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00:00 Derrière moi, la cathédrale et le Grand Théâtre.
00:02 Juste en face, c'est Saint-Martin.
00:03 Alors où sommes-nous ?
00:04 Eh bien, c'est ce que vous allez découvrir aujourd'hui dans "Rencontre en Terre Inconnue".
00:07 En tout cas, c'est un lieu qui fête ses 20 ans.
00:09 Aujourd'hui dans "Rencontre en Terre Inconnue", un anniversaire, 20 ans.
00:29 Celui qui fête ce bel âge, c'est le Théâtre Olympia.
00:32 Vous connaissez ?
00:33 C'est le Centre Dramatique National de Tours, situé rue de Lucé.
00:37 À la direction du théâtre depuis 10 ans, le metteur en scène et comédien Jacques Vincé.
00:44 Il a notamment travaillé avec Patrice Chéreau, Bernard Sobel et Nicole Garcia.
00:48 Jacques Vincé, je suis très contente d'être ici.
00:52 Ça faisait longtemps que je n'étais pas venue au Théâtre Olympia.
00:55 Oui, c'est dommage qu'on puisse dire quand même aux gens qui nous regardent,
00:58 c'est un centre dramatique.
01:00 Moi, quand on me dit dramatique, je sens la fin du monde, la mort.
01:04 On joue quoi ici ?
01:05 Alors, c'est un centre dramatique national même.
01:08 Donc c'est encore plus...
01:09 Mais en fait, c'est très simple.
01:11 Centre dramatique national, tout simplement, c'est parce qu'il y a des centres chorégraphiques nationaux,
01:14 il y a des centres lyriques.
01:16 Donc c'est... Voilà.
01:17 Mais maintenant, on sait que dans les centres dramatiques,
01:19 d'abord, on fait du comique, aussi.
01:21 Mais aussi du vidéographique, du chorégraphique.
01:24 Les choses se mélangent heureusement entre les différentes disciplines.
01:27 Les centres dramatiques nationaux, c'est parce que c'est un réseau de 38 lieux labellisés par l'État
01:34 qui ont la particularité d'être dirigés par des artistes.
01:37 Donc 38 lieux comme celui-là, en France,
01:41 qui sont des théâtres où on joue de tout.
01:45 Pas que des larmes.
01:47 Pas que des larmes.
01:47 Pas que la mort.
01:48 Mais non, bien sûr que non.
01:49 Mais la mort, la vie, on sait que c'est la friction de tout ça
01:54 qui fait parfois des choses très drôles, parfois des choses tragiques.
01:57 Mais voilà, le drame, c'est la comédie et la tragédie.
02:02 - Vous êtes en pleine répétition, on va remonter quand même la pause
02:04 et on va pas vous faire comme ça, attendre.
02:06 Il y a du travail.
02:07 Quand vous êtes arrivés, vous avez donné un spectacle.
02:10 Ça se passait dans un monde où il y a un rire un peu mécanique.
02:13 Et puis il y a ce prince dans ce royaume qui va dire "moi, je vais épouser Yvonne".
02:17 Yvonne, elle parle pas.
02:18 Elle rigole pas.
02:19 Elle est vraiment pas comme les autres.
02:21 L'idée, c'était quand même de faire réagir un peu et de créer quand même une petite gêne.
02:25 C'est ça ?
02:26 - Mais oui, en fait, le théâtre, très souvent,
02:29 joue en miroir de ce que nous sommes et dont nous n'avons pas forcément conscience.
02:34 Donc, c'est jouer sur, effectivement, comme vous dites, ces grincements,
02:37 ces révélations de réalité qui nous environnent,
02:41 dans lesquelles souvent on est immergé et qui là, émergent sur une scène de théâtre.
02:46 Et c'est parfois horriblement drôle.
02:48 Et c'est souvent d'ailleurs ça, l'enjeu.
02:51 - C'était...
02:52 - Toute la profondeur des choses.
02:54 - Mais regardez-la !
02:56 Elle est outrée en plus.
03:00 Oh ! Oh, voilà la blague de la haine !
03:04 - Mon enfant,
03:08 désormais,
03:11 nous sommes tes parents.
03:14 - Non mais attends.
03:16 Regarde, Ciri.
03:19 On peut tout se permettre avec elle.
03:21 - Tout ?
03:22 - C'est du moxing joke !
03:24 - Encore une petite poire.
03:26 Nous respectons tes sentiments.
03:32 Reconnais-le.
03:33 - À toi, Léna.
03:35 - Avec les accords dits.
03:41 - Je joue mon rôle.
03:45 - Oh !
03:46 - Merveilleux, sensationnel !
03:50 Comment faites-vous ?
03:51 - Et ça s'appelait Yvonne, princesse de Bourgogne.
03:54 Depuis, il y a eu énormément de créations.
03:56 Ça fait 10 ans que vous avez les clés de la maison.
03:58 Et puis là, bientôt, ça va s'arrêter, vous partez.
04:00 - Encore un petit peu, encore quelques mois, jusqu'à la fin de l'année.
04:03 Mais effectivement, c'est la fin d'un cycle.
04:05 Un très beau cycle qui s'achève.
04:07 Et d'autres nouvelles aventures qui vont s'ouvrir, arriver.
04:12 - Souvenez-vous, rue de Lucé, l'Olympia était un cinéma.
04:15 Le site a été retenu pour construire un nouveau bâtiment
04:18 avec une immense façade de verre inaugurée en 2003.
04:21 La salle dispose aujourd'hui de 427 places.
04:24 Cet équipement culturel métropolitain
04:27 constitue un outil majeur de diffusion et de création.
04:30 Il existe 38 centres de cette envergure en France.
04:33 - Évidemment, c'est un équipement qui est public, c'est ça ?
04:36 - Un équipement d'intérêt métropolitain.
04:38 Donc plus que jamais, oui, en effet, un équipement qui appartient à la métropole
04:41 et à la disposition de nos amis les artistes.
04:43 - Celui-ci vous tient particulièrement à cœur
04:46 parce que j'allais dire, on n'est pas à Paris, d'accord,
04:49 mais on a quand même une scène nationale, c'est ça ?
04:52 - Nationale depuis 2017, c'est bien ça, cher Jacques ?
04:55 - Absolument.
04:56 - Donc grâce au travail, entre autres, de Jacques,
04:58 qui a su faire preuve d'invention
05:01 et aussi d'interpeller un peu le public,
05:03 il a su aussi rajeunir un peu le public
05:05 puisque les moins de 30 ans qui d'habitude ne poussaient pas les portes
05:08 de cet équipement métropolitain,
05:10 ils ont fait des résultats, ils y viennent
05:12 parce que Jacques Vincet avec ses équipes ont su les interpeller
05:15 et c'est toute la magie aussi de la culture parfois,
05:17 de faire venir des gens qui n'ont pas l'habitude de venir.
05:19 - Ça c'est sûr, on en reparlera tout à l'heure avec Léa Toto
05:22 qui est en charge des publics, parce que des publics il y en a plusieurs ici.
05:25 Moi quand j'ai préparé cette émission, on m'a dit
05:27 "Ah Jacques Vincet, il y a ce coup de maître,
05:29 c'est la pièce, en tout cas le spectacle
05:33 qui s'appelait "Ount" avec une soprano
05:35 que tout le monde connaît, Nathalie Dessé.
05:37 Est-ce que vous êtes d'accord quand on vous dit
05:39 que c'est vraiment votre patte ce spectacle-là ?
05:43 - Oui, c'est une patte, c'est-à-dire que c'est une rencontre
05:47 entre un texte, une interprète, effectivement Nathalie Dessé,
05:51 dont c'était les premiers pas sur une scène de théâtre
05:54 et non pas une scène lyrique,
05:56 pour un texte dramatique mais aussi drôle
05:59 pour revenir à notre début de conversation.
06:01 Mais en fait, un spectacle c'est une cristallisation
06:06 d'un travail d'équipe, donc un metteur en scène
06:09 évidemment met une équipe sur le plateau,
06:11 acteur, actrice, mais aussi les collaborateurs.
06:14 Et en l'occurrence, ce spectacle avait un dispositif
06:16 scénographique qui était fait de 500 kilos de glace.
06:18 - Une cathédrale.
06:20 - Une cathédrale de glace, un lustre de glace
06:22 qui fondait au fil de la représentation
06:24 tout autour de Nathalie et qui s'effondrait
06:26 sur le plateau au fur et à mesure.
06:28 Donc c'est vrai qu'il y avait quelque chose
06:30 d'un peu magique et qui en tout cas a beaucoup marqué
06:32 les esprits et je pensais que...
06:34 - Je me souviens en tout cas, il y avait même
06:36 des congélateurs dans les coulisses.
06:38 Est-ce qu'à chaque fois au théâtre ici,
06:40 ce sont des textes qui viennent de votre imagination
06:43 ou alors on reprend des oeuvres existantes ?
06:45 - Moi c'est vrai que je travaille à partir d'un poète,
06:49 on peut dire ça comme ça, qu'il soit classique
06:52 ou qu'il soit contemporain. Là en l'occurrence,
06:54 je répète un spectacle qui est pile à la frontière
06:56 des deux puisque "Quartette" est un texte écrit
06:59 à la fin du XXème siècle à partir des liaisons
07:01 dangereuses écrite par Laclos à la fin du XVIIIème.
07:04 Donc voilà, c'est complètement transversal
07:07 mais j'ai besoin en fait de cette matière
07:10 qui me fait rêver et qui suscite un désir,
07:15 comme je disais tout à l'heure, de rassembler
07:17 une équipe autour de ce matériau source radioactive.
07:30 Direction la salle de spectacle,
07:32 ou plutôt les coulisses du théâtre.
07:34 On y retrouve Laurent, le directeur technique
07:36 du Centre Dramatique National.
07:38 - Ça c'est le maquillage des comédiens
07:40 qui sont partis déjeuner.
07:42 Laurent, je suis hyper contente, moi j'adore le côté coulisses
07:44 et là on y est vraiment, le maquillage,
07:47 on a tous les costumes qui sont là.
07:49 Derrière le rideau, c'est un spectacle
07:51 derrière le spectacle, c'est ça ?
07:53 - C'est un petit peu un spectacle derrière le spectacle,
07:55 c'est-à-dire que tout le monde est en attente,
07:57 pour aller jouer leur partition,
08:00 ou les techniciens, pareil, pour intervenir
08:03 sur un changement de décor, sur un changement de lumière,
08:06 enfin voilà, équipés en son,
08:08 donc c'est un spectacle, c'est vraiment les coulisses,
08:10 mais c'est très actif derrière.
08:12 - Oui, j'imagine que vous êtes 8 en fait,
08:14 et vous, vous êtes le patron, directeur technique.
08:16 On va aller voir ce qui se passe de l'autre côté,
08:19 parce qu'évidemment, ce que nous on voit
08:21 quand on est grand public, c'est ici,
08:24 devant le rideau, salle de combien de fauteuil ?
08:28 C'est quoi la jauge ?
08:29 - Nous sommes sur 425 places.
08:31 - Très bien, et donc vous nous avez réservé
08:33 un joli petit trône, alors on ne va pas s'asseoir dessus,
08:36 parce que c'est vraiment réservé aux comédiens.
08:38 Ils ont le droit de tout demander, les comédiens,
08:40 parce que j'ai l'impression quand même que
08:42 dans ce centre dramatique, toutes les folies sont autorisées.
08:45 C'est vous un peu l'arbitre ?
08:47 - En partie, pas que, puisqu'il n'y a pas que la technique non plus,
08:51 mais effectivement, ils ont le droit de tout demander.
08:53 Après, j'essaie de répondre autant que possible,
08:56 mais on est souvent obligé d'adapter les demandes.
08:59 - Quel est le truc le plus dingue ?
09:01 On a vu avec Jacques-Vincé Hount,
09:03 cette pièce dans laquelle il y a 25 blocs de glace,
09:06 qui goûtent à...
09:08 - Bien plus.
09:09 - Bien plus ?
09:10 - Bien plus, donc ça, c'était assez dingue
09:12 dans la logistique de cette glace, pour le coup.
09:14 Après, effectivement,
09:17 dès qu'on utilise des matières qui envahissent un peu le plateau,
09:21 c'est là où ça devient un peu plus compliqué en gestion.
09:24 - Mais magique pour les spectateurs.
09:26 - J'espère, je le pense, oui.
09:28 - Vous êtes là depuis le début, en tout cas, Laurent.
09:31 C'est ça ?
09:32 - Je suis à ce poste depuis 2000.
09:35 - Alors, on a dit tout à l'heure, tout est pratiquement possible.
09:50 Techniquement parlant.
09:52 En même temps, parfois, il faut un peu d'imagination,
09:54 voire un peu de bricolage, c'est ça ?
09:56 - C'est ça, c'est qu'on est...
09:58 - Ah bon, vous grattez même la tête, quand on voit ça.
10:00 - Vous m'amenez le stress, là, tout d'un coup.
10:03 Non, pour le coup, on travaille aussi bien avec des ordinateurs,
10:07 sans parler de la marque, mais on travaille avec des ordinateurs,
10:10 la console lumière, etc.
10:11 Tout est numérique, informatisé, etc.
10:14 Et on a au plateau un marteau, des clous, une visseuse.
10:18 C'est un mélange de techniques ancestrales et...
10:23 - Et de géo-trouve-tout.
10:24 - Et de géo-trouve-tout, aussi bien en lumière qu'en son,
10:28 qu'en plateau, en décor, effectivement.
10:30 Il faut essayer de répondre aux désirs des artistes.
10:34 Et voilà.
10:37 - Nous jurons de restituer l'oeuvre avec fidélité,
10:39 l'ayant apprise avec respect et dans la dignité pour la restituer
10:42 dorénavant avec ferveur à l'envers comme à l'endroit,
10:45 sans céder à la tentation d'en trahir le contenu
10:47 par des émotions qui me sont personnelles
10:49 et me dispensent de peser chaque mot dans ma bouche,
10:51 ni d'enforcer le sens par l'excès de mes intentions...
10:55 - Le Théâtre Olympia, le Théo pour les intimes,
10:58 propose mille et une portes d'entrée.
11:00 En effet, il n'y a pas que les spectacles pour les abonnés.
11:03 L'équipe travaille avec les collégiens, les lycéens et les étudiants.
11:07 - L'éducation artistique et culturelle, c'est un vrai pari pour
11:10 Tour Métropole-Vla de Loire, aussi que l'ensemble des collectivités locales,
11:13 comme le conseil départemental, aussi je sais que la ville de Tourille
11:16 est très attachée. Donc on continuera en effet à soutenir
11:19 ces dispositifs qui sont aussi soutenus par le ministère de la Culture,
11:21 il faut quand même le rappeler.
11:22 - Et puis vous parliez des jeunes, alors vous les jeunes,
11:25 vous aimez les faire vivre le théâtre,
11:28 et j'allais dire vous les héberger, vous les faites travailler.
11:31 Ça c'est par exemple le Festival Ouet entre autres.
11:34 Ça aussi c'est votre touche finalement, d'abord amener les jeunes comédiens.
11:38 - Et pour être vraiment très honnête, c'est un héritage,
11:42 j'ai hérité en arrivant ici du travail de mon prédécesseur,
11:45 Gilles Bouillon, qui avait mis en place dans ce centre dramatique
11:49 une troupe permanente de cinq acteurs, actrices qui sortent des écoles.
11:53 - C'est rare ce type de dispositif ?
11:55 - C'est exceptionnel. Il y a quatre tours, au centre dramatique de Tours,
11:58 qui a ce dispositif. Donc il y a une troupe provisoire,
12:01 c'est presque un oxymore, mais ils sont là pour deux ans,
12:04 puis après il y en a d'autres qui arrivent.
12:06 Donc il y a tout le temps des jeunes qui traversent cette maison,
12:09 des artistes jeunes. Et du coup, c'est vrai que je me suis emparé
12:12 de ce dispositif en me disant comment on peut au mieux
12:15 à la fois les faire profiter de cet outil formidable pour eux,
12:18 pour grandir dans leur parcours d'artistes,
12:21 mais aussi en faire profiter le public, les spectateurs.
12:24 Vous avez raison de dire que le public est divers,
12:27 et les jeunes, dès leur plus jeune âge.
12:29 Là, je leur ai confié effectivement la responsabilité d'un festival
12:32 qu'on a appelé le WET, qui est un festival de jeunes créations.
12:35 Et je me suis dit, il y a des jeunes créateurs dans la maison,
12:38 confions-leur la programmation.
12:41 (Musique)
13:00 - Ça fait peur, ça, de confier les clés aux jeunes ou pas ?
13:03 - C'est toujours un risque, mais en même temps, comme je dis,
13:06 c'est une conduite accompagnée. Je leur ai donné les clés du camion,
13:09 mais on ne les laisse pas tout seuls sur l'autoroute.
13:12 Évidemment, il y a une expérience, une expertise dont on leur fait profiter,
13:15 mais l'enjeu, c'est de prendre le risque qu'effectivement, année après année,
13:18 eux proposent ce qui leur semble important dans ce qui émerge
13:21 parmi leurs congénères, leur génération, de plus important.
13:25 - Vous piochez des idées ? Vous leur piquez des idées de temps en temps ?
13:28 - Bien sûr, je ne cesse de leur piquer des idées. J'espère qu'ils me piquent aussi des idées.
13:31 - C'est au courant ? - Non, mais c'est ça la richesse,
13:34 évidemment, dans des écarts de génération, c'est qu'elles,
13:37 comment s'alimentent les uns les autres, et c'est ça tout mon bonheur
13:41 et mon plaisir de directeur que de croiser, de travailler
13:46 avec des artistes d'autres générations.
13:48 [Musique]