Inspirées de Britney Spears, des Spice Girls ou encore Clueless, comment sont nées Alex, Clover et Sam ? Les Totally Spies, ces héroïnes iconiques de notre enfance ❤️
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00:00 Les gens nous disaient "vous êtes complètement fou, ça ne marchera pas".
00:03 Aux Etats-Unis, on a fait toutes les chaînes.
00:05 On est un cas complètement unique.
00:06 Ça a été 19 ans à l'antenne sur TF1.
00:09 Bonjour, je suis David.
00:11 Bonjour, je suis Stéphane.
00:12 Bonjour, je suis Vincent.
00:13 Et on va vous raconter...
00:14 La folle histoire de Total Spies !
00:16 Tout a commencé parce qu'on était à une période
00:25 où il n'y avait aucun programme pour filles.
00:29 Et avec des filles qui étaient en charge.
00:30 En fait, quand on a commencé à penser à Total Spies,
00:32 c'était le début de toute la vague de "girl power".
00:35 Pour ceux qui se rappelaient, il y avait Britney Spears,
00:39 les Spice Girls.
00:40 Du côté des grands, des adultes,
00:42 il y avait énormément de filles en charge, d'héroïnes.
00:45 Et pas du tout en animation.
00:47 C'était un peu le contraire.
00:48 C'est-à-dire que toutes les chaînes nous disaient
00:50 "les programmes avec des filles en lead, ça ne fonctionnera jamais".
00:54 Parce que c'est les garçons qui tiennent la télécommande.
00:57 C'est-à-dire que l'idée, c'est qu'il fallait toujours rajouter un garçon.
00:59 Et tout au long du développement,
01:01 on nous a demandé de rajouter un garçon.
01:03 Et d'ailleurs, un chien.
01:05 Ce qui était nouveau, et là où on a eu de la chance,
01:08 parce que c'était un certain contexte,
01:09 c'est que la responsable de TF1 nous a autorisés
01:14 à tenir le cap et à faire un programme sans garçon.
01:19 Mais il faut savoir qu'à l'époque, c'était un peu fou.
01:23 Les chaînes n'achetaient pas de programme.
01:25 Ça n'existait pas avec des filles.
01:27 Et quand on a fait Total Space,
01:29 on a commencé de le vendre à TF1 et puis à Fox aux Etats-Unis.
01:32 C'était un peu les exceptions.
01:34 Partout ailleurs où on parlait du programme,
01:36 les gens nous disaient "vous êtes complètement fous,
01:38 ça ne marchera pas et on n'achètera pas de programme
01:41 avec des leads féminins".
01:43 Il y avait une deuxième originalité de Total Space,
01:45 ce qui est très important,
01:46 c'est qu'en tant que société française,
01:48 on a fait un programme qui se passait aux Etats-Unis.
01:51 Ce qui était une folie, une deuxième folie.
01:53 Nous, notre objectif, c'était d'aller directement
01:57 viser le marché américain.
02:00 Et d'ailleurs, parce qu'on se disait
02:01 si on a le marché américain, on aura le marché mondial.
02:04 Et même pour le prénom des filles,
02:06 comme on ne savait pas du tout les prénoms à la mode là-bas,
02:09 je me rappelle à l'époque, c'était des fax.
02:10 Si tu veux me parler, envoie-moi un fax.
02:13 On a envoyé des fax à des gens qu'on connaissait à Los Angeles
02:15 pour leur demander trois prénoms
02:18 qui puissent être à la mode à Los Angeles.
02:20 Et on a fait ce programme en s'imaginant vivre aux Etats-Unis.
02:25 On était tous un peu fascinés par ça.
02:27 Un peu l'époque de Beverly Hills, pour ceux qui s'en rappellent.
02:31 Oui, c'était l'époque Beverly Hills,
02:32 c'était l'époque aussi Buffy en fiction,
02:35 qui était très, très populaire à l'époque.
02:36 On avait un peu situé des lieux emblématiques de Los Angeles
02:41 qu'on a retrouvés ensuite dans notre pré-production
02:42 lorsque j'ai rapporté toutes les photos à l'équipe.
02:44 Le lycée de Beverly Hills.
02:46 Le lycée de Beverly Hills, Venice Beach, Rodeo Drive.
02:49 Enfin, on a fait notre grand tour.
02:50 On était aussi très, très imprégnés
02:52 des séries américaines des années 70-80.
02:55 Pour ne pas les citer, Les Trois Drôles de Dame.
02:58 Et Clueless aussi, qui était un film important
03:00 dans les références de Totally Spies,
03:02 qui aussi devait se mélanger avec du True Lies.
03:05 - May I see your invitation, please ? - Sure.
03:07 Un mélange entre du très girly,
03:11 de la vie à l'école, d'étudiante,
03:13 et puis de l'action débridée, cachée, et une vie secrète.
03:16 Nos directeurs d'écriture de l'époque,
03:18 Robert et Michel Lamoureau,
03:19 c'était un couple, homme-femme.
03:20 Et on sentait bien, d'ailleurs,
03:21 dans la répartition de leur travail,
03:24 en tout cas moi, lorsque je recevais les scripts.
03:25 J'ai deux belles sœurs.
03:27 Deux belles sœurs qui aussi ressemblent beaucoup
03:29 au profil de chacune des filles.
03:32 Et donc c'est aussi un peu ce qui m'a permis, moi,
03:34 d'avoir une référence pour essayer de les caractériser.
03:38 Autour de moi, j'ai une Clover et une Alex.
03:40 Et moi, je suis avec Sam.
03:41 Et en fait, tout le monde était poussé
03:43 vers des archétypes de filles très superficielles
03:47 et un peu faufoles.
03:48 Comment t'as fait pour en avoir ?
03:49 Ils affichent complet depuis des semaines !
03:51 Et je pense que ce qui a été vraiment réussi,
03:53 c'est qu'on a fait des personnages comme Clover,
03:55 par exemple, qui étaient à la fois superficiels
03:57 et à la fois qui n'étaient pas des victimes,
03:59 qui n'étaient pas des personnages passifs,
04:01 mais qui faisaient avancer l'action, l'enquête.
04:04 Qui n'étaient pas bêtes.
04:05 Qui n'étaient pas bêtes.
04:06 Si vous touchez un seul cheveu des membres du groupe,
04:08 je jure de vous faire avaler votre joyau,
04:10 espèce de vieux vampire à moustache réducteur de tête !
04:12 C'était un équilibre très, très difficile
04:14 parce qu'on essayait de nous pousser
04:16 soit dans une direction,
04:17 et nous disaient "des filles superficielles, c'est génial !"
04:20 - Merci !
04:21 Et puis, il y avait ceux qui nous disaient
04:22 "oh là là, ça manque de profondeur !"
04:24 Je pense que ce qui a été génial dans Total Dispareil,
04:25 c'est qu'on est arrivé à un peu faire les deux, en fait.
04:28 Le plus difficile à créer au tout début,
04:31 c'était Clover.
04:32 Parce que Clover, étant un personnage superficiel,
04:34 c'était celle sur laquelle tout le monde,
04:36 des auteurs, des designers,
04:39 tout le monde était tenté d'en faire une caricature.
04:41 Souvent, les filles superficielles,
04:44 en télévision, en cinéma,
04:46 sont un peu méchantes.
04:47 Et tout notre travail, tous les trois,
04:50 ça a été d'éviter ça.
04:51 Ce qui fait un bon show, c'est d'abord
04:53 que les personnages soient d'abord sympas.
04:56 Parce que, quelquefois, le cinéma français oublie,
04:58 à mon avis.
04:59 Puis, gentils.
05:00 Et ça, David a fait très attention à ça.
05:03 Toujours la gentillesse.
05:04 Et ça, c'est très important dans tout notre travail.
05:06 Et puis drôle.
05:07 Mais drôle par la construction de leur personnalité.
05:11 Il fallait réussir à amuser l'enfant,
05:14 mais aussi un peu le parent qui regarde le programme.
05:18 Ça a comment les moments surréalistes ?
05:20 On appelait ça, j'ai plusieurs noms,
05:21 c'était les moments de Japanese.
05:23 C'était la troisième innovation, en fait.
05:25 C'est qu'on intégrait de l'animation japonaise,
05:27 des inspirations d'animation japonaise dans le programme.
05:30 J'avais une culture entre les deux,
05:31 entre les séries d'animation américaines
05:35 et puis aussi une passion pour le cinéma d'animation japonais.
05:40 Donc là, je voyais une opportunité formidable
05:42 de balayer ou d'époussirer le style d'animation française.
05:46 Ça a été appelé par les Américains, le "Franime".
05:49 Je me rappelle qu'il y avait deux choses
05:51 qu'on avait depuis le début à l'écriture.
05:52 C'était le Whoop qui n'avait pas encore de nom.
05:55 Et les gadgets.
05:56 Votre scanner corporel 3D avec son bracelet velcro.
06:00 Nous, les gadgets, c'était important
06:02 parce que l'une de nos références, c'était quand même James Bond.
06:04 Il y avait True Lies, mais il y avait beaucoup de James Bond.
06:07 La chèvrerie, c'est M et le Whoop, c'était le MI6.
06:10 En Gladys, c'est qui ?
06:11 Non, enfin, ah oui.
06:13 Enfin, non, Gladys, c'était en fait les prémices de l'intelligence artificielle
06:17 autour de laquelle déjà on travaillait à l'époque.
06:21 Il nous fallait un super ordinateur
06:22 qui puisse converser avec Jerry, les filles,
06:25 et qui puisse être aussi à la fois drôle.
06:27 On a créé Tchad GPT.
06:29 Mais un temps avant.
06:30 On a toujours aussi eu un second niveau de lecture sur Totally Spies,
06:34 sur des problématiques un petit peu plus globales parfois,
06:37 liées à l'esthétique, à la mode, à la consommation et j'en passe.
06:42 Moi, je me souviens d'un article de Télérama
06:46 qui nous avait épinglé sur une remarque que je trouvais une des plus drôles,
06:51 mais elle était du second degré.
06:53 Jerry qui disait aux filles,
06:54 "Bravo les filles, vous avez sauvé la société de consommation."
06:57 Ah oui !
06:58 Et donc, je trouve que ça résume bien.
07:02 Se faire tacler par Télérama sur ça,
07:04 moi c'était plutôt assez drôle.
07:05 Mais on avait eu deux T.
07:07 Oui, on avait eu deux T.
07:08 Alors les méchants de Totally Spies
07:10 étaient des méchants complètement stupides,
07:12 excentriques, exubérants, ridicules.
07:15 Des méchants humains.
07:16 Et c'était aussi souvent des méchants freudiens.
07:18 C'est-à-dire que c'était souvent des méchants
07:19 qui avaient des problèmes avec leur mère,
07:21 avec leur père, avec leur chat.
07:23 L'animation marche par rediffusion.
07:25 Les enfants, il faut qu'ils s'approprient le personnage, l'histoire.
07:30 Je dirais que ça a pris deux, trois ans à marcher progressivement
07:33 dans chaque territoire.
07:34 Ça s'est installé.
07:35 Aux États-Unis, on a fait toutes les chaînes.
07:37 On est un cas complètement unique.
07:39 Warner, Disney, Cartoon Network.
07:41 Nickelodeon, on n'a pas fait.
07:43 On n'a pas fait Nickelodeon.
07:44 Après, il y a un autre phénomène qui a lieu,
07:46 mais alors très longtemps après.
07:47 Déjà, quand les enfants deviennent adultes,
07:49 ça devient un peu mythique.
07:50 On garde les pieds sur terre.
07:53 Et moi, je trouve que ça fait extrêmement plaisir.
07:55 La majeure partie de la vie Totally Spies
07:57 est regardée par des enfants, concernant moi aujourd'hui.
07:59 Et les enfants de 6 ans, ça ne va pas forcément sur Twitter.
08:03 Ça envoie parfois des dessins, des lettres.
08:05 Mais les réactions, en fait, on les a aujourd'hui
08:08 de gens qui aujourd'hui ont 20, 25, 30 ans.
08:11 Ça a été 19 ans à l'antenne sur TF1.
08:15 Et moi, j'avais calculé que c'était 300 fois par an.
08:20 Je pense que nous, et surtout Stéphane, ce qu'on a amené,
08:23 c'est, on a dit, voilà, on peut amener aux enfants
08:27 des programmes qui sont divertissants
08:28 et qui sont cools et dans l'air du temps.
08:30 Et ça, je pense que c'était vraiment novateur.
08:32 Mais aujourd'hui, quand on est indépendant,
08:34 c'est quasiment impossible de développer,
08:37 de présenter du contenu vraiment disruptif.
08:39 Moi, je sens, comment dire ça, une censure
08:42 mille fois plus forte qu'à l'époque de Totally Spies.
08:45 Toi aussi, hein.
08:46 Et c'est ça qui a énormément changé,
08:48 parce qu'on pourrait se dire, il y a les plateformes,
08:49 il y a beaucoup plus de canaux de diffusion,
08:52 il y a YouTube.
08:53 Et la réalité est que les enjeux, justement,
08:57 des plateformes sont tellement importants
08:59 que tout le monde est devenu extrêmement conservateur.
09:02 Dominique !
09:04 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
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