Invité sur le plateau de CNEWS, Jean-Paul Brighelli s'est exprimé sur l'école et la question de l'uniforme. «Il y a une vertu essentielle de l'uniforme [...], lorsque vous êtes élève, il va falloir penser à s'habiller en élève», explique-t-il.
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00:00 - Alors je me suis exprimé sur le sujet, on va prendre un exemple.
00:04 Dans les têtes de classement PISA, PIRS, etc.
00:07 Vous avez le Japon, vous avez la Chine, vous avez Singapour.
00:10 Ce sont des pays qui sont tous en uniforme.
00:14 Il faut bien comprendre une chose, c'est qu'il y a une vertu essentielle de l'uniforme.
00:19 C'est que lorsque vous êtes pompier, vous habillez en pompier.
00:22 Lorsque vous êtes médecin, vous habillez en médecin.
00:25 Lorsque vous êtes élève, il va falloir penser à s'habiller en élève.
00:28 - C'est clair. Alors votre bouquin, "L'école à deux vitesses",
00:30 les programmes du primaire et du secondaire devaient être réécrits.
00:33 - Totalement.
00:34 - Ça c'est clair.
00:35 Il ne servait à rien que le nouveau bac blanquer impose pour l'oral
00:38 de l'épreuve anticipée de français l'étude d'une question grammaticale
00:41 si la grammaire n'est pas étudiée.
00:42 Mais moi, quand je lis ça, j'ai des...
00:45 Monsieur Jakubowicz, s'il vous plaît.
00:47 - Pardon.
00:48 - Pardon.
00:48 - Écoutez, Monsieur Brighelli, la grammaire est étudiée.
00:54 - Non.
00:54 - Non.
00:55 - Ben non.
00:57 - Non.
00:57 - Enfin, la grammaire n'est pas étudiée.
00:59 - La grammaire n'est pas étudiée.
01:00 - Mais ce n'est pas possible.
01:01 - La grammaire n'est pas étudiée pour elle-même.
01:02 - Ce que vous dites n'est pas possible.
01:04 - Vous avez parlé...
01:06 - On va reprendre. Je vais vous refaire un cours, Pascal.
01:08 Là, tout de suite.
01:09 On est actuellement dans une pédagogie...
01:12 Comment dire ?
01:14 Où c'est l'élève qui doit trouver la règle.
01:18 - Et le complément d'objet direct, par exemple, concrètement...
01:21 - Non, on lui montre une phrase.
01:22 On lui montre une phrase et on lui dit,
01:24 "Regarde la phrase et déduis la règle."
01:27 Et là, il passe dix minutes à raconter absolument n'importe quoi.
01:30 - Ça, c'est une manière d'apprendre ?
01:32 - Non.
01:32 - Peut-être. Non, mais peut-être que ça allait mauvais.
01:34 Moi, je ne sais rien. Je ne suis pas un spécialiste.
01:35 - Vous en avez pour une éternité, pour faire ça.
01:38 C'est ce qu'on appelle le constructivisme,
01:40 c'est-à-dire que chaque élève construit ses propres savoirs.
01:42 - Mais pourquoi est-ce qu'on fait ça, alors ?
01:43 Pourquoi est-ce qu'on...
01:44 En fait, avant, il y avait un système qui marchait, si j'ai bien compris.
01:47 - Oui.
01:47 - On en est, nous, les témoins.
01:48 Moi, je dis toujours la même chose.
01:49 Moi, je suis un élève lambda.
01:51 Je n'ai pas fait normal sup.
01:51 J'ai eu le bac.
01:52 Voilà, j'étais un élève lambda comme il y en a des milliers.
01:55 - Non, vous avez passé le bac de cette époque.
01:57 - D'accord.
01:58 - Ça n'a rien à voir avec le bac d'aujourd'hui.
01:59 - Mais quand je sors en 83, quand je sors en 82, plus exactement du bac,
02:02 je sais lire, écrire, compter.
02:04 Et j'ai...
02:05 Oui, je fais tous des fautes d'orthographe, mais globalement, j'en fais peu.
02:08 Globalement.
02:10 Et je sais ce que c'est que la grammaire.
02:11 Alors, ce système marchait.
02:12 Pourquoi il ne marche plus ?
02:13 - Bon, alors, parce que vous avez des idéologues.
02:16 Vous savez, un idéologue, c'est quelqu'un qui n'a aucun rapport avec la réalité.
02:19 C'est ça, la définition d'Alain Arendt.
02:21 Vous avez des idéologues qui ont dit "l'orthographe, c'est très mal, c'est bourgeois".
02:25 Je pourrais vous les citer.
02:27 Il y a des livres entiers.
02:29 - Oui, mais aujourd'hui, on est revenu quand même là-dessus, sur le pédagogisme.
02:32 - Non, on n'est pas revenu.
02:33 On est dans un principe d'égalitarisme absolu.
02:37 L'égalitarisme, c'est toujours par en bas.
02:39 - D'accord.
02:39 Alors, est-ce qu'on va les changer ?
02:41 Est-ce qu'on va les réécrire, ces programmes ?
02:42 - Il faudrait.
02:43 J'attends avec impatience qu'on nomme quelqu'un de compétent à la commission des programmes.
02:49 Il y a eu une femme très compétente sous Blanquer qui a été sous-exploitée,
02:53 Suadha Yada, et Papandia, il a changé.
02:58 Il faut absolument réécrire les programmes, les réécrire très vite.
03:00 Et par ailleurs, ce n'est pas la question des programmes.
03:03 Ça, c'est une décision Jacobin.
03:04 Mais il faut que, localement, on puisse adapter les programmes en fonction de l'état des collégiens que l'on aura en face.
03:12 - Le bon élève, écrivez-vous, tel que le conçoivent dans leur majorité mes collègues, n'est pas un vrai cadeau des disciplines scolaires.
03:18 C'est une créature faite d'obéissance, de réflexes scolaires acquis très tôt et d'un sens poussé de l'imitation et de la reproduction.
03:25 Ce que nous appelons bon élève est un clone de nous-mêmes, enseignants, une ressucée de ce que nous fûmes et un reflet de ce qu'attendent les oligarques au pouvoir,
03:34 les enseignants, la plupart du temps, étaient bons élèves, dont le réflexe d'obéissance se perpétuit tout au long de la vie.
03:41 - Alors, c'est très simple, je me suis appuyé sur les réflexions des jurys de l'ENA depuis ces cinq dernières années,
03:48 qui déplorent le conformisme, la bêtise des candidats, c'est-à-dire leur incapacité à penser différemment.
03:57 On a vu ce que ça a donné, le gouvernement est peuplé d'énarques.
04:01 Les divers gouvernements, d'ailleurs, des 20 dernières années, sont peuplés d'énarques.
04:07 Bon, est-ce que ça nous a fait beaucoup de bien ?
04:09 Non, il faut trouver des gens qui arrivent à penser différemment.
04:14 Vous savez, l'un des grands succès de l'été, c'était Oppenheimer.
04:17 Qu'est-ce qui a fait d'Oppenheimer, d'Einstein, etc., des gens qui étaient vraiment au sommet ?
04:24 C'est qu'ils se sont mis à penser la physique différemment.
04:27 - Tout le monde n'est pas Oppenheimer, évidemment.
04:29 - Non, chacun à son niveau.
04:32 Mon slogan de base, c'est amener chacun au plus haut de ses capacités, quelles que soient ses capacités.
04:39 Et elles ne sont pas les mêmes pour tout le monde.
04:40 Il y a des gens qui sont infiniment plus intelligents que vous et moi, Pascal.
04:45 - Vous croyez ?
04:45 - Oui.
04:46 [Musique]
04:49 [SILENCE]