• l’année dernière
L'Assemblée nationale a adopté mardi en première lecture le projet de loi "pour le plein emploi", qui impose aux bénéficiaires du RSA la réalisation de 15 heures d'activités hebdomadaires. Un texte vu par la gauche comme une injustice, notamment dans les Pyrénées-Orientales.

Category

🗞
News
Transcription
00:00 Mais d'abord à 7h45, l'Assemblée nationale qui validière le projet de loi pour le plein emploi.
00:06 Les députés valident donc aussi ce changement très contesté sur les règles du RSA, le Revenu de Solidarité Active.
00:12 23 000 personnes perçoivent cette allocation dans les Pyrénées-Orientales.
00:16 Pour en parler, notre invité Suzanne Chaudjahi, c'est le vice-président du département en charge de l'insertion.
00:22 Bonjour Rémi Lacapaire.
00:23 Bonjour à vous.
00:24 Vous êtes un élu communiste au département.
00:27 Alors dans ce projet de loi, il est prévu effectivement de conditionner l'obtention du RSA,
00:32 c'est-à-dire que pour obtenir cette allocation, 600 euros pour une personne seule,
00:36 il faudrait réaliser désormais 15 heures d'activité chaque semaine.
00:40 Est-ce que vous êtes d'accord avec les députés de gauche qui estiment que c'est du travail gratuit ?
00:45 Oui, effectivement, il y a cette première partie qui est critiquable dans le texte,
00:50 c'est qu'effectivement, il y a d'une certaine manière cette obligation à travailler, à donner ces 15 heures.
00:57 Alors ces 15 heures, c'est compliqué, c'est pas très clair quand même leur explication.
01:03 Effectivement, ça peut être du travail, auquel cas ça fait deux jours de travail quand même, 15 heures.
01:07 C'est pas une petite activité.
01:10 On sait pas encore si ce sera dans des entreprises, dans des collectivités, dans des associations ?
01:14 Ni comment, ni la forme, on sait pas bien.
01:18 Ensuite, ces 15 heures pourraient être des heures dans l'insertion par l'activité économique,
01:25 par exemple ce qui se passe aujourd'hui avec les chantiers d'insertion, les entreprises d'insertion.
01:29 C'est quoi la différence ?
01:30 Aujourd'hui, cela fait partie des dispositifs d'insertion qui accompagnent les publics,
01:37 qui remettent d'une certaine manière le pied à l'étrier.
01:39 Mais là encore, il faudrait que le débat, le gouvernement, l'État,
01:44 débloque des moyens importants pour ouvrir des places en insertion par activité économique,
01:48 ce qui n'est pas le cas aujourd'hui puisque ce nombre de places est limité.
01:52 Et ce dispositif-là, c'est avec un vrai salaire ?
01:54 Et ce dispositif-là, c'est bien évidemment avec un salaire, il s'agit de salariés en insertion.
01:58 Alors si jamais les bénéficiaires du RSA ne réalisent pas leurs 15 heures d'activité chaque semaine,
02:03 il y a sanction, en tout cas c'est ce qui est prévu par le projet de loi,
02:07 le RSA leur est retiré jusqu'à ce qu'ils retrouvent une activité.
02:10 Là encore, pour certains députés, c'est faire passer les bénéficiaires pour des feignants.
02:15 Mais en fait, qu'est-ce que vous, vous constatez dans les Pyrénées-Orientales sur le terrain ?
02:19 Est-ce qu'il y a des bénéficiaires qui ne sont pas en mesure de réaliser ces heures d'activité ?
02:23 Alors d'abord, il faut prendre en considération les bénéficiaires du RSA où ils en sont.
02:29 Donc il y a effectivement besoin pour un certain nombre de les accompagner, de les soutenir.
02:33 Chaque situation est unique.
02:34 De lever des freins, c'est ce à quoi s'attache le département aujourd'hui,
02:38 les Pyrénées-Orientales, avec l'ensemble d'acteurs, un écosystème autour,
02:41 d'acteurs économiques, d'acteurs partenaires de l'emploi,
02:45 avec lesquels on accompagne les publics.
02:49 Accompagner les publics, ce n'est pas les stigmatiser,
02:52 ce n'est pas les montrer du doigt comme le fait ce texte de loi,
02:56 ce n'est pas les jeter à l'opprobre nationale en disant qu'ils seraient responsables de leur propre situation.
03:03 Les accompagner, c'est effectivement créer des dispositifs qui les rassurent,
03:10 qui permettent d'aller à leur rencontre, de créer des dispositifs ou des réponses sur des situations sociales,
03:18 parfois des difficultés de logement, des difficultés de garde-enfant.
03:21 Dans certaines situations justement, parmi les 23 000 personnes qui bénéficient du RSA dans les Pyrénées-Orientales,
03:28 il y en a qui, selon vous, ne peuvent pas réaliser ces 15 heures d'activité chaque semaine ?
03:33 Je n'ai pas pensé qu'on va arriver à faire travailler ces 23 500 bénéficiaires du RSA, il est illusoire.
03:42 Pourquoi ?
03:44 Parce qu'il faut d'abord lever les freins, il faut d'abord créer les conditions.
03:48 Et puis j'entendais dire qu'il y avait la possibilité que ces 15 heures,
03:52 on l'a entendu dans les bans de l'Assemblée Nationale, pouvaient être de la formation.
03:56 Par exemple, il n'y a pas 23 500 formations offertes à l'échelle du département.
04:02 Et puis de la même manière, on parle de ces 15 heures,
04:04 on dit qu'ils pourraient très bien faire leurs démarches administratives,
04:06 que cela serait compter dedans, ou participer à des job dating, ou à de la recherche active d'emploi.
04:14 Mais ça, ça ne fera jamais 15 heures.
04:16 Concernant la sanction, est-ce que vous savez si le département aura une marge de manœuvre,
04:20 ou une marge de souplesse en fonction des situations que vous décrivez justement ?
04:24 Les personnes malades, les personnes qui ont du mal à faire garder leurs enfants,
04:26 est-ce que vous aurez une marge de manœuvre ?
04:28 D'abord, le département n'a plus l'allocation en gestion.
04:32 C'est plus vous qui décidez, effectivement ?
04:34 Nous sommes dans l'expérimentation de la renationalisation du RSA.
04:36 C'est aujourd'hui la CAF qui s'occupe de l'allocation.
04:40 Mais est-ce qu'il y aura une marge de manœuvre, à votre avis ?
04:42 Alors, je l'espère qu'il y aura une marge de manœuvre.
04:46 Parce qu'en fait, c'est le piège de ce texte de loi.
04:50 On a décidé, là, à l'Assemblée Nationale,
04:53 qui a décidé d'ouvrir la boîte de Pandore de cette possibilité de sanction.
04:58 Et donc, aujourd'hui, il va falloir qu'il se débrouille avec.
05:01 C'est quoi le SAV derrière ?
05:04 Soit le gouvernement décide de ne pas appuyer sur le bouton "sanction",
05:07 et auquel cas il sera accusé de laxisme par la frange la plus à droite de l'Assemblée Nationale.
05:13 Soit alors, il le fait, et auquel cas, on va prendre des cas d'école.
05:18 Un couple avec un enfant, un des deux seulement en travail, et au SMIC.
05:24 Donc là, il y a un complément, il y a le RSA qui rentre en considération.
05:30 Si la personne ne remplit pas ses obligations,
05:32 donc je ne vois pas comment elles pourraient être remplies,
05:34 ces 15 heures, je ne vois pas comment on peut y arriver.
05:37 Mais admettons que la sanction tombe,
05:41 ça veut dire que ce couple-là sera complètement fragilisé,
05:44 que derrière, ça sera impossible de payer son loyer,
05:47 un jeu de domino, et avec derrière, des enfants qui sont en jeu.
05:51 C'est d'ailleurs pour cela que nous avons Claire Hédon,
05:54 la défenseuse des droits qui alerte, mais aussi l'Assemblée Nationale.
05:57 - Elle dit carrément que c'est un retour au 19e siècle.
05:59 - Voilà, exactement, exactement.
06:01 Elle dit que c'est un retour au 19e siècle,
06:03 et qu'au lieu de créer, elle se pose la question de quelle est cette société,
06:06 finalement, quand il y a une fragilité,
06:08 on décide d'appuyer sur la tête des personnes les plus fragiles.
06:11 C'est un peu le monde à l'envers quand même.
06:13 - Vous craignez que la misère s'aggrave dans le département.
06:15 - Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement.
06:17 - Nous avons ici, à Sion, l'invité du 6/9.
06:20 - 8h au mois d'ici, notre invité, Suzanne Chaudjahi,
06:22 et Rémi Lacapère, vice-président du département des P.O.
06:25 en charge de l'insertion sociale professionnelle.
06:27 - Dès cet hiver, il y a beaucoup d'associations,
06:29 comme les Restos du Coeur, qui ont déjà prévenu,
06:31 elles vont refuser des bénéficiaires.
06:33 Est-ce que justement, avec cette réforme du RSA,
06:35 tout ça vous inquiète ?
06:37 Vous parliez de misère dans le département.
06:39 - C'est inquiétant parce qu'on est déjà dans un département
06:42 qui est profondément touché par le chômage,
06:45 par la précarité, par des fragilités.
06:47 Je trouve que là, cette réforme a bien évidemment
06:53 rajouté une difficulté supplémentaire.
06:55 - Pourtant, il faut bien réformer ça,
06:57 il faut bien aider les gens à retrouver un emploi.
06:59 Qu'est-ce que vous, vous proposez,
07:01 alors que vous êtes en charge de l'insertion au département ?
07:03 - En fait, la question c'est de créer les conditions.
07:09 - Ça veut dire quoi, créer les conditions ?
07:11 - Ça veut dire participer à une dynamique collective.
07:16 On le fait, le département par exemple,
07:18 est un acteur économique important,
07:20 même s'il n'a plus aucune compétence en termes d'emploi.
07:23 Il n'est plus financeur de l'activité économique,
07:25 il ne peut plus aider les entreprises par exemple.
07:27 Néanmoins, c'est l'un des premiers employeurs.
07:31 Par l'investissement, on crée de l'activité économique,
07:34 on crée de l'emploi.
07:36 - C'est des formations ?
07:37 - Et ensuite, on accompagne les publics vers des formations.
07:40 Même si c'est la région qui a cette compétence-là.
07:45 Et puis, la question c'est la fragilité des publics.
07:52 Vous parliez des alertes données par les associations de solidarité,
07:58 quelles qu'elles soient d'ailleurs.
08:00 Le contexte de cette loi,
08:02 il y en a deux des contextes qu'il faut prendre en considération.
08:05 Les warnings que vous avez dit,
08:07 les alertes lancées avec 16% des Français qui ne mangent pas à leur fond.
08:11 - Mais vos solutions ?
08:12 - Les solutions sur la question des bénéficiaires du RSA,
08:18 aujourd'hui, il faut pouvoir mieux les accompagner.
08:23 C'est ce qu'on fait en travaillant avec les acteurs locaux.
08:28 On se parle aujourd'hui avec les acteurs locaux,
08:30 on arrive à accompagner, à aller chercher des difficultés,
08:35 essayer de les dépasser.
08:38 Et ensuite, de permettre une reprise d'emploi.
08:41 C'est ce qui a été fait avec, par exemple, hier matin,
08:45 le job dating du département avec l'ensemble des partenaires locaux.
08:50 - Merci beaucoup Rémi Lacapère d'avoir été avec nous ce matin
08:54 pour nous donner votre avis sur ce projet de loi
08:57 qui va modifier les conditions d'accès au RSA.

Recommandations