je pense qu'il faut regarder la démographie du cinéma.
08:44 Aujourd'hui, qui va au cinéma ? Ce sont soit des gens qui ont plus de 50 ans,
08:47 donc qui n'ont plus d'enfants à la maison, qui ont le temps d'y aller.
08:49 Ce n'est clairement pas la cible des franchises.
08:52 Qui va voir des franchises ? Ce sont plutôt des jeunes de moins de 25 ans.
08:55 Et ce public-là se renouvelle en permanence.
08:57 Et visiblement, il redemande de ce type de produit.
09:00 Ce qui est marquant aussi, c'est que les acteurs passent aujourd'hui presque derrière la marque,
09:04 derrière la franchise. Il y a une époque où on allait voir Depardieu ou Belmondo au cinéma.
09:08 Aujourd'hui, on va voir X-Men, Harry Potter, Batman.
09:11 Mission Impossible.
09:12 Enfin, sur Mission Impossible, on va encore voir Tom Cruise.
09:16 Il y a un certain nombre d'acteurs aujourd'hui qui sont encore des grandes stars mondiales.
09:19 Et nous, on a une relation privilégiée avec Tom Cruise.
09:23 Et on voit que voir le nouveau film de Tom Cruise, ça a une valeur aujourd'hui qui est très forte.
09:28 Dès qu'un film a du succès, ça appelle une suite derrière.
09:32 Par exemple, cette année, il y a eu Barbie ou Mario Bros qui ont cartonné.
09:36 Ça va devenir des franchises, là aussi. Il n'y a pas trop de doutes là-dessus, Julien Jourdan ?
09:40 Aucun doute, puisque Mattel a annoncé qu'ils allaient lancer un studio.
09:44 Ils vont faire probablement une suite à Barbie, c'est certain.
09:46 Et il y aura d'autres films. Je crois qu'il y a un film sur le Uno qui est en préparation.
09:49 Oui, sur le Uno.
09:50 Je suis curieux de savoir ce que ça va donner.
09:51 Plus quatre, plus deux, cascade.
09:52 C'est très intéressant.
09:53 Aucun doute.
09:56 Et puis, parfois, on peut même réunir plusieurs succès pour tenter de faire un troisième succès.
10:00 Cet été, il y a eu deux succès en salle. Au même moment, c'était Barbie et Oppenheimer.
10:03 Deux films qui n'ont rien à voir dans le style.
10:05 Et bien, ça a donné l'idée à un réalisateur de faire Barbenheimer.
10:08 Sortie prévue en 2024.
10:11 Ce n'est pas une histoire de rôles.
10:12 Non, non, c'est partie d'une blague, mais ça va devenir sérieux.
10:14 On va peut-être un peu trop loin dans le délire des franchises.
10:18 On va voir ça. Merci en tout cas à tous les deux.
10:21 Merci d'être venus ce matin à ce micro.
10:23 Frédéric Mauger, directeur général de Paramount France.
10:25 Et Julien Jourdan, professeur associé à HEC Paris.
10:28 Merci beaucoup.

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