Regardez L'invité de RTL du 24 avril 2023 avec Amandine Bégot.
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00:02 RTL Matin
00:06 Il est 7h43, excellente journée à vous tous qui nous écoutez.
00:10 Amandine Bégaud, vous recevez donc ce matin la navigatrice Clarisse Crémer.
00:14 Bonjour Clarisse Crémer.
00:15 Bonjour à vous.
00:17 Et merci beaucoup d'être en direct avec nous depuis l'Orient.
00:20 Vous êtes, je le rappelle, la révélation du dernier Vendée Globe en 2020,
00:24 puisque vous avez déterminé 12e,
00:26 vous avez même signé la meilleure performance féminine de toute l'histoire de cette course en bouclant ce Vendée Globe en 87 jours,
00:33 2h24 et pourtant, pourtant, vous avez bien failli ne pas pouvoir prendre le départ du prochain en 2024,
00:39 faute de sponsor, en février dernier, Banque Populaire.
00:42 Votre sponsor jusque-là décide en effet de se passer de vous,
00:46 moins de 3 mois après votre accouchement, on en avait beaucoup parlé.
00:50 Clarisse Crémer, c'est à cause de ça, à cause de votre maternité que vous avez été évincée ?
00:55 Oui, alors c'est un petit peu plus compliqué que ça.
00:57 C'est les règles de sélection pour le Vendée Globe qui ont fait dire à mon ancien sponsor que je représentais un risque un peu trop important.
01:04 Et voilà, ils ont préféré me remplacer parce que, effectivement, je n'avais pas pu faire les courses
01:10 et donc je n'étais pas assez avancée dans le processus de sélection.
01:14 Voilà, il faut rappeler que dans ce nouveau règlement du Vendée Globe,
01:17 il faut, pour participer, cumuler le plus de miles possible pendant 4 ans.
01:22 Vous étiez en colère contre qui ? On se souvient de ce gros coup de gueule que vous aviez poussé à l'époque en février.
01:28 Ils sont prêts à assumer des risques mais pas celui de la maternité, aviez-vous dit.
01:32 Vous étiez en colère contre qui ? Contre Banque Populaire ou contre l'organisation du Vendée Globe ?
01:36 À l'époque, un peu des deux.
01:39 C'est vrai que c'est difficile à accepter quand c'est notre métier et notre passion
01:44 de devoir que la maternité puisse représenter un si gros impact au milieu de notre carrière.
01:52 Après, aujourd'hui, je suis quand même contente de voir que le débat a pu avancer,
01:57 que ça permet de faire avancer les choses et notamment dans mon milieu de la course large,
02:01 les gens osent plus parler du sujet de la maternité.
02:04 J'ai eu des échanges importants avec l'organisation du Vendée Globe
02:09 qui a envie de faire les choses différemment pour l'édition suivante
02:12 parce qu'ils ne peuvent pas changer les règles en cours de jeu.
02:15 Donc voilà, on va dire que ma parole aura permis, je pense, de faire avancer le sujet.
02:22 C'est encore compliqué aujourd'hui d'être maman et sportive de haut niveau ?
02:26 Je pense qu'il y a un sujet en termes de perception.
02:30 Il faut se rendre compte que si on est un enfant, c'est un grand moment de joie
02:36 mais ce n'est pas pour autant que notre motivation et notre envie d'être sportive de haut niveau disparaissent.
02:41 Ce n'est pas toujours accepté par tout le monde, je pense que c'est surtout ce sujet-là.
02:46 Mais quand même, les choses évoluent d'année en année.
02:49 Je suis surtout contente de pouvoir dire que je reviens dans la course au Vendée Globe
02:54 avec un nouveau sponsor, l'Occitane, et une nouvelle équipe.
02:57 C'est ça le plus important et ça montre qu'en 2023, c'est possible encore.
03:01 Vous serez au départ le 10 novembre 2024, Clarisse Kramer. C'est l'objectif en tout cas ?
03:05 C'est l'objectif. La première victoire, c'était d'avoir à nouveau un projet,
03:09 une équipe, un bateau, un sponsor. C'était ça la première victoire à atteindre.
03:14 Et la seconde victoire, ce sera d'être au départ du Vendée Globe.
03:17 On est dans un sport technique à risque avec beaucoup de mésaventures possibles.
03:23 Donc la montagne est haute, mais déjà j'ai le sourire de pouvoir être accompagnée et que mon projet soit relancé.
03:30 Est-ce que vous avez eu l'impression à un moment ou à un autre qu'on a voulu vous faire payer le fait d'avoir eu un bébé ?
03:36 Non, c'est vraiment pas ça le sujet. Il y a peu de femmes dans le monde de la course large.
03:43 C'est un sujet qui a malheureusement été un peu oublié. C'est surtout ça le sujet.
03:48 Parce qu'il y en avait peu jusqu'ici et peu peut-être aussi de votre âge, en âge d'être maman.
03:53 Certains disent que sportivement vous n'étiez pas au niveau et c'est ce qui expliquerait
03:58 pourquoi Banque Populaire a préféré se passer de vous.
04:04 Alors ça, je n'ai pas envie de m'étendre sur ce sujet-là. Le fait est qu'ils m'ont choisi il y a deux ans pour ce projet.
04:10 Je pense qu'on est plus sur un des sujets de la perception de la femme et de la maternité et de la motivation.
04:18 Avec plus de recul, j'en parlerai dans le futur. Mais là, je vais surtout me concentrer sur le positif.
04:24 C'est un sujet le fait d'être prête sportivement. J'imagine qu'après un bébé, s'y remettre, ce n'est pas évident.
04:31 Ça vaut pour plein de sports, ça vaut pour plein de métiers.
04:35 Ça peut être perçu comme une grande injustice, mais après avoir eu un bébé, ce n'est pas facile de reprendre le boulot.
04:44 Pas facile de se remettre à la barre d'un bateau, j'imagine.
04:48 Oui, moi je n'ai jamais caché que ça allait être un énorme challenge de revenir.
04:53 Parce que forcément, on a le corps qui a changé. On a fait une pause pendant quelques temps, pendant que les autres progressent.
04:59 C'est énormément de sujets et d'enjeux.
05:02 Mais ce n'est pas impossible.
05:05 Oui, il y a un challenge, un Everest, comme on aime appeler le Vendée Globe.
05:12 Moi, c'est déjà un Everest avant d'être au départ.
05:15 Mais oui, à mon sens, les critiques qui ont été faites par rapport à la perception de mon niveau
05:22 sont plus liées à une perception de la maternité.
05:25 Parce que quand j'ai été choisie, je n'avais pas plus de niveau.
05:30 Ce sont des machos qui disent ça ?
05:33 Je pense qu'il y a encore quelques évolutions psychologiques à faire dans notre milieu,
05:37 mais comme dans pas mal d'endroits dans la société.
05:40 Ce n'est pas tout beau, tout rose encore.
05:46 Vous le disiez, votre nouveau sponsor, c'est l'Occitane.
05:50 Pour qui c'est presque un choix militant que de vous soutenir,
05:53 puisque ce groupe est le premier groupe cosmétique international à avoir mis en place,
05:56 dès 2020, une politique de congé parental pour tous ses employés dans le monde entier.
06:01 C'est un joli coup de com' aussi pour eux.
06:04 Oui, bien sûr.
06:06 C'est quelque chose de très bien accepté dans notre milieu.
06:10 On a la chance de faire du bateau, de vivre des aventures extraordinaires.
06:13 On est accompagné par des marques pour qui ça représente quelque chose.
06:17 En l'occurrence, l'Occitane, je suis hyper heureuse de les avoir avec moi.
06:21 Ils m'ont très vite apporté une marque de soutien ces derniers temps.
06:26 Le fait de se rendre compte qu'on peut partager la même vision qu'une entreprise,
06:31 aussi belle qu'elle, c'est chouette aussi.
06:35 Aujourd'hui, je ne peux que les remercier de me permettre d'avoir les outils
06:38 pour espérer à nouveau être au départ du prochain Vendée Globe.
06:42 Je suis surtout concentrée là-dessus.
06:44 Vous ne pourrez pas emmener votre fille sur le Vendée Globe.
06:47 Ça va être difficile de la laisser à quai, d'autant que son papa,
06:50 votre mari Tanguy Le Turquet, prendra lui aussi le départ de cette course.
06:54 Oui, ça va être difficile.
06:56 Bien sûr que j'y pense, ça fait partie du challenge.
06:59 Aujourd'hui, on est concentré avec mon équipe à faire en sorte
07:03 que j'ai le meilleur équilibre de vie possible.
07:05 C'est sûr qu'aujourd'hui, ma petite fille fait partie de cet équilibre.
07:10 On fait en sorte que ce soit le moins difficile pour moi de la laisser,
07:14 en créant un environnement stable à la maison pour elle.
07:18 Mais c'est aussi difficile pour les papas quand ils laissent leurs enfants à terre.
07:22 C'est quelque chose de plus commun.
07:24 C'est un rythme de vie.
07:27 On s'est lancé dans un projet un peu fou.
07:29 On ne le fera probablement peut-être pas comme ça toute notre vie.
07:32 Vous pensez que le fait de devenir maman a changé la navigatrice que vous êtes ?
07:36 Je n'ai pas encore eu l'occasion d'être en course toute seule sur mon bateau.
07:41 Mais oui, forcément, c'est une expérience assez extraordinaire de devenir maman.
07:45 Ça ajoute quelque chose en plus dans notre tête, dans notre mental.
07:48 On a parlé tout à l'heure des difficultés, de la partie challenge,
07:53 de l'enjeu pour le corps de revenir au niveau.
07:56 Mais je suis assez curieuse de voir aussi ce qui se passe dans la tête en termes de force.
08:00 J'en ai souvent entendu parler par le biais d'autres sportifs, dans d'autres milieux,
08:03 de ce que ça peut ajouter dans notre tête.
08:05 Je pense que c'est important aussi de parler de l'aspect positif des choses.
08:10 Bien sûr, ça donne une force, bien sûr.
08:13 Peut-être un peu de responsabilité aussi, selon Mère, au milieu des océans ?
08:18 Vous y penserez sans doute.
08:19 Ce n'est pas anodin quand même ?
08:21 Oui, ce n'est pas anodin.
08:23 Je penserais à revenir en un seul morceau, mais ça on y pense de toute façon.
08:27 On n'est pas des têtes brûlées, les marins de course au lâche qui font le tour du monde.
08:32 On a un bateau qu'il faut amener jusqu'au bout.
08:35 On est beaucoup dans la gestion technique, sportive.
08:39 On est tout le temps en train de calculer les risques.
08:43 On est dans un sport qui est compliqué, qui peut être dangereux, mais on fait quand même très attention.
08:49 C'est sûr que de ce point de vue-là, je continuerai de le faire.
08:53 C'est pour ça que je parlais tout à l'heure d'un environnement stable,
08:57 que notre fille soit entre de bonnes mains, parce que ça va être très important.
09:04 Forcément, c'est la pounelle de nos yeux, comme on dit.
09:07 Un grand merci en tout cas, Clarisse Crémer, d'avoir été en direct avec nous ce matin.
09:11 On vous souhaite plein de bonheur en famille et sur les mers avec cette nouvelle aventure, avec l'Occitane.
09:17 Merci beaucoup. Merci aussi.
09:19 - Merci.
09:20 [SILENCE]