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Le romancier Didier Van Cauwelaert est l'invité de ce Télématin. Son nouveau livre, « La vie absolue » est publié chez Albin Michel.

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Transcription
00:00 - Bonjour Didier Vankevlaert. - Bonjour Damien.
00:02 Bienvenue chez nous.
00:03 Ce n'est pas trop tôt pour vous, vous êtes à Matinal, comment ça se passe ?
00:05 Oui.
00:06 - Et vous écrivez tôt d'habitude ? - Oui.
00:09 Ah, vous êtes plutôt donc même écrivain du matin.
00:12 Oui, 5h30-6h, c'est l'heure la plus facile, parce que je me prends par surprise.
00:16 Bien sûr.
00:17 Allez, votre actualité, c'est ce nouveau livre,
00:20 "La vie absolue", édition Albain Michel.
00:22 On en parle dans une poignée de secondes,
00:23 mais je souhaitais, j'avais envie qu'on démarre par une archive
00:26 que j'ai découverte, dont j'ignorais l'existence.
00:29 J'avais vu pas mal d'archives de vous.
00:30 Didier, je pense que c'est une de vos premières interviews,
00:32 on est en 1982, Alice.
00:34 Clairement, oui, c'est la publication "20 ans et des poussières",
00:37 - mon premier roman. - De votre premier roman, c'est ça.
00:40 Alors, j'ai choisi cette archive parce que finalement,
00:43 elle nous démontre que dès le début,
00:44 vous saviez exactement pourquoi vous vouliez devenir écrivain.
00:47 Alors, je vous préviens, ça va être émouvant, vos parents y témoignent.
00:50 Ils témoignent dans ce reportage.
00:51 - Votre papa était avocat, c'est ça ? - Oui.
00:53 Et ma mère, horticultrice.
00:55 Regardez, regardez, c'est très émouvant.
01:00 J'ai toujours voulu raconter des histoires,
01:03 et puis avoir des lecteurs,
01:06 mais comme si je faisais du théâtre, c'est pour avoir un public.
01:08 Il y a deux courants dans les auteurs,
01:10 il y a les narcisses et les cabots.
01:11 Moi, je suis plutôt la deuxième espèce.
01:14 Mais parfois, il me posait des questions surprenantes.
01:16 Il me disait "Papa, un testament, qu'est-ce que c'est ?"
01:21 Il avait à l'époque 6 ans.
01:24 Et les successions, ça consiste à quoi ?
01:28 Quand quelqu'un meurt, est-ce que ses frères, ses sœurs héritent ?
01:33 Nous pensions que c'était une passion d'enfant au début, bien sûr.
01:37 Et puis, le temps passant, sa forme d'écriture évoluait,
01:42 mais la passion était de plus en plus forte.
01:45 Oui ?
01:49 Ce qui est fou, Didier, alors je comprends l'émotion, elle est légitime,
01:52 ce qui est fou, c'est que vous demandez à votre papa à 6 ans
01:55 comment ça marche une succession, etc.
01:57 Ça veut dire que tous vos thèmes, la vie, la mort, l'après, l'âme,
02:01 dès le début, c'était des thèmes qui étaient en vous, ça ?
02:03 Oui, c'était là.
02:04 Et puis, il y a une personne qui manque là,
02:07 c'était la secrétaire de mon père, la secrétaire de cabinet d'avocat,
02:09 qui tapait en cachette les manuscrits.
02:13 Puisque à l'époque, mon père a été quasiment invalide,
02:17 il a eu un grave accident de voiture,
02:19 et il avait dit que le jour où il serait complètement dans un fauteuil roulant,
02:24 il se tirerait une balle dans la tête, et je m'étais dit,
02:25 je vais faire un truc extraordinaire pour lui donner envie de vivre quand même,
02:28 je vais être le premier écrivain le plus jeune publié au monde.
02:32 Et donc, en lui faisant la surprise,
02:33 je lui ai détourné sa secrétaire qui a tapé des centaines et centaines de pages gratuitement.
02:38 Vous aviez un genre de petit dictaphone, et puis elle retranscrivait ?
02:41 - Sous casque, c'est ça. - Exactement.
02:43 - Oui, c'est vrai que... - Tout était là, tout était là.
02:46 - Oui, je suis un petit peu évolué, je suis un peu moins péremptoire que j'étais à l'époque.
02:50 - Oui, c'est drôle.
02:53 - Mais je n'ai pas changé.
02:55 Le petit garçon que j'étais, qui a commencé à écrire à 7 ans et demi, 8 ans,
03:00 quand il a appris à écrire à l'école,
03:02 quand les mots, tout à coup, sont devenus des outils extraordinaires pour raconter des histoires.
03:07 Donc ce petit garçon, tu recommandes du vieil homme de lettres que je suis devenu.
03:13 - Allez, parlons de ce livre, "La vie absolue" chez Alba Michel.
03:16 Alors, quelle belle idée.
03:17 Vous reprenez, en fait, vous redonnez vie d'une certaine manière à Jacques Lormeau.
03:21 Jacques Lormeau, c'était le héros de "La vie interdite",
03:24 c'était un de vos romans qui date d'il y a 25 ans, c'est ça ?
03:28 Donc ce personnage qu'un cahier était mort à 34 ans dans le précédent roman,
03:33 et là, alors, comment vous le faites ?
03:35 Parce que vous lui faites réapparaître sous forme de narrateur.
03:40 - Disons qu'il revient dans les vibrations terrestres par quelque chose de très brutal.
03:45 En fait, il s'agit d'un sauvetage dont il va être l'instrument, à la fois le témoin,
03:51 il essaie d'être actif aussi.
03:53 - Il n'y a que nous, lecteurs, qui l'entendons, évidemment.
03:55 Les vivants autour de lui ne l'entendent pas, on est d'accord.
03:57 - Et en fait, ça commence, qu'est-ce qu'il fait revenir sur Terre ?
04:01 C'est son exhumation.
04:03 On est au cimetière.
04:05 - Pour une recherche de paternité.
04:07 - Et il y a une jeune fille qui est...
04:09 C'est la famille Admi, il y a d'un côté la grosse quinquairie Lormeau,
04:11 on est avec Slébin, les deux commerces emblématiques, c'est la quinquairie Lormeau.
04:13 - Maisons bourgeoises.
04:15 - Et puis, la pâtisserie du Mont-Sel.
04:18 Sauf que la pâtisserie a été rachetée par la quinquairie qui en a fait un espace tondeuse.
04:22 Et donc, il y a une haine entre ces deux familles, de part et d'autre, de la tombe.
04:26 Parce que Morgane, jeune étudiante, qui est de cette famille de la pâtisserie,
04:34 sa mère lui a dit...
04:36 - Avant de mourir, on ne dira pas dans quelles circonstances.
04:38 - Elle lui a dit, voilà, ton père, ce n'est pas celui qui vient d'être arrêté.
04:41 On a découvert que c'était un pédo criminel épouvantable.
04:44 Elle lui dit, non, rassure-toi, ton vrai père, c'était le gentil quinquailler Jacques Lormeau.
04:48 - C'est le voisin.
04:49 - Qui est mort il y a 25 ans.
04:50 C'était mon copain d'école.
04:51 Un soir, il m'a consolé.
04:53 Tu n'es pas une enfant de l'amour, tu es une enfant de l'amitié.
04:56 Et elle lui fait cet espèce de cadeau de départ.
04:59 Et elle va se jeter sous un train parce qu'elle ne peut pas, elle, survivre.
05:03 - Donc le corps est exhumé, le corps du quinquailler est exhumé.
05:06 Est-ce qu'on peut aller jusque la révélation du test ?
05:09 Parce que ça vient assez vite, on peut le dire ou pas ?
05:11 - Ah oui, là, on est dans les 10 premières pages.
05:12 C'est-à-dire que déjà, vous savez qu'il n'est…
05:13 Alors, c'est évidemment la vieille pâtissière qui a été absorbée par cette amie,
05:19 qui décide aussitôt que sa petite-fille lui dit la révélation de sa mère
05:24 de lancer la procédure d'exhumation.
05:27 Sauf que vous savez qu'on ne peut plus, depuis l'exhumation d'Yves Montand en France…
05:30 - Mais je l'ai appris par vous.
05:31 - Voilà.
05:32 On ne peut plus exhumer quelqu'un pour un test ADN
05:35 si cette personne n'a pas donné son accord de son vivant.
05:37 Et c'est là que la veuve de Jacques va faire un acte d'amour sacrificiel si fort
05:42 que c'est ça qui va ramener dans ses parages l'esprit de Jacques
05:46 qui s'est un peu dissoudu dans l'au-delà.
05:48 - Jacques le quincaillé.
05:49 - Qu'est-ce qu'elle fait ?
05:50 Elle sort une lettre d'amour qu'il lui avait écrite dans le temps
05:52 et elle recopie son cercle modèle pour faire un fond en écriture
05:55 où Jacques autorise, quelques mois avant sa mort…
05:58 - S'il y avait besoin, dans le début.
06:00 - S'il y avait besoin, en cas…
06:01 - Une recherche en paternité.
06:03 - Et donc, parce qu'elle est tellement émue par la détresse de cette jeune fille
06:05 qu'il y a besoin de croire vraiment qu'elle est la fille de ce gentil garçon
06:11 et pas de ce monstre.
06:13 Sauf que Jacques vit tout ça et se dit, lui, c'est très bien
06:16 qu'il n'a jamais eu de relation intime avec son ami d'enfance.
06:19 - Donc nous, lecteurs, Jacques nous dit, c'est pas moi, je ne serai pas le père.
06:22 - Et on sait que ça va être une cata, c'est-à-dire qu'elle aurait pu être sauvée,
06:25 Morgane, au bénéfice du doute, par ce mensonge d'amour que lui a fait sa mère.
06:30 Sauf que là, la réalité va tout casser, ça va être encore pire.
06:34 Sauf que le fils de Jacques, Lucien…
06:37 - Alors, le vrai fils de Jacques ?
06:39 - Le vrai, qui est un super geek, un hacker, un spécialiste des manipulations informatiques
06:44 et donc expert en sécurité informatique aussi.
06:47 Vous savez, les persos de coffre-fort deviennent les meilleurs serruriers.
06:50 Et lui, il voit cette jeune fille de son âge, il est bouleversé par cet espoir.
06:57 Et qu'est-ce qu'il va faire ? Il va intercepter le rapport…
07:02 - Le résultat du test ADN.
07:04 - Il fait ce qui s'appelle en informatique "impersonation attack",
07:07 c'est-à-dire l'usurpation d'identité.
07:09 Il se fait passer auprès du laboratoire pour le juge des affaires familiales.
07:13 Il intercepte le rapport qui dit qu'il n'y a aucun marqueur génétique commun entre les deux.
07:18 - En gros, on dit que ce n'est pas lui le père, le père biologique.
07:21 - Lui, il va truquer le truc.
07:22 - Et on n'en dit pas plus, il dit.
07:24 Si vous êtes d'accord, on n'en dit pas plus.
07:26 Les gens vont découvrir, évidemment, la suite de cette histoire.
07:28 Il y a des rebondissements.
07:29 Je vous le disais hors caméra que ça ferait un film formidable, un téléfilm,
07:31 parce qu'il y a des secrets de famille.
07:33 C'est une ambiance chabrolienne, bourgeoisie de province,
07:36 on se regarde un peu comme ça, avec méfiance,
07:39 et ça donnerait donc une belle adaptation.

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