• l’année dernière
Après ses innombrables cancers et sa maladie de Parkinson annoncés par les médias français, Poutine aurait échappé de peu au coup d’État. La semaine dernière, l’affaire autour d’Evguéni Prigojine, le patron du groupe paramilitaire Wagner a mis l’Occident en ébullition. Beaucoup de commentateurs se sont empressés d’annoncer la fin imminente de Vladimir Poutine à l’image de Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et romancier à ses heures, qui voulait mettre l’économie russe à genou. Une semaine plus tard, Prigojine est exilé et rien n’indique que Vladimir Poutine ressort affaibli de cet épisode, au contraire. L’économie russe, elle, après 12 trains de sanctions économiques prononcées par l’Union européenne et la présidente de la Commission européenne Ursula von de Leyen, semble résister. Sur le plan international, la Russie n’est pas non plus isolée comme aimeraient le penser une majorité de pays du G7.
De l’autre côté, l’Occident et l’Union européenne ne tirent aucune conclusion des mauvais choix qui s’enchaînent et ratent toutes les occasions de redresser la barre.
Jacques Sapir est économiste, directeur d’études de l’IHESS, et spécialiste de la Russie. Il explique les derniers événements en Russie avec précision, mesure et perspicacité. Il évalue l’état de l’économie russe et de la croissance du pays et nous livre son analyse des transformations mondiales en cours.

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00:00:51 Bonjour à tous, je suis ravie de vous retrouver pour ce nouveau numéro du samedi politique.
00:00:56 Cette semaine, j'espère que vous ne m'en voudrez pas, mais nous n'allons pas parler des émeutes qui se déroulent en France,
00:01:01 mais nous allons parler de la situation géopolitique et économique mondiale autour du conflit en Ukraine.
00:01:07 Vous connaissez les derniers événements qui se sont déroulés en Russie la semaine dernière.
00:01:11 Vladimir Poutine est-il sorti affaibli ? Qu'en est-il réellement de l'économie russe et du dollar,
00:01:19 dont nous allons et nous avons déjà parlé auparavant ?
00:01:22 On va essayer de faire un point pour comprendre tout ça, mais avant toute chose, vous savez,
00:01:25 comme chaque semaine, je vous le demande, pensez à commenter cette émission,
00:01:29 à la partager à vos proches et puis bien sûr, pensez à cliquer sur le pouce en l'air pour améliorer son référencement.
00:01:34 C'est parti, à l'attaque !
00:01:36 [Générique]
00:01:46 Et à mes côtés aujourd'hui pour ce beau programme, Jacques Sapir. Bonjour monsieur.
00:01:50 Bonjour.
00:01:51 Merci beaucoup d'être avec nous. Vous êtes économiste, directeur d'études à l'EHESS,
00:01:57 l'École des hautes études de sciences sociales. Vous êtes spécialiste des questions stratégiques,
00:02:02 mais aussi de la Russie, du monde russe, oserais-je dire.
00:02:05 Vous êtes également l'auteur de très nombreux ouvrages. Je ne pourrais évidemment pas tous les citer.
00:02:10 Parmi eux, je prendrais le dernier, publié chez Jean-Cyril Gautrevoy,
00:02:14 "Le grand retour de la planification" avec un point d'interrogation à la fin.
00:02:18 Et puis aussi "La démondialisation ou la fin de l'eurolibéralisme",
00:02:22 deux livres publiés aux éditions du Seuil.
00:02:24 Alors Jacques Sapir, si vous voulez bien, pour commencer, on va revenir quelques jours en arrière.
00:02:27 Comme je l'ai dit en introduction, on va reparler de ce coup de force d'Evgeny Prigojin,
00:02:32 le patron du groupe Wagner la semaine dernière en Russie.
00:02:36 Les médias occidentaux parlaient d'un coup d'État, se réjouissaient presque de parler d'un coup d'État.
00:02:42 Comment avez-vous observé cette séquence ?
00:02:45 C'est une mutinerie, ce n'est pas un coup d'État. D'ailleurs, jamais le pouvoir n'a été mis en cause.
00:02:50 Le pouvoir de Poutine n'a pas été mis en cause, du Premier ministre il n'a pas été mis en cause.
00:02:56 Bien sûr, Prigojin avait attaqué le ministre de la Défense et le chef d'État-major,
00:03:02 mais il les avait attaqués déjà depuis plus de six mois.
00:03:05 Et il n'y avait pas de volonté de prendre le pouvoir.
00:03:11 Une chose qui est très simple, les fameuses colonnes de Wagner qui vont vers Moscou,
00:03:18 on voit les chars sont sur des porte-chars.
00:03:21 La colonne n'est pas du tout en position de combat ou en ordre de combat quand elle marche.
00:03:28 Donc, c'est une mutinerie, ou plus précisément une démonstration de mécontentement,
00:03:35 dont on comprend qu'elle a été en réalité provoquée par le fait que Vladimir Poutine
00:03:41 avait signifié à Prigojin et au chef de Wagner
00:03:45 qu'il entendait obliger les combattants de Wagner de prendre un engagement dans l'armée russe.
00:03:52 Et c'est en réalité…
00:03:55 – Pour le 1er juillet, en plus l'échéance s'approchait.
00:03:57 – L'échéance s'approchait et c'est la crainte par Yannick Prigojin
00:04:03 de la perte de son contrôle sur Wagner,
00:04:06 aussi de la perte du contrôle sur le financement.
00:04:10 Parce que, c'était évident, le financement venait de l'État russe,
00:04:16 qui l'a d'une certaine manière motivé.
00:04:18 Mais il faut toujours rappeler une chose,
00:04:20 Wagner n'existait que par la volonté du gouvernement russe.
00:04:27 Qui fournit les armes ? Qui fournit le carburant ? Qui fournit les munitions ?
00:04:32 Wagner n'a pas d'autres sources que les sources militaires d'approvisionnement.
00:04:37 Et c'est ça qui est assez incompréhensible.
00:04:41 Dès qu'il se dressait contre l'autorité,
00:04:46 l'autorité n'avait qu'à fermer le robinet et c'était fini.
00:04:50 Alors, est-ce que Yevgeny Prigojin a eu l'illusion
00:04:55 qu'il entraînerait avec lui une partie significative de l'armée ?
00:05:00 Parce que c'est vrai que dans l'armée,
00:05:02 on fait des critiques, parfois justifiées d'ailleurs,
00:05:06 contre le chef d'État-major, contre aussi le ministre.
00:05:10 Bien, il oublie et il oubliait une chose qui était tout à fait fondamentale,
00:05:17 la Russie est engagée dans des opérations militaires,
00:05:20 alors qu'on appelle ça une opération militaire spéciale comme le veulent les Russes,
00:05:24 ou qu'on parle plutôt de guerre,
00:05:26 parce qu'on voit bien, le niveau de violence, c'est le niveau d'une guerre,
00:05:29 c'est pas autre chose.
00:05:32 Et qui fait que jamais dans ce genre de circonstances,
00:05:36 des militaires n'auraient accepté de marcher avec Yevgeny Prigojin.
00:05:41 Donc le résultat, il a perdu.
00:05:44 Si il y a quelqu'un qui a perdu, c'est bien lui.
00:05:47 Il se voit retirer tout ce qui faisait sa force.
00:05:52 Wagner va bien être intégré dans l'armée russe.
00:05:55 L'équipement lourd a été retiré à Wagner,
00:05:58 tous les chars, les canons sont récupérés par l'armée russe.
00:06:03 Donc de fait, il n'a plus de dents, il ne peut plus mordre.
00:06:07 Alors bien sûr, il n'est pas condamné en tant que tel,
00:06:11 il est contraint à l'exil au Bélarusse,
00:06:14 il ira avec certainement une partie de son encadrement et quelques hommes,
00:06:20 mais par exemple, il semble que sur les…
00:06:23 on ne connaît pas exactement les effectifs de Wagner,
00:06:26 on peut penser qu'il y a entre 25 000 et 30 000 combattants,
00:06:29 plus des gens qui sont à l'arrière, qui s'occupent des services logistiques.
00:06:33 Bon, que sur les 25 000 à 30 000 combattants de Wagner,
00:06:36 visiblement pas plus de 5 000 l'ont suivi.
00:06:39 Ça reste très faible.
00:06:41 – Surtout au regard de l'armée russe.
00:06:42 – Tout à fait, ça reste extrêmement faible.
00:06:45 Et donc, il a perdu de manière très nette.
00:06:50 Vladimir Poutine a réaffirmé son pouvoir.
00:06:53 Alors, je ne dis pas que Vladimir Poutine n'est pas embêté
00:06:57 par ce qui s'est passé.
00:06:59 Wagner, c'était un instrument bien utile en Afrique,
00:07:03 et d'ailleurs, Vladimir Poutine et le ministre de la Défense
00:07:09 ont indiqué que les activités de Wagner continueraient en Afrique,
00:07:13 sous le contrôle maintenant plus direct de l'armée
00:07:17 et, je dirais, des services de sécurité.
00:07:20 Voilà, ce n'est pas plus que cela, mais ça montre bien
00:07:27 qu'il y a eu là un problème dans la gestion d'une forme
00:07:32 que l'on voulait, si vous voulez, discrète de la puissance russe.
00:07:37 Il faut toujours se demander, pourquoi est-ce que Wagner a été créé ?
00:07:41 Parce que, si vous voulez, ce n'est pas tellement dans la tradition
00:07:45 de la Russie d'utiliser ce genre d'instrument.
00:07:47 Alors d'abord, il y a par contre une véritable tradition
00:07:51 depuis les années 90 de force paramilitaire.
00:07:55 Il y a eu, bien avant Wagner, les Cossacks du Kouban
00:07:59 qui se sont constitués, alors d'abord, en organisation civile,
00:08:02 puis une organisation civile qui est devenue une organisation paramilitaire,
00:08:05 qui est même devenue une organisation militaire en tant que telle,
00:08:09 et qui est aujourd'hui intégrée dans la garde nationale,
00:08:12 dans Roskvarg, et abondance.
00:08:14 Il y a eu toute une série de ce type d'organisation,
00:08:19 et puis surtout, il y avait l'exemple donné par les États-Unis.
00:08:22 Blackwater, l'usage justement de ces sociétés militaires privées en Irak,
00:08:31 et peut-être une chose que les Russes...
00:08:33 Alors, les Russes ont vu évidemment tous les avantages
00:08:35 qu'il y avait à avoir ce type d'instrument,
00:08:37 ce qui permettait d'intervenir sans intervenir,
00:08:39 sans être directement présent.
00:08:41 Ils n'ont peut-être pas mesuré les inconvénients que cela pouvait avoir.
00:08:46 Le fait, par exemple, que les exactions qui ont été commises
00:08:51 par les hommes de Blackwater en Irak ont, d'une certaine manière,
00:08:55 maximisé les pertes sur l'armée américaine.
00:09:00 C'est-à-dire qu'une partie de la révolte qui a eu lieu en Irak
00:09:04 contre les Américains est aussi liée aux règles...
00:09:08 – Ou est-ce liée au fait qu'on faisait faire plus à Blackwater le sale boulot ?
00:09:11 – Exactement.
00:09:12 Bon, donc voilà, il y a tous ces problèmes qui se sont posés.
00:09:17 Bon, je pense qu'il va y avoir une réflexion,
00:09:19 peut-être à plus long terme sur cet usage-là,
00:09:22 mais l'affaire est terminée, si vous voulez,
00:09:26 comme on dit, l'incident est clos, comme on dit à l'Assemblée nationale,
00:09:30 et très clairement, il n'y a pas eu d'affaiblissement de Vladimir Poutine.
00:09:34 – Alors, ce sur quoi j'aimerais revenir aussi, Jacques Sapir,
00:09:36 c'est qu'on a vu, souvent, nous sommes taxés typiquement "je suis pro-russe",
00:09:41 bien sûr, pour les médias du système,
00:09:43 pour autant, on a quand même constaté des gens qui,
00:09:46 parfois, perdaient un peu la raison,
00:09:48 et j'aimerais vous faire revenir sur un terme en russe,
00:09:51 à savoir le "maskirovska", qui a fleuri sur les réseaux sociaux
00:09:56 pour justifier, finalement, un pas de deux
00:09:59 entre Prigojin et Vladimir Poutine,
00:10:01 une forme d'entente pour organiser un grand complot pour l'Occident, etc.
00:10:06 Enfin, moi, un truc qui était un peu compliqué à comprendre,
00:10:09 à mon avis, par eux-mêmes, on est très loin de ça, en fait,
00:10:12 on est vraiment dans un désaccord de fond entre deux hommes
00:10:15 et une tentative de Prigojin de faire quelque chose qui fonctionne en sa faveur.
00:10:19 – Tout à fait, ou plus précisément, de montrer à Poutine,
00:10:23 "mais enfin, vous ne pouvez pas me traiter comme ça",
00:10:26 "ben si, je peux te traiter comme ça, mon gars", c'est ça qui est très important.
00:10:30 – Je préfère l'image, oui.
00:10:32 – Voilà, alors, la "maskirovska", ça existe,
00:10:35 et ça existe que ce soit au niveau tactique,
00:10:37 que ce soit au niveau opératif, ou que ce soit au niveau stratégique,
00:10:41 oui, ça existe, c'est même défini, il y a des manuels de "maskirovska"
00:10:45 qui sont publiés régulièrement par le ministère de la Défense de la Russie,
00:10:51 bon, voilà, mais appeler cette opération une opération de type "maskirovska",
00:10:56 c'est rentrer, alors là, pour le coup, dans une paranoïa complète, non !
00:11:01 Il y avait un conflit, ce conflit ne touchait pas au pouvoir,
00:11:06 il touchait tout simplement à la question,
00:11:08 quelqu'un qui avait effectivement acquis un certain instrument,
00:11:12 qui disait "m'enlève pas mon instrument, m'enlève pas mon argent".
00:11:16 – Mon outil de puissance.
00:11:17 – Ben oui, voilà, je peux t'enlever ton instrument,
00:11:19 et tu n'es qu'un instrument, donc il faut que tu te le rappelles.
00:11:23 – Alors ce que je vous propose à présent, Jacques Sapir,
00:11:26 c'est d'écouter François Asselineau, le président de l'UPR,
00:11:28 il a livré sur sa chaîne UPR TV, que vous pouvez retrouver sur Youtube,
00:11:32 une analyse, on va dire, des conséquences de cette opération pour Vladimir Poutine,
00:11:38 aussi bien sur la scène intérieure que la scène extérieure, on l'écoute.
00:11:42 – Le premier effet, c'est que Vladimir Poutine se débarrasse de Prigogyne,
00:11:45 le deuxième effet, c'est qu'il met la main sur les mercenaires,
00:11:48 qui vont être, si j'ai bien compris, vont signer un contrat,
00:11:51 ils vont maintenant passer sous le contrôle direct de l'armée régulière,
00:11:54 troisième élément de satisfaction, c'est le moins que l'on puisse dire,
00:11:58 c'est qu'il n'y a pas eu un seul militaire qui se soit rebellé de l'armée régulière,
00:12:02 qui se soit rebellé contre Poutine.
00:12:05 Quatrième élément, Vladimir Poutine a pu aussi compter sur le soutien immédiat
00:12:11 des institutions de la Fédération de Russie.
00:12:14 Le président de la Chambre basse de la Douma,
00:12:17 comme celui de la Chambre haute de la Fédération de Russie,
00:12:23 l'un et l'autre ont déclaré leur soutien immédiat et sans condition à Vladimir Poutine dans cette affaire.
00:12:32 Également le soutien du patriarche orthodoxe de toutes les Russies, le patriarche Kirill II.
00:12:39 Encore autre chose, c'est le soutien international.
00:12:43 Le soutien international à Poutine a été immédiat de la part de ses alliés traditionnels,
00:12:50 mais qui auraient pu se pincer le nez ou prendre légèrement leur distance.
00:12:55 On a appris le soutien non seulement de Tokayev du Kazakhstan, de Mirziyev de l'Ouzbékistan,
00:13:05 non seulement de Loukachenko, mais aussi du président Erdogan, le président de la Turquie.
00:13:11 On a eu également le soutien de Kim Jong-un de la Corée du Nord.
00:13:15 Ça peut être intéressant en matière de drones, mais c'est surtout le soutien de Xi Jinping.
00:13:20 Et la Chine a apporté son soutien sans ambiguïté.
00:13:24 Donc sur la scène internationale, eh bien en fait,
00:13:28 Vladimir Poutine n'a pas eu l'ombre d'une difficulté à faire le plein de ses alliés traditionnels.
00:13:35 Voilà la réalité de la situation.
00:13:38 [Générique]
00:13:44 – Alors partagez-vous cette analyse de François Asselineau
00:13:47 que j'allais qualifier de tout bénef pour Vladimir Poutine.
00:13:50 – Oui, très largement.
00:13:51 Alors, je serai peut-être un petit peu moins optimiste
00:13:54 parce que ça va imposer une forme de réflexion et de reconfiguration
00:13:59 de l'appareil militaire officiel et officieux.
00:14:02 – Ça bouscule l'ordre établi.
00:14:03 – Bon, d'accord, mais oui, sur le fond, il a entièrement raison.
00:14:06 On pourrait même ajouter que les grands chefs de l'armée
00:14:09 ont immédiatement apporté leur soutien à Vladimir Poutine.
00:14:13 Chose qui n'est pas sue et qui même est niée aujourd'hui dans la presse occidentale,
00:14:19 c'est que Sourovikine a été un des premiers à soutenir Poutine.
00:14:22 Donc, il y a eu toute une tentative d'intoxication,
00:14:25 de dire "oui, oui, il y a une purge qui va se passer dans l'armée,
00:14:28 Sourovikine est arrêté".
00:14:30 Bon, c'est complètement faux.
00:14:31 – C'est celui qui a la tête de l'opération d'Ukraine.
00:14:34 – Tout à fait, il est à la tête des opérations réelles.
00:14:39 Il est sous le commandement de Grasimov,
00:14:42 ce qu'il supporte d'ailleurs pas très bien par moments,
00:14:45 il y a visiblement des frictions entre les deux hommes,
00:14:48 comme il y en a d'ailleurs souvent entre militaires de haut rang,
00:14:51 mais il a apporté tout de suite son soutien
00:14:54 et il est absolument faux de dire qu'il ait été arrêté.
00:14:58 Bon, tout ceci, c'est de la propagande pure et de la désinformation.
00:15:03 Donc oui, très clairement, Poutine est le gagnant.
00:15:09 Alors, qui l'aurait préféré que Yevgeny Prigojine ne fasse pas ça ?
00:15:17 Se calme, accepte.
00:15:19 Bon, et qu'à ce moment-là, il aurait probablement pu proposer à Prigojine d'autres choses.
00:15:26 Bien oui, c'est évident, il ne pensait pas qu'on irait jusqu'à ce type d'affrontement.
00:15:33 Mais puisqu'on y est allé, il a gagné et Prigojine a perdu, c'est très clair.
00:15:40 Et alors, surtout le point important auquel peu de gens ont pensé,
00:15:43 en faisant ça, Prigojine se met hors jeu politique en Russie.
00:15:48 Or, s'il y avait un créneau sur lequel il pouvait se positionner,
00:15:52 c'était celui du regroupement de la droite nationaliste contre Poutine en Russie même.
00:15:58 Alors ça, si je peux me permettre, on va faire une petite pause.
00:16:01 C'est très intéressant ce que vous dites parce qu'on a vu pendant très longtemps
00:16:04 les médias occidentaux parler des combattants de Wagner et de Prigojine
00:16:08 comme des brutes assoiffées de sang qui violaient les Ukrainiens.
00:16:12 Ils font la guerre, bien entendu, on n'est pas en train de dire que c'est des enfants de cœur.
00:16:15 Mais quand ils ont essayé de "renverser" ou d'aller discuter le pouvoir de Vladimir Poutine
00:16:20 et de la puissance qui leur était accordée,
00:16:23 certains les ont qualifiés de "freedom fighters".
00:16:27 – Oui, oui, oui.
00:16:30 – Donc de combattants pour la liberté.
00:16:32 C'est absolument incroyable parce que dans la réalité,
00:16:36 Prigojine c'est la branche dure de ce qu'on peut trouver au pouvoir en Russie.
00:16:41 – Tout à fait. Alors, il faut bien comprendre que pendant très longtemps,
00:16:46 je dirais la fraction dure, la fraction ultra-nationaliste de l'opinion,
00:16:54 elle était représentée par un homme, Gérinowski,
00:16:59 qui est mort d'ailleurs des suites de la Covid il y a maintenant un peu plus d'un an.
00:17:05 Et la mort de Gérinowski laisse un grand vide sur, si vous voulez, sur ce segment-là.
00:17:14 Aujourd'hui, celui qui était probablement le plus légitime
00:17:20 pour reprendre l'héritage de Gérinowski, c'était Prigojine.
00:17:26 Mais pour cela, il fallait qu'il fasse allégeance d'une certaine manière à Poutine
00:17:30 dans un domaine pour lui dire "bon d'accord, vous avez décidé
00:17:34 que Wagner devait être réintégré, je pense que vous faites une erreur, mais j'obéis".
00:17:40 Voilà, il n'est pas question que je m'y oppose.
00:17:44 Il n'a pas choisi ça. Alors, pourquoi ?
00:17:48 Peut-être qu'il trouvait que c'était inférieur à ce qu'il pouvait espérer.
00:17:52 Peut-être tout simplement qu'il a surréagi, si vous voulez.
00:17:56 Il faut quand même savoir que l'individualité des gens est une chose importante.
00:18:02 Mais le point qui est essentiel, c'est que désormais,
00:18:08 personne ne peut légitimement aspirer à reprendre la totalité de l'héritage de Gérinowski.
00:18:16 Et ça, d'une certaine manière, je dirais que ça enlève une épine du pied de Poutine.
00:18:24 Inversement, s'il y a des gens qui peuvent se réjouir de ce qui s'est passé,
00:18:30 ce sont les dirigeants du Parti Communiste de Russie,
00:18:34 qui eux, sont aussi sur un créneau très nationaliste,
00:18:38 mais avec une dimension sociale et de gauche.
00:18:44 Et là, ils peuvent tenter, et je ne serais pas étonné par ailleurs
00:18:48 qu'ils le fassent dans le cadre de la campagne électorale
00:18:52 qui s'ouvrira pour l'élection présidentielle de 2024,
00:18:56 mais je ne serais pas étonné qu'ils tentent une opération de séduction vers l'électorat de Gérinowski.
00:19:04 Parce qu'on sait, si vous voulez, par des études depuis maintenant plus de 25 ans,
00:19:08 on a vu que l'électorat du KPRF et l'électorat du LDPR,
00:19:12 donc le KPRF ce sont les communistes, le LDPR c'était Gérinowski,
00:19:16 ce sont des électorats qui sont assez poreux réciproquement.
00:19:22 – Surtout si le côté patriote a une fibre sociale.
00:19:26 – Tout à fait, et donc, comme personne,
00:19:30 et je ne vois pas quelqu'un qui est aujourd'hui la stature de Gérinowski,
00:19:36 ne pourra remplacer Gérinowski, en tous les cas pas dans les médias,
00:19:40 s'il y a des gens qui peuvent se réjouir de ce qui s'est passé, c'est bien les gens du KPRF.
00:19:44 – Donc si je résume pour l'échiquier franco-français,
00:19:48 on dirait que Mélenchon ferait plus du Georges Marchais que du Clémentine Autain.
00:19:52 – Oui tout à fait, si vous voulez, c'est même au-delà,
00:19:56 mais c'est ce qui serait intéressant, si vous voulez,
00:20:00 on serait dans une situation où un chef nationaliste,
00:20:04 qui avait donné des gages au Kremlin, il ne faut pas non plus se faire trop d'illusions,
00:20:10 meurt, il n'est pas remplacé, tout le monde regarde vers son héritage,
00:20:16 et celui qui était le plus légitime pour aspirer à cet héritage se discrédite.
00:20:22 Donc voilà, et ça ouvre un véritable espace supplémentaire au KPRF,
00:20:30 qui il faut le rappeler, est aujourd'hui la seule opposition structurée à Vladimir Poutine.
00:20:38 – On vous répondrait évidemment, il a mis Navalny en prison.
00:20:42 – Oui, mais Navalny n'a jamais représenté plus de 1 ou 2%.
00:20:46 Et s'il y a une opposition en Russie, alors on peut dire,
00:20:50 oui mais regardez cette opposition, elle a accepté de travailler avec Vladimir Poutine.
00:20:56 Je rappelle que dans la guerre de 14-18, il y avait bien eu l'Union sacrée,
00:21:00 et que d'une certaine manière, l'opposition parlementaire
00:21:04 avait fait bloc avec le gouvernement pour la conduite de la guerre.
00:21:08 Donc c'est la réelle opposition à Vladimir Poutine,
00:21:14 et je pense qu'ils ne sont pas dans une mauvaise position
00:21:18 à la suite de ce qui vient de se passer, et ils peuvent dire,
00:21:21 regardez où vous mène cette espèce de discours très ultra-nationaliste.
00:21:27 Bon, un discours ultra-nationaliste qui n'est pas enraciné dans des revendications sociales,
00:21:34 ça vous mène à l'aventure, ça mène à des ambitions qui sont purement des ambitions personnelles,
00:21:40 tirez un petit peu les leçons de ce qui s'est passé avec Prigogine.
00:21:45 Là, je pense qu'ils peuvent avoir un véritable créneau de développement.
00:21:50 – Et un discours, j'allais dire, anti-guerre en Ukraine, en Russie,
00:21:53 il a sa place sur l'échiquier politique,
00:21:55 où personne ne conteste l'intérêt de ce conflit,
00:21:59 la nécessité même, j'allais dire, de ce conflit ?
00:22:02 – Alors, il existe, si vous voulez, il n'a pas sa place politiquement
00:22:07 parce que le pouvoir russe, le gouvernement a établi des règles
00:22:12 qui sont extrêmement restrictives, mais on peut penser qu'il y a grosso modo…
00:22:17 – Ce qui n'est pas un cas isolé, soit dit en passant,
00:22:19 parce que même l'état d'urgence implique certaines règles pour la presse.
00:22:21 – Tout à fait, tout à fait. – J'entends de France.
00:22:24 – Voilà, et je dois dire, ce serait la même chose
00:22:27 si on regardait ce qui se passe dans la guerre de 14-18.
00:22:31 Toute une série de gens qui tenaient des propos pacifistes
00:22:35 ont dû s'exiler en Suisse.
00:22:37 Donc, il faut quand même rappeler cela.
00:22:41 Bon, oui, mais ça existe, ça doit représenter entre 15 et 20% de l'électorat,
00:22:46 classiquement, si vous voulez.
00:22:50 Même si le départ en exil, parce qu'on peut penser qu'il y a aujourd'hui
00:22:56 à peu près 500 000 Russes qui, l'année dernière, ont choisi de s'exiler.
00:23:03 Je ne parle pas des Russes qui vivaient à cheval entre l'étranger et la Russie.
00:23:08 – Oui, bien sûr, les convasculés.
00:23:10 – Mais des gens qui étaient vraiment bien insérés en Russie
00:23:13 et qui ont choisi de s'exiler.
00:23:15 Et la disparition de ces gens affaiblit d'autant ce courant,
00:23:21 je dirais qu'il serait plutôt pour dire
00:23:24 "non, non, il faut arrêter immédiatement la guerre", etc.
00:23:27 Ce qui est très significatif, c'est que quand on pose la question aux Russes,
00:23:33 les Russes disent "oui, il faudrait qu'on arrive à une paix",
00:23:36 ce qui est assez normal, hein, bon, "mais une paix à nos conditions".
00:23:42 Je crois qu'ils sont pratiquement 78% à avoir répondu ça.
00:23:47 Ça démontre en réalité…
00:23:49 – Après "nos conditions", j'imagine que chaque personne
00:23:51 ne met pas forcément les mêmes choses derrière.
00:23:53 – Non, si, c'était détaillé dans le sondage.
00:23:57 C'était garder les territoires qui ont été rattachés.
00:24:03 Alors, pour la Crimée, c'est massif, c'est 94%.
00:24:08 – Bon, la Crimée, elle était intégrée depuis 2014.
00:24:10 – Tout à fait.
00:24:12 Pour la République de Donetsk et la République de Lugansk,
00:24:15 qui maintenant sont devenues des oblastes de la Fédération de Russie,
00:24:19 c'est aussi très élevé, c'est autour de 80%.
00:24:22 C'est un petit peu moins élevé, autour de 60%.
00:24:25 – Pour les deux autres, Zaporizhia et Kersau.
00:24:27 – Voilà, pour les deux.
00:24:29 – Alors, si vous le voulez bien, Jacques Sapir,
00:24:31 on va passer au deuxième grand temps de cette émission,
00:24:33 on va parler économie.
00:24:34 On se rappelle de notre Bruno Le Maire national,
00:24:36 notre ministre de l'économie à nous qu'on aime tant,
00:24:39 parce qu'il nous fait beaucoup rire et écrit de merveilleux ouvrages,
00:24:42 comme vous avez pu le constater.
00:24:44 Il avait annoncé qu'il mettrait l'économie russe à genoux.
00:24:48 Dans la même lignée, l'Union Européenne a pris des trains de sanctions successifs.
00:24:52 Nous sommes aujourd'hui, je crois, au 11ème, il me semble ?
00:24:55 – 12ème.
00:24:56 – 12ème, j'en avais même oublié un, tellement il s'enchaîne.
00:24:59 Aujourd'hui, Jacques Sapir, que disent les chiffres sur l'économie russe ?
00:25:04 – Alors, très clairement, les chiffres actuels sont très bons.
00:25:09 Comment regarder ça de manière, avec un petit peu de recul ?
00:25:14 – Oui, parce qu'on va vous taxer d'être pro-russe, évidemment.
00:25:17 Il est très clair que les sanctions ont eu un effet réel au deuxième trimestre de l'année dernière.
00:25:28 Ça se voit d'ailleurs dans les chiffres, il y a une baisse de la production
00:25:33 de l'ordre de 3 à 5%, ça dépend des secteurs.
00:25:38 Bon, là, c'est tout à fait net.
00:25:40 – Et c'était quel type de sanctions qui avaient l'impact ?
00:25:42 – Alors, les sanctions qui ont le plus impacté, ce sont essentiellement
00:25:48 les sanctions qui concernaient la fourniture de matériel.
00:25:52 Là, oui, ça a eu un impact parce qu'il y a des entreprises russes
00:25:56 qui se sont trouvées sans fournisseurs de matériel,
00:26:00 qui ont dû soit faire avec la production nationale,
00:26:05 soit chercher de nouveaux fournisseurs, mais ces nouveaux fournisseurs,
00:26:08 par exemple la Chine, n'a pas nécessairement les mêmes standards que les fournisseurs.
00:26:15 Par exemple, c'est très clair dans l'automobile.
00:26:18 Si la production d'automobiles russes s'est tellement effondrée
00:26:23 à la suite des sanctions, c'est essentiellement ça.
00:26:26 Et pourquoi n'a-t-elle pas redémarré comme a redémarré le reste de l'industrie
00:26:31 dès le troisième et le quatrième trimestre ?
00:26:34 Tout simplement, c'est parce que vous ne pouvez pas mettre un moteur d'origine chinoise
00:26:40 dans une caisse qui a été conçue par Volkswagen ou par Renault.
00:26:45 Il faut redessiner l'ensemble du véhicule.
00:26:48 Alors, qu'est-ce que l'on constate depuis le début de cette année ?
00:26:52 C'est que, pour le coup, l'économie russe a retrouvé au premier trimestre
00:27:00 le niveau de production qui était le sien avant les sanctions.
00:27:06 – Les sanctions de la… les récentes, pas celles de 2014.
00:27:10 – Non, non, oui, les sanctions qui ont des prises depuis…
00:27:13 – Parce que c'est une vieille habitude maintenant, les sanctions.
00:27:15 – …depuis la fin février 2022.
00:27:17 Bon, là, on voit très bien que l'économie russe a retrouvé à peu près ce niveau
00:27:21 et depuis donc avril-mai, la production s'accélère.
00:27:27 Donc, elle est repartie en croissance absolue.
00:27:30 Donc, ce n'est pas simplement le fait d'avoir récupéré du choc.
00:27:34 Oui, ça a pris à peu près un an, hein.
00:27:37 Mais là, elle est repartie en croissance absolue.
00:27:41 Les chiffres pour le PIB du mois de mai, c'est 5,7 %,
00:27:47 croissance de 5,7 %, pour l'industrie, 7,1 %,
00:27:54 pour l'industrie manufacturière, 13 %.
00:27:58 – C'est énorme.
00:27:59 – Il y a vraiment une accélération de la production,
00:28:03 une accélération que l'on pouvait vérifier à travers deux indicateurs importants,
00:28:09 la consommation d'électricité en Russie.
00:28:12 Vous savez que l'électricité est essentiellement utilisée
00:28:15 dans le domaine industriel.
00:28:16 Bien sûr, bon, il y a les consommations des particuliers,
00:28:20 mais ça représente en réalité une proportion assez faible de l'électricité.
00:28:24 Ceux qui consomment de l'électricité, c'est essentiellement l'industrie.
00:28:27 – Ce qui permet de nuancer d'ailleurs les délires de sobriété énergétique.
00:28:30 – Tout à fait, c'est le même problème.
00:28:33 Et là, on voit que la consommation d'électricité avait retrouvé
00:28:38 à peu de choses près son niveau de décembre-janvier 2022,
00:28:45 donc avant les sanctions, au mois de décembre de l'année dernière.
00:28:51 Et là, on voit, elle continue d'augmenter.
00:28:54 Autre facteur très intéressant, l'emploi.
00:28:58 Et là, on voit que l'emploi s'est accru d'un million de personnes
00:29:04 de février 2022 à février 2023.
00:29:10 Et il continue d'augmenter.
00:29:13 Alors, ça veut dire une chose, ça veut dire que les entreprises
00:29:18 ont des perspectives d'expansion, elles embauchent.
00:29:21 Ça veut dire aussi autre chose, ça veut dire que la productivité du travail
00:29:25 a probablement un petit peu baissé.
00:29:27 Et ça, c'est très certainement l'effet des sanctions.
00:29:30 Alors, on voit qu'elle avait beaucoup baissé au mois d'avril-mai 2022,
00:29:35 c'est un moment où les sanctions ont eu l'effet maximal,
00:29:39 et qu'elle est en train de revenir progressivement au niveau d'avant les sanctions.
00:29:45 Ça pose maintenant un dernier problème.
00:29:49 Vous savez que le taux de chômage est au plus bas en Russie,
00:29:54 un plus bas historique.
00:29:56 – C'est 3,2%. – 3,2%, tout à fait.
00:29:59 Et quand on sait qu'il y a une partie du chômage,
00:30:01 qui est ce qu'on appelle le chômage incompressible.
00:30:03 Alors, qu'est-ce qu'on appelle le chômage incompressible ?
00:30:05 C'est exactement quelqu'un qui quitte son entreprise
00:30:10 parce qu'il vise une autre entreprise,
00:30:13 et qui pendant les quelques semaines ou les quelques mois,
00:30:16 il s'inscrit au chômage.
00:30:19 Donc, on ne pourra pas descendre en dessous de 1,8%, entre 1,5% et 2%.
00:30:26 – Donc, il y a encore un point à rogner.
00:30:28 – Il y a encore un point à rogner.
00:30:30 Si on est sur une hausse de la population employée
00:30:36 d'environ 100 000 personnes par mois,
00:30:40 le point sera rogné début 2024.
00:30:45 Donc, alors bien sûr on dit oui, mais il y a la population
00:30:50 des territoires qui ont été rattachés à la Russie.
00:30:53 C'est vrai, c'est vrai, mais il faut savoir que cette population,
00:30:57 elle travaille déjà, or, dans les résultats de la Russie,
00:31:00 les résultats de la Russie sont comptabilisés par le système statistique
00:31:05 sur le territoire de la Russie au 1er février 2022.
00:31:10 – Il n'y a pas les nouveaux territoires.
00:31:13 – Alors, ça c'est un point important.
00:31:16 Il y a les réfugiés ukrainiens en Russie,
00:31:19 parce qu'il faut savoir aussi qu'il y a beaucoup d'ukrainiens
00:31:22 qui ont quitté l'Ukraine, qui ne sont pas allés en Pologne,
00:31:25 qui ne sont pas allés à l'Ouest, ils sont allés en Russie.
00:31:28 – Et pas uniquement les habitants du Donbass.
00:31:30 – Absolument, et pas uniquement les habitants du Donbass.
00:31:32 Oui, on peut penser qu'une partie d'entre eux,
00:31:35 une partie d'entre eux peuvent travailler.
00:31:39 Évidemment pas les personnes âgées, etc.
00:31:42 mais une partie d'entre eux peuvent travailler.
00:31:44 Bien, sur le total, ça peut représenter encore
00:31:50 entre 500 000 et 800 000 personnes, 5 à 8 mois.
00:31:55 Ça donne à la Russie une marge de 5 à 8 mois.
00:31:59 Concrètement, fin 2024 ou début 2025,
00:32:04 la Russie va être à son maximum possible d'emplois.
00:32:10 Donc, qu'est-ce qui va se passer ?
00:32:12 Alors bien sûr, ils peuvent chercher à accroître la productivité,
00:32:17 ils vont faire appel à des machines, des machines chinoises, très bien.
00:32:22 Mais globalement, il va leur manquer des travailleurs.
00:32:25 Donc, la Russie va redévelopper une immigration importante.
00:32:32 En sachant qu'il y a déjà en Russie entre 7 et 10 millions d'immigrés,
00:32:38 qui viennent essentiellement d'Asie centrale,
00:32:40 et que l'on retrouve dans les statistiques,
00:32:43 parce que l'argent qu'ils renvoient dans leur pays d'origine
00:32:47 peut représenter jusqu'à 20% du PIB du pays d'origine.
00:32:51 Donc, c'est considérable, c'est tout à fait considérable.
00:32:54 Et donc, il va falloir se poser la question…
00:32:56 Ça veut dire que c'est bien une immigration de travail aussi ?
00:32:58 Ah, c'est une immigration purement de travail.
00:33:02 D'où vont pouvoir venir ces nouveaux travailleurs ?
00:33:05 Alors, oui, probablement encore sur l'Asie centrale,
00:33:08 mais compte tenu du nombre de gens issus d'Asie centrale
00:33:12 qui sont maintenant présents en Russie,
00:33:15 je ne pense pas qu'il y ait des capacités tellement importantes,
00:33:19 des réserves de main-d'œuvre tellement importantes.
00:33:22 Donc, on va probablement avoir des pays d'Asie
00:33:26 qui vont fournir du travail.
00:33:28 Et de ce point de vue-là, il y a quelque chose qui a attiré mon attention,
00:33:32 le fait que le chef du gouvernement russe,
00:33:36 M. Mishuchin, a été invité au Vietnam,
00:33:41 que Vladimir Poutine fera une visite officielle au Vietnam cet automne.
00:33:47 Pourquoi ?
00:33:49 Parce que le Vietnam, c'est actuellement 100 millions d'habitants
00:33:54 et c'est un chômage des jeunes extrêmement important.
00:33:59 Et il y avait une tradition du temps soviétique
00:34:04 de faire venir des travailleurs vietnamiens,
00:34:08 donc en Union soviétique,
00:34:10 je pense que c'est l'un des pays vers lesquels la Russie va se tourner
00:34:15 pour une immigration de travail.
00:34:17 – On a parlé beaucoup au début de cette crise du cours du rouble,
00:34:21 que l'on disait systématiquement "au plus bas",
00:34:23 le rouble n'a jamais été aussi bas, n'a jamais été aussi bas.
00:34:26 Aujourd'hui, qu'en est-il ?
00:34:27 Et surtout, qu'en est-il au regard de l'euro et de la santé du dollar ?
00:34:32 – Alors, c'est vrai que le rouble est tombé pendant 3 semaines.
00:34:36 Pendant 3 semaines, il est tombé,
00:34:37 puis les mesures qui ont été prises par le gouvernement et par la Banque centrale
00:34:41 ont commencé à faire leur effet,
00:34:42 et le rouble est monté au plus haut,
00:34:45 il a été à un moment donné à plus de 25% au-dessus de son niveau d'avant les sanctions.
00:34:53 Ce qui par ailleurs pose un problème,
00:34:56 parce que ça renchérit le prix des produits fabriqués en Russie.
00:35:01 Donc progressivement, la Banque centrale a commencé à assouplir son mécanisme
00:35:06 pour que le rouble redescende progressivement à son niveau d'avant les sanctions.
00:35:13 Sauf que, il faut aussi savoir qu'il y a eu plus d'inflation en Russie
00:35:22 qu'en moyenne dans les pays de l'Union européenne ou qu'aux États-Unis.
00:35:28 Bon, il y a eu un pic d'inflation très fort,
00:35:31 à un moment donné ils sont montés à 17% au mois de mai et au mois de juin de l'année dernière.
00:35:38 Aujourd'hui, ils sont vraiment retombés, ils sont entre 2,5 et 3,5%,
00:35:45 même si la Banque centrale craint, justement à cause de la tension sur le marché du travail,
00:35:50 que l'inflation reparte d'ici quelques mois.
00:35:54 Et donc, il faut défalquer des taux de change, au moment, si vous voulez, à l'avant-sanction,
00:36:05 l'impact évidemment de l'inflation pour les pays de la zone euro et de l'inflation en Russie.
00:36:11 Donc ce qui veut dire que ce qu'on appelle le taux de change réel,
00:36:16 autrement dit le taux de change corrigé de l'inflation,
00:36:19 est encore supérieur à ce qu'il était en février 2022.
00:36:27 Et donc, il y a encore une marge, si vous voulez, de dépréciation du rouble qui est tout à fait évidente.
00:36:34 Et je pense que la Banque centrale ne réagira qu'une fois que le taux de change réel
00:36:44 sera celui qui convient à l'économie russe et aussi si elle voit repartir l'inflation.
00:36:52 Et comme je vous dis, les dirigeants de la Banque centrale s'attendent à une poussée d'inflation
00:36:57 au deuxième semestre de cette année-là.
00:36:59 Et c'est donc pour cela que je pense que le rouble va continuer à se déprécier jusqu'au début de l'été
00:37:07 ou disons jusqu'au mois d'août, début septembre,
00:37:11 et qu'après la Banque centrale va à nouveau serrer la vis
00:37:15 parce que si l'inflation repart en Russie, il ne faut pas qu'elle puisse être en plus alimentée
00:37:22 par un phénomène d'inflation importée.
00:37:25 Donc ce sont ce type de choses.
00:37:27 Grosso modo, ça veut dire qu'il y a une politique monétaire relativement intelligente
00:37:32 qui est menée en Russie.
00:37:34 – Comme quoi c'est possible ?
00:37:36 – Voilà, oui, oui, c'est tout à fait possible.
00:37:39 Quand on a des gens compétents, ça ne pose aucun problème.
00:37:42 Et donc, voilà, je pense que le taux de change va continuer à baisser
00:37:48 parce qu'on n'a pas encore atteint le taux de change réel pour un mois, voire deux mois,
00:37:54 mais qu'après, il pourrait se stabiliser, voire repartir un petit peu à la hausse
00:38:00 dans une stratégie de lutte contre l'inflation.
00:38:03 – Alors si on s'en tient à la question de la guerre,
00:38:06 quel impact a-t-elle sur l'économie ?
00:38:09 Parce qu'on imagine que ça coûte de l'argent de faire la guerre,
00:38:12 on imagine certes que l'industrie de l'armement,
00:38:15 elle, forcément, fonctionne à plein régime.
00:38:18 Finalement, est-ce que, j'allais dire, la balance bénéfice-risque est positive,
00:38:23 négative pour la Russie ? Qu'en est-il ?
00:38:26 – Il faut comprendre que le gouvernement, Vladimir Poutine,
00:38:30 le Premier ministre, Monsieur Michel-Austin, etc.,
00:38:33 mènent une politique le beurre et les canons.
00:38:36 C'est-à-dire qu'ils ne veulent pas que les dépenses induites par la guerre
00:38:42 aient un impact sur la population.
00:38:45 Donc, ils maintiennent…
00:38:47 – C'est aussi pour garantir le soutien de la population, non ?
00:38:49 – Oui, tout à fait.
00:38:51 D'ailleurs, le salaire réel augmente, il augmente fortement depuis deux mois.
00:38:56 Il y a toute une série de mesures qui ont été prises pour augmenter les pensions.
00:38:59 Bon, quel est le coût de la guerre ?
00:39:02 Officiellement, c'est 3% du PIB.
00:39:05 – C'est très faible.
00:39:06 – C'est très faible, c'est effectivement très faible.
00:39:10 Est-ce que c'est la totalité du coût de la guerre ?
00:39:14 Ça c'est un problème, oui, bien sûr,
00:39:17 on a ce qu'il y a dans les données du ministère des Finances, etc.
00:39:21 Mais quand on se décide à faire monter, et ce qu'ont fait les Russes,
00:39:27 à faire monter la production de munitions de manière extrêmement importante,
00:39:31 quand on se décide de faire travailler des usines en 3, 8 et 7 jours sur 7,
00:39:39 ça a aussi un coût.
00:39:41 Et ce coût n'est peut-être pas directement visible dans les dépenses
00:39:47 du ministère de la Défense, du ministère de la Sécurité Intérieure, etc.
00:39:52 Donc, je pense que ce chiffre de 3% du PIB, c'est un minimum.
00:39:58 Et que l'effort de guerre est probablement au-delà.
00:40:02 Quel est l'impact sur l'industrie russe ?
00:40:07 Alors, vous voyez très clairement, la montée des productions militaires
00:40:12 a eu un impact positif.
00:40:14 Parce que vous produisez plus d'obus.
00:40:17 Actuellement, la Russie est sur un rythme annuel de production
00:40:23 qui est de 2 millions d'obus de 152 mm,
00:40:27 je ne parle pas pour les autres munitions,
00:40:29 mais qui est de 2 millions d'obus de 152 mm par an.
00:40:32 Alors que les États-Unis sont sur une production d'environ 500 000,
00:40:40 4 fois moins.
00:40:41 – La moitié, la 4 fois moins, pardon, 2 millions.
00:40:44 – Et que les autres pays de l'OTAN, agrégés, sont probablement autour de 400 000.
00:40:53 Donc, très clairement, l'industrie russe…
00:40:57 – Mais on ne parle que des obus, mais on ne peut pas dire
00:40:59 qu'on reprenne une supériorité sur le reste de l'armement.
00:41:02 – Tout à fait, mais très clairement, l'industrie russe, là, a pris de l'avance
00:41:07 par rapport aux industries des pays de l'OTAN.
00:41:11 Or, quand vous produisez des obus, il faut des produits chimiques.
00:41:16 La charge explosive, mais aussi ce qui propulse l'obus,
00:41:21 tout ça, c'est des produits chimiques.
00:41:23 Donc, ça développe votre industrie chimique.
00:41:26 Pour faire un obus, il faut de l'acier, il faut de la fonte, etc.
00:41:30 Donc, vous tirez un petit peu plus d'autres industries.
00:41:35 Et puis, si on sort des obus, qui sont quand même assez basiques,
00:41:38 et si on regarde la production de chars, d'avions de combat, d'hélicoptères, etc.
00:41:45 Tout ceci fait monter la production.
00:41:48 Ce qui est clair, c'est qu'aujourd'hui, il y a bien une montée des industries
00:41:55 qui sont à potentiel militaire.
00:41:58 Par exemple, l'industrie électronique et l'industrie des composants électriques
00:42:04 s'est accrue de 30% par rapport au début de l'année dernière.
00:42:10 – Mais est-ce qu'on ne peut pas redouter carrément un effet bulle, finalement ?
00:42:13 – Alors, un effet bulle, non, parce que ce n'est pas une bulle,
00:42:17 ce sont des choses réelles.
00:42:18 – Oui, mais quand la guerre n'existera plus, quand ça sera arrêté ?
00:42:21 – Alors, voilà, ça sera bien entendu le problème classique.
00:42:25 Une fois qu'on reviendra dans une situation de paix,
00:42:29 il y aura un problème de reconversion.
00:42:32 Alors, il faut quand même dire que la Russie, pour l'instant,
00:42:35 les Russes n'ont pas réellement converti des entreprises civiles.
00:42:39 Ils se contentent de faire tourner à plein régime les industries de défense,
00:42:45 les usines de défense.
00:42:47 Mais on ne peut pas exclure complètement qu'ils commencent à convertir
00:42:52 des usines civiles.
00:42:53 Oui, il faudra prévoir à ce moment-là la reconversion.
00:42:57 Mais surtout, ce qui est très intéressant, c'est qu'on voit que des productions
00:43:00 qui, elles, sont typiquement civiles, production de vêtements,
00:43:05 production alimentaire, montent aussi vite que le reste.
00:43:11 La production alimentaire monte sur un rythme de l'ordre de 15% par an.
00:43:17 La production de vêtements monte autour de 12% par an.
00:43:22 – Et comment on l'explique alors ? C'est parce qu'ils exportent davantage ?
00:43:25 – Non, c'est parce qu'ils remplacent des produits importés.
00:43:29 Et ça, c'est quelque chose d'extrêmement important.
00:43:32 Le mécanisme de substitution aux importations,
00:43:36 qui prend du temps quand il s'agit de substituer des équipements
00:43:41 pour l'industrie, mais qui est beaucoup plus rapide
00:43:46 dans le domaine de l'agroalimentaire, en plus appuyé sur une agriculture russe
00:43:51 qui est de plus en plus puissante, qui ne cesse de monter en puissance
00:43:55 depuis maintenant plusieurs années, ça ne date pas de hier.
00:43:58 La montée en puissance, elle date de 2015-2016.
00:44:02 – Accessoirement aussi un peu des sanctions avec la première partie de la guerre.
00:44:07 – Oui, tout à fait, mais aussi des contre-sanctions.
00:44:09 C'est-à-dire à partir du moment où la Russie a décidé
00:44:11 de ne plus importer de produits alimentaires,
00:44:14 c'est ce qui a ouvert un énorme marché.
00:44:17 Et concrètement, on voit que les effets de substitution
00:44:22 sont désormais très visibles dans le domaine des industries de consommation.
00:44:29 On commence à le voir dans les industries plus lourdes
00:44:33 et on commence surtout à voir le redémarrage
00:44:37 de certaines branches industrielles qui ont terminé le processus
00:44:41 d'adaptation à des nouveaux fournisseurs.
00:44:44 Prenons le cas de l'automobile.
00:44:47 L'industrie automobile est tombée au plus bas à 15 000 véhicules/mois.
00:44:53 15 000 véhicules/mois, c'est très faible.
00:44:56 Elle était remontée à 26 000 véhicules/mois en moyenne au premier trimestre.
00:45:03 Et là, elle vient de passer à 42 000.
00:45:06 Qu'est-ce que ça veut dire ?
00:45:07 Ça veut dire qu'il a fallu attendre pratiquement un an
00:45:10 pour que les usines soient rééquipées,
00:45:12 pour que les lignes de production correspondent à de nouveaux produits.
00:45:17 Ce rééquipement est en passe d'être terminé
00:45:21 et immédiatement, l'industrie automobile redémarre
00:45:25 et ça va très certainement porter encore plus le développement industriel
00:45:31 au moins pour les six prochains mois.
00:45:33 Donc, si vous voulez, les perspectives de court terme
00:45:38 sont de bonnes à très bonnes suivant les secteurs.
00:45:42 Mais il y a, et je le répète, un grand point d'interrogation.
00:45:46 Alors, pas six mois, pas un an,
00:45:49 mais un point d'interrogation à l'horizon fin 2024-2025,
00:45:54 c'est l'emploi.
00:45:55 Parce que là, si vous voulez, une économie qui travaille à plein régime,
00:46:00 à un moment donné, elle épuise ses ressources humaines.
00:46:06 – Alors, vous avez évoqué tout à l'heure la question otanienne
00:46:10 avec ces armes qui sont fournies
00:46:12 et donc une production qui est également repartie à la hausse.
00:46:18 On sait qu'il y a un sommet dans quelques temps à Vilnius,
00:46:21 sera discutée notamment l'adhésion de la Suède à l'OTAN.
00:46:25 On sait que Recep Tayyip Erdogan, le président turc,
00:46:28 joue finalement son veto sur cette question
00:46:31 et est en droit d'imposer plus ou moins ses désidératas à l'OTAN.
00:46:37 On a vu également qu'il n'a pas tardé à manifester son soutien
00:46:42 à l'égard de Vladimir Poutine lors de l'opération de Prigojin,
00:46:45 ce qui était très important.
00:46:47 François Asselineau le dit d'ailleurs dans sa vidéo,
00:46:49 qui était un peu le parallèle et, j'allais dire,
00:46:51 la récompense à Vladimir Poutine après le coup d'État
00:46:55 tenté sans doute avec un lien américain il y a quelques années.
00:47:00 Pour vous, comment voyez-vous ce sommet ?
00:47:04 Finalement, la Turquie va-t-elle devenir un arbitre incontournable
00:47:08 dans les mois qui viennent ?
00:47:09 Elle est déjà un arbitre incontournable, c'est déjà le cas.
00:47:13 Voilà un pays de l'OTAN qui n'applique pas les sanctions.
00:47:16 C'est quand même extrêmement important.
00:47:18 Un pays de l'OTAN qui a demandé son adhésion au BRICS.
00:47:22 Alors, je pense qu'il y aura des discussions,
00:47:24 ils ne vont pas rentrer comme ça au BRICS, mais voilà, c'est ça.
00:47:29 Non, non, c'est très clair qu'aujourd'hui, la Turquie est devenue un pays pivot,
00:47:37 un acteur clé de ce qui se passe et il faut un petit peu se décentrer.
00:47:44 Nous avons, nous en France et plus globalement en Allemagne, en Italie, etc.
00:47:48 Nous avons notre attention complètement polarisée par ce qui se passe en Ukraine.
00:47:53 Bon, il y a des raisons, c'est vrai, ce qui se passe est tout à fait dramatique,
00:47:56 des gens meurent des deux côtés, bon.
00:47:59 Mais quand vous regardez la presse indienne, la presse de Singapour,
00:48:08 la presse indonésienne en anglais, je ne parle pas d'Indonésien,
00:48:11 je vous le dis tout de suite, bon, la presse des pays arabes en anglais,
00:48:16 vous voyez que la guerre en Ukraine n'est qu'un élément
00:48:24 et pas nécessairement un élément tellement important
00:48:27 dans l'ensemble des problèmes mondiaux.
00:48:31 Et que beaucoup de pays qui n'approuvent pas nécessairement la position de la Russie,
00:48:39 mais considèrent d'abord que la Russie ne fait que ce que les autres pays occidentaux
00:48:45 ont fait dans d'autres cas, donc pourquoi prendre parti ?
00:48:50 Bon, que c'est une histoire entre occidentaux, donc on ne va pas s'en mêler.
00:48:55 – Donc c'est amusant de voir qu'ils intègrent totalement la Russie dans l'Occident alors ?
00:48:59 – Alors, pas totalement justement, mais voilà, votre histoire, débrouillez-vous-en,
00:49:06 nous ça ne nous concerne pas, par exemple la position des pays africains,
00:49:10 la position des pays africains dit "ce n'est pas notre problème".
00:49:14 – Alors certains veulent quand même tenter de faire avancer des accords de paix,
00:49:18 c'est aussi un jeu pour avancer sur la scène diplomatique.
00:49:20 – Mais bien sûr, l'Afrique du Sud, parce que l'Afrique du Sud a des relations
00:49:24 avec les pays occidentaux, comme elle a d'excellentes relations
00:49:27 avec la Russie et avec la Chine, et elle se dit "bah pourquoi pas,
00:49:31 ça serait un bon coup, nous sommes au centre".
00:49:34 Bon, malheureusement ça n'a pas réellement réussi,
00:49:37 et la manière dont les délégations africaines ont été traitées,
00:49:40 en particulier par les Polonais, est absolument scandaleuse.
00:49:44 Si vous voulez, les Polonais ne les ont pas laissés passer vers la Russie.
00:49:49 – Oui absolument.
00:49:50 – Donc on a cette situation dans le reste du monde,
00:49:54 alors le reste du monde qui est grosso modo entre les deux tiers
00:49:58 et les trois quarts de la population mondiale, c'est quand même extrêmement important,
00:50:03 et un pays comme la Turquie se dit, c'est visiblement son projet stratégique,
00:50:09 pourquoi ne pas jouer le rôle de pivot entre un monde occidental qui est en déclin,
00:50:17 un monde d'Asie qui est en pleine expansion,
00:50:23 le reste du monde qui se rapproche de l'Asie et qui se détourne progressivement
00:50:28 du monde occidental, pourquoi ne serions-nous pas l'intermédiaire entre les deux,
00:50:34 voire le pivot entre les deux ?
00:50:37 C'est un calcul qui est parfaitement rationnel,
00:50:42 quoi que je pense de M. Erdogan, là je dois dire qu'il joue sa carte,
00:50:48 et il joue sa carte de manière assez logique.
00:50:52 Et ça ce sont des choses que nous n'avons pas compris.
00:50:56 Par exemple, chaque fois que le président Macron
00:51:00 cherche à imposer le point de vue occidental à des pays du Grand Sud,
00:51:06 non seulement il n'est pas écouté, il n'est même pas entendu,
00:51:10 mais surtout il ne comprend pas qu'il est hors sujet.
00:51:14 Ce que demandent désormais les pays du Grand Sud,
00:51:18 c'est qu'est-ce que vous avez à nous proposer.
00:51:22 C'est pas "prenez parti pour un tel ou un tel",
00:51:26 non, c'est pas notre problème,
00:51:29 c'est qu'est-ce que vous avez à nous proposer concrètement pour notre développement.
00:51:35 Oui, les Chinois nous proposent des choses.
00:51:37 Oui, les Russes nous proposent des choses.
00:51:39 Oui, la structure des BRICS, elle propose une forme d'alliance
00:51:45 ou une forme d'ordre international,
00:51:48 non pas sur l'ensemble de la planète, mais sur une grande partie de la planète,
00:51:52 où nous pouvons peut-être retrouver nos intérêts.
00:51:56 La nouvelle banque de développement, oui c'était quelque chose d'intéressant.
00:51:59 Qu'est-ce que nous avons à dire à cela ?
00:52:02 Et l'exemple archétypal, c'est l'ambassadeur LGBT
00:52:09 qui a été envoyé au Cameroun.
00:52:11 Que vous dites à un pays, mais ça vous n'avez pas besoin d'envoyer un ambassadeur,
00:52:16 vous pouvez le faire passer par les canaux diplomatiques.
00:52:18 Vous avez des mesures qui sont des mesures discriminatoires.
00:52:24 Après, le problème c'est que c'est le problème de la souveraineté du pays.
00:52:28 On peut nous considérer que ce sont des mesures discriminatoires,
00:52:32 mais surtout, envoyer un ambassadeur spécifique sur ces questions-là,
00:52:37 alors qu'au Cameroun on attendait plutôt des propositions sur le développement,
00:52:44 c'est hors sujet.
00:52:46 – Tentative d'ingérence en plus ratée, qui est hors sujet.
00:52:49 – Oui, mais surtout, on est hors sujet, si vous voulez.
00:52:52 Et c'est ça qui est dramatique.
00:52:54 Après, on va dire, oui, la perte d'influence française en Afrique, c'est Wagner.
00:53:01 Alors, je ne dis pas que Wagner n'y contribue pas,
00:53:03 mais pourquoi Wagner peut-il y contribuer ?
00:53:05 Parce que nous sommes désormais systématiquement hors sujet.
00:53:10 Même chose pour les États-Unis.
00:53:12 Et tant qu'on ne comprendra pas ça,
00:53:15 et tant qu'on ne comprendra pas qu'il y a une demande massive en termes de développement,
00:53:22 et que les gens qui sont capables d'y répondre sont les gens qui pourront parler à ces pays,
00:53:27 et que pour l'instant les seuls qui le font, ce sont la Chine, l'Inde et la Russie,
00:53:32 eh bien, on n'avancera pas, ou même, on va continuer de reculer.
00:53:38 Et donc ça, c'est un point absolument essentiel dans le nouvel ordre mondial,
00:53:46 si tant est qu'il existe.
00:53:47 – Il ne faut pas l'écrire sur Youtube parce que sinon il y a une bannière.
00:53:50 – Oui, j'essaie, mais vous savez que le terme de nouvel ordre mondial,
00:53:54 c'est un terme qui est très ancien, qui vient des travaux de Grotius, Hubert de Grote,
00:54:01 qui est le premier à avoir pensé à un ordre mondial à travers la souveraineté des États,
00:54:06 et que c'est une notion de science politique parfaitement acceptable.
00:54:11 – Sauf pour l'algorithme bête et méchant.
00:54:14 Vous avez dit tout à l'heure, tous ces pays, les BRICS si je dois résumer,
00:54:18 s'interrogent sur que peut encore nous offrir l'Occident ?
00:54:22 Et moi, j'ai une réponse un peu provocatrice à vous fournir.
00:54:25 Je vais pour ce faire vous proposer d'écouter Christine Lagarde, la patronne de la BCE.
00:54:31 – Le changement climatique a un impact sur l'inflation.
00:54:34 Et l'inflation est la bête noire de tous les banquiers centraux,
00:54:38 qu'ils portent une veste verte ou non, parce qu'il affecte nos bilans.
00:54:42 Qu'il s'agisse d'un bilan de 3 ou de 7 milliards,
00:54:45 il est affecté par le changement climatique.
00:54:48 [Générique]
00:54:54 – Est-ce que finalement, ce qu'on propose maintenant au reste du monde,
00:54:57 ce n'est pas uniquement la lutte contre le changement climatique ?
00:55:01 – Alors, c'est un vrai sujet, si vous voulez.
00:55:05 Prenons le cas de l'Inde.
00:55:08 L'Inde se fournit pour à peu près 70% de son énergie en charbon.
00:55:16 Ça crée déjà des conditions atmosphériques extrêmement pénibles
00:55:22 dans toute une série de villes indiennes.
00:55:25 Pourquoi est-ce que les Chinois ont pris le tournant
00:55:28 de la question du changement climatique ?
00:55:30 Parce que leur population et la classe moyenne
00:55:32 n'arrivaient plus à respirer dans leur ville.
00:55:36 Donc, oui, c'est un vrai sujet, il ne faut pas le nier.
00:55:40 Par contre, comment est-ce qu'on l'aborde ?
00:55:43 Est-ce qu'on l'aborde en disant "oui, vous allez passer tout de suite
00:55:46 aux énergies renouvelables" ?
00:55:48 C'est impossible sur des demandes d'énergie du niveau de la Chine,
00:55:54 du niveau de l'Inde, du niveau de l'Indonésie, etc.
00:55:58 Donc, il faut mieux raisonner ça en disant
00:56:03 "commençons déjà à sortir progressivement
00:56:06 les formes d'énergie les plus polluantes, la tourbe,
00:56:11 bien utilisée par l'Allemagne."
00:56:14 - Oui, mais alors on ne dit rien, ce n'est pas grave.
00:56:16 - Le charbon. Et comment peut-on remplacer le charbon ?
00:56:20 Par le gaz. La première forme de remplacement du charbon,
00:56:25 c'est par le gaz. Et une centrale à eau et gaz,
00:56:28 bien sûr qu'elle pollue, mais elle pollue peut-être
00:56:30 trois fois moins que ce que pollue une centrale au charbon.
00:56:34 - Et là, ces derniers mois, on a plutôt remplacé le gaz par le charbon.
00:56:37 - Tout à fait. Et ça, c'est la conséquence des sanctions.
00:56:40 Donc, il y a un vrai sujet là-dessus.
00:56:44 Ce sujet, c'est un sujet qui est peut-être à 1 500 milliards
00:56:50 de dollars d'investissement, peut-être 2 000 milliards de dollars.
00:56:54 Ce sont des sorts colossales.
00:56:57 Alors évidemment, ça ne sera pas du jour au lendemain,
00:56:59 ce sont des investissements qui seront faits,
00:57:01 qui seront échelonnés sur 15 ans, 20 ans.
00:57:06 Quels sont les pays qui sont capables de fournir des solutions ?
00:57:11 Uniquement les pays qui prévoient des formes bancaires
00:57:17 adaptées à des prêts à long terme.
00:57:20 Parce que quand vous faites de l'investissement en infrastructure,
00:57:24 que ce soit en infrastructure énergétique,
00:57:26 que ce soit en infrastructure de transport, etc.,
00:57:29 il ne faut pas attendre un retour sur investissement en 3 ans ou en 5 ans.
00:57:33 - Bien sûr.
00:57:34 - Le retour sur investissement, il sera sur 15 ans, sur 20 ans.
00:57:37 Et d'ailleurs, une partie de ce retour sur investissement n'est pas calculable.
00:57:41 Comment vous intégrer dans le calcul le fait que vous diminuez
00:57:46 la présence des microparticules dans l'air pour une ville ?
00:57:51 - Ah oui, on pourrait faire ça en disant
00:57:54 "Oui, mais les microparticules impliquent toute une série de maladies,
00:57:58 prenons en compte le groupe".
00:58:00 C'est très compliqué.
00:58:01 - Très compliqué, bien sûr.
00:58:02 - C'est très compliqué.
00:58:03 Donc, en fait, il y a toute une partie du retour sur investissement
00:58:07 qui malheureusement est difficilement calculable.
00:58:10 Je ne dis pas que ce soit pas du tout calculable,
00:58:12 mais c'est très difficilement calculable.
00:58:14 Donc, il faut des institutions publiques pour assurer cet investissement.
00:58:21 D'où l'importance de la fameuse nouvelle banque de développement
00:58:24 qui a été montée par les BRICS.
00:58:27 Et pourquoi est-ce qu'il y a aujourd'hui 19 pays
00:58:31 dont 9 sont désormais identifiables ?
00:58:34 Les autres font de la négociation sans le dire.
00:58:38 Mais il y en a 9, qu'ils le disent, qui ont demandé d'adhérer aux BRICS.
00:58:42 C'est parce qu'ils voient là l'existence d'une dynamique importante.
00:58:47 Outre une dynamique géopolitique
00:58:49 qui permet une forme de réconciliation entre l'Iran et l'Arabie Saoudite,
00:58:55 quand même essentielle.
00:58:57 - Sous les gilles de la Chine ?
00:58:58 - Tout à fait.
00:58:59 C'est la fin de la guerre au Yémen qui se profile.
00:59:03 - Et accessoirement, c'est aussi le décollement de l'Arabie Saoudite des États-Unis.
00:59:08 - Tout à fait.
00:59:09 Alors, pas un décollement total.
00:59:11 - Bien sûr.
00:59:12 - Pas un décollement total.
00:59:13 - Mais sur la question des énergies, ça a un rôle très important.
00:59:16 - Tout à fait.
00:59:17 Donc là se jouent des changements qui sont absolument fondamentaux
00:59:23 et dont nous ne prenons pas la mesure.
00:59:27 - Mais justement, c'est là où je voulais en venir,
00:59:29 même si ma question au départ était un peu compliquée.
00:59:31 Avec Christine Lagarde, on partait de très loin.
00:59:33 Mais finalement, comment on peut expliquer l'attitude aujourd'hui,
00:59:37 par exemple, de l'Union Européenne, si on se concentre sur elle,
00:59:40 qui nous rebat les oreilles avec le réchauffement climatique
00:59:43 tout en acceptant que l'Allemagne rouvre des centrales à charbon,
00:59:47 qui regarde les mains dans le dos parce qu'elle ne peut rien faire,
00:59:51 la Chine qui rapproche l'Arabie Saoudite de l'Iran,
00:59:55 qui regarde finalement et qui applaudit des deux mains
00:59:58 les sanctions contre la Russie qui nous empêchent de faire venir des énergies,
01:00:03 du gaz notamment à bas coût, mais qu'il accepte par d'autres canaux plus chers.
01:00:08 – Il y a un moment, on a l'impression que tout est tellement surréaliste
01:00:13 qu'il doit y avoir une explication là-dedans.
01:00:15 – Si vous voulez, peut-être la meilleure explication, c'est la bêtise.
01:00:20 Rappelez-vous de ce qu'avait dit Michel Rocard,
01:00:23 qui avait dit "quand j'ai le choix entre un complot et la bêtise,
01:00:27 je choisis la bêtise parce qu'un complot, ça demande beaucoup de qualité
01:00:32 et beaucoup d'intelligence, la bêtise est beaucoup plus répandue".
01:00:35 – Je suis assez d'accord avec vous, mais je ne sais pas si vous connaissez,
01:00:37 sur internet, vous savez, il y a les challenges avec la bouteille d'eau.
01:00:40 Et même les plus nuls, au bout de 15 fois, quand ils lancent la bouteille d'eau,
01:00:43 il y a toujours un moment où la bouteille d'eau finit par tomber dans le bon sens.
01:00:46 Nous, on n'y arrive pas, jamais.
01:00:48 – Oui, parce qu'on n'a pas essayé 15 fois, peut-être qu'il nous faudra 50 ans
01:00:51 pour essayer 15 fois.
01:00:53 Non, si vous voulez, le fond du problème, c'est qu'aujourd'hui,
01:00:55 nous avons des hommes politiques, alors français, italien, allemand, etc.,
01:01:00 qui sont plus intéressés par la communication que par le fond des dossiers.
01:01:06 Ça se voit par exemple sur les mécanismes européens de prix de l'énergie.
01:01:12 Ces mécanismes étaient voulus par les Allemands, c'est eux qui ont fait pression,
01:01:16 pour attaquer l'un des rares avantages compétitifs qu'avait la France.
01:01:21 – Le nucléaire.
01:01:22 – On aurait dû résister.
01:01:25 Ils se sont beaucoup servis du rôle de leur fondation.
01:01:31 Là-dessus, il y a un papier qui a été fait par l'école de guerre économique
01:01:35 que je conseille à tout le monde de lire, parce qu'il établit, si vous voulez,
01:01:40 un constat de l'implication de toute une série de fondations allemandes
01:01:45 autour de cette question, qui est tout à fait remarquable.
01:01:50 Le véritable problème, c'est qu'il faudrait dire,
01:01:54 1) nous sommes dans une logique de mélange d'énergie.
01:02:00 Nous devons d'abord commencer à sortir les énergies les plus polluantes.
01:02:04 Donc, une énergie qui est polluante, mais qui l'est moins qu'une autre,
01:02:08 peut-être à un moment donné intéressante.
01:02:11 Le gaz, le nucléaire, alors bien sûr, le nucléaire n'est pas parfait,
01:02:16 mais le nucléaire c'est mieux que du charbon et que de la tourbe.
01:02:23 C'est même mieux que du gaz, c'est même mieux que du pétrole.
01:02:26 Donc, il faut sortir de l'idée "nous allons faire le mieux" pour dire non.
01:02:35 Nous allons faire au mieux par rapport au reste.
01:02:40 Autrement dit, oui on sera peut-être…
01:02:42 – Petit à petit de moins en moins pire.
01:02:44 – Oui, on va aller ainsi dans cette direction.
01:02:47 Et ça c'est un raisonnement qui est pourtant un raisonnement technique,
01:02:51 un raisonnement de bon sens, mais qui ne parle pas à l'émotion des gens.
01:02:57 Si vous dites oui, on va améliorer les choses progressivement,
01:03:01 et si vous avez à côté de ça une autre personne qui leur dit non, non, non,
01:03:05 le progressif, moi ce que je vous propose c'est d'aller immédiatement
01:03:09 à quelque chose qui soit parfait, où vous aurez toute l'énergie que vous voulez,
01:03:13 ça ne coûtera pas cher et ça ne polluera pas.
01:03:16 – Mais ça n'existe pas.
01:03:17 – Voilà, et le problème c'est que c'est cette position
01:03:21 qui est une position typiquement émotionnelle,
01:03:24 qui parce que nous sommes dans un monde où désormais les hommes politiques
01:03:28 font plus de communication que de politique,
01:03:31 qui a pris d'une certaine manière le pouvoir sur les techniciens
01:03:36 et les gens qui raisonnent.
01:03:39 Et là on voit, là encore on voit une divergence majeure entre le monde occidental,
01:03:46 alors même si cette espèce de prise en main par la communication
01:03:53 est peut-être moins importante aux États-Unis qu'elle l'est dans l'Union européenne,
01:03:57 l'Union européenne est un espèce de cas d'école de ce point de vue-là,
01:04:00 ça ne fonctionne pas en Chine, ça ne fonctionne pas en Inde,
01:04:04 ça ne fonctionne pas en Indonésie, ça ne fonctionne pas au Nigeria,
01:04:09 ça ne fonctionne pas en République d'Afrique du Sud, pourquoi ?
01:04:14 Parce que les gens là sont face à des vrais problèmes et qui disent,
01:04:18 bon on ne va pas faire de la communication, on va chercher…
01:04:20 – Et ils veulent des gens qui vont régler les vraies problèmes.
01:04:22 – Voilà, et ils veulent des gens qui apportent des solutions concrètes,
01:04:26 directement utilisables et pas des gens qui vont leur parler de,
01:04:30 oui mais si on peut faire des super éoliennes…
01:04:34 – Pendant ses printemps.
01:04:35 – Voilà, il faut être dans le concret, et ça c'est une…
01:04:40 enfin il y a une forme de retour à la réalité qui est absolument impérative
01:04:47 aujourd'hui dans les pays occidentaux et dans les pays de l'Union européenne,
01:04:52 tant qu'on restera dans le domaine de la communication,
01:04:55 si vous voulez, il y a une image qui décrit très bien ça,
01:05:00 c'est une image de dessin animé, dans le dessin animé,
01:05:03 très souvent vous avez un personnage qui court, qui court,
01:05:06 qui arrive au bord d'une falaise et il continue de courir,
01:05:10 puis à un moment donné il regarde, il voit qu'il court dans le vide
01:05:13 et c'est à ce moment-là seulement où il tombe,
01:05:15 alors ça porte un nom en économie, ça s'appelle la bootstrap économie,
01:05:18 c'est le fait de tirer sur ses bottes pour pouvoir décoller.
01:05:24 Nous sommes aujourd'hui non pas dans une bootstrap économie,
01:05:28 nous sommes aujourd'hui dans une bootstrap politique,
01:05:31 autrement dit une politique de l'illusion,
01:05:35 et le plus vite nous reviendrons à la réalité, le mieux savoir.
01:05:39 – Eh bien je vous remercie beaucoup Jacques Sapir,
01:05:41 vous me fournissez une parfaite conclusion pour cette émission,
01:05:44 je vous remercie d'être venu jusque nous,
01:05:46 je rappelle à nos téléspectateurs que vous pouvez trouver
01:05:49 de nombreux ouvrages de Jacques Sapir sur la boutique de TVL,
01:05:52 sur TVL.fr évidemment, et puis bien sûr je vous rappelle aussi,
01:05:56 si vous ne l'avez pas encore fait, que je compte sur vous
01:05:59 pour partager cette émission, pour la commenter,
01:06:01 et puis bien entendu pour cliquer sur ce fameux pouce en l'air,
01:06:03 parce que c'est très important, même si ça vous semble dérisoire,
01:06:07 c'est ce qui fait notre succès.
01:06:09 Alors je vous le répète pour cela, toutes les semaines,
01:06:11 et vous l'aurez jusqu'à la fin de l'année qui approche d'ailleurs.
01:06:14 En attendant chers amis de vous retrouver la semaine prochaine,
01:06:16 portez-vous bien, à bientôt.
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