Lundi 22 mai 2023, SMART PATRIMOINE reçoit Alain Krief (Responsable de la gestion obligataire, Edmond de Rothschild) et Romain Rivière (Directeur Adjoint en Gestion Financière, Astoria)
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00:00 Et nous enchaînons à présent avec enjeux patrimoine dans un contexte où les banques centrales font monter régulièrement leur taux directeur.
00:12 Faut-il miser en tant qu'épargnant sur les obligations ? En 2023, c'est la question que nous allons poser à nos deux experts.
00:20 Nous avons le plaisir de recevoir tout d'abord sur le plateau de Smart Patrimoine Alain Crièf. Bonjour Alain Crièf.
00:24 Bonjour Nicolas.
00:25 Vous êtes responsable de la gestion obligataire chez Edmond Rothschild Asset Management. Nous avons le plaisir de recevoir également sur ce plateau Romain Rivière.
00:31 Bonjour Romain Rivière.
00:32 Bonjour.
00:33 Vous êtes directeur adjoint de la gestion financière chez Astoria Finance. Alors on va commencer avec vous Alain Crièf. Je vous pose la question qui s'affiche à l'écran.
00:41 Faut-il miser sur les obligations cette année après l'année 2022 chahutée, compliquée qu'on a pu connaître sur l'obligataire ?
00:49 Alors je vais vous donner une réponse simple tout d'abord. Oui, après je vais quand même vous expliquer pourquoi.
00:53 Pourquoi quand même ?
00:55 En effet, après l'année chahutée, après il faut voir pourquoi elle a été chahutée, on a eu une remise, on a rebattu les cartes sur les taux de façon générale,
01:04 sur le risque aussi de façon générale et aujourd'hui on a énormément d'opportunités sur l'obligataire.
01:09 D'accord.
01:09 Donc on a des rendements qui sont très positifs et si à cela on ajoute les primes de risque crédit quand vous allez sur la dette d'entreprise, ce que nous mettons en avant,
01:19 Bien sûr.
01:19 on a des rendements significatifs et beaucoup d'opportunités.
01:22 On peut peut-être justement rentrer un petit peu plus dans le détail de ce que veut dire obligataire, investissement obligataire.
01:28 Il y a ce que tout le monde connaît entre guillemets la dette d'État, ce qu'on voit notamment dans les fonds en euros qui va offrir une garantie en capital
01:36 et un rendement qui progresse effectivement en 2023 mais qui reste relativement peu élevé et ensuite on peut faire de l'obligataire d'entreprise avec
01:44 des niveaux de risque différents en fonction des entreprises qui vont chercher à lever de l'argent.
01:48 Exactement donc on va prêter aux entreprises, c'est de la dette d'entreprise, elles sont présentes la plupart du temps sur les marchés actions mais aussi sur de la dette.
01:58 Et donc on va prêter aux entreprises et donc ce qu'il faut bien comprendre quand on prête aux entreprises, ces titres d'entreprise en fait sur ces titres on accumule
02:08 deux rendements, on accumule le taux d'État et on accumule une prime de risque crédit qui correspond justement à la qualité de l'entreprise.
02:16 Si l'entreprise est de très bonne qualité cette prime va être relativement réduite.
02:20 D'accord, toujours le couple rendement risque effectivement, il y a moins de risque.
02:23 Exactement et si elle est de moins bonne qualité cette prime va être plus importante.
02:27 Donc ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on va atteindre des rendements de l'ordre de...
02:30 Alors déjà le niveau bas il devient beaucoup plus élevé qu'auparavant donc au minimum j'allais dire sur les entreprises de très bonne qualité on est plutôt sur les 3,50, 4%.
02:41 Bien sûr. Et quand vous allez, vous descendez en qualité d'entreprise, encore une fois c'est pas non plus des mauvaises entreprises mais c'est des entreprises plus endettées,
02:48 vous allez pouvoir toucher du 6, 7% par an. Donc là ça commence à être significatif par rapport surtout par rapport à ce qu'on a connu auparavant.
02:57 Ce qui va faire évoluer pour qu'on comprenne bien cette prime de risque entre guillemets c'est uniquement l'endettement de l'entreprise, la capacité de l'entreprise
03:05 à faire face à la dette qu'elle aura contractée via son émission obligataire.
03:08 Exactement, c'est sa solvabilité, c'est tous ses ratios par rapport à son endettement, par rapport à son résultat, par rapport à ses résultats sur la couverture des intérêts qu'elle va pouvoir couvrir ou pas etc.
03:21 Donc tout plein de ratios assez simples on va dire et aussi des projections par rapport à ce qu'on peut essayer de voir sur 12 mois, 18 mois, c'est un peu compliqué d'aller voir beaucoup plus loin
03:33 mais c'est ce qu'on essaie de faire pour voir un peu si cette entreprise, ces entreprises vont pouvoir rembourser leur dette parce que c'est le but.
03:40 Alors pourquoi Alain Crièf, l'obligataire, devient-il plus attractif depuis le début de l'année ?
03:44 C'est parce que la base effectivement de 3, 3,5% qui correspond effectivement à des rendements qu'on peut voir aussi sur des obligations d'Etat a elle beaucoup progressé sur les derniers mois ?
03:54 Exactement, exactement on est passé, je vous donne un exemple simple, on est passé à des rendements pratiquement de l'ordre de zéro sur des obligations d'entreprise de bonne qualité à aujourd'hui 4%.
04:05 C'est en quelques mois donc ça a fortement changé donc on a du rendement mais c'est normal ce qui correspond à notre environnement économique aujourd'hui, on a de l'inflation,
04:14 on a donc les taux surmontés, les taux d'Etat j'entends donc on a plus de rendement sur ces obligations et à cela s'ajoute en fait un risque supplémentaire parce que
04:25 qui dit inflation, qui dit remonter les taux, qui dit éventuellement ralentissement économique pour lutter contre cette inflation et donc cet effet-là augmente les primes de risque crédit aussi sur ces entreprises.
04:38 C'est pour ça qu'au final en additionnant tout ça on obtient des rendements qui sont significatifs aujourd'hui comme je vous le disais de l'ordre entre 4 et 7% et 7% je suis gentil parce qu'on peut aller un peu plus loin aussi.
04:49 Après il faut savoir contrôler son risque et en fonction du risque que vous pouvez prendre vous avez ce type de rendement.
04:56 Alors effectivement il y a ce qu'on appelle l'investment grade ou le high yield mais c'est des terminologies qui s'appliquent effectivement aux entreprises très risquées pour le high yield et moins risquées ou intermédiaires pour l'investment grade.
05:07 Romain Rivière, quand on regarde dans une stratégie patrimoniale qu'on a le choix effectivement entre des fonds euros, aller sur les marchés financiers, les produits structurés qui reviennent aussi pas mal sur le devant de la scène, des placements plus alternatifs et des stratégies obligataires.
05:24 Quelle place prend la stratégie obligataire depuis le début de l'année ? Est-ce que vous constatez que vous avez ou vous plus d'opportunités en tant que professionnel ou qu'il y a plus de demandes de la part des épargnants ?
05:35 Il est évident qu'à l'aube de l'année 2023 qu'on a connu et comparé à l'année 2022 qui comme l'a souligné M.Krief a été particulièrement catastrophique pour la classe d'actifs, le retour des rendements sur l'obligataire fait gagner une considération plus importante sur la brique obligataire qu'on va intégrer dans une allocation d'actifs global.
05:54 Maintenant il est aussi intéressant de regarder le risque qu'on est capable de prendre parce que l'obligataire c'est l'un des marchés financiers les plus vastes.
06:03 Et ça c'est important de le préciser parce qu'effectivement quand on parle de l'obligataire dans cette émission même on parle souvent des fonds euros ou alors on en parle beaucoup en lien avec les produits structurés qui reproposent du capital garanti grâce à la hausse des taux sur l'obligataire mais il y a de l'obligataire risqué aussi.
06:18 Il y a de l'obligataire risqué effectivement, vous en parliez il y a ce qu'on appelle le high yield donc le haut rendement c'est-à-dire les obligations dont les notations sont les moins bonnes.
06:26 On peut trouver également des obligations sur des pays émergents donc de par leur géographie elles vont être sur des niveaux de risque également un peu plus important.
06:36 Et donc c'est tout ça en fait qu'il faut prendre en compte quand on veut mettre de l'obligataire dans une allocation d'actifs c'est pas simplement se dire on met de l'obligataire non risqué.
06:44 C'est quel type d'obligataire on va mettre.
06:46 Et bien entendu au regard de sa stratégie globale du profil de risque de l'épargnant on lui propose telle ou telle solution que ce soit de l'obligataire type fonds en euros pour les très très peu risqués.
07:00 D'accord ça c'est la base on commence par ça on met du fonds en euros les épargnants veulent du fonds en euros aujourd'hui.
07:04 Les épargnants veulent encore du fonds en euros effectivement.
07:07 Et la discussion vient après du coup pour le reste de la poche obligataire qu'on va pouvoir définir pour l'épargnant.
07:13 Oui oui généralement ça se fait exactement comme ça maintenant sur la poche obligataire qu'on va coupler au fonds en euros c'est là où c'est intéressant c'est qu'on la reconsidère aujourd'hui parce qu'on peut retrouver de l'obligataire peu risqué avec un vrai intérêt en tout cas en coeur de portefeuille avant d'aller chercher de la diversification sur soit de l'obligataire très risqué soit sur d'autres types d'actifs que ce soit des actions ou d'autres types alternatifs comme les produits structurés le private equity etc.
07:41 Une question alors effectivement qui fera peut-être la transition avec ce que pourra nous nous dire Alain Crièf dans un second temps.
07:49 Quand on regarde les marchés actions donc pas obligataire les marchés actions on a le sentiment qu'on peut continuer à y faire des performances mais qu'on a plus de mal quand même à les lire depuis depuis ou à les anticiper alors on n'a jamais su effectivement mais à les lire depuis quelques mois.
08:01 Qu'en est-il des marchés obligataires quand on est professionnel de la gestion de patrimoine ?
08:06 C'est effectivement deux lectures qui sont drastiquement différentes. Aujourd'hui les marchés obligataires on l'a dit offrent un rendement de base qui est bien plus intéressant qu'en 2022 et que sur les 5-10 dernières années où on avait des taux bas voire négatifs.
08:25 Donc effectivement on va reconsidérer la question autrement. Maintenant la lecture qu'on peut avoir de ces marchés là est forcément beaucoup plus importante dans la question de l'allocation d'actifs global.
08:44 Alain Crièf si on rentre un peu plus dans le détail d'une stratégie obligataire qu'on pourrait mettre en place qu'est-ce qu'on fait aujourd'hui ? Alors effectivement il y a autant de stratégie que de volonté d'épargner mais globalement est-ce que les entreprises européennes ou américaines sont des entreprises qui offrent de belles performances aujourd'hui ?
09:03 Est-ce qu'il faut aller sur les émergents comme ça a été évoqué ou au contraire rester attentif aujourd'hui sur le sujet ?
09:09 Alors je vais tout d'abord apporter une précision importante. L'obligataire ce qui différencie des actions c'est qu'en général la majorité de l'obligataire avons une échéance.
09:20 C'est-à-dire quand on prête à une entreprise on a une échéance et plus cette échéance est courte plus vous avez de la visibilité sur ce remboursement et sur cette solvabilité.
09:30 Quand on va prêter à deux ans trois ans en fait sur des entreprises comme dans l'automobile ou etc. ça veut dire que le problème à la fin vous n'avez pas de rendement si l'entreprise fait défaut.
09:41 Et là on parle d'entreprises comme des Renault, des Stellantis ou des Foresia. Je parle de l'automobile je pourrais parler du Télécom et autres.
09:48 Donc déjà on a ce type de rendement à court terme si les entreprises ne font pas défaut. Donc ça c'est déjà très important de voir ça parce que finalement l'obligataire ça a toujours été un rendement un peu plus court terme que l'écoutille.
10:00 Ce qui est important dans ce contexte aussi. Et donc pour répondre à votre question exactement c'est aujourd'hui il y a plusieurs stratégies en effet.
10:09 On l'a dit en termes de risque donc en termes de qualité des entreprises c'est certes et comme je viens de vous le dire aussi en termes d'échéance.
10:17 Parce que plus vous allez sur une échéance plus longue plus vous allez être sujet à des variations justement de taux et pas forcément avoir une valeur qui va varier en fonction de la volatilité des taux, de cette prime de risque etc.
10:35 Donc quand vous allez sur du court terme en fait déjà c'est un peu plus sûr c'est clairement voilà c'est clairement moins volatile et plus sûr vous avez certes un peu moins de rendement.
10:45 Et justement l'anomalie de notre marché aujourd'hui c'est de dire que si vous allez sur de l'obligataire moins risqué ce qu'on appelle la catégorie investissement, investment grade qu'on appelle en anglais.
10:56 En fait sur le court terme vous avez le même type de rendement sur du 2 ans, 3 ans que sur du 4 ans, 5 ans etc. relativement plat.
11:05 Et ça alors même que on réduit le risque de défaut puisqu'on est exposé moins longtemps à l'obligation en question.
11:12 Exactement donc et alors il y a deux choses qui viennent comme je vous l'ai dit à l'intérieur de cette dette et de ce rendement vous avez une partie taux d'État et une partie prime de risque crédit.
11:25 Et aujourd'hui si on revient sur le contexte économique général on est sur la fin de la remontée des taux d'État il reste certes 2 fois 0,25 pour la BCE notamment.
11:38 Estimé anticipé par le marché on peut être plus ou moins en dessous ou au-dessus mais en tout cas par rapport à ce qui est beaucoup plus derrière nous que devant.
11:47 Et par rapport à cette petite volatilité vous avez en plus cette prime de risque crédit donc j'allais dire sur ce type d'obligation vous avez vraiment une sorte d'assurance entre guillemets.
11:59 Qui est ce taux d'État si jamais on avait un ralentissement économique plus important et une fois la lutte contre l'inflation terminée il faut savoir se projeter dans 6 mois.
12:09 Vraisemblablement est-ce que ce qu'anticipe les marchés c'est que ces taux d'État risque de baisser alors pas à court terme.
12:16 Ça veut dire quoi ça veut dire que même si jamais les primes de risque crédit venaient à augmenter parce qu'on aurait plus de problèmes économiques ralentissement économique.
12:26 Ça viendrait se compenser donc vous avez en plus d'acheter ce type d'obligation vous avez une sorte de protection intégrée qui est aujourd'hui un rendement positif sur les taux d'État.
12:38 Ça c'est très important de le signaler.
12:40 Je change un peu de sujet face au timing de l'émission Romain Rivière on voit de plus en plus de professionnels nous parler de fonds datés sur l'obligataire.
12:49 Est-ce que c'est un outil que vous utilisez dans la gestion de patrimoine ?
12:54 C'est un outil qu'on peut utiliser ça dépend de la stratégie en tout cas de l'objectif du client puisqu'effectivement un fonds à échéance ou un fonds daté comme on l'appelle.
13:03 C'est un fonds qui va être un fonds d'obligation de portage c'est-à-dire qu'on va rentrer dans l'obligation on va la porter jusqu'à sa maturité sans faire d'arbitrage entre temps.
13:13 C'est-à-dire qu'on va toucher les coupons ça va donner le rendement effectivement de notre investissement mais on va pas effectivement chercher à céder l'obligation en fonction de la valorisation de celle-ci.
13:21 Exactement on la prend à l'émission et ensuite on la porte jusqu'à son échéance et les fonds datés aujourd'hui on en voit beaucoup qui ont fleuri fin 2022 début 2023.
13:33 Et effectivement avec des échéances à 2027 à 2028.
13:37 A cela il faut opposer alors opposer il faut il faut compléter avec des fonds ce qu'on appelle donc Evergreen des fonds ouverts où ce sont des fonds d'obligation mais cette fois-ci non pas de portage mais d'arbitrage.
13:49 C'est-à-dire que le gérant qui gère ce fonds obligataire va profiter des valorisations de la volatilité des marchés obligataires pour essayer de rentrer sur des obligations dont les valorisations seraient devenues attractives.
14:00 Par exemple une augmentation des taux puisque ça aussi il faut peut-être le rappeler aux épargnants une augmentation des taux crée une baisse de la valorisation déjà émise.
14:10 Mais justement le fait d'avoir des taux attractifs aujourd'hui dans un fonds de portage c'est pas une stratégie effectivement "sûr" pour un épargnant ?
14:24 Si ça peut l'être c'est aussi pour ça qu'on a vu beaucoup beaucoup de fonds à échéance se créer sur la fin de l'année 2022 début de l'année 2023 parce que les nouvelles émissions étaient intéressantes.
14:34 Et ça a été intéressant pour les sociétés de gestion qui ont des gérants obligataires comme monsieur Kriev par exemple de créer des fonds à échéance de créer des fonds datés.
14:43 Parce qu'effectivement pour le client qui souhaite faire de l'obligataire de manière on va dire "sûr" même si la valeur liquidative du fonds n'est absolument pas garantie.
14:52 Et on peut en sortir même si ça s'appelle un fonds daté ou un fonds à échéance on peut en sortir et on peut même y rentrer après la commercialisation.
14:59 Et donc effectivement ces fonds là ont un intérêt en tout cas pour les investisseurs qui souhaitent faire de l'obligation avec une certaine maturité une certaine échéance.
15:09 Et qui n'ont pas vocation à avoir une stratégie active de leur exposition sur l'obligation.
15:15 On va devoir s'arrêter là même si on aurait pu en parler encore pendant des heures. Merci beaucoup messieurs. Merci Romain Rivière.
15:20 Merci Alain Kriev d'être venu sur le plateau de Smart Patrimoine. Merci à vous de nous avoir suivi et je vous dis à très vite sur Bsmart.
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