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00:00 - Europe 1 Matin - Nicolas Carreau, votre livre ce matin c'est un rendez-vous.
00:06 - Mais oui, ça fait partie des plaisirs de la vie, ça aussi le retour d'un recueil de Philippe Delerme.
00:10 Parfois il propose d'autres idées, comme dans son livre, vous vous souvenez, où il disait qu'il adorait New York
00:15 et pourquoi, et pour cette même raison, il n'irait jamais. Mais quand même, depuis la première gorgée de bière,
00:20 il publie régulièrement un recueil de textes courts où il explore les plaisirs minuscules.
00:25 - Alors c'est le cas de celui-ci qui s'appelle "Instants suspendus" au pluriel.
00:28 - Au seuil, une quarantaine de textes qui s'intéressent donc à ces moments éphémères qu'on connaît forcément,
00:33 mais auxquels on ne fait plus attention. Sortir du tunnel par exemple, comme vous êtes dans un train,
00:37 on était dans l'obscurité avec un son assourdi et soudain, vlam ! Le bruit a changé, il est plus ouvert,
00:41 le paysage éclate tout à coup un peu plus loin. Rien à voir, c'est ça l'intérêt de ces recueils.
00:45 Enfiler des Stan Smith. Et au passage, l'histoire rapide de Stan Smith, le tennisman des années 70,
00:51 complètement oublié mais célébrissime à cause de ses chaussures. Il est toujours en vie d'ailleurs.
00:55 Il y a la lumière du soir aussi, ou la mouche de l'été. Il semble que ce soit toujours la même chaque année,
01:00 écrit De Lerme, "elle aime les murs blancs, les contre-vents tirés, l'assoupissement de la campagne alentour".
01:06 - Oui, elle est rarement seule, la mouche de l'été, ceci dit. Ce sont des observations du monde en fait.
01:11 - Exactement, mais avec un oeil poétique. Voir ce qu'on ne voit plus, comme le texte "la veste sur l'épaule",
01:16 comme Belmondo dans "A bout de souffle" qui marche aux côtés de Jean Seberg, veste sur l'épaule donc,
01:21 en la tenant avec désinvolture, on peut aller jusqu'à mettre la main dans la poche éventuellement,
01:26 en bras de chemise, pour revendiquer, écrit De Lerme, qui exagère exprès, pour revendiquer qu'on est un affranchi,
01:32 un homme sensible à l'atmosphère aussi, au marronnier en fleurs, au désir d'échapper au carcan.
01:36 - Ok, boomer, ouais. - En partant, la photo aussi, l'instant suspendu par excellence,
01:40 la photo où celui-là, j'adore, choisir sa religieuse, pas la nonne, le gâteau.
01:44 Ce moment, cet instant, quand on hésite entre religieuse, café ou chocolat.
01:49 - Les parts choisis, celle au café dit De Lerme, parce que c'est plus chic et c'est comme ça.
01:52 Ou un dernier, le moment où quand il fait froid dehors, qu'il pleut même, et que vous regagnez la voiture,
01:57 vous savez, vous êtes parti sur la côte, vous baladez, et puis vous avez pas fait attention,
02:01 le vent s'est levé, la pluie a commencé à tomber, donc vous commencez tout doucement à courir,
02:05 crescendo vers la voiture, le parking arrive, enfin la voiture, vous vous y réfugiez,
02:11 et vous rentrez, vous claquez la porte, c'est cet instant précis, réfugié à l'intérieur,
02:15 où vous soupirez, ce n'est pas possible, je cite encore, de se sentir aussi bien, aussi vite,
02:21 juste après avoir été si mal, on soupire encore, on fait mine de s'ébrouer,
02:25 sans plus la moindre nécessité, on pourrait revenir au monde en allumant l'autoradio.
02:30 - Philippe De Lerme, les instants suspendus, c'est au seuil, merci beaucoup Nicolas Caro.
02:35 Héloïse Gois, vous nous conseillez aujourd'hui une mini-série australienne avec, s'il vous plaît,
02:40 Madame Sigourney Weaver.
02:42 "Les Fleurs Sauvages", c'est le titre de cette très belle série,
02:45 adaptée du roman du même nom de Holly Ringland.
02:47 Elle est produite par l'équipe de Big Little Lies et de Nine Perfect Strangers,
02:51 ça vous donne déjà une petite idée du niveau.
02:53 En revanche, je vous préviens tout de suite, si vous n'avez pas trop la pêche en ce moment,
02:57 attendez peut-être un petit peu pour regarder "Les Fleurs Sauvages",
02:59 parce que même si cette série est sublime, il s'agit d'un drame familial, un vrai, c'est pas la poilade.
03:04 Les épisodes suivent le destin d'Alice, une petite fille qui se retrouve orpheline
03:08 après un incendie qui a emporté ses parents.
03:10 - Effectivement, oui. - Voilà, ça commence joyeux.
03:13 Elle est recueillie par sa grand-mère June, Sigourney Weaver donc,
03:16 dans un endroit a priori très poétique, une ferme à fleurs à l'adresse secrète.
03:20 - Il y a pas mal d'habitants dans cette ville qui sont contre l'idée que des femmes puissent diriger une ferme.
03:24 Ils n'apprécient pas qu'on vive coupée du monde et qu'on soit différente.
03:29 - Bon, qu'est-ce qui se passe dans cette ferme à fleurs ? Pourquoi l'adresse est-elle secrète ?
03:33 - Eh bien, en plus de vraiment cultiver toutes sortes de fleurs,
03:35 June et sa compagne accueillent depuis des années des dizaines de femmes vulnérables ou en danger.
03:40 Toutes ces victimes hébergées dans la ferme sont appelées les fleurs.
03:43 - Ah d'accord, mais j'imagine qu'il y a un mais ?
03:45 - Absolument, parce qu'Alice grandit et elle comprend que sa grand-mère a tissé toute une toile
03:49 de terribles mensonges autour de sa famille et de son passé.
03:52 - Il y a des choses que tu dois savoir, Alice. Des choses que je ne peux pas dire sur un répondeur.
03:56 - Mais putain, qu'est-ce qui s'est passé ?
03:59 - Tu lui avais promis de la protéger.
04:01 - Alice a le droit de savoir ce qu'il s'est réellement passé.
04:03 - Que pour t'arroser ?
04:05 - On n'est pas obligés de tout lui dire tout de suite.
04:07 - Dans cette ferme, les femmes communiquent à travers les fleurs qui ont tout un symbole différent.
04:13 Donc quand Alice finit par fuguer, elle laisse à l'attention de sa grand-mère un lis de marais
04:17 qui représentent la trahison. Cette poésie du texte original est très bien retranscrite à l'écran.
04:22 Évidemment, Sigourney Weaver est à des kilomètres de son roulis dans Alien.
04:26 - Oui, j'allais vous le dire. Y a-t-il un alien ?
04:27 - Non, absolument pas. Ici, elle incarne avec une justesse épatante une femme dure, fermée,
04:32 qui peine à arroser de tendresse sa petite fille qui en a pourtant un grand besoin pour pousser droit.
04:37 Vous voyez la métaphore avec les fleurs, j'ai travaillé.
04:39 Cette série, c'est à la fois un drame et un thriller qui nous parle à tous,
04:43 puisque les épisodes explorent la famille, les racines et les secrets qui abîment.
04:47 Les images sont somptueuses de bout en bout, c'est bouleversant.
04:50 - Elle a aimé Héloïse Gouin, les fleurs sauvages. Merci beaucoup Héloïse d'avoir sur Prime Vidéo,
04:55 la plateforme de streaming d'Amazon. Merci beaucoup, chers amis.