Vendredi 26 mai 2023, BE SMART reçoit Christiane Bertoncini (DG, Maison Thiriet)
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00:00 On poursuit cette émission en compagnie d'une entreprise familiale française spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de produits alimentaires surgelés.
00:14 C'est une marque qui vient de fêter ses 120 ans. J'accueille sur ce plateau Christiane Bertoncini. Bonjour.
00:19 Bonjour.
00:20 Vous êtes la directrice générale de Maison Thirier. Alors je le disais, c'est une maison qui a plus d'un siècle, une entreprise familiale.
00:26 Quelle est son histoire exactement ? Parce qu'on ne la connaît pas vraiment finalement.
00:29 Alors effectivement, cette maison a plus de 120 ans. Elle a été créée en 1902 par le grand-père de monsieur Claude Thirier qui est actuellement président encore actif de l'entreprise.
00:37 C'est une entreprise qui a toujours développé tout son savoir-faire en France à travers le surgelé mais plus anciennement à travers une boulangerie familiale qui est basée à Éloa dans les Vosges.
00:46 Et donc qui a toujours employé tous ses salariés en France, qui paye 100% de ses impôts en France et qui a vraiment une volonté de développer la souveraineté française alimentaire.
00:55 Je m'explique, c'est-à-dire que plus de 85% de nos produits sont français d'origine France et 100% globalement de toutes nos matières premières fabriquées dans nos ateliers sont d'origine France.
01:05 Donc on a vraiment un ancrage français local très fort.
01:08 Alors je disais en préparant cette interview que vous êtes une enseigne qui est complètement intégrée de la fabrication à la logistique en passant aussi par la livraison à domicile et en magasin.
01:17 Pourquoi cette volonté de maîtriser comme ça toute la chaîne ?
01:20 Écoutez, je crois qu'on est toujours meilleur quand on maîtrise son process de fabrication.
01:24 Donc effectivement on est totalement intégrés à la fois sur nos plateformes logistiques qui sont des plateformes propres à la maison terrier, nos outils de fabrication.
01:31 Nous avons trois outils de fabrication. Nous fumons notre saumon, nous fabriquons nos glaces artisanales, nos viennoiseries, nos pâtisseries.
01:39 Prochainement nous allons brasser nos bières artisanales. Donc on a vraiment cet ADN de fabriquer.
01:43 Mais la bière, alors attendez, stop stop, je vous arrête, la bière ce n'est pas un produit surgelé ?
01:46 Oui, alors on a développé une cinquantaine, une soixantaine de références qui sont complémentaires à l'activité surgelée.
01:53 Et effectivement on a un ADN extrêmement fort sur la fabrication.
01:57 Mais je pense que la passion de la filière elle est là, c'est-à-dire cette création de valeur,
02:01 elle est beaucoup plus importante quand on maîtrise toute la chaîne de valeur que quand on se contente de distribuer des produits.
02:06 Vous voyez un peu comme un artisan en fait ?
02:09 Alors juridiquement on ne peut pas l'exprimer mais on est complètement des artisans.
02:12 Si vous étiez amené à visiter nos différents ateliers, vous verriez qu'on fabrique de façon très artisanale.
02:17 Nos gâteaux sont pochés à la main, les seaux sont déposés à la main.
02:21 Donc il y a vraiment une culture de savoir-faire qui est extrêmement, extrêmement forte et marquée et qu'on souhaite vraiment préserver.
02:27 J'entends que ce marché des surgelés aujourd'hui est beaucoup challengé par l'innovation.
02:34 Parce qu'effectivement pour aller appâter le client, lui faire changer parfois ses habitudes alimentaires, il faut sans cesse renouveler les recettes.
02:40 Comment est-ce que vous travaillez sur ces sujets-là ?
02:43 Alors écoutez, on a cette volonté d'incarner l'innovation et d'être le leader de l'innovation et de la créativité dans le domaine des surgelés.
02:50 Et donc on a notre directeur du développement, il est meilleur ouvrier de France.
02:54 Il pilote 20 ingénieurs qualités qui travaillent d'RHP pour toujours aller chercher des unités de besoin ou des produits qui sortent vraiment de l'ordinaire.
03:03 Avec nos créations dans le cadre des collections de fin d'année ou dans le cadre des collections quotidiennes, on a vraiment toujours ce besoin d'aller marquer la différence.
03:13 Et aujourd'hui la Maison Thierry elle est vraiment reconnue pour des produits qui sont totalement singuliers, parfois même très, très étonnants.
03:20 Par exemple ?
03:21 Par exemple, quand on a sorti le calendrier de l'avant glacé ou la boîte à aimer pour la Saint-Valentin ou la boîte anniversaire.
03:28 Je vous donne un exemple, pour la Saint-Valentin vous êtes en quête d'une idée, vous avez une boîte dans laquelle vous avez absolument tout,
03:34 de l'apéritif au dessert qui s'appelle la boîte à aimer, dans laquelle vous avez aussi plein de goodies qui vous permettent de décorer, d'agrémenter votre table, le tout pour moins de 40 euros.
03:43 Donc ça veut dire que si le soir de la Saint-Valentin, un homme, une femme n'ont pas eu le temps d'anticiper les choses,
03:49 ils viennent au sein de la Maison Thierry, ils prennent leur boîte et ils arrivent à faire un repas de fête pour moins de 20 euros par personne en ayant en plus la décoration de la table.
03:57 On va toujours chercher l'idée qui n'existe pas pour faciliter la vie de nos clients et puis leur amener vraiment une touche d'innovation que d'autres concurrents ne proposent pas.
04:08 Comment justement vous cultivez cette relation avec vos clients aujourd'hui ?
04:11 Alors la Maison Thierry, elle a un savoir-faire qui est un peu inégalé et qui revient complètement à Monsieur Thierry qui a développé un concept en livraison à domicile extrêmement singulier là aussi,
04:22 puisque la personne, si vous étiez client de la Maison Thierry, peut-être l'êtes vous, mais vous auriez un seul livreur, télé-prospecteur qui vous appellerait pour prendre votre commande,
04:31 ce serait exactement la même personne qui vous livrerait à domicile et ce serait la même personne qui collecterait dans votre rue.
04:37 Donc on a une relation avec nos clients qui est extrêmement forte et qui est liée au fait qu'on a un seul interlocuteur dans toute la vie de la relation entre la Maison Thierry et ce client
04:47 et qui est un interlocuteur unique, qui est capable à la fois de conseiller, de livrer et de prospecter.
04:51 Vous avez aussi des magasins en propre ?
04:54 Oui, nous avons 180 magasins et nous avons 1600 livreurs qui oeuvrent dans toute la France et qui permettent de livrer et de couvrir nos 4 millions de clients actuellement en France.
05:04 Alors puisque vous parlez de vos livreurs et de vos salariés, j'ai lu qu'en janvier vous aviez proposé d'intégrer 150 salariés de place de marché qui est ex-Toupargel qui avait été mis en liquidation judiciaire.
05:16 Pourquoi ce geste ? C'est de la solidarité ou c'est parce que comme beaucoup d'entreprises vous êtes confrontés à des problèmes de recrutement et vous vous êtes dit finalement ceux-là ils ont le savoir-faire, ça va aller plus vite ?
05:25 Non, écoutez, quand un acteur aussi important que place du marché a rencontré les difficultés qu'ils ont rencontré, on n'a pas vécu ça comme quelque chose de positif.
05:33 On ne peut pas se réjouir qu'un acteur aussi important que place du marché disparaisse du spectre du business.
05:40 Donc inévitablement on est touché et on est touché parce que ça fragilise la profession quand un gros acteur disparaît et on est touché aussi parce que nous aussi mon rôle de dirigeant c'est de protéger 3 000 salariés au sein de la maison Thirier et de faire en sorte qu'ils puissent évoluer confortablement et dans le temps au sein de la maison Thirier.
05:59 Et quand on voit tous ces collaborateurs qui étaient en difficulté, on s'est dit qu'on pouvait rapprocher l'offre et la demande et faire un geste envers ces collaborateurs en leur garantissant un processus de recrutement qui se trouvait être du coup privilégié.
06:12 Il faut savoir que la ligne qu'on a mise en place elle était rattachée directement à notre directeur des ressources humaines.
06:17 C'est donc notre directeur des ressources humaines qui était directement en contact et qui a permis à date il y a eu 130 candidatures directes qui sont intervenues assez tardivement parce qu'on comprend, c'est assez légitime que les collaborateurs de place du marché aient attendu d'aller au bout du licenciement économique.
06:36 Il fallait qu'ils attendent ce processus là. Donc 130 candidatures sont ouvertes, nous avons déjà 20 recrutements qui sont réalisés en CDI et d'autres entretiens de recrutement qui poursuivent.
06:47 C'est un geste social et ça correspond aux valeurs de la maison Thirier cette démarche d'ailleurs.
06:52 Elle a été plébiscitée par le plus grand nombre, par les organisations syndicales, par les acteurs du marché, par les collaborateurs et par les nôtres aussi parce que ça fait toujours plaisir de voir qu'une entreprise dans laquelle on travaille a des valeurs qui sont importantes.
07:06 Vous parlez des difficultés de votre concurrent. Quelle est la situation du marché des surgelés français aujourd'hui ?
07:12 Depuis le Covid, les surgelés ont trouvé encore un essor supplémentaire qui est lié à la praticité, à la facilité, avec des modes de distribution simple.
07:24 Nous développons le click and collect une heure dans tous nos magasins, la livraison à domicile, la livraison express. Donc il y a beaucoup de facilité derrière les surgelés.
07:32 Et puis surtout à l'heure où on parle d'empreintes carbone, les surgelés ont un avantage extraordinaire, c'est qu'il n'y a zéro gaspillage dans les surgelés contrairement aux produits frais où on estime à 20-25% de gaspillage dans les réfrigérateurs.
07:46 Les surgelés, on ne gaspille rien.
07:49 Parce que c'est portionnable plus facilement.
07:51 C'est portionnable et ensuite effectivement sous forme de galets souvent.
07:54 Et puis ensuite vous avez un avantage avec le surgelé, c'est que absolument tous les produits de la Maison Thierry, les 1800 produits, mais plus largement de la profession, vous pouvez les consommer très largement au-delà de la date limite d'utilisation optimale.
08:06 La seule chose qui puisse vous arriver, non pas sur le plan de la santé, mais sur le plan gustatif, c'est d'éventuellement avoir un produit qui est peut-être moins goûteux, moins bon qu'il ne l'aurait été.
08:17 Mais donc ce qui explique que les surgelés en termes d'empreintes carbone finalement, contrairement à ce qu'on peut penser nativement, présentent une équation extrêmement intéressante et bénéfique pour le client.
08:27 Donc pour répondre à votre question, un essor qui est lié à la facilité d'accès et puis un essor qui est lié à la fonction même du produit.
08:35 Donc on est très serein sur le modèle économique des surgelés.
08:37 Néanmoins j'imagine que vous avez dû faire face à la flambée des prix de l'énergie.
08:41 Parce qu'effectivement qui dit surgelé dit congélateur et donc évidemment une prise sur laquelle on branche tout ça.
08:46 Je crois que la hausse des prix c'est quelque chose de l'ordre de 20% dans les surgelés.
08:49 Exactement 22% pour être plus précis en tout au moins sur la partie des MDD.
08:53 Nous sommes une marque distributeur + 22%.
08:55 Donc c'est effectivement une équation qui a été complexe à mener et qui a mis la profession en difficulté au même titre que tout l'alimentaire en France.
09:03 Parce que l'alimentaire se situe aux alentours de +18%.
09:05 Donc là-dessus il y a un travail de fond qui est fait au sein de la maison Thirier et on a pris un parti pris très fort.
09:11 Et qui là pour le coup je prends un petit peu de temps pour en parler parce que c'est pas la solution qu'a retenu la profession.
09:19 On a pris le parti de ne pas modifier nos recettes.
09:23 Aucune recette a été modifiée voire même nous avons prolongé, poursuivi, renforcé notre travail qui consiste à avoir le maximum de produits origine France avec des approvisionnements extrêmement locaux.
09:34 Et donc cette équation là elle est très très importante et elle nous a permis, elle nous permet aujourd'hui d'avoir une inflation qui est contenue.
09:41 D'une part parce qu'on a nos ateliers de fabrication donc on est toujours plus agile quand on maîtrise ces process.
09:46 D'autre part parce que nous avons engagé un travail de fond sur nos achats.
09:50 Et puis troisièmement parce que nous maintenons cette équation qualité en ayant pris une décision là toute récente qui est de baisser significativement nos prix.
09:59 Et comment vous tenez ça baisser les prix dans un contexte d'inflation à 22% ?
10:03 On a fait un choix qui est assez simple qui est de dire on va prendre sur nos marges.
10:07 Alors vous pourriez, vous seriez légitime de me dire pourquoi ne pas la refaire en janvier déjà.
10:11 En janvier on n'était pas en mesure de maîtriser complètement l'environnement économique étant entendu qu'on partait dans des inflations incroyablement inhabituelles et qu'il nous fallait vraiment avoir davantage de visibilité.
10:22 Maintenant l'inflation de mon point de vue sur beaucoup de matières premières elle est contenue.
10:27 On sent même des petits signaux à la baisse même si ça frissonne.
10:33 Ça reste des signaux faibles.
10:34 Ça frissonne, ça reste des signaux faibles mais des signaux à la baisse.
10:36 On voit que la viande, la volaille commence à avoir atteint un plafond haut et voir comment ça baissait légèrement.
10:42 Donc on a pris le parti d'anticiper et de faire un pari sur cette baisse et en tout état de cause de prendre la totalité de ces baisses sur nos marges.
10:49 En baissant les 50 produits préférés des clients au sein de la maison Thierry.
10:53 Pour vous expliquer comment on les a choisis c'est assez simple.
10:55 On a pris nos 50 plus grosses ventes en volume qui représentent à elles seules 15% de notre chiffre d'affaires.
11:01 Et ça correspond à 15% de baisse sur ces 15% de chiffre d'affaires.
11:05 Ce qui dans l'équation économique est quand même extrêmement impactant pour nous.
11:09 Mais le choix a été fait en tenant compte du pouvoir d'achat de nos clients.
11:13 Et en se disant il faut qu'on aide nos clients à garantir un équilibre alimentaire sain.
11:18 Parce qu'on est aussi très centré sur le bien manger et donc sur l'idée qu'une alimentation heureuse fait une société heureuse.
11:24 Et donc en attaquant ces 50 produits qui sont des produits de consommation quotidienne courante.
11:30 On y retrouve des légumes bruts, des poissons bruts, de la viande brute.
11:34 On y retrouve aussi au niveau numéro 1 notre fameuse brioche parisienne qui est le produit emblématique de la maison Thierry.
11:42 Pour votre information ils s'en mangent une toutes les 4 secondes en France.
11:46 Une toutes les 4 secondes ?
11:48 Une toutes les 4 secondes.
11:49 Alors ça ?
11:50 Je vous prends un exemple et je m'arrêterai là sur les prix.
11:53 Elle était de par l'inflation positionnée à 4,50 euros.
11:56 Elle est repositionnée à 3,50 euros.
11:59 C'est à dire que sur les 50 produits on a mis les mêmes prix qui étaient pratiqués en janvier 2023.
12:05 Ce n'est pas une baisse qu'on a convenu comme ça.
12:07 On a dit ces 50 produits on les repositionne au prix qu'on a pratiqué en janvier 2023.
12:11 Soit pour la brioche parisienne une baisse de plus de 22%.
12:15 Quand bien même on continue à avoir des oeufs qui commencent à flamber, à être à la hausse.
12:19 Ce que je veux vous faire toucher du doigt là c'est que ces baisses là on les prend sur nos marges
12:24 pour permettre à nos clients de continuer à manger des produits du quotidien
12:29 de façon équilibrée avec des bons produits d'origine France.
12:32 Merci beaucoup Christiane Bertoncini. Je rappelle que vous êtes directrice générale de la Maison Thierry.