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Le Maroc est à la Une du grand entretien de France Inter ce dimanche matin, après le séisme qui a frappé le pays vendredi soir. Les invités décrivent l'émotion sur place, la course contre la montre pour retrouver les survivants et les secours qui s'organisent. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20/l-invite-de-8h20-du-week-end-du-dimanche-10-septembre-2023-6607538

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00:00 Le Maroc a la une du grand entretien ce matin après le tremblement de terre qui a frappé
00:03 la région de Marrakech vendredi soir.
00:05 L'émotion, évidemment, la situation sur place, la course contre la montre pour retrouver
00:10 les survivants, les secours qui s'organisent, les origines et les conséquences toujours
00:14 provisoires de la catastrophe.
00:16 Vos questions, vos réactions, vos témoignages aussi, chers auditeurs au 01 45 24 7000 ou
00:22 sur l'application France Inter.
00:24 Avec Marion Lourdes, nous serons en direct avec le Maroc dans un instant et avec nous
00:29 en studio Boris Velyachev, architecte, ingénieur, spécialiste des risques majeurs.
00:34 Bonjour et bienvenue.
00:35 Vous connaissez très bien la question des tremblements de terre, vous avez vécu dix
00:38 ans au Japon, on va y revenir avec vous pour essayer de comprendre comment la catastrophe
00:43 a pu se produire.
00:45 Et puis nous retrouverons Myriam Otmani, elle est présidente de l'INSAF, c'est une association
00:49 qui est très engagée dans la région, qui est à l'épicentre du séisme.
00:53 Mais d'abord, nous sommes en direct avec la journaliste Sophia Fagroud.
00:57 Bonjour.
00:58 Bonjour Aline, bonjour Marion, bonjour à tous.
01:01 Vous êtes journaliste pour la SNRT, la radio nationale marocaine.
01:04 Merci infiniment de prendre le temps d'être avec nous ce matin.
01:07 Vous vous êtes rendue à Marrakech.
01:08 Quelle est la situation sur place ce matin ? Est-ce que les secours sont déjà arrivés ?
01:13 Les secours sont déjà sur place, même depuis hier.
01:18 Vous parliez tout à l'heure de l'émotion.
01:20 C'est toujours la situation justement, elle est caractérisée justement, si je puis dire,
01:27 par l'émotion qui est toujours vive.
01:29 Le long relais des histoires de victimes, comme cette femme dont les mots ont fait le
01:35 tour du monde, ou du moins le tour des chaînes d'information et des réseaux sociaux.
01:40 Une femme qui a perdu son mari et ses quatre enfants.
01:43 Et depuis quelques heures, des journalistes, des confrères et des consœurs, ont pu atteindre
01:49 des doigts qui sont de petites agglomérations d'habitants complètement détruits, comme
01:56 la localité de Tirets, près de Chichawa, à cheval.
02:01 Je rappelle, Chichawa c'est à cheval, entre Marrakech et la région d'Agadir qui est
02:05 plus au sud.
02:06 Plus de 60 corps ont été sortis des décombres dans ce village, et qui comptaient 100 habitants.
02:12 C'est dire l'ampleur de la catastrophe.
02:15 Et la tâche des secours, vous en parliez, est d'autant plus compliquée.
02:20 Elle est toujours compliquée, et ils ont dû faire appel à des drones pour localiser
02:27 d'éventuels survivants sur place.
02:29 Il y a par exemple d'autres localités dans la précarité, comme celle d'Assif, Assif
02:35 Humel, complètement détruits aussi.
02:37 Sans parler bien sûr de Moulaïbarine, en haut de la montagne, dans le châousse, qui
02:44 attendent toujours leur tour pour être secourus.
02:47 Et dont on a vu les images de ce village Moulaïbarine, complètement ravagé.
02:52 On a toutes en tête les images bouleversantes de la catastrophe, Sophia.
02:55 Mais maintenant la solidarité s'organise.
02:58 Elle s'organise sous quelles formes ?
02:59 Il y a plusieurs formes.
03:02 D'abord, la priorité c'est de rétablir l'eau et l'électricité dans plusieurs villages,
03:07 il faut le dire, qui sont toujours coupés.
03:09 Organiser des campagnes de dons de sang, c'est très important.
03:12 Et les appels se multiplient depuis hier matin déjà.
03:18 Des personnalités, notamment du monde de sport…
03:21 Notamment l'équipe de foot du Maroc qui donne l'exemple ?
03:24 Justement, voilà.
03:25 Parce qu'il faut souligner qu'un match de football devait avoir lieu aujourd'hui.
03:29 Il a été reporté s'il n'est gué, mais les joueurs de l'équipe de football ont
03:36 donné leur sang.
03:37 Et dès hier, nous avons vu des files d'attente dans les centres de transfusions sanguines.
03:41 Non seulement à Marrakech, mais dans d'autres villes, par exemple au Jidak, très loin,
03:47 dans l'Est du pays, dans le Nord, Tangier, Tétouan…
03:51 La campagne de solidarité se construit dans ce sens-là.
03:55 Et pourtant, on n'est pas encore dans le teint de la résilience, Sophia.
03:59 C'est ce qu'on entendait tout à l'heure dans le discours du neuropsychiatre Boris
04:02 Cyrulnik.
04:03 Oui, on n'en est pas encore là.
04:07 Mais on en est dans les appels, par exemple, de dons de matériel, de couverture.
04:13 Et des campagnes de collecte s'organisent déjà, par exemple à Rabat, Casablanca,
04:18 pour acheminer de l'aide.
04:20 Je ne parle pas de l'aide de la protection civile, par exemple, qui est déjà sur place,
04:25 mais de l'aide de personnes à travers des ONG, à travers des associations sur place.
04:32 Une question encore, Sophia.
04:34 Le séisme, c'est quelque chose qui est présent dans de nombreux esprits, dans des
04:38 peuples à travers la planète.
04:40 Ils ne l'étaient pas dans la tête des Marocains au quotidien ?
04:43 Absolument pas.
04:45 Et surtout, dans cette région-là.
04:48 C'est inédit.
04:49 Déjà, c'est un tremblement de terre de magnitude 7 sur la chaîne d'Horizta.
04:54 C'est un séisme.
04:55 C'est le séisme le plus violent jamais enregistré en Maroc, depuis que le pays dispose
05:01 d'instruments de mesure.
05:02 C'est inédit aussi parce que l'épicentre se trouve à Eril, dans la région de Al-Hawd,
05:07 qui ne connaît pas d'activité sismique intense et qui n'a jamais connu de tremblement
05:11 de terre aussi violent.
05:13 Et contrairement à la région d'Agadir, qui n'est pas loin, dans le sud, qui a connu
05:19 un séisme dévastateur en 1960, mais qui était de magnitude 5,7.
05:24 Il avait décimé le tiers de la population d'Agadir.
05:27 Il avait tué 12 000 personnes.
05:29 Il y a eu malgré tout des enseignements qui ont été tirés des précédents tremblements
05:33 de terre en 2004, dans le nord du Maroc, près de Al-Hosayma, où l'État avait imposé
05:37 des normes de construction antisismique, Sophia.
05:40 Exactement, l'État avait imposé des normes antisismiques.
05:44 Nous avons parlé à des architectes, à des experts en urbanisme, qui nous disaient que
05:50 c'est vrai que le bilan est lourd.
05:51 On parle aujourd'hui de plus de 2 000 morts, mais que nous avons évité un bilan qui aurait
05:58 pu être beaucoup plus lourd, grâce à cette législation, grâce à ces nouvelles normes
06:02 antisismiques.
06:03 Il faut souligner que la région d'Al-Hos, c'est une région montagneuse, où ça construit
06:11 beaucoup avec la pierre, beaucoup avec le pisé.
06:13 On a le nombre de victimes qu'on a aujourd'hui.
06:18 L'un des drames du Maroc, c'est justement le pisé.
06:20 On aura l'occasion d'en parler avec Boris Veliachev dans un instant.
06:23 Merci infiniment, Sophia Fagroud, d'avoir été avec nous en direct depuis Marrakech
06:27 ce matin.
06:28 Boris Veliachev, vous êtes architecte spécialisé dans les risques majeurs.
06:31 Justement, Sophia Fagroud, qui était avec nous à l'instant, parlait du pisé.
06:36 Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce que c'est, avant de partir sur le bilan des victimes ?
06:41 Dans le nord de l'Afrique, on construit beaucoup avec différents types de matériaux, dont
06:48 la terre, principalement.
06:49 Dans la terre, il y a plusieurs façons de construire, dont le pisé.
06:52 Ce sont des matériaux qui sont friables et qui résistent assez mal aux séismes.
06:59 Même chose avec la maçonnerie de la pierre, ou de la brique d'ailleurs, qui sont des
07:05 éléments qui sont mis les uns sur les autres.
07:07 C'est le même principe, si vous montez des morceaux de sucre les uns sur les autres,
07:11 vous pouvez poser des poids très lourds au-dessus, mais dès que vous allez bouger la table
07:15 ou provoquer un mouvement horizontal, tout va s'écrouler.
07:18 Sans rien pour les solidariser ?
07:19 Voilà, c'est ça.
07:20 C'est ce qu'on appelle de la maçonnerie non-chaînée.
07:22 C'est-à-dire que c'est de la maçonnerie où il n'y a pas d'élément pour la solidariser.
07:26 Et donc ça explique les images assez terribles qu'on voit sur les écrans, des bâtiments
07:30 complètement effrités au sol ?
07:32 Dans tout le pourtour méditerranéen, on a un énorme patrimoine, ancien souvent, qui
07:38 est dans ce type de matériaux, particulièrement la maçonnerie.
07:40 Le pisé, on en trouve plus, c'est vrai, au Maroc, en Afrique du Nord en général,
07:46 dans les villages reculés, et c'est là que ça a fait le plus de victimes.
07:49 Il faut noter d'ailleurs qu'il y a les habitations traditionnelles, il y a aussi
07:53 le patrimoine dont vous parliez il y a un instant, Boris Veliachev, avec l'UNESCO
07:59 qui a envoyé une mission d'urgence pour essayer de sauver les monuments historiques
08:03 puisque la ville de Marrakech notamment est classée patrimoine universel.
08:07 On retourne au Maroc, à Casablanca.
08:09 Bonjour Myriam Othmani.
08:10 Bonjour.
08:11 Merci infiniment d'être au micro de France Inter.
08:14 Vous êtes la présidente de l'INSAF, c'est l'Institution Nationale de Solidarité
08:19 avec les Femmes en Détresse.
08:20 C'est une association qui est très engagée dans la région frappée par la catastrophe.
08:24 Vous aidez des familles qui sont souvent isolées dans les villages du Haut Atlas.
08:28 Quelles sont les dernières nouvelles des familles auprès desquelles vous travaillez
08:31 justement Myriam ?
08:32 Alors écoutez, nous, pour l'instant, on est à la recherche de nos bénéficiaires,
08:39 de nos jeunes filles.
08:40 On a encore 150 jeunes filles qui doivent reprendre l'école, qui devaient reprendre
08:47 l'école incessamment et qui sont retournées dans leur famille.
08:51 Pour beaucoup, elles ont disparu.
08:53 Donc on les recherche.
08:54 Malheureusement, on a de mauvaises nouvelles.
08:57 Il y en a beaucoup qui sont déjà décédées.
09:01 Mais les recherches sont difficiles parce qu'on a de grosses difficultés d'accès
09:07 aux villages qui sont enclavés.
09:12 Donc vous attendez toujours des nouvelles d'autres familles et d'autres personnes
09:19 qui sont proches de votre association ?
09:21 Voilà.
09:22 On essaye de regrouper, de retrouver tous nos bénéficiaires.
09:26 On en a 150 en ce moment.
09:30 Nous avançons un petit peu.
09:33 On a des problèmes d'électricité, on a des problèmes de réseau.
09:36 On a des problèmes de route.
09:38 Mais tout va se résoudre parce que les autorités ont pris les choses en main et que les routes
09:44 commencent à être déblayées, que les secours sont en train de s'organiser.
09:50 Disons que cette région est maintenant de plus en plus sous contrôle.
09:56 Quelles sont les actions que vous, personnellement, dans votre association, vous préparez pour
10:02 aider les sinistrés du séisme ?
10:03 Pour l'instant, on a fait surtout beaucoup d'appels aux dons.
10:12 Nous avons créé une cellule d'urgence où nous avons des personnes qui vont trier,
10:22 emballer et nous allons expédier ces dons dans les villages avec l'aide des autorités
10:28 locales bien sûr, pour qu'ils puissent être distribués aux personnes sinistrées.
10:37 Quand vous parlez des dons, Myriam Otmani, il est question d'argent, mais on parle
10:42 aussi de réserves d'huile, de sucre, de couverture, de lait, de l'eau aussi.
10:47 Parce que l'eau manque.
10:49 Absolument.
10:50 On doit nous livrer, on a fait appel à des sociétés qui livrent l'eau, qui doivent
10:54 nous livrer des camions d'eau demain.
10:56 Nous allons réasséminer à notre petite échelle.
11:01 Il y a beaucoup d'associations qui font la même chose, l'État est en train de
11:05 faire également la même chose.
11:07 Il y a beaucoup d'organismes qui se donnent même.
11:12 Nous, on est une petite association relativement aux autres institutions, mais nous avons
11:21 un contact direct avec la population.
11:24 Grâce aux autorités locales, nous allons redistribuer.
11:28 Pour l'instant, nous sommes surtout dans la recherche de dons, aussi bien de couverture
11:32 que d'eau, que de vivres.
11:35 Nous recherchons également de l'argent pour pouvoir reconstruire.
11:41 Myriam Otmani, la Croix-Rouge internationale parle de besoins qui sont pour des mois, voire
11:47 des années.
11:48 Est-ce que vous avez la même évaluation des choses ?
11:49 Ce sont des régions très pauvres, ce sont des régions qui sont en manque de beaucoup
11:57 de choses.
11:58 Il faut savoir qu'à l'heure actuelle, il y a des modifications.
12:04 L'État a pris les choses en main.
12:06 Il y a l'inscription de toutes les personnes dans des registres.
12:12 Il va y avoir des dons.
12:15 Le Maroc, pour moi, est en pleine révolution parce que toute la population pauvre va pouvoir
12:26 être aidée, aussi bien pour les allocations familiales bientôt que pour l'assurance
12:33 maladie.
12:34 En ce moment, beaucoup d'efforts sont faits pour aider ces populations.
12:41 On était un peu plus tôt en ligne avec un invité de secouriste en frontière en France
12:48 qui attendait l'autorisation du Maroc pour décoller en avion et venir apporter son aide
12:54 également.
12:55 Ça rejoint une question qu'on a reçue sur l'application France Inter de Laurence
12:57 qui dit "j'ai entendu que le Maroc n'avait pas encore officiellement sollicité l'aide
13:01 internationale, pourtant la solidarité s'organise avec des cagnottes etc."
13:04 Qu'est-ce qui se passe ?
13:06 Est-ce que le Maroc met du temps à autoriser les associations, les particuliers qui veulent
13:12 aider ?
13:13 Est-ce que finalement le besoin n'est pas si important que ça ?
13:16 C'était l'hypothèse que formulait notre invité un peu plus tôt de secouriste en
13:19 frontière.
13:20 Non, non, non, non, non, le besoin est là.
13:23 Mais si vous voulez, il y a un afflux de demandes, ça va être un peu désorganisé.
13:32 Il faut que tout soit regroupé, tout soit coordonné.
13:38 Je crois que la fondation Mohamed V va organiser tout ça et peut-être qu'effectivement
13:45 les réponses ne sont pas venues à temps.
13:48 Mais on ne peut pas venir et distribuer comme ça.
13:53 Il faut qu'il y ait une certaine logique, il ne faut pas créer d'attente dans les
14:00 populations.
14:01 Je pense que, à moins qu'un fonctionnaire n'ait pas fait son travail, c'est possible
14:07 aussi.
14:08 Mais normalement, les choses sont bien prises en main aussi bien par l'armée, la gendarmerie,
14:17 toutes les autorités locales, le croissant rouge marocain.
14:22 Tout est en train de se mettre en place.
14:27 C'est vrai que la critique est facile et qu'il y aura toujours des failles.
14:32 Et en tout cas, on sait le travail que fait votre association et votre association notamment
14:36 dans cette région d'Alhaz.
14:38 Juste un mot, Myriam, pour qu'on prenne la mesure de votre travail et des urgences.
14:43 Il y a évidemment l'urgence absolue, il y a ce dont on a besoin pour survivre.
14:48 Et l'argent récolté par votre association, par exemple, pourrait permettre de reconstruire
14:53 à plus long terme un internat de jeunes filles, un internat qui a été détruit par le séisme.
14:57 Oui, si vous voulez, notre grand souci, c'est que nous avons accompagné plus de 600 jeunes
15:06 filles qui travaillaient.
15:07 On les a remis à l'école.
15:10 Et là, maintenant, l'internat, un des internats, il y a d'autres internats dans la région,
15:14 mais un des internats, à Tlaxcoc, a été totalement détruit.
15:18 Et nous tenons absolument à ce que ces gamines puissent leur scolarité le plus longtemps
15:24 possible, au moins jusqu'aux BAC, pour pouvoir aller en faculté ou en formation professionnelle.
15:29 L'internat a été détruit, donc si vous voulez, toutes ces gamines ne peuvent pas…
15:33 En plus, quand une jeune fille ne travaille pas chez nous, elle risque d'être mariée
15:38 précocement, avec toutes les conséquences que ça peut avoir.
15:41 Donc, il est urgent qu'on aide à reconstruire cet internat, bien sûr avec l'éducation
15:48 nationale et une entraide nationale.
15:51 Une question d'une auditrice, Myriam, vous restez en ligne avec nous et puis on se tournera
15:56 vers vous, Boris, dans un instant.
15:58 Bonjour, Myriam.
15:59 Bonjour.
16:00 Merci d'être dans le 6.9 d'Inter.
16:02 Vous nous appelez de Paris.
16:04 Vous avez une question, justement, peut-être à laquelle peut répondre Myriam Optmani.
16:08 Oui, j'ai une double question.
16:11 Je me demandais, dans l'urgence, comment on fait pour reloger toutes ces personnes
16:14 qui sont à la rue ? Et aussi, comment aider le Maroc, qu'on adore beaucoup en France.
16:21 Moi, j'y étais il y a quelques mois.
16:22 Parce qu'on voit partout des cagnottes sur les réseaux sociaux.
16:25 Comment être sûr que si on participe à une de ces cagnottes, ça va arriver là-bas et
16:30 ça va être efficace ?
16:31 Myriam Optmani ?
16:32 Deux questions extrêmement intéressantes.
16:37 Bon, pour le relogement, c'est effectivement absolument crucial.
16:40 Dans le village, les personnes qui y vivent dorment.
16:46 Il n'y a pas encore de tente.
16:48 Il faut que les tentes arrivent pour qu'elles puissent être logées.
16:51 Je pense que pour le relogement dans les villes de Marrakech et autres, l'État va s'occuper
17:00 de tenter de reloger tout le monde.
17:02 Et ça ne va pas se faire très rapidement et ça va se faire un peu avec beaucoup de
17:05 difficultés.
17:06 Maintenant, pour les cagnottes, il y a toujours un risque de détournement.
17:14 Je pense qu'il faut essayer de donner aux grandes associations, aux associations crédibles,
17:21 aux associations qui ont pignon sur rue, regarder les sites.
17:26 Comme la Fondation de France.
17:27 Radio France fait un appel au don sur le site de la Fondation de France par exemple.
17:31 Là, il n'y a aucun risque.
17:35 C'est vrai que là, il n'y a aucun risque.
17:36 Je vais quand même vous donner notre site à nous.
17:39 Oui, bien sûr.
17:40 On vous écoute.
17:41 www.insaf.ma.
17:42 Insaf, c'est I comme Isidore, N comme Sophie, A comme Françoise.
17:56 C'est noté.
17:57 L'Institution nationale de solidarité avec les femmes en détresse.
18:01 On va se tourner peut-être vers Boris Veliachev, on parlait de cette interna qui s'est effondrée.
18:06 On parlait aussi tout à l'heure du bâti, du problème du pisé ou des constructions
18:09 en pierre qui ne sont pas solidarisées.
18:11 Connaissant ce que vous connaissez, vous, sur le bâtiment, sur la construction, est-ce
18:16 que vous pensez que ce bilan qui est aujourd'hui d'un peu plus de 2000 morts peut encore s'alourdir ?
18:20 Oui, bien sûr.
18:21 Particulièrement dans les villages alentours.
18:24 Parce qu'il y a tous ces villages qui sont dans les reliefs en fait.
18:27 On parle beaucoup de Marrakech, mais Marrakech c'est une ville qui est organisée, où il
18:32 y a beaucoup de secours, où les gens vont être secourus assez rapidement, enfin les
18:36 victimes qu'on peut secourir.
18:38 Et où il y aura sans doute, proportionnellement à la quantité de population, moins de morts,
18:45 moins de victimes d'ailleurs que dans ces villages où les constructions sont beaucoup
18:48 plus vulnérables.
18:49 Parce qu'elles sont souvent le fruit de ce qu'on appelle l'autoconstruction.
18:52 Ce sont des gens qui construisent eux-mêmes leurs maisons, ou des petits artisans, avec
18:56 les matériaux locaux, avec les moyens locaux.
18:58 Il y a beau y avoir des règlements parasismiques, des modes de construction permettant de faire
19:05 que la construction résiste, souvent ces personnes-là ne sont pas capables même de
19:09 les comprendre.
19:10 Ces règlements ne les disent pas, ne les connaissent pas.
19:12 Donc ils construisent avec les moyens du bord, avec les matériaux qu'ils ont sur place,
19:16 de façon économique.
19:17 Alors il y a des moyens, il y a des études qui sont faites de façon à essayer de renforcer,
19:22 d'éduquer ces populations, de leur apprendre à mieux construire, à mieux concevoir en
19:25 zone à risque.
19:26 Mais c'est vrai que ça demande de très longues opérations de formation sur place,
19:34 de déplacement de personnes qui vont montrer comment on construit, comment on peut consolider
19:38 des maisons.
19:39 Et c'est pas facile de faire ça dans toutes les régions du monde.
19:41 - Et à court terme, comment est-ce qu'on évite ? On voit qu'il y a des gens qui dorment
19:44 par exemple dehors par peur des répliques sismiques.
19:47 Comment est-ce qu'on évite qu'il y ait un bilan trop lourd, beaucoup plus lourd ?
19:50 - Pour les gens qui sont dehors ?
19:53 - Oui, voilà.
19:54 Est-ce que ces personnes qui ont vu leur maison peut-être fragilisée par des secousses doivent
19:59 continuer à dormir dehors parce qu'il y a vraiment un risque qu'elle puisse s'effondrer ?
20:01 - De toute façon, dans l'urgence, en ce moment, bien sûr il faut porter secours à toutes
20:07 les victimes, essayer de chercher toutes les victimes.
20:09 Et puis porter les premiers secours aussi aux gens qui sont dehors parce qu'ils ont
20:13 besoin, comme vous en avez parlé, ils ont besoin d'eau, de nourriture, de vêtements,
20:17 etc.
20:18 Par contre, il y a une autre chose qui se fait en même temps, c'est qu'il faut très rapidement
20:22 inspecter toutes les constructions de façon à permettre aux gens éventuellement de revenir
20:27 dedans ou alors d'en consolider certaines si elles peuvent être consolidées.
20:30 Et puis, il y en a qui ne peuvent pas être consolidées, donc là on va interdire aux
20:33 gens de rentrer parce qu'il s'agit de les protéger en premier.
20:36 Donc on fait ça très souvent d'ailleurs avec des petites affichettes.
20:39 On va mettre une affichette verte, jaune ou rouge.
20:42 Et ce sont des experts, des architectes, des ingénieurs qui vont les structures, dans
20:45 cela pré-structure, inspecter.
20:47 - Il y a peu d'architectes alors en France, au Maroc, ailleurs, qui sont formés au risque
20:52 majeur ?
20:53 - Oui, particulièrement en France d'ailleurs, mais au Maroc aussi.
20:55 Il faut savoir qu'aujourd'hui encore, en France, les architectes ne sont pas formés
20:59 au risque majeur, particulièrement au séisme.
21:01 Il y a quelques petites initiatives.
21:03 Moi, j'ai des enseignements particuliers, comme en troisième cycle et en deuxième
21:07 cycle dans certaines écoles, mais ça c'est à l'initiative de certains enseignants formés
21:10 pour ça.
21:11 C'est vrai que c'est pas du tout dans le tronc commun et la plupart des architectes
21:15 en France ne sont pas formés pour ça.
21:16 C'est le cas de nombreux pays, ce qui n'est pas le cas par exemple au Japon.
21:19 - Non, on l'a vu, mais par exemple en Turquie, après le séisme, où il y avait eu un nombre
21:24 de morts absolument effrayants, c'est la reconstruction, quelque chose qui va prendre
21:30 longtemps, très longtemps, même avec des types d'habitations qui sont plus simples
21:34 à construire qu'un immeuble par exemple.
21:37 - Ça prend toujours du temps, la reconstruction, on l'a vu.
21:39 Les gens, souvent d'ailleurs, d'abord il y a une phase où on va venir au secours des
21:44 gens, donc là on va les placer en général dans des grands espaces, des écoles, des
21:49 gymnases qui sont libres, etc.
21:52 Ensuite, il va s'agir de reconstruire et pendant cette phase de reconstruction, on ne peut
21:55 pas loger les gens dedans, donc on va faire ce qu'on appelle des habitats temporaires
21:59 pour mettre les gens.
22:00 Et ces habitats temporaires, on parle de temporaires, mais en fait ça reste sur une période assez
22:03 longue.
22:04 A Bumerdes en Algérie, ils sont restés plus de 10 ans.
22:07 Au Japon, même après le tsunami, c'est plus de 8 ans qu'il y en a certains qui sont restés.
22:10 Donc c'est pas une période si courte que ça.
22:12 - Et puisque beaucoup d'auditeurs se posaient la question, le roi Mohamed VI a été montré
22:20 à la télévision en train de présider une réunion de travail à Rabat avec le prince
22:23 héritier justement pour coordonner les secours et venir en aide aux populations, puisque
22:28 de nombreux auditeurs se posaient la question.
22:30 Merci infiniment en tout cas Boris d'être venu avec nous ce matin, nous expliquer et
22:35 prendre la mesure de ces enjeux.
22:37 Les dons peuvent arriver évidemment sur le site de la Fondation de France.
22:44 Je vous rappelle que toutes nos antennes s'associent avec la Fondation de France, fondationdefrance.org.

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