Son & images © Abdelmajid Arrif
Rue Moha ou Saïd/Bab Marrakech, Casablanca, 28/08/2016
« La parole est événement (…). Vouloir dire, injurier, échanger, informer, lire à haute voix pour autrui (…) tissent et ourdissent les liens entre ceux qui ne se joignent que par le verbe. (…) La parole est acte de présence, posture face au monde ; elle est ce bruit vivant de pensées en train de se chercher puis de se reconnaître, cherchant à être saisies puis portées par les contenus de leurs énoncés. Action, manière d’être, la parole des gens du peuple les engage complètement. Puisque l’écrit ne se maîtrise que mal, les corps font de leurs paroles un devenir, une puissance sur le futur, un énoncé de leur présent. » (Arlette Farge, Effusions et tourments, le récit des corps. Histoire du peuple au XVIIIe siècle, 2007, p. 67-68).
Un paysage sonore n’existe pas en soi, c’est plutôt à mon sens une construction d’une réalité sonore qui ne peut être indépendante de notre conscience, perception et sensibilité à ses sonorités. Il forme ainsi une empreinte, un timbre que chacun charge de sens, d’émotion, et d’information. Le paysage sonore agrège et ne distingue pas, c’est l’analyse qui tamise ses grains en unités distinctes. C’est en quelque sorte cette réalité augmentée qui en fait l’identité, mais il s’agit ici d’une identité instable, car la vie ordinaire, même dans sa routine, laisse place à l’inédit, à l’effraction d’un réel non prévu. D’où la difficulté de la patrimonialisation du paysage sonore rétif à toute captation muséale. Le son a cette force de nous inscrire immédiatement dans le passé et son archive, dans ce qui est advenu et qui ne peut se répéter. Une sorte de tension cognitive et sensible qui est au cœur de notre rapport au temps qui passe et à notre angoisse de l’encapsuler, de l’encoder dans une grammaire et une fiction patrimoniale.
Cet enregistrement est la captation à l’échelle de la marche de l’ambiance sonore de la Rue Moha ou Saïd prolongée par Bab Marrakech à Casablanca (Maroc). Il se prête à plusieurs expériences casque vissés aux oreilles. Hier je l’ai écouté dans un parc d’une ville française et j’en ai éprouvé la richesse en ce point de son exil et de dissonance. J’ai alors mesuré tout l’éclat de vie et la densité sociale qu’il distillait sur mon chemin en grains de voix.
Abdelmajid Arrif
Rue Moha ou Saïd/Bab Marrakech, Casablanca, 28/08/2016
« La parole est événement (…). Vouloir dire, injurier, échanger, informer, lire à haute voix pour autrui (…) tissent et ourdissent les liens entre ceux qui ne se joignent que par le verbe. (…) La parole est acte de présence, posture face au monde ; elle est ce bruit vivant de pensées en train de se chercher puis de se reconnaître, cherchant à être saisies puis portées par les contenus de leurs énoncés. Action, manière d’être, la parole des gens du peuple les engage complètement. Puisque l’écrit ne se maîtrise que mal, les corps font de leurs paroles un devenir, une puissance sur le futur, un énoncé de leur présent. » (Arlette Farge, Effusions et tourments, le récit des corps. Histoire du peuple au XVIIIe siècle, 2007, p. 67-68).
Un paysage sonore n’existe pas en soi, c’est plutôt à mon sens une construction d’une réalité sonore qui ne peut être indépendante de notre conscience, perception et sensibilité à ses sonorités. Il forme ainsi une empreinte, un timbre que chacun charge de sens, d’émotion, et d’information. Le paysage sonore agrège et ne distingue pas, c’est l’analyse qui tamise ses grains en unités distinctes. C’est en quelque sorte cette réalité augmentée qui en fait l’identité, mais il s’agit ici d’une identité instable, car la vie ordinaire, même dans sa routine, laisse place à l’inédit, à l’effraction d’un réel non prévu. D’où la difficulté de la patrimonialisation du paysage sonore rétif à toute captation muséale. Le son a cette force de nous inscrire immédiatement dans le passé et son archive, dans ce qui est advenu et qui ne peut se répéter. Une sorte de tension cognitive et sensible qui est au cœur de notre rapport au temps qui passe et à notre angoisse de l’encapsuler, de l’encoder dans une grammaire et une fiction patrimoniale.
Cet enregistrement est la captation à l’échelle de la marche de l’ambiance sonore de la Rue Moha ou Saïd prolongée par Bab Marrakech à Casablanca (Maroc). Il se prête à plusieurs expériences casque vissés aux oreilles. Hier je l’ai écouté dans un parc d’une ville française et j’en ai éprouvé la richesse en ce point de son exil et de dissonance. J’ai alors mesuré tout l’éclat de vie et la densité sociale qu’il distillait sur mon chemin en grains de voix.
Abdelmajid Arrif
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