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Art et designTranscription
00:00 *Musique*
00:19 Et merci de débuter cette nouvelle semaine du Book Club avec nous.
00:22 Vous avez été nombreux et nombreuses à réagir sur le compte Instagram du club de lecture de France Culture.
00:27 Merci à vous, c'est ainsi que nous préparons tous les jours cette émission.
00:31 Une émission où l'on met ce midi à l'honneur une femme, une artiste, une sculptrice.
00:36 Son nom, Germaine Richier, née au tout début du XXe siècle dans un monde étranger à l'art.
00:42 Elle va, dès le plus jeune âge, exprimer sa ferme conviction de devenir sculptrice.
00:48 Et à force de travail, la jeune femme va réussir son pari, côtoyer les plus grands
00:52 et connaître un franc succès et une reconnaissance précoce.
00:55 Alors que le Centre Pompidou à Paris lui consacre une rétrospective étonnante,
01:00 une BD et une biographie viennent de paraître.
01:03 Entrons ensemble dans le monde de Germaine Richier.
01:07 On pourrait sûrement faire des choses magnifiques avec le corps humain et la nature.
01:12 Mais à l'heure actuelle, il y a un problème qui intéresse de mettre des formes d'insectes
01:19 qui, au fond, si on les regarde de très près, ont aussi des proportions humaines.
01:23 Et c'est un mélange qui peut être très intéressant, mais ça c'est très personnel.
01:27 *Générique*
01:33 Et la voix de Germaine Richier pour débuter ce book club, elle qui pourtant n'aimait pas
01:38 parler de son art et de son travail de sculptrice.
01:41 On va en parler dans un instant.
01:42 Bonjour Laurence Durieux.
01:43 - Bonjour.
01:44 - Vous êtes autrice, mais vous êtes aussi la petite nièce de cette géante de la sculpture
01:48 qui était Germaine Richier.
01:49 Vous publiez aux éditions Fage un portrait de votre grande-tante Germaine Richier, l'ouragan
01:54 du nom de l'une de ses œuvres dont on va évidemment parler.
01:58 Et vous racontez son chemin, son parcours dans une bande dessinée publiée avec Olivia
02:02 Sautreuil aux éditions Bayard sous le titre Germaine Richier, la femme sculpture.
02:07 Germaine Richier est morte en 1959 à l'âge de 57 ans.
02:11 Vous ne l'avez pas connue.
02:12 Racontez-nous comment vous avez fait sa connaissance, sa découverte.
02:17 Qu'est-ce qui vous a poussé à raconter son histoire depuis maintenant quelques années ?
02:20 - Évidemment, j'ai été bercée par les récits de ma mère et de ma grand-mère.
02:24 Elle était très présente.
02:25 Elle était aussi très présente par ses sculptures qui étaient à la maison quand
02:30 je venais chez ma grand-mère en France.
02:32 J'habitais à l'étranger enfant.
02:33 Mais l'élément déclencheur, en fait, c'est passé hors de la famille.
02:40 C'est quand j'ai croisé son assistante et élève, Claude-Marie, qui a été au plus
02:46 près de la création pendant des années, qui était aussi artiste et qui a eu la générosité
02:51 de m'ouvrir vraiment le chemin vers Richier et qui m'a donné envie de prendre le chemin
02:59 justement pour rencontrer d'autres personnes encore vivantes qu'il avait connues.
03:03 - Alors, allez-y.
03:04 - Excusez-moi, après, ma mère m'a fait un cadeau formidable, c'est-à-dire les lettres
03:09 que Germaine Richier a écrites à son frère, mon grand-père, et donc avec une écriture
03:14 très directe, formidable, ferme.
03:18 Et du coup, j'ai été dévorée par l'envie de découvrir le reste de sa correspondance.
03:25 - Alors, pour nous plonger dans sa vie, dans son oeuvre durant toute cette émission, nous
03:29 avons également convié Ariane Coulondre.
03:31 Bonjour.
03:32 Vous êtes commissaire de l'exposition Germaine Richier qui a lieu en ce moment même au
03:35 Centre Pompidou à Paris jusqu'au 12 juin prochain et qui partira ensuite au musée
03:40 Fabre à Montpellier du 12 juillet au 5 novembre.
03:44 Germaine Richier a été la première femme exposée de son vivant au Musée national d'art
03:49 moderne, c'était en 1956, la même année que Matisse d'ailleurs.
03:53 Elle n'a pas été exposée depuis, nulle part ? Pourquoi est-ce qu'on a l'impression
03:59 de la redécouvrir en 2023 ?
04:01 - Elle a fait l'objet de nombreuses rétrospectives, mais effectivement, il était temps de lui
04:05 rendre hommage à travers une grande exposition à Paris.
04:08 Il y a eu des rétrospectives, je pense en particulier à celle qui a été organisée
04:12 à la Fondation MAG en 1996 par Jean-Louis Pratt, ou des rétrospectives à l'étranger
04:18 dans de nombreux pays européens.
04:20 Mais il était temps effectivement de la revoir et de la reconsidérer globalement à Paris
04:26 à travers une grande exposition.
04:28 - On explique ce fait qu'elle ne soit peut-être pas aussi connue que, allez disons-le, d'autres
04:32 sculpteurs hommes.
04:34 - Il y a tout un grand nombre de facteurs qui peuvent expliquer effectivement la connaissance
04:40 que l'on a, le regard que l'on porte aujourd'hui sur sa sculpture.
04:43 La première chose, c'est qu'elle est morte précocement, en 1959.
04:48 Évidemment, on peut se dire également que le fait qu'elle ait été une femme a pu
04:53 jouer dans ce relatif retrait et bien sûr, quand on considère sa cote en regard de ses
05:00 homologues masculins, on voit qu'elle n'est pas à la même hauteur que l'œuvre de d'autres
05:06 artistes, par exemple Giacometti, dont elle a été proche.
05:09 Ils ont un parcours qui est assez parallèle.
05:11 Je crois qu'il y a d'autres facteurs.
05:13 Le fait qu'elle soit assez inclassable.
05:15 En fait, son œuvre est vraiment dans une sorte d'entre-deux, entre la grande tradition
05:20 de la statuaire, elle est considérée comme l'une des héritières d'Auguste Rodin
05:24 ou d'Antoine Bourdel, dont elle était élève.
05:27 Ça a été vraiment son mentor.
05:30 Et en même temps, elle est pleinement dans son temps, elle est très proche des grands
05:33 artistes des années 50, très amie avec Dubuffet, elle croise Picasso, elle croise les grands
05:39 artistes abstraits de l'abstraction lyrique, Virada Silva, Hans Hartung.
05:43 C'est vraiment une artiste qui est entre deux moments, entre une sculpture qui est
05:50 marquée par une tradition du modelage et un art qui s'oriente vers l'assemblage.
05:55 On va écouter Bernadette, c'est l'une des lectrices, membre de la communauté du
05:58 Book Club, qui a lu Germaine Richie, l'Ouragan, cette biographie que vous signez, Laurence
06:04 Durieux.
06:05 Voici ce qu'elle en a retenu.
06:06 Nous l'attendions avec impatience.
06:08 Ce livre qui nous convie à un rendez-vous essentiel.
06:11 La redécouverte de cet artiste majeur du XXe siècle, Germaine Richie.
06:16 Depuis sa mort en 1959, elle fut invisibilisée.
06:21 Laurence Durieux, l'auteur et sa petite nièce, nous rappellent que Germaine Richie
06:26 fut l'élève de Bourdel, saluée et reconnue par Picasso et beaucoup d'intellectuels.
06:31 Elle fut en rivalité avec Giacometti sur certains salons.
06:35 Et la première femme sculpteur a exposé dans ce qui est l'actuel Palais de Tokyo
06:40 et dans des musées étrangers.
06:42 Cependant, elle ne peut être comparée à personne ni intégrée dans un quelconque
06:46 mouvement.
06:47 Impressionnisme, surréalisme, etc.
06:50 D'ailleurs, elle revendiquait détester les « isms ». La sculpture de Richie est unique.
06:55 Nouvelle, elle vient du fond des âges, voire de certaines croyances comme la tarasque et
07:01 son projet d'un cadeau qu'elle pensait porteur de malédiction.
07:04 Elle nous projette vers cette part informulée en nous de l'ordre de l'intimité et de
07:09 l'humanité la plus profonde.
07:11 Elle n'établit pas de différence entre le minéral, le végétal et l'humain.
07:16 La nature est sa principale source d'aspiration depuis son enfance dans la garrigue.
07:21 Elle aime l'idée du chaos et fut frappée par les gisants de Pompéi.
07:26 Elle se nourrit de son environnement.
07:28 Vers la fin de sa vie, elle grava ses sculptures et fut tentée par la couleur.
07:33 Ce livre, en partie documenté par la correspondance de l'artiste, est également enrichi par
07:38 les témoignages d'intellectuels et autres qui côtoient Richier.
07:42 Ses regards convergents sont précieux, ainsi que les légendes des photos de ses œuvres
07:47 qui nous ravissent.
07:48 - Laurence Durieux, il y a beaucoup de choses dans ce que vient de dire Bernadette.
07:53 Un beau résumé évidemment de votre ouvrage et de la vie de Germaine Richier.
07:58 Ce qui est intéressant, on en a dit un mot il y a quelques instants, vous commencez
08:03 l'autre livre, la bande dessinée, le roman graphique, par quel chemin parcouru.
08:08 C'est Germaine Richier qui dit cela en prenant dans ses bras l'une de ses sculptures,
08:13 ce qui est très beau et très fort dans le rapport entre l'artiste et ses œuvres.
08:19 C'était une reconnaissance absolue cette exposition en 1956 pour elle ?
08:24 - Oui, c'était une consécration.
08:26 Première femme à être exposée de son vivant au musée d'art moderne, comme vous l'avez
08:29 dit, la même Annec Matisse.
08:31 Ce n'est pas une rétrospective.
08:33 À son âge, c'était trop jeune.
08:35 C'est vrai qu'elle prend le plâtre de la grande sauterelle dans ses bras.
08:41 Elle considère ces sculptures comme des personnes vivantes, ses enfants.
08:45 C'est Georges Limbourg qui parle de sa fécondité de déesse.
08:49 Cela montre aussi que Richier, c'est un tempérament.
08:55 Dans le plâtre de cette grande sculpture, elle a tracé sur la paume de la main un cœur,
09:01 comme une espèce de talisman, un gris-gris.
09:04 On est en 1956, elle est malade depuis 1954.
09:08 La réponse à sa maladie, c'est un travail acharné.
09:10 C'est de la couleur dans son travail.
09:12 Oui, c'est une consécration.
09:16 En tout cas, merci pour cette lecture lumineuse.
09:19 Après, rivalité, je ne sais pas si c'est un mot que j'employerais pour Richier.
09:22 La rivalité n'est pas de mise, elle trace son chemin,
09:25 comme vous l'avez dit, au-delà de tous les courants.
09:28 Mais Richier, ce n'est pas aussi une artiste qui va tout faire pour avoir les bons marchands,
09:33 pour se placer.
09:34 Au contraire, elle est généreuse.
09:36 Elle invite d'autres grands artistes de son époque à intervenir dans son travail.
09:40 Elle protège, elle encourage les jeunes artistes.
09:46 Ça vient aussi peut-être de son parcours.
09:48 On va dire un mot de son enfance et de comment elle en est venue à la sculpture.
09:51 Mais elle est aussi très critiquée en 1956 des détracteurs,
09:55 notamment dans la presse, qui parle d'un "exéma sculpté".
09:59 Oui, bien sûr.
10:00 En fait, elle incarne vraiment la quintessence de l'art moderne.
10:04 C'est ça qui est intéressant.
10:05 C'est que quand Jean Cassou choisit d'ouvrir les portes du musée d'art moderne,
10:10 du Palais de Tokyo à l'époque, à Germaine Richier,
10:13 c'est aussi une stratégie du musée de s'ouvrir à l'art vivant.
10:18 Puisqu'auparavant, on présentait essentiellement les œuvres des artistes après leur mort.
10:22 Donc, la question qu'a dû se poser Jean Cassou, c'est quel artiste vivant
10:26 est le plus représentatif de notre époque ?
10:28 Et il choisit Germaine Richier.
10:30 Et bien sûr, il y a une réaction très forte.
10:33 Mais je dirais que c'est une réaction globale par rapport à cette esthétique,
10:37 cette esthétique expressionniste où le modelage est exacerbé.
10:43 Les sculptures sont travaillées en creux, en bosses, en trous.
10:47 Et pour ces contemporains, ces œuvres sont l'expression de la menace qui pèse sur l'humanité.
10:54 À l'époque, on est au sortir de la Seconde Guerre mondiale.
10:57 Il y a aussi une réaction par rapport à cette question de la terreur, de l'effroi.
11:02 Ces œuvres ne laissent pas indifférentes.
11:04 On voit qu'elles ont une intensité, une puissance qui continuent à nous parler aujourd'hui.
11:07 On va revenir sur la rupture qui a lieu, évidemment, après la Seconde Guerre mondiale.
11:11 Revenons sur son enfant, si vous le voulez bien, Laurence Durieux.
11:14 Germaine Richier naît dans une famille pas du tout d'artistes, dans une famille dans les Bouches-du-Rhône.
11:21 Comment elle découvre son attrait pour l'art, la sculpture ?
11:26 Oui, c'est vrai. Ses parents vivent de la terre, sont minotiers, viticulteurs,
11:30 donc de la vigne, de l'huile d'olive et du blé.
11:35 Richier, dès le début, a une enfance de sauvageonne.
11:40 Elle passe moins de temps sur les bancs de l'école que dans la garrigue,
11:46 à sentir le parfum des rochers, à collectionner les bestioles, à les scruter à la loupe.
11:52 Elle est vraiment nourrie de ça.
11:54 Après, je ne suis pas historienne de l'art.
11:56 Je ne sais pas s'il y a des artistes qui naissent avec ça en eux.
11:59 Mais c'est vrai qu'à 12 ans, à Saint-Trophy, elle rencontre l'art, en fait,
12:05 dans le cloître de cette église romane où il y a des figures.
12:10 Elle est en arrêt et elle décide qu'elle va être sculpteur.
12:13 Je pense qu'elle ne sait pas trop ce que c'est qu'être sculpteur.
12:16 Mais elle suit son instinct et jusqu'au bout de toute sa vie, elle va suivre son instinct.
12:20 Elle le dit très vite lors d'un repas de famille.
12:22 Son père lui dit "le monde de l'art n'est pas fait pour les femmes.
12:26 Tu iras donc en pension".
12:28 Elle passe, elle surpasse, elle dépasse cette épreuve, si je puis dire.
12:32 Et puis, il y a trois rendez-vous, trois moments pour l'émancipation de cette artiste Ariane Coulombre.
12:42 C'est notamment d'abord l'entrée au Beaux-Arts de Montpellier.
12:44 - Effectivement, en 1921, elle entre à l'École des Beaux-Arts de Montpellier,
12:48 dans l'atelier de Louis-Jacques Guy, un ancien élève de Rodin.
12:51 Il faut dire que l'École des Beaux-Arts est ouverte aux femmes depuis une vingtaine d'années.
12:55 Donc, Richy est vraiment l'une des pionnières dans cette histoire de la sculpture moderne.
13:00 Donc, première étape, effectivement, de cette émancipation, la formation.
13:04 - C'est là où elle dit "je ne veux pas passer par la peinture, je veux directement aller faire de la sculpture".
13:09 - Oui, on est vraiment dans l'attrait pour la matière, pour le volume.
13:13 Effectivement, et on verra par la suite que finalement, quand elle dessine,
13:18 elle ne dessine pas pour faire des esquisses préalables,
13:21 mais elle dessine directement sur le corps de ses modèles ou sur ses sculptures.
13:25 Et quand elle fait des dessins, finalement, c'est toujours d'après ses sculptures.
13:29 La sculpture est en premier dans sa création.
13:34 - Comme si elles étaient des modèles, en fait. - Absolument.
13:36 - D'abord, les Beaux-Arts, et puis ensuite ?
13:38 - Ensuite, elle monte à Paris en 1926.
13:41 Elle est chapronnée par son grand frère, Jean Richy,
13:45 parce que ses parents sont tout à fait réticents à laisser leur cadette monter dans la grande ville.
13:52 Ils n'ont aucun lien avec le monde de l'art.
13:56 Et donc, elle va réussir à faire sa place, à se loger,
14:01 à trouver un métier alimentaire au début,
14:06 pour faire des mannequins en bois pour une société qui fait ce genre d'objet.
14:12 Et elle va surtout toquer à la porte de l'atelier de Bourdel,
14:17 le maître qui est vraiment extrêmement célèbre,
14:20 qui accueille des centaines d'élèves dans son atelier,
14:24 mais qui à l'époque est très âgée et ne prend plus d'élèves.
14:27 Il le dit au début, donc elle a un petit peu de mal,
14:30 mais elle va persister et elle va le convaincre de la prendre avec lui.
14:36 Et elle va vraiment se faire accepter.
14:38 Il y a un lien quasiment filial entre eux,
14:41 une reconnaissance des liens amicaux,
14:45 et presque une figure paternelle dans la figure du collège.
14:48 - Il l'appelle, Laurence Duryeu, "mon Rossignol".
14:50 - Son numéro, oui, c'est vraiment sa dernière élève particulière, chérie, vraiment.
14:57 - Qu'est-ce qu'elle apprend chez lui ?
14:59 - Elle apprend le rude métier du sculpteur.
15:02 C'est vrai que ce qui la passionne, c'est la construction.
15:06 Elle expérimente aussi la technique de la triangulation,
15:10 qu'elle va utiliser tout au long de sa vie.
15:13 C'est une mesure à partir du compas, du fil à plomb.
15:17 Elle va utiliser peu d'outils.
15:20 Elle dit qu'il faut sentir la joie de la main qui crée.
15:23 Mais c'est vrai qu'elle prend des mesures avec le compas et le fil à plomb
15:27 sur le modèle qu'elle reporte sur la terre qui monte,
15:30 tout en faisant mentir le compas.
15:32 Donc une technique très ancestrale et qu'elle a toujours explorée
15:36 pour justement mettre en valeur cette géométrie secrète du corps,
15:40 pour faire ressortir cette sculpture de l'intime,
15:44 ce mystère que chacun porte en nous.
15:47 - Elle va apprendre évidemment le buste, la technique du buste.
15:50 Et c'est ce qui est très marquant dans l'exposition au Centre Pompidou,
15:53 à Riane-Coulombe, c'est qu'on entre dans cette exposition
15:56 et là on se retrouve devant, alors il n'y a pas une soixantaine de têtes et de bustes,
16:00 il y en a un petit peu moins, mais une sorte de forêt de bustes.
16:03 Qui sont ces personnes qu'elle a sculptées ?
16:05 - Toutes sortes de personnes.
16:07 Il y a à la fois des proches, il y a des modèles professionnels,
16:10 des enfants, des gens plus âgés, des femmes, des hommes.
16:13 En fait, on voulait vraiment qu'en arrivant, le visiteur soit frappé
16:18 par l'intensité de ces visages qui évoquent la diversité de ces modèles.
16:24 On voit en arrivant aussi bien le visage du fils Coutin,
16:29 qui est donc le fils de Robert Coutin, un sculpteur
16:34 qui a accueilli Richier à ses débuts à Paris.
16:37 Et à côté, il y a une tête très étrange que Richier a conservée dans son atelier,
16:45 un plâtre dont les traits sont effacés.
16:49 Et donc il y a déjà dans les années 20-30,
16:53 à la fois l'expression de sa virtuosité, de son métier classique.
16:58 Elle est capable d'exprimer la vérité du modèle, ses traits, sa physionomie.
17:02 Et en même temps, il y a l'idée de dépasser les apparences,
17:05 de montrer ce qu'il y a à l'intérieur, ce qui est sous la peau, comme disait Alain Jouffroy.
17:11 C'est vraiment ça qu'on voulait faire comprendre en arrivant pour les visiteurs,
17:16 c'est l'importance de l'humain.
17:18 - Voilà, c'est vers là que je voulais vous emmener.
17:20 L'importance de l'humain, en tout cas au début,
17:22 puisque après ça va évoluer et on va voir comment.
17:24 Qu'est-ce que ça voulait dire l'importance de l'humain, Laurence Durieux,
17:28 dans les premiers travaux de votre grande tante ?
17:32 - C'est vrai qu'elle disait que seul l'humain compte,
17:35 que le modèle vivant lui est indispensable,
17:38 mais elle prend l'humain dans sa globalité.
17:40 Elle ne s'arrête pas à la nature humaine,
17:42 mais elle va jusqu'à la nature minérale, animale, végétale.
17:49 Et puis aussi, c'est une manière de transcender les âges.
17:53 Elle a l'amour du débris, des ravages, des morsures du temps.
17:58 Elle est folle d'un modèle qui s'appelle Nardone, il a 80 ans à peu près.
18:03 Elle aime son côté primitif.
18:06 Son assistante, Claude-Marie, dit que c'est comme un homme
18:08 qui descend de la montagne, dénué de toute expressivité.
18:12 Il est là et elle l'aime comme il est.
18:14 Et on a vraiment l'impression qu'il descend des âges.
18:17 Ça donne aussi un sentiment d'une culture complètement atemporelle.
18:22 - Et puis ça évolue.
18:24 Evidemment, ce qui est intéressant dans son parcours,
18:26 on l'a un peu oublié dans la deuxième partie du XXe siècle,
18:29 si on peut dire, c'est qu'elle est reconnue très rapidement.
18:31 Elle a un premier prix en 1936.
18:34 Elle est décorée de la Légion d'honneur ensuite dans les années 50.
18:37 Cette exposition de 56 dont on a parlé.
18:41 Et puis, il y a la guerre qui arrive.
18:44 Elle s'est mariée, ça c'était le troisième point de l'émancipation,
18:47 avec Otto Banninger, qui est zuricois, un sculpteur lui aussi,
18:53 qui a travaillé d'ailleurs pour Bourdel, si je ne dis pas de bêtise.
18:56 - En fait, quand elle arrive chez Bourdel, à la fois,
18:58 elle apprend, elle perfectionne son métier,
19:01 elle apprend la liberté dans la création.
19:03 Et surtout, autre chose essentielle, c'est qu'elle s'insère dans un réseau d'artistes
19:10 et elle rencontre de nombreuses personnalités qui vont la marquer.
19:15 Et elle va rester très amie avec un grand nombre de ses sculpteurs ou artistes.
19:20 Et elle rencontre Banninger, qui est praticien, qui est un sculpteur zuricois,
19:23 praticien de Bourdel.
19:25 Juste après la mort de Bourdel, ils vont se marier.
19:29 Et quand la guerre arrive, ils sont en Suisse en 1939.
19:33 Ils vont rester pendant six ans en exil, où elle devra se réinventer.
19:39 Elle va, et son œuvre, à la fois c'est une rupture dans sa vie,
19:42 et puis son œuvre va en quelque sorte s'exacerber
19:45 et elle va aller plus loin dans sa recherche.
19:47 Elle va oser, alors qu'elle est déracinée, elle dit qu'elle est déracinée,
19:50 elle est loin de son pays et de sa famille.
19:53 Elle va oser aller plus loin et dépasser finalement les conventions classiques.
19:57 On va écouter Marie.
19:58 Marie, elle a lu le roman graphique "Laurence Durieux" que vous publiez également.
20:02 Et elle est ensuite allée au Centre Pompidou pour voir l'exposition.
20:05 On va donc écouter ce qu'elle en retient.
20:07 J'ai lu le roman graphique sur la vie et l'œuvre de Germaine Richier
20:11 sans aucun a priori, puisque je ne connaissais pas du tout l'œuvre de cette artiste.
20:16 Je l'ai trouvée très intéressante parce que j'ai trouvé qu'il y avait un vrai équilibre
20:20 entre les éléments biographiques qui sont rapportés
20:23 et la présentation et la découverte des œuvres,
20:26 des différentes sculptures, des différents types de matériaux utilisés,
20:30 et que l'un n'empiétait pas sur l'autre.
20:33 Lorsque j'ai visité cette semaine l'exposition,
20:36 ça a confirmé mes impressions de lectrice
20:39 et ça m'a permis aussi, cette lecture préalable,
20:42 de m'affranchir de la lecture des cartels
20:44 et de vraiment être dans l'émotion de la découverte des œuvres,
20:47 de leur matière, leur format aussi,
20:50 qui bien entendu est particulier et très différent de la lecture du roman graphique.
20:56 Contre toute attente, lorsque j'avais lu le roman,
20:59 j'avais eu très envie de découvrir la sculpture La Sauterelle,
21:03 donc je l'ai trouvée très belle,
21:05 mais j'ai été frappée par d'autres œuvres que j'avais pourtant découvertes dans le roman graphique,
21:09 notamment La Chauve-Souris, que j'ai trouvée magnifique, très délicate.
21:13 Et ma question à Laurence Durieux aurait été de savoir,
21:17 c'est une question un petit peu personnelle,
21:19 si elle pouvait nous indiquer quelle était la sculpture qu'elle préférait,
21:23 bien entendu j'imagine qu'il n'y en a pas qu'une seule,
21:25 mais dans l'œuvre de Germaine Richier.
21:27 C'est cruelle comme question !
21:29 Oui, parce que vous pouvez choisir.
21:31 J'ai un grand, grand élan vers sa première Fourmi,
21:35 qu'elle fait en 1946,
21:37 donc elle revient seule, c'est aussi une manière de s'affranchir,
21:40 elle revient seule sans son mari,
21:42 elle a peur d'avoir été oubliée à Paris,
21:45 tout est à reconstruire, son atelier prend l'eau,
21:48 elle fait le plâtrier, le peintre,
21:52 et elle se jette à corps perdu dans son travail,
21:55 et elle fait cette sculpture.
21:58 Pour la première fois, elle expérimente des fils,
22:00 donc c'est une manière aussi de dessiner l'espace.
22:03 Et c'est cette femme arachnide,
22:06 donc on est en plein dans l'hybride,
22:08 et vraiment là, on est dans la sculpture de l'affût, de l'attaque,
22:12 et pour moi, Richier, c'était vraiment une guerrière,
22:15 combat, c'est un mot qu'elle adorait,
22:17 elle utilisait peu d'instruments,
22:19 mais il y en avait un petit qu'elle appelait l'épée,
22:21 elle appelait d'autres sculptures des guerriers, la lutte,
22:23 et c'est vrai que vous parliez d'affranchie,
22:25 c'est une affranchie,
22:27 elle disait d'ailleurs, les difficultés,
22:30 je marche dessus, elles s'aplanissent.
22:32 Et c'est vrai que cette sculpture,
22:34 avec ce petit visage, où il n'y a presque rien et tout en même temps,
22:37 me bouleverse.
22:42 On entre dans l'exposition, on l'a dit tout à l'heure,
22:44 avec les bustes, avec ces visages,
22:46 et puis on est ensuite emmenés, embarqués,
22:49 carrément dans un autre monde,
22:51 un monde presque surréaliste,
22:53 même s'il ne faut pas prononcer ce mot,
22:55 elle n'aurait pas aimé.
22:56 On est dans la partie nature et hybridation,
22:58 il y a ces fourmis, ces chauves-souris,
23:00 ces sauterelles qui sont là,
23:02 et qui en même temps, nous ressemblent presque.
23:04 Comment expliquer ça Ariane Coulombre ?
23:06 C'est bien ce que disait Germaine Richier
23:08 dans la citation qu'on a entendue au début de l'émission.
23:11 Effectivement, Germaine Richier cherche,
23:14 à son retour à Paris en 1946, après la guerre,
23:18 à réinventer l'humain.
23:20 Beaucoup d'artistes se sont finalement tournés vers l'abstraction,
23:24 considérant qu'après le désastre,
23:26 la figure de l'humain ne pouvait plus être représentée.
23:30 Et Richier, elle, reste vraiment,
23:33 et quand elle dit "seul l'humain compte",
23:35 je crois qu'il y a cette question de la représentation de l'humain
23:38 et de l'attachement à la figuration.
23:40 Mais l'humain ne peut plus être tel qu'il était auparavant.
23:44 L'humain est blessé.
23:46 On a à cette époque-là la représentation,
23:48 son couple extraordinaire, l'orage, l'ouragan,
23:51 qui sont des statues d'une puissance
23:54 campée sur leurs jambes,
23:56 mais en même temps qui semblent sur le point de se mouvoir,
23:58 qui expriment à la fois toute la force
24:01 et la fragilité de l'humanité à cette époque-là.
24:04 Richier va, dans le même temps,
24:06 avoir l'idée, qui est extraordinaire,
24:10 d'hybrider, de réinventer l'humain
24:12 par sa fusion avec le monde de l'animal,
24:15 le monde du végétal.
24:16 C'est une fusion qui est à la fois
24:19 une hybridation des identités,
24:21 elle se reconnaît dans ses petits animaux,
24:24 comme le disait Laurence.
24:25 Elle a grandi avec toutes ces petites bêtes,
24:28 des animaux souvent méprisés
24:30 qu'elle pouvait voir dans la garrigue
24:33 et qu'elle va collectionner ensuite dans son atelier.
24:36 Mais c'est aussi une hybridation des formes.
24:38 Ce qui est extraordinaire avec Richier,
24:40 et là c'est vraiment l'historienne de l'art qui parle,
24:43 c'est sa manière de jouer sur des formes naturelles
24:47 qu'elle va ramasser, collectionner
24:49 et intégrer à l'intérieur de sa sculpture.
24:51 C'est une hybridation des formes.
24:53 Elle trouve une branche qu'elle va utiliser
24:55 pour créer un homme-forêt.
24:57 Cette nature va lui servir de base,
25:02 de racine, pour inventer une nouvelle sculpture.
25:05 Ce mot de racine auquel elle donnait beaucoup d'importance,
25:09 évidemment, elle le disait Laurence Durieux.
25:11 Elle était capable de voir le nombre d'or
25:14 dans une patte d'un insecte.
25:15 D'ailleurs, elle disait le membre d'un insecte.
25:18 On le voit tout ça dans l'exposition,
25:21 puisqu'il y a toute une partie qui reconstitue
25:23 en quelque sorte son atelier,
25:24 et où on découvre un squelette de chauve-souris,
25:27 un petit bout d'écaille de je ne sais quel poisson
25:30 ou je ne sais quel animal qui s'est baladé par là,
25:33 et du tatou qu'elle a récupéré.
25:35 Tout ça, c'est très important pour comprendre
25:38 ensuite le résultat de ces sculptures.
25:41 Absolument, c'est vraiment le projet de cette exposition,
25:45 de comprendre son processus créatif.
25:47 Je crois que si on voit ses œuvres isolément,
25:50 on peut les admirer, les trouver extraordinaires,
25:53 mais peut-être qu'on reste un petit peu en retrait
25:56 par rapport à toute la démarche,
25:59 et la démarche extrêmement radicale de Richier.
26:02 Il faut vraiment comprendre que l'art de Richier,
26:05 c'est un art du modelage, de la main,
26:07 et on parle toujours de l'expressivité de la terre
26:10 qui est ensuite fondue en bronze.
26:12 Mais l'art de Richier, c'est aussi un art de l'objet,
26:14 et la capacité qu'elle a à trouver des formes signifiantes
26:19 dans la nature ou autour d'elle.
26:22 Elle a par exemple dans son atelier le trident des gardiens de Camargue,
26:26 c'est en fait le bout de la lance des hommes
26:29 qui gardent les troupeaux de chevaux ou de taureaux.
26:32 C'est une sorte de forme de lune qui fait comme des petites cornes,
26:36 et elle va avoir l'idée géniale d'utiliser cette forme de pique
26:41 pour la tête d'une de ses sculptures, la tauromachie,
26:44 qui confère au personnage des petites cornes
26:48 comme le taureau qu'il est censé avoir tué.
26:51 Il y a vraiment cette idée dans l'usage de ces objets
26:55 de la fluidité entre le vivant et ce qui nous entoure et nous-mêmes.
27:02 Arrêtons-nous un instant sur l'ouragan et l'orage.
27:05 Ce sont deux très grandes statues qui représentent un homme et une femme,
27:10 Laurence Durieux ?
27:11 Oui, c'est un homme et une femme qui surgissent des entrailles de la terre,
27:17 du magma, on est vraiment dans la sculpture tellurique.
27:23 Marie-Darriussecq, dans le catalogue de l'exposition,
27:26 écrit un très beau texte sur cette grande sculpture qu'est l'ouragan,
27:29 et elle dit "L'ouragan avance sur nous, terrible et menaçante, affectueuse et aimante".
27:35 C'est tout à fait deux choses qu'il y a toujours chez Richier.
27:38 C'est à la fois la menace et la survie, une dimension d'inquiétude
27:45 et en même temps un sentiment très fort de vitalité.
27:49 Je crois que c'est ça qui fait qu'elles sont aussi puissantes.
27:53 D'ailleurs, ces œuvres ont été lues comme des représentations du cataclysme
27:59 qui s'est abattu sur l'humanité avec la guerre, les bombes atomiques,
28:02 les camps de concentration, on est juste après cette histoire-là dans ce contexte.
28:07 Pour ses contemporains, il est très clair que l'art de Richier exprime la violence du monde.
28:12 En même temps, Richier disait "Moi je veux faire des sculptures vivantes".
28:16 Elle parle de la vie.
28:18 On a retrouvé en travaillant pour l'exposition des notes de Francis Ponge,
28:23 grand écrivain qui a été très ami et grand admirateur de Richier,
28:26 et qui dit que le geste du sculpteur peut être rapproché de celui d'un chirurgien.
28:32 Il s'agit d'ouvrir, de trouver, mais pour réparer, pour nettoyer et pour revitaliser,
28:39 c'est-à-dire pour redonner vie.
28:41 C'est ça qui est toujours fascinant dans l'art de Richier.
28:44 Oui, c'est une nature gaie et inquiète.
28:46 Il y a un mot de Bernard Milray que j'aime beaucoup qui dit
28:49 "Cet être de panique est une femme heureuse".
28:52 C'est vrai qu'elle craint la nature quand elle est déchaînée.
28:56 Elle est fascinée par la nature de près.
28:59 J'imagine qu'elle se souvient des crues qui débordaient d'Ulaise
29:04 et qui ravageaient la maison de son enfance.
29:08 C'est vrai qu'elle a été marquée, vous l'évoquiez,
29:12 par les moulages des corps pétrifiés de Pompéi.
29:16 C'est vraiment une nature gaie et inquiète.
29:20 Il y a aussi dans son parcours et dans ses œuvres,
29:24 celle qui va faire le plus grand scandale, on va en dire un mot bien sûr,
29:27 c'est "Le Christ d'Assis".
29:30 Vous nous racontez l'histoire brièvement, Laurence Durieux ?
29:33 Brièvement, c'est aussi une pionnière en ce sens où c'est la première fois
29:38 que l'Église commente un Christ de cette importance
29:41 pour le cœur d'une église en Haute-Savoie,
29:44 qui est construit dans le cadre des sanatoriums.
29:49 Ce sont un petit groupe de curés, frondeurs, acteurs du renouveau d'art sacré,
29:54 qui vont d'atelier en atelier et ils commandent à Germaine Richier
29:58 le Christ principal pour le cœur.
30:01 Le projet est tout de suite accepté.
30:03 Pour la première fois, elle fait une maquette,
30:05 parce que d'habitude, un petit cro-barre suffit.
30:07 Elle se lance dans la sculpture, là, elle fait une maquette.
30:10 Les curés sont emballés et elle fait cette sculpture
30:14 comme toute autre sculpture, avec ses compas, ses filapelons,
30:17 le modèle qu'elle convoque.
30:20 Le Christ est installé, consacré par l'évêque d'Annecy, Monseigneur Sébron.
30:26 Quelques mois plus tard, un des évêques est invité à une conférence
30:31 sur "Est-ce que cette église d'Annecy participe au renouveau de l'art sacré ?"
30:36 Là, en fait, c'est un vrai traquenard.
30:38 Il y a un petit groupe d'intégristes qui distribue un tract,
30:41 "On ne se moque pas de Dieu", qui confronte le Christ de Germaine Richier
30:45 à l'image d'un Christ saint-supécien, avec les joues roses,
30:50 les perles de sang qui coulent des épines.
30:54 Et de là va surgir ce qu'on va appeler la querelle de l'art sacré,
31:00 avec l'appui du Vatican.
31:03 A l'époque, c'est Pie XII qui juge ce Christ blasphématoire.
31:07 Le Christ est retiré du chœur, de l'église.
31:11 - À la demande de Germaine Richier ?
31:13 - Non, pas du tout.
31:14 - C'est l'évêque qui...
31:15 - C'est l'évêque.
31:16 Non, Germaine Richier est très meurtrie que ce Christ...
31:18 Germaine Richier demande son retour à l'atelier, ce qui lui est refusé.
31:22 Et le Christ va pour le coup vivre un vrai chemin de croix
31:26 entre la vestibule du presbytère, la crypte.
31:31 Il va finir relégué dans la petite chapelle des morts, adjacente.
31:35 Et il va être remis dans le chœur, dix ans après la mort de l'artiste,
31:42 justement pendant la semelle sainte, un peu en catimini.
31:46 Tout le monde est mort, maintenant.
31:49 Paul VI est pape, l'évêque d'Annecy est mort.
31:54 Et c'est le père Caille, qui est le nouveau curé de la paroisse,
31:59 qui se dit "mais après tout, qui demande rien à personne et qui réinstalle".
32:04 Et qui ravit les paroissiens, parce que les paroissiens ont toujours aimé ce Christ.
32:10 - On ne va pas raconter toute son histoire parce que ce n'est pas possible.
32:12 On n'a pas le temps.
32:13 Il y a beaucoup d'autres choses à raconter.
32:16 Mais s'il faut un argument pour aller voir cette exposition,
32:21 et j'espère ne pas vous piéger avec cette question, Ariane Coulombe,
32:25 mais qu'est-ce qu'il faut retenir de cet artiste qu'on a méconnu
32:29 et qu'on a envie de redécouvrir aujourd'hui ?
32:31 - Je pense que c'est à la fois l'une des plus grandes sculptrices modernes.
32:35 Et je pense que tous les amateurs d'art, d'art moderne et de sculpture
32:39 doivent venir au Centre Pompidou pour voir, pour redécouvrir cette grande artiste.
32:45 Et aussi, je crois, au-delà, c'est une œuvre qui nous parle.
32:49 Qui nous parle aujourd'hui de l'humanité, qui nous parle de la violence du monde.
32:55 Et bien sûr, beaucoup de témoignages de visiteurs me parlent de la guerre en cours en Ukraine,
33:01 me parlent de la menace qui pèse sur nous, de la question aussi du rapport de l'humain à la nature
33:06 et de la manière qu'a richi de nous rappeler ce qui nous lie à ce qui nous entoure.
33:11 Je crois que c'est une œuvre profondément contemporaine.
33:14 Rapidement, cette puissance qu'elle a de résister au chaos, vraiment.
33:20 - Avec à la fin aussi, une période un peu différente où elle utilise du vert, de la lumière, des transparences.
33:26 C'est très beau et c'est très perturbant, je vais vous le dire,
33:29 parce qu'on découvre des choses qui sont vraiment très belles.
33:32 Merci à toutes les deux d'être venues.
33:34 Laurence Durieux, vous publiez aux éditions Fage un portrait de votre grande-tante Germaine Richer,
33:38 l'ouragan du nom de cette œuvre.
33:40 Elle a raconté son parcours dans une bande dessinée à romans graphiques,
33:43 publiée avec Olivia Sautreuil aux éditions Bayard sous le titre Germaine Richer, la femme-sculpture.
33:48 Merci à Ariane Coulombre.
33:50 L'exposition Germaine Richer, dont vous êtes commissaire, a lieu en ce moment jusqu'au 12 juin prochain au Centre Poupidou.
33:56 Vous pourrez la découvrir ensuite à Montpellier au Musée Fabre du 12 juillet au 5 novembre prochain.