Vendredi 22 septembre 2023, SMART BOURSE reçoit Julien Nebenzahl (Futur AM) et Olivier Raingeard (Directeur des investissements, Neuflize OBC)
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00:00 (Générique)
00:10 Deux invités avec nous ce soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:13 Olivier Ringe, arrêté avec nous, le directeur des investissements de Neuflys OBC.
00:16 Bonsoir Olivier.
00:17 Bonsoir Grégoire.
00:18 Merci d'être là, ravi de vous retrouver, ravi de retrouver également Julien Nebenzel qui est à vos côtés.
00:22 Bonsoir Julien.
00:23 Bonsoir Grégoire.
00:24 Vous êtes administrateur d'Advise.
00:26 Peut-être revenons sur la séquence Banque Centrale qui a animé quand même les marchés,
00:31 les investisseurs depuis un peu plus d'une semaine maintenant.
00:33 Je le disais en introduction, toutes les grandes banques centrales des pays développés
00:38 mais des pays émergents également ont pu s'exprimer depuis un peu plus d'une semaine maintenant.
00:43 Ce qui coïncide sur le plan des marchés à un retour de volatilité un peu généralisé,
00:49 pas que sur les marchés actions mais on a vu des mouvements obligataires,
00:52 on a vu des mouvements de devises,
00:53 on voit des mouvements également toujours sur les matières premières et sur le pétrole.
00:57 Il y a peut-être un lien d'ailleurs entre les deux,
00:59 entre le déluge de communication de Banque Centrale
01:02 et le retour d'un marché peut-être un peu plus agité sur la séquence Olivier.
01:07 C'est vrai que les banques centrales ont retenu l'attention,
01:10 c'est vrai que leur communication a été somme toute assez habile.
01:14 Si on regarde la Banque Centrale Européenne, on a eu une hausse d'oviches,
01:19 si on regarde la Banque Centrale Américaine, on a eu une pause au quiche.
01:22 Donc c'était à peu près conforme aux anticipations.
01:26 Mais ce qui retient plus particulièrement l'attention,
01:30 c'est ce qui se passe sur l'autodisant américain.
01:32 Et c'est lui qui est vraiment le facteur explicatif de ce petit regain de volatilité pour l'instant,
01:40 en espérant qu'il reste petit,
01:42 puisque les investisseurs considèrent que la Banque Centrale Américaine
01:47 d'abord laisse la porte ouverte à une hausse de taux directeurs d'ici à la fin de l'année,
01:53 même si pour notre part nous pensons qu'elle ne franchira pas le pas,
01:57 et d'autre part dit qu'elle ne souhaite plus vraiment baisser les taux à l'horizon fin 2024,
02:04 moins qu'initialement anticipé.
02:08 Ce qui retient également l'attention,
02:10 c'est qu'au sein du comité de politique monétaire américaine,
02:14 il semble qu'il y ait des différences d'opinion qui soient assez spectaculaires,
02:20 avec des oppositions entre ceux qui souhaitent continuer à durcir
02:25 et ceux qui pensent que le mouvement de durcissement est désormais derrière nous.
02:30 En fait cette opposition, elle caractérise probablement,
02:34 ou elle matérialise le fait qu'on est dans une période d'incertitude
02:38 sur deux ou trois questions qui sont sur la table depuis maintenant 15 ou 18 mois à peu près.
02:46 Le taux directeur jusqu'où il va ?
02:49 Le taux neutre de la banque centrale américaine, est-ce qu'il est à 2, 3, 3,5, 4% ?
02:57 Ça reste une question, et puis derrière cette question,
03:01 que fait l'inflation et in fine, quelles conséquences pour la croissance ?
03:07 Donc en fait on est en train de se reposer ces questions,
03:10 et le fait qu'on se repose ces questions génère un peu de volatilité sur les différentes classes d'actifs.
03:15 Oui, effectivement, les décisions de la Fed et de la BCE étaient peut-être convenues, consensuelles,
03:21 néanmoins, notamment après la décision de la Fed, comme vous le remarquez Olivier,
03:25 ça a bougé sur les taux.
03:27 C'est-à-dire qu'on a quand même marqué de nouveaux sommets sur l'ensemble de la courbe des taux aux Etats-Unis.
03:32 Alors c'est à chaque fois des dixièmes de point basse,
03:35 même sur des marches obligataires ça compte,
03:38 4,50 et plus sur le 10 ans américain,
03:40 on était à 3,80, 3,90 au début de l'été.
03:43 Et le taux réel monte avec tout ça, continue de monter.
03:48 Oui, c'est vrai qu'on est un peu plus élevé,
03:50 après quand on regarde là où on était en fin d'année dernière,
03:53 on est 15 points de basse je pense,
03:56 au-dessus des niveaux qu'on avait connus en fin d'année dernière sur la partie longue de la courbe.
04:00 Donc c'est rien de spectaculaire.
04:03 C'est pas un break-out qui laisse entrevoir des niveaux de taux auxquels on ne pense même pas aujourd'hui,
04:09 pour dire les choses.
04:10 Pas encore. Je pense qu'aujourd'hui la Banque Centrale Américaine a signalé
04:14 qu'elle n'était pas prête à baisser rapidement les taux directeurs,
04:18 elle n'a fait que confirmer ce message avec ses fameuses dots.
04:22 Maintenant pour que le mouvement sur les taux longs continue,
04:26 il semblerait y avoir la hausse, il faudrait des statistiques,
04:29 en particulier sur le marché de l'emploi,
04:30 qui corrobore l'idée que cette économie américaine ne veut décidément pas atterrir.
04:34 On l'a vu encore, les derniers chiffres, effectivement.
04:37 Alors les enquêtes ont tendance à être beaucoup plus pessimistes que la réalité,
04:41 ça se vérifie encore aujourd'hui,
04:43 mais on a vu hier les inscriptions hebdomadaires au chômage,
04:45 qu'on voyait tendre à un moment peut-être jusqu'à 300 000,
04:48 et en fait non, on se retombe à 200 000 inscriptions hebdomadaires au chômage,
04:52 ce qui est le chiffre le plus faible depuis, je crois, le mois de mars de cette année.
04:57 Oui, tout à fait.
04:58 Julien, vos commentaires de rentrée sur cette séquence,
05:02 alors d'une semaine ou d'une dizaine de jours,
05:05 retour de volatilité ou pas ?
05:07 Est-ce que les marchés sont en train de changer de régime,
05:10 de changer de monde, de changer de logique, ou pas ?
05:15 Alors, il y a eu quelques mouvements cette semaine,
05:18 effectivement les banques centrales qui se sont exprimées,
05:20 des réactions instantanées qui étaient opposées,
05:23 réaction positive des marchés actions avec la banque centrale européenne,
05:26 un petit peu avant, et réaction négative sur la décision de la banque,
05:32 enfin le communiqué de la banque centrale américaine.
05:36 Il y a toujours, quand il y a une annonce, un chiffre, etc.,
05:39 il y a toujours un ajustement, mais le niveau, la valeur retenue,
05:44 en tout cas le prix de marché qu'on constate,
05:46 pour moi il reflète beaucoup plus ce qui est anticipé dans six mois.
05:50 Donc en fait, quand on a ces mouvements, on a des mouvements d'ajustement, simplement.
05:55 Est-ce que ces mouvements d'ajustement peuvent participer de la création d'une tendance ?
06:00 Là, il faudrait se pencher sur l'analyse technique du marché,
06:03 et pour l'instant, aucune indication n'est donnée.
06:06 Donc on est dans une évolution qu'on appelle latérale.
06:09 Je vous fixais, je crois, en avril-mai, une sorte de range d'évolution de 10% sur les actions européennes.
06:15 On n'a même pas fait ces 10%, on est sur un chiffre inférieur.
06:18 C'est qu'on fait plus 5, moins 5, là, depuis 6, 7 mois, c'est ça ?
06:20 Non, non, mais entre le sommet et le creux, on n'a pas fait 10%, on a fait plutôt 7 ou 8.
06:24 Ce qui est vraiment très étroit, c'est assez exceptionnel.
06:28 On peut se poser la question de l'origine de ça, du point de vue de la finance classique, orthodoxe.
06:34 Moi, à mon point de vue, ma théorie, mais ce n'est pas mon domaine d'intervention,
06:40 c'est qu'on assiste à une période de...
06:43 On revalorise les actifs longs, risqués, donc les marchés d'action essentiellement,
06:50 à l'aune de la nouvelle donne de taux et de taux longs.
06:54 C'est-à-dire par le mécanisme d'actualisation des flux futurs,
06:57 une fois que les années financières ont fait leur travail d'anticipation de bénéfices,
07:00 on reconstitue le prix tel qu'il devrait sortir des modèles financiers.
07:05 Alors, ça n'a pas de sens en soi, c'est juste une norme,
07:08 mais ça aide quand même toujours l'ensemble des investisseurs de fixer ce cadre.
07:12 C'est pour ça qu'on a eu une disparité sectorielle cet été, au cours des derniers mois.
07:18 Maintenant, sur la banque centrale, sur les décisions des banques centrales elles-mêmes,
07:22 moi, mon point de vue, c'est que ce qui se passe, c'est simplement,
07:25 je dis ça depuis quelques trimestres, c'est une normalisation de politique monétaire.
07:30 Je ne suis pas convaincu, et les faits montrent sur 150 ans,
07:34 que les décisions de politique monétaire ont un réel impact sur la baisse de l'inflation.
07:38 Donc, je pars de ce principe-là.
07:41 Mais qu'en revanche, la normalisation de politique monétaire...
07:43 - Ça peut participer, mais...
07:44 - Ça y participe, et c'est tout à fait normal.
07:46 C'est quelque chose qui est tout à fait normal.
07:48 Donc, il se trouve que l'inflation est arrivée,
07:51 et les banques centrales, les premières, ont collé la normalisation à la notion d'inflation.
07:56 Tant mieux !
07:57 Ça justifiait tout ce qui était en train d'être fait, tout ce qui a été fait jusqu'à présent.
08:01 Mais si on revient au point de départ, avant l'inflation,
08:04 on a passé quand même 15 ans à vouloir de l'inflation, du côté des autorités monétaires,
08:08 et donc à créer les conditions pour celle-ci.
08:10 Les conditions monétaires, c'est le terreau, ça a été mis en place,
08:14 mais c'est pas ça qui fait l'inflation.
08:16 L'inflation est arrivée de manière vraiment...
08:20 La source principale du démarrage de l'inflation,
08:25 c'est les problèmes de dysfonctionnement de la chaîne de production
08:28 suite à l'événement exceptionnel qu'est le Covid.
08:31 Donc on s'est aperçu que le flux tendu, quand on le remet en marche,
08:33 il ne marche pas parfaitement.
08:35 Il y a ça, et des facteurs géopolitiques qui sont tout à fait liés,
08:39 qui disent "Bah non, il faut qu'on puisse produire quand même des choses
08:43 un petit peu plus près de chez nous".
08:45 Donc ça modifie le système de production.
08:47 Est arrivée ensuite la deuxième étape, pas majoritaire mais qui est significative,
08:50 ce qui est la survenance de la guerre en Europe.
08:52 Et une forme de déstabilisation un peu de la logique sur le marché de l'énergie.
08:58 Ces éléments-là, ce sont des éléments sur lesquels les banques centrales
09:01 n'ont aucune autorité.
09:03 On ne peut pas leur reprocher, elles ne peuvent rien faire.
09:07 En revanche, normaliser une politique monétaire
09:10 qui avait pour but de permettre l'inflation et qui a donné ce terreau,
09:14 c'est nécessaire, parce qu'on ne peut pas dans un contexte d'inflation
09:17 laisser une politique monétaire extrêmement marxiste.
09:20 Donc, elles ont lâché pour faire ce chemin, ce qu'on appelle la "forward guidance",
09:25 de manière à pouvoir se raccrocher à des données,
09:28 le fameux "on suit les données de marché", etc.
09:31 Mais en fait, l'objectif c'est simplement que les taux soient à un niveau
09:34 qui soit compatible avec le niveau de croissance tel qu'on le voit en ce moment
09:38 et le niveau d'inflation, quel est le bon ?
09:41 Moi, je ne rentre pas dans ce débat, mais c'est bien leur projet.
09:44 Vous êtes en train de dire que les banques centrales, par construction,
09:48 sont pro-croissance et resteront pro-croissance dans leur approche.
09:51 Parce que dans le discours, ce n'est pas forcément ce qu'on entend tous les jours.
09:55 Je ne vous citerai pas encore Joachim Nagel hier, etc.
09:58 Mais il y a l'idée chez certains banquiers centraux qu'en Europe,
10:02 alors c'était le discours aux Etats-Unis, ça l'est moins aujourd'hui,
10:05 en Europe, s'il faut une récession, ne vous inquiétez pas, ça ne nous fera pas peur.
10:10 Quand on monte les taux, on impacte tout ce qui va dépendre
10:16 par la transmission sur la partie longue,
10:18 on va impacter tout ce qui va générer l'investissement à long terme.
10:22 Et là-dedans, il y a des tas de choses, dont par exemple l'immobilier.
10:25 Et on voit évidemment aux Etats-Unis et maintenant en Europe
10:28 qu'il y a des choses qui bougent de ce côté-là, c'est tout à fait normal.
10:30 Donc il y a un impact de la décision monétaire sur la conjoncture économique,
10:37 mais pas sur la structure. La structure n'est pas impactée par ça.
10:40 Ce sont des variations et des ajustements qui se mettent en place.
10:44 Est-ce que les banques centrales sont pro-croissance ?
10:46 Mon professeur de politique monétaire me disait, c'était en 93,
10:50 donc ça remonte à un petit moment maintenant,
10:52 il me disait, à nous étudiants, n'oubliez pas chers amis,
10:55 que dans le cours de politique monétaire, il y a le mot politique.
10:59 Il voulait bien nous rappeler que l'indépendance des banques centrales,
11:02 il nous disait ça dès le début, dont on parle, etc. n'existe pas.
11:06 C'est une apparence. Donc les banques centrales sont tout aussi concernées
11:10 par la situation sociale, par la situation politique,
11:14 par la situation géopolitique, que les politiques eux-mêmes.
11:17 Sauf que leur domaine d'intervention n'est pas celui-là.
11:20 - Oui, c'est la solidité des prix.
11:21 - Donc, est-ce que les banques centrales ont envie de créer une récession profonde
11:26 qui va créer des bouleversements dans la zone politique dans laquelle elles travaillent ?
11:30 Probablement pas. Je vous réponds indirectement.
11:33 - Oui, je comprends.
11:35 À propos de récession ou pas d'ailleurs, Olivier,
11:39 qu'est-ce qu'on peut dire à ce stade ?
11:41 Est-ce qu'on a toujours sur la table plusieurs scénarios macro
11:45 pour les 3, 6, 9 prochains mois, avec des probabilités qui restent équivalentes
11:49 entre l'idée du soft landing américain,
11:52 pourquoi pas l'idée d'un no landing aux Etats-Unis ?
11:55 Non mais, je veux dire, on sort d'un 3ème trimestre aux Etats-Unis
11:58 en termes de croissance qui aura été sans doute très bon,
12:00 au-delà du potentiel peut-être.
12:02 L'idée de la récession ou du hard landing,
12:06 qui est peut-être pas totalement écartée non plus.
12:08 Où est-ce qu'on en est dans la navigation, là, entre ces différents scénarios ?
12:12 Sachant que les perspectives qui ont été offertes par la Fed cette semaine,
12:17 qui met à jour régulièrement ces prévisions,
12:20 montrent quand même un cerneau de croissance pour cette année
12:23 et pour l'an prochain, qui a été révisé en nette hausse
12:26 par rapport aux prévisions précédentes du mois de juin et du mois de mars.
12:30 Je n'ose pas vraiment répondre à votre question,
12:32 parce qu'on faisait partie des personnes qui considéraient
12:37 que nous aurions une récession en 2023.
12:39 Oh, vous n'étiez pas le seul, Olivier.
12:41 Ce qui me rassure.
12:42 C'est lui !
12:43 Pas si vous ne le faisiez pas, mais en tout cas, oui.
12:45 Mais c'était un consensus en début d'année.
12:47 C'était la récession la plus attendue de l'histoire économique et financière.
12:51 La Fed a cassé quelque chose, ça craquera.
12:53 Qui n'a pas eu lieu.
12:55 D'ailleurs, cette histoire avait été aiguisée, si je puis dire,
12:59 par la crise ou les fortes tensions sur les banques régionales américaines
13:04 au mois de mars.
13:06 Finalement, notre économie américaine, pour l'instant,
13:08 est toujours très dynamique.
13:11 Une fois qu'on s'est trompé,
13:14 on essaie de comprendre pourquoi on s'est trompé.
13:16 La manière dont on analyse la situation est la suivante.
13:21 D'abord, il y a tout de même des facteurs exceptionnels
13:26 que l'on a du mal à quantifier et qui soutiennent l'économie américaine.
13:29 Facteurs exceptionnels que sont l'excès d'épargne.
13:33 On n'arrive pas tout à fait bien à estimer.
13:35 Vous avez différentes estimations sur cet excès d'épargne,
13:37 en particulier aux États-Unis.
13:39 Certaines disent que fin d'année, cet excès d'épargne aura été totalement dépensé.
13:44 D'autres disent que ça va jusqu'en 2025.
13:47 Je n'ai pas vu celle-là.
13:50 Deuxième élément, la politique budgétaire,
13:55 qui a quand même été un facteur de soutien,
13:58 qui a sans doute soutenu un peu la demande et peut-être l'inflation aussi,
14:02 dans un contexte où on avait une problématique sur l'offre
14:05 qui a alimenté l'accélération de l'inflation.
14:09 Cette politique budgétaire, on voit que progressivement,
14:12 elle devient moins accommodante.
14:15 Mais il n'est pas évident que dans une année d'élection l'année prochaine,
14:19 l'administration Biden, par exemple, n'ait pas envie de réutiliser cet outil budgétaire.
14:26 Troisième élément, la croissance du crédit.
14:28 La croissance du crédit a été quand même très vigoureuse
14:30 jusqu'à la fin de l'année dernière, début de cette année.
14:34 Potentiellement, on a eu un excès de croissance du crédit
14:36 dans l'anticipation d'un durcissement de la politique monétaire.
14:40 Et puis, dernier élément, le marché de l'emploi
14:42 qui est extraordinairement résilient et puissant.
14:48 Si on regarde ces quatre facteurs et qu'on essaye de les projeter à six mois,
14:53 on se dit que l'excès d'épargne, effectivement, il y a une grosse incertitude
14:57 sur quand il sera totalement dilapidé.
15:00 Mais on avance dans le temps et progressivement,
15:03 celui-ci est en train de diminuer significativement.
15:07 Sur la problématique budgétaire, à priori, on a des signaux aujourd'hui
15:12 qui montrent que la politique budgétaire américaine
15:15 est en train légèrement de se refermer.
15:20 On va également voir dans quelques jours le débat budgétaire aux États-Unis
15:27 et une potentielle refermeture des services publics américains.
15:31 Mais ce qui donnera un peu le ton sur la manière dont sera utilisé
15:35 ce levier budgétaire au cours de ces prochains mois.
15:39 Le crédit est en train de ralentir.
15:42 Là, les statistiques sont assez claires.
15:44 On a un ralentissement sensible du crédit.
15:47 Et sur l'emploi, celui-ci reste dynamique.
15:50 Mais quand vous regardez les créations d'emplois en rythme mensuel,
15:54 la tendance est très claire.
15:56 On n'est plus sur 500 000 créations d'emplois en rythme mensuel.
16:01 On commence à tangenter tranquillement vers les 200 000 créations d'emplois.
16:07 Les jobs ouverts sont en train également de corriger
16:10 de manière assez significative depuis deux mois.
16:13 Là aussi, on voit que le marché de l'emploi ralentit.
16:19 Ces quatre variables sont progressivement en train de s'éteindre.
16:23 Est-ce que ces quatre variables peuvent générer une économie américaine
16:29 qui tombe en récession ?
16:32 Probablement pas.
16:35 Mais une question subsidiaire demeure,
16:40 qui est ce durcissement monétaire et cette diffusion
16:43 à l'ensemble de la sphère économique.
16:45 Et à ce sujet-là, on est un peu mal à l'aise.
16:48 Parce que ce que l'on voit, c'est qu'on a ce durcissement monétaire
16:54 dont le délai de transmission est potentiellement plus long
16:59 que celui que l'on avait avant.
17:01 Pourquoi ? Parce qu'on est dans un monde où d'abord,
17:04 l'endettement à taux variable est moins important par exemple
17:08 que ce qu'on avait en 2005, 2006, 2007 aux Etats-Unis.
17:12 Et ensuite, on a eu des entreprises qui ont eu la très bonne idée
17:16 de se refinancer en 2020, 2021, au moment où les taux étaient extrêmement bas.
17:21 Quand on projette ça, ce que l'on voit, c'est que sur la partie refinancement,
17:25 les refinancements vont de nouveau redevenir progressivement importants
17:28 sur l'année 2024, mais surtout 2025 et 2026.
17:31 Donc ce délai de transmission, il est plus long
17:35 et donc l'effet va progressivement se faire sentir.
17:38 Ça, ça nous inquiète un peu.
17:40 Et ça, ça nous laisse penser que l'économie américaine
17:43 va quand même vraiment ralentir au cours de ces prochains mois.
17:46 Après, est-ce qu'on continue à appeler ou à considérer
17:49 qu'on va vers une récession ?
17:51 Non, on est plutôt sur un scénario de stagnation.
17:53 Parce que d'un autre côté, l'inflation décélère,
17:56 ça recrée un peu de pouvoir d'achat réel, positif
17:59 et ça soutient le revenu réel du consommateur américain.
18:01 Ça change beaucoup de choses pour l'investisseur ?
18:04 Qu'on soit dans l'idée d'un scénario de stagnation,
18:08 une économie sous le potentiel, mais qui bascule pas
18:12 dans quelque chose de négatif, auto-entretenu sur plusieurs trimestres ?
18:15 Je pense que ça, c'est un changement significatif.
18:18 Et c'est d'une certaine manière ce qui se matérialise un peu sur les marchés.
18:22 C'est que si on exclut le scénario de récession,
18:26 on exclut le scénario de chute brutale des bénéfices.
18:31 Et donc, dans ce cas-là, on ne met pas les valorisations sous tension.
18:36 Et donc, ça justifie, ça écarte les scénarios très adverses.
18:41 Et ça justifie d'avoir une espèce de palier sur le marché.
18:47 C'est un facteur de soutien.
18:50 Une force de rappel.
18:51 Une force de rappel.
18:52 A contrario, si tout d'un coup on basculait dans le scénario de récession,
18:55 on basculerait dans un scénario de contraction assez significatif
18:58 des résultats des entreprises.
19:01 Et là, le facteur de rappel, il serait beaucoup plus difficile
19:05 à estimer, à quantifier.
19:08 Ça générait probablement un mouvement de volatilité
19:14 plus puissant que celui qu'on vit aujourd'hui.
19:16 Julien, je veux bien qu'on reprenne ce que vous nous racontiez
19:20 sur cette séquence de repricing à nouveau des valorisations,
19:24 notamment des actifs risqués à duration longue sur les marchés actions.
19:27 Voilà, et le VMI a perdu 20% au cours de l'été, ou quasiment.
19:30 On n'a peut-être pas fait 20% pile, mais voilà.
19:32 En tout cas, c'est le genre de valeur à duration longue
19:36 qui a souffert tout au long de l'été face à la remontée des taux réels, etc.
19:41 On en est encore là.
19:44 C'était pour moi la grande histoire de 2022.
19:47 C'est ce qu'on a vu pendant 6-9 mois en 2022,
19:51 jusqu'au point bas du mois de septembre pour les indices actions en Europe.
19:55 On repart pour un tour, on est encore dans cette phase
19:58 où le marché doit réapprécier la valeur des actifs risqués.
20:02 Par rapport à des taux qui ont monté, mais on le soulignait,
20:07 4,50 sur le 10 an américain, ou 5,20 sur le 2 an,
20:10 on reste dans le cadre de ce qu'on connaît depuis quelques mois maintenant.
20:15 On en est encore là.
20:17 C'est la tentation, malheureusement pour moi,
20:21 pour le dire de manière extrêmement naïve,
20:25 de faire des confitures et de mettre les étiquettes sur les pots après.
20:30 Je le dis, je reconnais que c'est une expression un peu triviale.
20:35 Moi je travaille sur les cycles,
20:38 principalement les grands cycles de comportement.
20:41 J'ai parlé tout à l'heure de structure et d'infrastructure.
20:44 Il y a un auteur dans l'économie qui travaille tout le temps ces deux notions,
20:50 qui les met toujours côte à côte,
20:53 qui est très peu lu, qui est Nicolas Kondratieff,
20:55 et qui est mal interprété.
20:58 Il est dans tous les manuels scolaires,
21:00 aujourd'hui je ne sais pas encore,
21:01 à mon époque il était dans tous les manuels scolaires,
21:03 mais on ne le lit pas.
21:04 Il y a toujours des hurlues berlues,
21:06 qui ont des fantasmes complotistes qui prennent Kondratieff,
21:09 parce qu'en fait si on leur donne Eugène Fama ou Milton Friedman...
21:12 - C'est comme les prévisions des Mayas ou des Incas, c'est ça ?
21:14 - Non mais, vous leur donnez Milton Friedman ou Eugène Fama,
21:17 ils ne comprennent pas ce que ces types ont écrit,
21:18 donc ils n'arrivent pas à le détourner.
21:20 Or que Kondratieff, ils ont l'impression de comprendre.
21:22 Le travail de Kondratieff est un travail scientifique...
21:24 - Il est mal lu en plus.
21:25 - Voilà.
21:26 - Quand il est lu, il est mal lu.
21:27 - C'est un travail de scientifique,
21:29 il y a structure justement, et infrastructure.
21:32 Donc pourquoi je dis ça en relation avec la question ?
21:36 C'est que le travail sur les cycles,
21:38 quand on regarde vraiment la conjoncture,
21:40 ce sont des cycles courts,
21:41 c'est des cycles de 3 ans et demi, 4 ans,
21:43 et c'est aussi, c'est ce qu'on appelle le cycle de Kitchin,
21:45 et c'est aussi le cycle qui a été découvert par le français Clément Juglar,
21:49 du 164, le cycle de Juglar, aussi appelé cycle des affaires,
21:52 qui fait entre 7 et 11 ans, selon Juglar lui-même,
21:56 mais jusqu'au NBER américain qui a travaillé là-dessus,
21:58 et qui continue de dire que le cycle de Juglar fait entre 7 et 11 ans.
22:01 Lui c'est encore un cycle de conjoncture,
22:03 mais il a déjà des éléments d'infrastructure.
22:05 - Oui, plus structurel.
22:06 - Il a déjà des éléments, voilà.
22:08 Le cycle Juglar dans lequel nous sommes,
22:11 a très probablement commencé autour de 2016, très probablement.
22:15 Il se décompose assez logiquement en 3 cycles de Kitchin,
22:18 et nous venons d'entrer depuis mi-2022,
22:21 dans le 3ème cycle de Kitchin.
22:24 Ce cycle-là, c'est un cycle,
22:26 donc qui commence comme tout cycle par une forme d'expansion,
22:29 pour aboutir à la fin, non pas un retour au point de départ,
22:32 mais une phase un peu plus récessive.
22:34 Mais c'est 3 ans et demi.
22:36 Donc en fait depuis 2022, c'est du progrès économique,
22:41 qui est devant nous pendant 2 ans et demi.
22:43 C'était mon point l'an dernier.
22:45 Sauf que, la particularité de ce cycle,
22:48 dans ce cycle de Juglar, c'est qu'il est faible.
22:50 Et il n'est pas faible, c'est un peu complexe ce que je vais dire,
22:53 mais je suis obligé d'en passer par là pour que tu me répondes.
22:55 Il n'est pas faible parce que c'est le 3ème élément de Juglar,
22:58 il est faible parce que c'est le 1er cycle,
23:01 c'est le 1er élément d'un autre cycle d'un degré supérieur,
23:05 qui a été découvert par un économiste américain d'origine russe,
23:08 qui s'appelle Kuznets,
23:09 qui a eu un prix Nobel, mais pas pour ce travail-là, en 1927,
23:13 qui est un cycle dite d'infrastructure.
23:15 Ça, c'est le cycle qui nous parle vraiment,
23:18 parce qu'on peut le comprendre au niveau de ce qui se passe dans nos vies courantes.
23:22 Les années 80, il y a des marqueurs.
23:25 Reagan-Thatcher, c'est un marqueur.
23:27 L'entrée de la Chine dans le commerce mondial, c'est un marqueur.
23:31 Et un cycle de Kuznets, qu'on appelle maintenant cycle de Berry,
23:36 fait entre 25 et 30 ans,
23:37 et se termine toujours par un excès qui est le reflet de sa propre identité.
23:42 C'est exactement ce qui s'est passé en 2007-2008.
23:45 Ce qui suit après, c'est un nouveau cycle,
23:48 et il nous faut d'abord nous détacher du précédent.
23:51 Pour nous détacher du précédent, il y a des marqueurs qui arrivent.
23:54 Il y a eu le Brexit, il y a eu Trump,
23:57 et de manière générale, le populisme, entre 2013 et 2018,
24:01 a beaucoup progressé dans le monde entier.
24:04 Pas seulement en Occident, aussi dans les émergents.
24:07 Nous sommes dans ce premier cycle de jugular,
24:10 qui est le début d'un nouveau cycle d'infrastructure,
24:12 et la troisième partie, elle est faible.
24:14 Donc, ce que nous avons devant nous,
24:16 c'est un marché qui évalue la capacité de croissance en s'interrogeant,
24:20 en s'inquiétant, parce qu'elle n'est pas si forte que ça.
24:23 Il s'est posé la question, en 2022, de la récession,
24:26 puisque, évidemment, les données économiques se dégradaient.
24:29 Donc, il se posait la question.
24:30 Donc, si repricing des actions y a eu à ce moment-là,
24:32 ce n'est pas du tout, pour moi, relativement tôt,
24:34 c'est relativement aux anticipations de croissance,
24:36 anticipations de récession qui ont prévalu jusqu'en début d'année,
24:39 qui, maintenant, dès le début d'année, ont commencé à s'étioler.
24:42 La raison pour laquelle elles ont été étiolées,
24:45 les raisons, à mon avis, il y en a deux.
24:46 La première, évidente, c'est que les données économiques
24:48 ont cessé de chuter, elles se sont stabilisées,
24:50 et elles sont toujours, au peu près, au même niveau.
24:52 La deuxième raison, c'est que, quand on voit les marchés d'action
24:55 gagner 25 ou 30 % en quelques mois,
24:57 on se dit qu'il y a peut-être une anticipation cohérente
25:01 qui est là-dedans.
25:02 Puisqu'encore une fois, le cours du jour
25:04 n'est pas le cours de l'information du jour,
25:06 c'est le reflet de ce qu'il se passera plus tard.
25:08 En revanche, là, ce qui se passe depuis février-mars,
25:12 cette espèce d'évolution latérale en Europe
25:14 et d'oscillations aux États-Unis, c'est ma lecture.
25:17 Alors, ça devait arriver parce que, pour des raisons, pour moi,
25:21 c'est que la croissance ne sera pas si forte que ça.
25:23 Mais, si je mets une étiquette sur le pot de confiture,
25:26 je crois que c'est un travail de réajustement
25:29 de la recherche par l'analyse financière classique
25:31 de la valeur des actifs longs,
25:33 en fonction de l'anticipation de taux économiques.
25:36 C'est ce schéma qui est en train de se passer.
25:38 - Olivier disait, voilà, jusqu'où les taux directeurs,
25:41 où est le taux réel d'équilibre, etc.
25:44 On est perdu, plus personne ne sait répondre à ces questions,
25:46 aujourd'hui, à commencer par les banquiers centraux eux-mêmes,
25:48 en tout cas, de manière claire, limpide et définitive.
25:51 Et donc, enfin, désolé, je suis un peu trivial, mais...
25:54 Conclusion pour les indices actions,
25:56 qu'est-ce que ça veut dire, cette logique de range ?
25:58 Parce que là, je parle sous votre contrôle, Julien,
26:02 mais c'est vrai qu'on voit, quand même,
26:04 des rebonds indiciels qui sont toujours un peu plus faibles,
26:09 qui semblent être un peu plus fragiles.
26:11 On voit des tests, quand même, sur des zones techniques importantes.
26:14 Alors, je ne me glisse pas dans la peau d'un analyste technique,
26:17 je les écoute, je les lis, je vois qu'il y a le sentiment
26:20 de quelque chose qui pourrait se fragiliser.
26:22 Comment vous évaluez le risque de voir les indices sortir par le bas
26:26 de ce range, encore une fois, bien installé,
26:28 encore une fois, aujourd'hui, en cette fin de semaine,
26:31 le cas qui est autour des 7200, etc.
26:34 On n'a pas craqué pour l'instant, mais...
26:37 on a le sentiment qu'il y a une pression, un peu,
26:40 qui s'installe, de ce point de vue-là.
26:42 - Alors, vous parlez des variations des indices,
26:46 on pourrait presque faire la réflexion sur l'analyse technique,
26:49 l'utiliser, pour voir si elle nous dit quelque chose.
26:52 La particularité d'un marché actions qui monte de 10% par an
26:55 pendant 3 ans, c'est que les analystes financiers
26:58 et les géants qui travaillent sur l'analyse financière sont ravis,
27:01 parce que tout est clair et limpide.
27:03 Mais, en fait, pour les analystes techniques, c'est exactement la même chose.
27:06 C'est une tendance. Ce qui est à la base de l'analyse technique,
27:09 c'est l'exploitation de la tendance. En revanche, dès qu'un marché
27:12 n'a plus de tendance, vous pouvez demander aux analystes financiers,
27:15 "Est-ce que vous êtes complètement paumé aussi ?"
27:18 Ce qu'on vient de voir, ça arrive régulièrement, des périodes sans tendance.
27:21 C'est une période où personne n'a rien à dire de solide, de concret, de sérieux.
27:25 Ce qui se passe, c'est qu'il y a une digestion de l'information précédente,
27:28 ce qui est en train de se passer. J'ai mis une étiquette dessus,
27:31 mais ça peut être autre chose, en tout cas, je crois que c'est ça.
27:34 Et il n'y a rien à dégager de ça.
27:36 - Pour vous, à ce stade, circuler, il n'y a rien à voir.
27:39 - C'est plutôt même. Je vais essayer quand même de répondre.
27:42 Je dirais que c'est plutôt même pour les gens qui font des opérations
27:45 en court terme, vraiment une grande séquence pour perdre de l'argent.
27:48 C'est vraiment fait pour faire des erreurs, en quelque sorte.
27:51 Maintenant, cette période de pause, elle devait se produire,
27:55 elle devait être dans un range, pour moi, que j'ai fixé de 10%.
27:58 Il est inférieur, je le disais tout à l'heure, il est de l'ordre de 8%.
28:01 Je l'interprète comme le fait que le sentiment de marché
28:04 qui était récession au début d'année est devenu moindre récession,
28:08 pas de récession. Donc, en fait, il y a un courant acheteur
28:11 dans cette période-là. Ce courant acheteur, je le pense,
28:14 assez solide. Je pense qu'il est significatif,
28:17 qu'il n'apparaît pas ni dans les indicateurs de sentiment, etc.
28:20 Mais je l'entends, en fait, sur les plateaux de télévision,
28:23 je l'entends dans votre émission, et je pense que ça va générer...
28:27 - Vous avez une meilleure oreille que moi.
28:30 - Les mots ont totalement changé par rapport à décembre, janvier...
28:36 - Ah oui, bien sûr. Par rapport à il y a un an, oui.
28:40 Et donc, quand, dans une période de plat, on a cette reprise modérée
28:44 du sentiment, il y a un risque de déception.
28:47 Donc, je vous le dis, moi, ce que je vois en ce moment,
28:50 contrairement à ce que j'aurais dit il y a 6 mois,
28:52 c'est qu'on devrait avoir un moment d'émotion sur les marchés d'action.
28:56 On va difficilement l'éviter. En plus, c'est facile pour moi,
29:00 septembre, octobre, novembre, c'est toujours un peu cette période-là,
29:02 donc je ne prends pas des risques d'émotion.
29:04 - Mais un moment d'émotion, ça veut dire qu'on va se faire peur, quoi ?
29:05 - Oui, je pense. Il va se passer quelque chose, là,
29:07 parce que le sentiment est remonté un peu fort, sans données particulières.
29:11 Ce n'est pas une forme d'optimisme exacerbée du tout,
29:15 mais ce sentiment qui a évolué n'est pas étayé par des données.
29:18 C'est simplement une décision...
29:19 - Il y a une divergence. Il s'est créé une divergence
29:21 entre l'évolution du sentiment et des données.
29:23 - C'est une décision qui a été prise par rapport à tout ce qui s'est passé avant.
29:26 On essaie de se dire "Tiens, le marché ne bouge plus trop,
29:28 on se remet un petit peu dedans".
29:29 C'est extrêmement dangereux à très court terme.
29:32 Mais donc, sinon, ça ne change pas du tout mon anticipation...
29:34 - Et se faire peur, ça veut dire quoi en termes de niveau de marché, Julien ?
29:38 C'est ça que je veux savoir. Après, je passe la parole à Guillaume.
29:41 - Je vais terminer ce que je voulais dire par quelque chose.
29:43 Autant je pense que les marchés d'action vont faire de nouveaux sommets historiques l'an prochain.
29:46 Je n'ai aucune hésitation là-dessus.
29:49 Je ne sais pas quantifier la correction qu'il y a devant nous.
29:52 Je vous parlais de 10%, on est plutôt sur 8%.
29:55 Si je répercute cette erreur d'anticipation,
29:59 entre le sommet et le creux, on doit faire entre 15% et 17%.
30:02 Moins de 20%, autour de 15% par rapport au précédent sommet.
30:06 Donc, on mesure ça sur les principaux...
30:07 - Donc, vous dites à court terme, risque d'un nouveau point bas ?
30:10 C'est quoi la référence ? C'est les points bas de 2022 ?
30:14 - Non, parce qu'heureusement, on a bien monté.
30:17 Ce sera bien au-dessus des points bas de 2022.
30:20 - Risque d'un nouveau point bas qui sera au-dessus en Europe
30:22 des points bas de septembre 2022 et 2024, nouveau sommet.
30:26 - Et 2024, voilà, nouveau sommet. La tendance sociale qui continue.
30:29 - Bon, Olivier, comment on gère la situation présente sur les 3 à 6 prochains mois
30:35 dans une allocation d'actifs ?
30:38 Comment on gère toutes les possibilités,
30:40 tous les scénarios macro qui sont encore devant nous ?
30:44 - Alors, on retourne à l'université déjà pour retravailler les cycles.
30:48 - Oui, moi je vais réécouter parce que je me suis un peu perdu à un moment,
30:51 je pense, dans l'enchevêtrement des cycles.
30:53 Mais c'était très clair, Gilles, c'est juste qu'il faut réécouter.
30:56 - Alors, mais je pense que...
31:00 Alors, nous, on ne travaille pas avec cette analyse de cycles,
31:04 même si c'est quelque chose avec lequel on est familier,
31:06 en particulier pour essayer d'estimer les durées de phase de...
31:12 - D'expansion, de récession.
31:14 - D'expansion et de récession.
31:17 La manière dont on analyse la situation aujourd'hui est la suivante,
31:20 c'est qu'on a 3 scénarios dont on parle depuis 18 mois,
31:24 que sont récession, soft lending et no lending.
31:30 En particulier pour l'économie américaine,
31:32 c'est moins vrai pour l'économie européenne et l'économie chinoise.
31:36 Sur ces 3 scénarios,
31:41 en fin d'année dernière, on était plutôt sur le scénario de récession.
31:46 Aujourd'hui, on est plutôt sur le scénario de soft lending,
31:51 motivé en particulier par une désinflation qui soutient le consommateur.
31:56 Et on considère que les 2 autres scénarios restent quand même sur la table
32:01 et peuvent ressurgir assez rapidement,
32:06 à l'instar de ce que l'on voit de cette semaine sur les taulons américains
32:11 ou des interrogations qu'on peut avoir sur l'économie européenne
32:15 quand on regarde par exemple ces fameux indices PMI.
32:19 La conséquence de cela, c'est qu'on a aussi bien sur la partie action
32:25 que sur la partie obligation, une allocation relativement neutre
32:30 par rapport à nos indices de référence.
32:32 On ne se prononce pas sur le coup d'après,
32:35 considérant que la visibilité est somme toute assez réduite
32:40 et on préfère être investi à hauteur de nos indices de référence
32:45 sur la partie action et sur la partie obligataire.
32:48 Ensuite, au sein de la partie action,
32:51 on a une légère préférence pour les actions américaines
32:55 et j'ai l'impression qu'on n'est pas les seuls.
32:57 Ce qui peut évidemment...
32:59 À un moment, la croissance, oui, c'est ce qui attire.
33:02 C'est ce qui attire.
33:05 Après, le marché est quand même assez complexe.
33:09 Vous regardez, vous voyez qu'aux Etats-Unis,
33:11 c'est la croissance qui depuis...
33:14 Enfin, c'est tout le style croissance.
33:15 Oui, le style croissance, oui, bien sûr.
33:16 Qui surperforme de manière somme toute incroyable.
33:21 Vous êtes à plus de 33% sur le style croissance aux Etats-Unis
33:24 et la value est à zéro.
33:27 Et en Europe, l'analyse est beaucoup plus contrastée
33:31 puisque value et croissance font peu ou prou la même chose.
33:35 Et quand vous regardez depuis le début 2022,
33:37 c'est la value qui fait plus que la croissance.
33:41 Mais aujourd'hui, on préfère plutôt les Etats-Unis
33:45 et au sein de notre allocation sectorielle,
33:49 on n'a pas de préférence sur le style value,
33:53 sur le style croissance,
33:54 puisqu'on voit bien que c'est complexe selon les...
33:57 Ça tourne.
33:58 Ça tourne, selon les régions également.
34:00 Ça bouge assez vite.
34:02 On a toujours une préférence pour le secteur technologique
34:06 assis sur des croissances qui doivent rester plutôt bonnes
34:10 au cours des prochains mois,
34:12 avec un point d'attention sur la valorisation,
34:15 ce qui se passe sur les taux longs.
34:18 On a un biais qualité avec une surpionnération de la santé
34:22 qui a bien sous-performé cette année en particulier aux Etats-Unis,
34:27 mais qui peut offrir de la stabilité
34:29 dans un environnement peu lisible à court terme.
34:35 Et puis de l'autre côté,
34:36 ce qu'on n'aime pas trop, ce sont les financières.
34:39 On est plutôt absent du secteur financier.
34:43 Et également la consommation discrétionnaire
34:46 qui, dans un scénario de poursuite du ralentissement économique,
34:49 peut envoyer quelques signaux déceptifs.
34:53 Moi, j'ai une question sur les taux américains,
34:55 enfin quand même sur les treasuries.
34:57 Alors, dans un portefeuille obligataire, je comprends,
34:59 on peut loquer du rendement aujourd'hui,
35:01 sur de la dette privée, de la dette d'entreprise, etc.
35:04 Et pourquoi pas sur une partie de la courbe obligataire.
35:06 Le cash rapporte beaucoup, on l'a beaucoup raconté.
35:10 Mais je vois que dans des phases, à nouveau,
35:12 de correction ou de repricing des actifs risqués,
35:16 le 10 ans américain joue absolument plus le rôle d'actif clé,
35:21 de protection qu'il est censé jouer
35:24 dans un portefeuille balancé, équilibré.
35:26 La période estivale, le début du mois de septembre,
35:29 nous le montre bien et nous le démontre à nouveau
35:33 s'il fallait un exemple supplémentaire, Olivier.
35:36 C'est vrai que le consensus a été un peu pris à défaut,
35:38 de nouveau, sur cette thématique,
35:40 puisque, en fin d'année dernière, au début de cette année,
35:43 c'était le 60-40, ou le 70-50.
35:45 Mais bien sûr, les trois premiers mois de l'année
35:46 ont été exceptionnels pour le 60-40.
35:48 C'était exceptionnel, il fallait plutôt être absent du AIB,
35:51 parce qu'il y avait ce risque de récession,
35:53 et au mois de septembre, on regarde les performances,
35:56 l'obligataire d'état américain est en performance négative,
35:58 depuis le début de l'année,
36:00 l'obligataire d'état de la zone euro est en performance
36:02 légèrement positive,
36:04 et le high yield américain et européen est au-delà de +5%
36:06 depuis le début de l'année.
36:08 Donc, en fait, il fallait de nouveau faire un peu le contraire
36:10 des anticipations du début d'année.
36:12 Mais, au-delà de ça,
36:14 on est toujours, et je rejoins ce qui a été dit,
36:19 on est toujours dans ce mouvement d'ajustement
36:22 des taux courts, taux longs,
36:24 et ce mouvement d'ajustement des valorisations.
36:27 Donc, c'est normal qu'à ce stade,
36:29 et pour l'instant, c'est facile à dire maintenant,
36:31 les dettes souveraines américaines ne jouent pas ce rôle d'actif de protection ou d'actif refuge.
36:35 Non, oui, pour l'instant, c'est normal,
36:37 parce qu'on est toujours dans la même dynamique que l'on a initiée l'année dernière.
36:41 Les taux d'état américains rejoueront,
36:45 peut-être, leur rôle de diversification,
36:48 et sans doute, en tout cas, historiquement, ça s'est passé comme ça,
36:50 lorsqu'on sera dans un scénario de récession.
36:52 Mais tant qu'on n'est pas dans un scénario de récession,
36:54 et tant qu'on est toujours dans cette logique de
36:56 régime d'inflation plus élevé,
36:58 donc, taux courts plus élevés,
37:00 taux longs potentiellement plus élevés,
37:02 tant qu'on est dans cette thématique-là,
37:04 l'obligataire américain va avoir du mal à jouer son rôle de diversification.
37:07 Julien, pour conclure avec vous,
37:10 vous avez apporté déjà à tous les deux beaucoup d'informations,
37:13 mais sur la partie investissement, Julien,
37:15 il y a un risque d'émotion devant nous.
37:18 Déjà, comment on se prépare, peut-être, tactiquement ?
37:21 Est-ce qu'il y a tactiquement quelque chose à faire
37:23 pour se préparer à ce risque d'émotion,
37:25 comme vous l'avez appelé,
37:28 et avec quels actifs on est confortable aujourd'hui ?
37:31 - Je disais en avril, je crois, ou en mai,
37:35 je ne change pas l'exposition aux actions,
37:39 alors que normalement je pourrais le faire,
37:41 parce que je voyais bien la conso se profiler.
37:43 Je vais rester dans cette logique,
37:45 je vais vraiment partir du principe que s'il y a l'accident dont je parle,
37:48 ça peut être un équivalent SVB,
37:51 il y a beaucoup d'hypothèses sur la table,
37:53 si il y a un accident, on va l'accepter
37:56 et rester à l'intérieur du cycle haussier sur les marchés d'action.
37:59 Après, s'il y a des gens qui sont très équipés
38:01 pour arriver à très bien se couvrir,
38:04 et être capable aussi de relever sa couverture au bon moment,
38:06 parce qu'une chose est de se couvrir,
38:08 si on attend que tout aille mieux pour lever sa couverture,
38:11 en général on est 15% plus haut.
38:13 - Quand on a tout vendu, c'est difficile de racheter.
38:15 - Voilà, je pense qu'il n'y a pas de raison de se préoccuper.
38:21 - Pour quelqu'un qui a du temps, vous dites,
38:23 touchez pas votre portefeuille actions.
38:25 - Non, pour la partie obligataire, je me suis battu des années,
38:28 pour avoir aucune obligation, j'ai accepté il y a un an
38:30 d'en mettre un petit peu en disant, au moins il y a du taux,
38:33 ça compensera un risque de moins-value.
38:35 La moins-value s'est bien matérialisée,
38:37 le taux n'a pas compensé en totalité,
38:39 loin de là, je pense que cette situation va perdurer.
38:42 Je crois que les marchés obligataires vont glisser, glisser,
38:45 à horizon de 2-3 ans,
38:47 de temps en temps, il y aura des souffles,
38:49 des respirations, etc.
38:51 - Ce n'est pas une hausse continue des taux,
38:53 c'est ça, mais la correction obligataire,
38:55 elle est encore devant nous.
38:57 - Le marché obligataire va rester un marché baissier.
38:59 Pour moi, c'est un marché qui est baissier.
39:01 Ça ne veut pas dire que les obligations n'ont pas de raison
39:03 d'être en portefeuille, parce qu'en effet,
39:05 c'est justement un peu stabilisateur,
39:07 corrélé parfois, c'est souvent le rendement.
39:10 - Non, il n'y a du taux, mais il n'y a plus la même protection qu'avant.
39:12 Ça n'offre plus la même protection qu'avant.
39:14 - Et puis, si on raisonne à 2-3 ans,
39:17 l'Europe, je suis plus Europe qu'USA,
39:21 mais je suis vraiment totalement "steel value",
39:24 je pense qu'il faut détenir des matières premières,
39:26 enfin, tout ce qui existe de but au 3 ans va prendre de l'ampleur.
39:29 Donc, il ne faut pas du tout avoir un portefeuille.
39:31 - Sur un horizon de 3 ans, là ?
39:33 - Ni défensif, ni totalement sur les valeurs de croissance.
39:35 Ça ne veut pas dire que des choses ne joueront pas
39:37 dans l'infotech, dans la biotech, etc.
39:39 Évidemment que c'est tout à fait central et que ça se passe aux Etats-Unis,
39:41 et qu'il en faut, il faut détenir de ça,
39:43 mais l'essentiel, pour moi, va se situer dans un monde
39:47 où l'inflation va rester élevée,
39:50 les taux vont plutôt monter que baisser,
39:52 et les marchés d'action vont se comporter dans ce contexte.
39:56 - Merci beaucoup, messieurs.
39:58 Merci d'avoir passé ces 45 minutes avec nous
40:00 pour débriefer l'actualité de la semaine sur les marchés
40:03 et nous offrir vos perspectives.
40:05 Olivier Rajard, directeur des investissements de Neufly au BC,
40:07 et Julien Ebbenzal, administrateur d'Advise,
40:09 étaient les invités de Planète Marché, ce soir, sur Bsmart.