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François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, le 10 octobre 2023 sur franceinfo.

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00:00 La Banque de France publie sa note de conjoncture mensuelle et le tassement se confirme pour l'économie française.
00:05 Bonjour François Villeroy de Gallo.
00:06 Bonjour Jean-Luc Chappé.
00:07 Grand témoin de France Info ce matin, gouverneur de la Banque de France.
00:10 On va parler de cette note qui évidemment ne prend pas en compte les événements de ces derniers jours.
00:15 La guerre qui a éclaté samedi à l'aube, on la compare à celle de 1973,
00:20 guerre du Kipour qui a eu des conséquences sur le prix du baril, sur l'inflation.
00:24 Est-ce qu'on est dans une situation comparable ? Est-ce qu'il faut craindre une flambée des cours ?
00:29 Je ne crois pas qu'on soit aujourd'hui dans une situation comparable, mais il faut évidemment être très vigilant.
00:34 Je voudrais dire que ce qui s'est passé ce week-end c'est d'abord une tragédie humaine,
00:36 avec ses centaines de victimes civiles en Israël, et puis aujourd'hui un nouveau foyer de guerre.
00:43 Cela ajoute à l'incertitude économique.
00:45 Je crois qu'il serait prétentieux deux jours après de dire exactement ce que ça peut entraîner.
00:49 Mais nous sommes très vigilants sur deux choses.
00:53 D'abord bien sûr, vous l'avez dit, le prix du pétrole.
00:55 Il a, hier, sur les marchés mondiaux, monté de façon relativement modérée.
01:01 Il a monté d'à peu près 4%, alors qu'il avait baissé de 10% la semaine dernière.
01:06 - Mais le gaz augmente plus.
01:07 - Alors le gaz augmente plus, mais traditionnellement le gaz est extrêmement volatile.
01:12 Et sur ce prix du pétrole, pourquoi la situation est différente aujourd'hui de 1973 ?
01:18 C'est que en 1973, il y avait un conflit généralisé avec un embargo décrété par tous les pays producteurs de pétrole.
01:25 Ce que nous ne voyons pas aujourd'hui.
01:27 Mais il faut évidemment surveiller une éventuelle extension du conflit.
01:31 Au passage, c'est aussi différent du choc qu'on a connu début 2022 au moment de l'invasion de l'Ukraine.
01:37 Parce que c'était un choc généralisé sur toutes les matières premières, y compris agricoles ou les métaux.
01:43 Mais le pétrole était évidemment très volatile et à surveiller.
01:47 Et puis il y a une deuxième chose, si vous me permettez, c'est de voir dans quelle mesure
01:50 une augmentation du prix du pétrole se diffuse et contagieuse d'une certaine façon vers le reste de l'inflation.
01:56 Il faut se rappeler que l'énergie c'est très sensible pour tous les français.
01:59 Mais c'est 10% de notre consommation totale.
02:03 Donc ce qui fait l'inflation c'est les 90% restants.
02:06 Et là-dessus, nous voyons une claire tendance à la baisse.
02:09 - Une claire tendance à la baisse de l'inflation, ça se confirme ?
02:12 - Alors les chiffres parlent, Jérôme Chapuis.
02:15 L'inflation en zone euro était à plus de 10% il y a un an, en octobre 2022.
02:20 On est descendu aujourd'hui à 4,3%.
02:23 Et nous prévoyons un atterrissage de l'inflation vers 2% d'ici 2025.
02:29 Je veux dire aujourd'hui que nous ne voyons pas de raison de changer cet atterrissage.
02:35 Et que nous tenons fermement ce cap dans les turbulences.
02:38 Le point sans doute à surveiller le plus, c'est l'éventuelle extension du conflit.
02:42 - Vous avez publié cette note de conjoncture économique hier soir,
02:46 avec des milliers de patrons comme toujours qui sont interrogés.
02:49 Vous n'êtes pas très optimiste ?
02:50 - Alors nous interrogeons, c'est les hommes et les femmes de la Banque de France
02:54 qui font ce travail sur le terrain, et je les salue.
02:57 Nous interrogeons plus de 8500 entrepreneurs de toutes tailles, de tous secteurs, de tous territoires.
03:03 - Et qu'est-ce qu'ils vous disent ?
03:03 - Et ça confirme un ralentissement de l'économie française.
03:07 Vous vous souvenez peut-être qu'il y avait eu une bonne surprise au printemps, au deuxième trimestre.
03:12 Et du coup d'ailleurs sur l'ensemble de l'année 2023,
03:14 la croissance sera supérieure à ce que prévoyait la Banque de France.
03:18 On devrait être proche de 1%, nous le disons 0,9%.
03:21 Mais là on voit la confirmation d'un ralentissement un peu dans tous les secteurs.
03:26 Les services, l'industrie, le bâtiment.
03:28 Alors il y a deux nouvelles un peu meilleures que je veux quand même souligner.
03:33 La première c'est que c'est un ralentissement, c'est pas une récession.
03:36 - C'est pas une récession ?
03:37 - C'est pas une récession, ça je tiens à le dire ce matin.
03:38 - A quel moment ça devient une récession ?
03:39 - La récession techniquement c'est quand on passe en croissance négative, en dessous de zéro.
03:43 Nous prévoyons, je l'ai dit, 0,9% pour cette année.
03:45 Nous prévoyons aussi 0,9% pour l'année prochaine.
03:48 Mais c'est un ralentissement marqué.
03:50 La deuxième nouvelle un peu meilleure, c'est que l'emploi résiste très bien.
03:54 Ça c'est une surprise positive.
03:56 L'économie française devrait quand même créer plus de 300 000 emplois cette année.
04:00 Et le chômage est descendu à 7%, 7,2%
04:04 qui est le taux de chômage le plus bas qu'on avait connu depuis 40 ans.
04:07 Donc évidemment, l'économie est affectée par toutes les turbulences mondiales.
04:12 Mais je souligne qu'il y a une certaine résilience,
04:16 y compris quand on compare à nos voisins européens.
04:18 - Il y a quelques jours vous disiez "il n'y a pas de justification à une hausse supplémentaire
04:24 des taux de la BCE, de la Banque Centrale Européenne".
04:26 Vous maintenez qu'on est sur un plateau et qu'on va y rester pendant un certain temps ?
04:30 - Alors, je crois qu'il faut être clair là-dessus.
04:32 - Les taux d'intérêt ?
04:32 - Oui, oui, les taux d'intérêt.
04:34 Il faut être clair là-dessus, Jérôme Chapuis.
04:36 L'inflation c'est la maladie.
04:37 On en a parlé.
04:38 La montée des taux d'intérêt c'est le remède.
04:40 - Mais il fait mal ce remède ?
04:41 - Le remède n'est pas agréable pour tous ceux qui empruntent,
04:45 mais il est efficace.
04:46 Je vous ai cité les chiffres d'inflation qui baissent.
04:49 Alors je crois effectivement qu'après avoir beaucoup monté les taux,
04:53 maintenant nous sommes au bon niveau.
04:55 La bonne dose, si vous voulez, du remède.
04:58 Il faut ensuite savoir garder le traitement suffisamment longtemps.
05:03 C'est là que j'ai parlé d'un plateau.
05:05 Mais je crois que c'est ça la perspective dans laquelle nous sommes.
05:08 C'est que, sauf encore une fois, retournement, nouvelles données, etc.
05:13 - Mais c'est important pour les chefs d'entreprise, pour les Français aussi,
05:16 qui peuvent emprunter.
05:17 - Je ne crois pas qu'il soit c'étable de monter davantage les taux de la BCE.
05:20 - Mais suffisamment longtemps ces taux,
05:23 à quel moment on peut commencer à espérer une baisse des taux ?
05:25 - Je vous l'ai dit, notre perspective et presque notre engagement,
05:28 c'est cet atterrissage de l'inflation vers 2% dans les deux ans.
05:32 Donc nous verrons au fur et à mesure des progrès.
05:35 Il faut simplement savoir être suffisamment patient,
05:38 y compris, j'en rencontre plus pour une raison économique,
05:40 c'est ce qu'on appelle la politique monétaire,
05:42 cet intérêt, ça met un certain temps à être transmis vers l'économie,
05:45 à avoir son effet contre l'inflation.
05:47 Donc, patience dans le traitement,
05:49 mais en même temps, confiance dans le traitement,
05:52 parce que nous tenons ce cap, quels que soient les turbulences.
05:55 - François Villauras de Gallo, pourquoi est-ce que vous êtes toujours aussi fermé
05:57 à l'idée d'assouplir les règles de l'accès au crédit,
05:59 comme vous le demandent les professionnels de l'immobilier, secteur qui est en crise ?
06:03 - Alors ça, je crois que c'est un remède qui, lui, serait malvenu
06:08 et risquerait de provoquer une autre maladie, qui est le surendettement.
06:12 Il y a des normes qui sont de bon sens,
06:15 sauf des flexibilités sur lesquelles je vais revenir,
06:18 pas plus de 25 ans de crédit immobilier,
06:20 pas plus de 35% de charges de remboursement.
06:23 Il se trouve qu'aujourd'hui,
06:25 alors le crédit immobilier c'est un élément parmi beaucoup d'autres,
06:27 sur le secteur de l'immobilier, il y a les normes thermiques dont on parle,
06:30 il y a le foncier, la fiscalité.
06:31 Mais si on se concentre sur le crédit,
06:33 il se trouve qu'aujourd'hui, nous avons, avec le ministre Bruno Le Maire,
06:37 créé les conditions pour que les banques puissent prêter davantage.
06:40 On a stabilisé les taux du libre.
06:41 - Et elles n'en profitent pas ?
06:42 - Attendez, je précise là-dessus,
06:45 on va stabiliser, je crois, les taux de la BCE,
06:48 et puis on a une flexibilité sensible par rapport à ces normes de bon sens.
06:52 Encore une fois, pour éviter le surendettement,
06:54 il y a 6% aujourd'hui de crédit en plus,
06:57 en flexibilité, en dérogation par rapport à ces normes.
07:00 Donc il y a 6% de flexibilité libre,
07:03 il faut que les banques l'utilisent,
07:04 les banques, je crois, ont la capacité de prêter.
07:07 Je crois qu'elles en ont la volonté, elles le disent,
07:10 mais il faut maintenant que la production de crédit immobilier,
07:12 qui s'est stabilisée autour de 10 milliards,
07:15 c'est moins qu'avant, mais c'est plus que dans les autres pays,
07:17 mais 10 milliards, c'est pas assez,
07:18 il faut qu'elle reparte progressivement.
07:20 Ça dépend aussi de la demande des emprunteurs,
07:22 qui quelquefois attendent la baisse des prix de l'immobilier.
07:25 Mais je crois qu'on a créé les conditions
07:27 pour qu'une offre de crédit bancaire reparte.
07:28 Merci beaucoup François Villeroy de Gallo, gouverneur de la Banque de France, grand témoin de France Info.

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